Christophe ne vint jamais. J’en profitai pour faire une micro sieste entre 11h15 et 11h45. Je m’étais couchée au petit matin vers 4 heures en rentrant de la boîte de nuit où la bande d’étudiants m’avait traînée, moi qui déteste les boîtes… Je m’étais éclaté les tympans, assourdi le cerveau, tout en descendant quelques vodkas. Je suppose qu’il fallait bien ça pour avoir l’illusion d’oublier mes extravagances de lundi soir.
Thibaut, lui, arriva à l’heure. C’était ce qu’autrefois on aurait appelé un jeune cadre dynamique. Fraichement entré dans la quarantaine, ce responsable financier portait tous les accessits de l’homme s’imaginant jeune et faisant le maximum dans les salles de sport pour que son corps le confirme encore quelques années. Il arborait les signes extérieurs de branchitude qui permettent aux meutes de ne surtout pas se tromper de fréquentation entre classes sociales incompatibles. Une fois cette sociologie de salon de massage mise de côté, il était beau gosse et sympa. Très à l’aise et spontané, il me fit la bise, me reluqua, et me donna quatre-vingts euros pour quarante-cinq minutes en lingerie.
Le massage se passa très bien. Cet abonné aux « gymnases club » arborait fièrement quelques abdominaux parfaitement dessinés. Il était fier de son corps, et n’était objectivement pas désagréable à regarder. Mais ça ne me fit pas plus d’effet que ça. Le reste de sa musculature n’était pas en reste, et mes mains purent constater que parmi les pectoraux, biceps, triceps, mollets, et bien d’autres encore, aucun n’avait été oublié.
Thibaut parla beaucoup. Il avait de la conversation, une certaine éducation, et respirait l’aisance et la réussite. L’alliance à son annulaire gauche avait sonné la fin des hostilités parmi de nombreuses prétendantes. Il me paraissait toutefois plausible que ce type devait avoir l’embarras du choix pour se trouver des maîtresses. Il était même la caricature du mari infidèle. Je me demandai si une Porsche Cayenne n’était pas par hasard garée devant la maison… Souhaitant éviter de me laisser à mon tour berner par les clichés, je rentrai volontiers dans la conversation, qui tourna autour du sport (le pays de Galles allait-t-il remporter le tournoi des six nations ?), du cinéma (Jean Dujardin allait-t-il remporter l’Oscar du meilleur acteur pour « The Artist » ?), de la politique (François Hollande allait-t-il remporter la présidentielle ?) ou de la météo (l’anticyclone des Açores allait-il remporter ses combats à venir sur d’improbables dépressions ?)… Visiblement toute la vie de cet assoiffé de compétition se résumait à savoir qui allait battre qui, et qui allait gagner quoi.
Quand mes gestes commencèrent à lui échauffer les sangs, lesquels circulèrent intensément en des endroits attendus, il sut réclamer son autorisation avant que ses mains ne parcourent mon corps, s’attardant autour du string noir, et sur la partie bombée de ma poitrine que le push up assorti relevait éhontément vers les cieux. Monsieur le cadre financier était très bien bâti, jusque dans les dimensions de son anatomie la plus secrète. La verge dressée était longue et, bizarrement, pointue. Au lieu de ressembler à un champignon, le gland était plus proche du triangle, donnant l’impression de former une flèche indiquant la direction, comme un GPS coquin le conduisant à l’entrée d’innombrables vagins adultères. Dans mon salon, c’est ma main lubrifiée qui vint à lui. Il dura longtemps. Et résista. Je le sentis à sa façon de maîtriser sa respiration, de contracter ses abdominaux comme pour les dresser en muraille. Cela m’amusait, et sa persévérance m’impressionna. Il sut retarder l’éjaculation et faire durer le plaisir, malgré les sollicitations intenses que je lui infligeais. Mais la sève montait inéluctablement. Après quelques instants de paradis gracieusement accordés pour le récompenser des efforts entrepris, je concentrai mon harcèlement sur le gland, tournant dessus, exerçant de voluptueuses pressions, tout en sollicitant de mon autre main la longue branche de chêne. Ses efforts n’y purent plus rien, et le maître s’avoua vaincu en implorant.
-Mmmh non, encore un peu, pas tout de suite, Lola…
On avait déjà dépassé les quarante-cinq minutes et il avait eu droit à la plus longue de toutes les finitions réalisées jusque-là. Contente de moi, je parachevai ma victoire en poursuivant les mouvements vainqueurs et, pour toute réponse, lui chantonnai en empruntant à Yves Montand :
-Il est l’or Monseignor…
Je riais intérieurement de ma répartie très à-propos quand deux longs jets blancs de semence accumulée délivrèrent enfin ce quadra et le ramenèrent sur le chemin de la raison et vers l’acceptation de ses propres limites. Le pénis ne redescendit que très lentement, pendant les quelques instants que Thibaut passa sur la table à se remettre de tout ça.
-C’est impossible de vous résister.
-Vous avez pas mal essayé, quand même.
-Ah oui ça se voyait ?
-Bah oui évidemment.
-J’aurais aimé tenir plus longtemps.
-Vous êtes trop gourmand. Le plaisir c’est aussi de lâcher prise, vous ne trouvez pas ?
-Certainement, mais dans la situation où j’étais, chaque seconde supplémentaire n’est que du bonheur !
Thibaut fila à la douche. Il remit sa chemise cintrée, son pantalon noir, sa cravate, sa luxueuse ceinture, sa Rollex, sa veste, puis me fit la bise en me serrant contre lui, promettant qu’il reviendrait pour « améliorer son score ».
Ce type était incorrigible. Je le suivis des yeux pour tester mes clichés. Il ne monta pas dans une Porsche mais dans une autre allemande de luxe. Je n’étais quand même pas tombée loin.
Je suis un homme plein d'ambition
Belle voiture et belle maison
Dans la chambre, dans le salon
Moi je tourne en rond, je tourne en rond
Martin faillit croiser Thibaut, mais nous évitâmes le malaise de justesse. C’était un autre quadragénaire, moins bling-bling, mais tout aussi avenant et facile d’accès. Nous fîmes les présentations, il me donna lui-aussi quatre-vingts euros afin que je tombe le haut pendant trente minutes, et alla prendre une douche. Dès qu’il fut installé sur le ventre, le massage d’une demi-heure et la discussion commencèrent.
Il ne travaillait pas très loin du salon où Mélanie et moi exercions, dans une zone d’activité où les bureaux se succédaient.
-Alors c’est l’heure de la pause ?
-Voilà, et j’avais très envie d’une pause coquine.
-Mais vous avez tout à fait raison. Vous êtes un habitué ?
-Je suis venu voir Alessia quelques fois, oui. La dernière fois ça devait être en janvier. Et puis pour être honnête, j’alterne un peu les adresses.
-Ah oui, nous avons de la concurrence dans le coin ?
-Non pas vraiment pour ce qui est des massages, mais j’aime bien aussi de temps en temps voir une escort entre midi et deux.
-Pour tout autre chose, alors. Et donc selon l’humeur vous choisissez le massage coquin ici ou le gros câlin ?
-Exactement.
-Ça ne coûte pas le même prix.
-Ça dépend des filles, certaines demandent cent euros pour une demi-heure. Mais en général c’est beaucoup plus.
-Mais, excusez la naïveté de ma question… une demi-heure je trouve ça déjà court pour un massage, alors pour faire l’amour, ça doit être expéditif, le temps de faire connaissance, déjà…
-Vous savez on fait connaissance pendant les préliminaires, quand on ne prend qu’une demi-heure.
-Oh oui je vois.
-Certaines escorts, pour rompre la glace, proposent d’ailleurs un massage pour commencer.
-Un massage qui dérape très vite, j’imagine.
-Pour les séances d’une demi-heure à cent euros c’est assez codifié oui, il y a le massage, puis la fille fait une fellation, puis elle met le préservatif et le reste suit.
-Vous en parlez comme si vous trouviez ça dommage.
-C’est aussi pour ça que je préfère parfois un simple massage érotique, l’échange est de meilleure qualité, c’est moins mécanique. Quand je vais voir une escort, je paye une fille qui assure une prestation de qualité et je reste une heure.
-C’est très réfléchi tout ça.
-J’avoue que j’y ai souvent recours.
-Mais dites donc ça vous fait de l’effet de parler de ça, on dirait !
-Euh oui.
-Eh bien on va se retourner, alors…
Martin était en forte érection. Le massage de trente minutes étant court, j’en étais à la partie où je devais l'émoustiller, et m’étais aperçue que la verge était déjà bien gonflée, entre les cuisses, à plat sur la table de massage. Une fois sur le dos, son mât se retrouva dignement dressé et prêt à l’emploi.
-Lola je dois vous dire, j’adorerais faire l’amour avec vous.
-Voyez-vous ça…
-C’est pas une proposition, je sais que vous ne faites que des massages. Mais être entre vos mains comme ça, vous regarder… ça ne peut que donner ce genre d’envie.
-Je vois, dis-je en effectuant un premier va et vient rapide sur son sexe, pour faire connaissance.
-Je rêve de vous faire l’amour à vous et Alessia en même temps.
-Quel ambitieux vous faites.
-Je peux vous demander de relever le haut de la table, je préfère être assis pour la finition.
-Si vous voulez, oui.
J’abandonnai quelques instants le pénis de dimensions plus classiques que celui de Thibaut, et redressai la table. Martin souhaita que l’inclinaison fût vraiment importante et je dépassai les quarante-cinq degrés. Il se retrouva quasiment assis, comme on peut l’être sur une chaise longue l’été quand on bouquine au soleil.
-Je peux vous prendre contre moi ?
-Vous restez sage, hein ?
-Bien sûr.
Très tactile, Martin m’enlaça d’un bras alors que je reprenais le cours de la finition. Sa main droite explora méticuleusement tout le haut de mon corps, ne laissant aucun mystère quant à la texture de ma peau, de mes seins, détaillant le grain des tétons, des aréoles, et des mamelons, puis explora mon ventre, tournant autour du piercing sans le toucher, et descendit très bas à la frontière du string noir. Je crus que j’allais devoir l’arrêter, mais non, il savait exactement où était à la limite et ne la dépassa pas. Il tourna et passa de l’autre côté, caressant mes fesses avec un certain tact tandis qu’au bout du bras qui m’enlaçait, l’autre main resta sagement sur ma hanche.
Contrairement à Thibaut, il ne chercha pas à se retenir. Sa philosophie semblait davantage centrée sur l’instant présent dont il cherchait à tirer profit intensément, plutôt que de l’étirer au maximum sans le vivre vraiment. Quand mes doigts se firent pyromanes, son regard croisa le mien. Je sentis qu’il cherchait ce contact visuel. Je laissai alors mes yeux bleus dans les siens, qui tiraient sur le vert par petits pigments. Je n’avais pas besoin de regarder ce que faisaient mes mains, elles étaient maintenant habituées à ces chorégraphies pour adultes, et firent inlassablement monter la pression dans le bas-ventre de Martin, qui me sourit en me rendant mon regard. A chaque nouvelle pression sur le gland dégoulinant d’huile, je voyais son visage se crisper et ses yeux se voiler. C’était la première fois que je suivais à ce point les effets de la finition, non sur l’organe volcanique, mais sur le visage tourmenté de son propriétaire. Il y avait quelque chose d’émouvant à observer le feu que je provoquais. Sa main mobile continuait de parcourir mon corps. Je la sentis passer entre mes fesses, suivant la minuscule bande de tissus qui s’insinuait entre les flots romantiques, comme le pont menant à l’île de Ré. Ses yeux devinrent brumeux, mais continuèrent de me fixer. Ma main qui tenait la verge au niveau du bas de la hampe, massant doucement les testicules, sentit le gonflement irrévocable se produire. Je tirai mes doigts masturbateurs vers le bas, dégageant le gland au maximum pour l’apothéose
-Mmm Lola, qu’est-ce que j’aimerais être en vous.
Je ne joignis pas la parole aux regards qui suffisaient, et lui fis un simple petit clin d’œil qui valait toutes les réponses. Pour la première fois, je ne vis pas l’éjaculation. Ma main se couvrit d’une substance visqueuse que je sentis couler sur mon poignet. Enfin ses yeux se fermèrent et Martin profita de son orgasme.
Juste avant de sortir, il me fit la bise et ne put s’en empêcher :
-Vous savez, si jamais un jour vous êtes d’accord pour proposer davantage que des massages, je serai votre premier client, quel que soit votre prix.
-C’est noté, Martin, mais on va se contenter de massages, d’accord ?
-Je suis même prêt à trouver une très belle chambre d’hôtel et à apporter du champagne !
-Martin…
-Oui d’accord, il fallait juste que je vous le dise.
-C’est fait.
-Vous ne m’en voulez pas d’avoir essayé ?
-Non.
-Vous me reprendrez en massage quand même ?
-Oui.
-Alors ça va, à bientôt Lola.
-Bye Martin.
Je fais l'amour et la révolution
Je fais le tour de la question
J'avance, avance à reculons
Moi je tourne en rond, je tourne en rond
J’avais une demi-heure devant moi avant que Nicolas n’arrive pour mon premier body seule. J’étais contente de le revoir. Je me rendais compte aussi que le fait de recevoir une tête connue permettait une attente plus décontractée. Je me fis la réflexion que l’idéal serait d’avoir un petit répertoire d’habitués venant régulièrement. J’allumai le portable et eus le temps de rajouter deux rendez-vous. Le premier serait pour le lundi suivant, après Vincent et avant que Mélanie ne prenne le relai à 15 heures. Cyrille, la quarantaine, avait souhaité venir à 14 heures pour une demi-heure. Je lui accordai 14h15 en étant consciente que mon timing serait assez serré ce jour-là. Simon, mon lapin excusé du 23 février dernier, fixa un rendez-vous « sans faute » jeudi prochain à 13 heures sonnantes. Enfin un certain Rudy me proposa un massage ce soir vers 17 heures. Mais je voulais être disponible le plus tôt possible pour Éric. Je déclinai, et invitai Rudy à me rappeler pour jeudi prochain, dès qu’il aurait son planning.
Enfin, Nico arriva. Je reconnus tout de suite ce grand garçon un peu gauche, tendre, au sexe légèrement courbé, qui avait provoqué quelques réactions en moi lors de ma journée d’initiation en compagnie de Mélanie. Il m'embrassa sur la joue, et insista sur le plaisir qu’il avait à me revoir. Il fit son aller et retour à la salle de bains, sans tout casser cette fois-ci, et se mit en position sur le ventre. J’envoyai valser le peignoir satiné et me retrouvai dans le plus simple appareil pour la deuxième fois seulement, la première en présence d’un client masculin. Je fus surprise de constater à quel point mes mains retrouvèrent des repères. Je reconnaissais ce corps ! Les épaules larges, la petite bouée naissante autour du ventre, les mollets saillants, les fesses rebondies… c’était un peu comme si Nico n’était descendu de ma table que la veille.
-C’est la première fois que vous revenez depuis le body avec Alessia ?
-Oui j’avais très envie d’un massage seul avec vous.
-Vous êtes l’œil d’Alessia, vous pourrez lui chiffrer mes progrès la prochaine fois que vous la verrez.
-Physique vingt sur vingt.
-Il est flatteur !!
-Non mais plus sérieusement, vous m’avez laissé un souvenir incroyable l’autre fois.
-Vous m’en voyez ravie.
-Je peux vous faire une confidence ?
-En dehors du divan d’un psychanalyste, je ne vois pas de meilleur endroit.
-Vous seriez sexy en psychanalyste…
-Dans votre esprit, je crois que je serais sexy en tourneuse-fraiseuse, non ?
-Vous n’avez pas tort.
-Alors cette confidence ?
-Le lendemain soir, après cette séance, j’ai fait l’amour avec ma femme… et je peux vous dire que ça faisait des années que ça n’avait pas été intense comme ça.
-En gros je suis une bénédiction pour votre couple.
-Je n’irai pas jusqu’à cette hypocrisie. Mais le fait est que vous m’avez aidé à nous faire passer à elle et moi une nuit comme nous n’en avions pas connue depuis quelques temps. Je ne vous fais pas un dessin, mais bon, les enfants, la routine…
-Mais le changement était où exactement ? Dans votre désir ?
-J’ai toujours du désir pour Céline. Mais j’avais l’impression d’avoir vingt ans, et j’étais aussi excité que les premières fois où je découvrais son corps.
-Ok. Alessia et moi, on vous a boosté la libido.
-Exactement ! Mais il y a plus. Comment vous dire…
-Je vous écoute.
-C’est un peu gênant.
-Vous avez tenu plus longtemps que d’habitude.
-Comment l’avez-vous deviné ?
-Ça me parait assez logique, à vrai dire.
-Vous savez, la finition est une concentration de gestes qui créent des sensations bien plus précise et fortes qu’une pénétration. Alors quand on a subi celle que vous me l’avez faite, tout à coup, se retenir plus longtemps en faisant l’amour, ça parait simple.
-Voilà une analyse très scientifique monsieur l’ingénieur.
-Vous vous moquez de moi.
-Mais vous avez quelques soucis sur ce terrain-là, d’ordinaire ?
-Oui, parfois je jouis un peu plus vite que je ne l’aimerais. Je suis un peu émotif, vous savez…
-Oui, je sais.
-Ah bon ça se voit ?
-Comme le nez au milieu de la figure, oui.
-En tout cas, j’ai fait l’amour à ma femme deux fois dans la nuit et chaque fois ça a été ... explosif pour moi et pour elle !
-Vous transmettrez mes félicitations à Céline, alors.
-Je m’abstiendrai peut-être…
Pendant que ce premier quart d’heure touchait à sa fin, je me remémorai le contenu du message téléphonique d’Agnès. Il exprimait en substance la même idée. « Ma libido et le plaisir ressenti n’avaient plus rien à voir », avait-elle dit. Nicolas confirmait donc qu’à bien des égards, les petites papouilles que nous dispensions ici n’étaient pas sans conséquences positives. Je m’en sentis à la fois amusée et satisfaite.
Mais il était temps de passer aux acrobaties. Là aussi, je retrouvai sans peine le mouvement qui m’avait permis de grimper sur la table, et le réexécutai pour me retrouver au-dessus du dos luisant de Nicolas. Mes mains calées en appui sur les siennes, je mis mes seins en action et ils rendirent visite à toute la surface de peau disponible, chatouillant, pétrissant, alternant les pressions et variant les vitesses de glissade. Nicolas resta inerte, profitant de son indolence. Je fus rapidement consciente d’une différence importante par rapport au premier body. J’étais nue. Entièrement. Et dans ce corps à corps, au lieu qu’un petit shorty de dentelle bleu marine ne vînt frotter le corps alangui, c’est ma toison pubienne qui s’en chargea.
Prenant des libertés avec le protocole, je me mis debout sur la table et prévins Nicolas.
-N’ayez pas peur.
M’accrochant des mains aux poutres apparentes du plafond, le cherchai un équilibre et posai un pied sur sa nuque. Je le fis glisser le long de sa colonne vertébrale puis pénétrer entre ses deux fesses, pour terminer tout en douceur sur le pénis, douillettement lové entre les jambes écartées, sans appuyer ni presser. J’avais juste envie d’expérimenter un contact différent. Cela sembla plaire à mon cobaye car du haut de mon point de vue, je vis le sexe gonfler, s’allonger, et la fameuse courbure se dessina. Mon autre pied suivit le sillon du premier. Une fois l’effet de surprise produit, je voulus en créer un deuxième. Je me tournai, toujours debout, pour regarder en direction de ses jambes, et m’accroupis. La pose souhaitée était délicate à prendre. Mes mains se posèrent derrière mois, de part et d’autre de son cou. Tel un crabe, j’étirai mes bras et mes jambes, le corps tendu vers le haut, et descendis mes fesses contre les siennes pour masser toute la région du bas de son dos avec mon cul que je contractai pour le rendre très ferme, le corps à corps prenant tout à coup des allures callipyges assez savoureuses. Seul le bruissement de l’huile entre sa peau nue et mes fesses lubrifiées rompait le silence. J’avais l’impression d’être aux Jeux Olympiques, dans une épreuve de gymnastique classée X. Le fait est que les positions étaient extrêmement exigeantes pour mon corps, dont je sentais les muscles fortement sollicités. Je terminai en m’allongeant complètement, mon dos Marschmallow épousant la forme du sien, mes fesses calées juste sous les siennes, appuyant sur les cuisses entrouvertes. Je sentis la verge en érection, palpitant contre mon postérieur, et l’idée me vint que nous étions proches d’une pratique qui valut sa destruction divine à la ville de Sodome.
Ravie de cette incartade totalement improvisée, je redescendis promptement au sol et restai pieds nus. Penchée par-dessus la tête enfouie dans son trou, j’invitai d’une voix de Sylphide mon autruche à se retourner.
Nicolas était dans tous ses états. Sa verge gracieusement courbée dans ma direction était dure comme une barre de pole dance. Quelques secrétions avaient commencé à ruisseler et le prépuce en était rempli, tel le bénitier sur pied contenant l’eau sacrée.
Je pris une intonation volontairement narquoise, en démarrant le massage du ventre.
-Nicolas, dans quel état je vous ai mis, vous avez vu ça ?
-Lola, comment fais-tu ?
-On se tutoie ?
-Oh pardon, je ne l’ai pas fait exprès.
-Je te taquine, ça ne me dérange pas. Donc comment je fais quoi ?
-Mais ça… ce que tu viens de faire. Tu es acrobate ?
-J’ai un peu plus le sens de l’équilibre que toi, en effet. Je ne t’ai pas fait peur, ça va ?
-C’était une sensation très loin de la peur.
-Je vois ça, dis-je en décalottant le gland d’un petit coup vif mais tendre, pour laisser le liquide pré-séminal s’écouler.
Le troisième quart d’heure fut une délicieuse attente, le moindre geste sage n’étant que le messager de celui plus osé qui suivrait, comme l’odeur de l’herbe mouillée annonce en été le rafraîchissement salutaire avant que l’orage ne se déchaîne.
Et il se déchaîna.
A dix minutes de la fin, je grimpai une deuxième fois sur la table. Nicolas m’enlaça alors que je démarrai le lascif ballet mammaire sur son corps dont chaque membre était en état d’éveil.
-Je peux ? demanda-t-il par politesse alors qu’il connaissait la réponse.
-Fais-toi plaisir.
Il se fit plaisir. Ses mains partirent à la rencontre de tout mon dos, de mes fesses, qu’il écarta délicatement, pour glisser entre elles, puis caressèrent le haut de mes cuisses. Elles remontèrent chercher mes seins, et, impatientes, se glissèrent entre eux et son propre corps. La turgescence entre ses cuisses glissa contre les miennes, tandis que je massai son torse avec ma poitrine. Puis je me déplaçai pour m’approcher du poteau des suppliciés, et fis passer très doucement chacun de mes tétons sur le gland, donnant un premier aperçu des caresses ravageuses que mes mains allaient bientôt accomplir. Le pénis se lova entre mes seins. Je n’eus pas la vanité de tenter la cravate de notaire : je ne possédais pas les arguments anatomiques de Mélanie. Mais je fis quand même glisser le gland décalotté contre mes mamelons, créant une caresse. Puis, accroupie au-dessus de la zone de tous les dangers, je coinçai le phallus dans le creux de mon genou, repliai ma jambe, et étirai doucement vers l’arrière le membre prisonnier. Nicolas soupira et l’air expulsé se termina en gémissement. Je ramenai mon jouet dans sa virile verticalité, et inventai la génuflexion masturbatoire en faisant avec ma jambe quelques mouvements de bas en haut. Nicolas, dont les mains étaient libres depuis que j’étais descendue plus au sud, s’accrocha aux bords de la table de massage en grimaçant. Je changeai de jambe et recommençai le petit numéro contorsionniste en regardant le visage de Nicolas s’empourprer et grimacer. Mais je n’en avais pas encore fini. Je me retournai et me remis dans l’équilibre précaire de tout à l’heure, le crabe retrouvant ses appuis, et mes fesses massèrent le sexe repentant qui implorait à la fois pour que dure encore et encore la séance libertine, et pour que celle-ci s’achève dans le tourbillon qui se faisait attendre. Contre mon tendre postérieur, je sentis tous les détails de la morphologie de cette verge bandée dont la fine peau glissa, lovée et choyée dans cet écrin que tant d’hommes rêvent d’explorer. Puis le crabe fit un dernier demi-tour et oublia toute pudeur. Je calai une dernière fois le membre agonisant entre mes fesses, mais faisant face à Nicolas, jambes écartées et contractées, mon anatomie de femme accessible à son regard. Nicolas caressa mes pieds, seule partie de mon corps à portée de ses mains. J’accélérai mes mouvements, coinçant le pénis contre ses cuisses, le malaxant dans un jouissif écrasement de chairs scellées par le plaisir. Quand Nicolas fut au bord de chavirer, je m’intercalai entre le bord de la table et lui, y glissant mon corps longiligne. Surpris, Nicolas se retrouva tout contre moi, nos jambes mêlées, l’arrière de ma tête posée sur son épaule, alors que ma main entamait l’insoutenable va et vient. Je savais son besoin de tendresse et la lui offrais au moment ultime. Il enfouit sa tête dans mon cou, je le sentis embrasser ma nuque et mes lobes d’oreille. Il passa une main autour de moi, geste à la fois possessif et protecteur. L’autre caressa tout mon corps, enfin à sa portée. Il ne tiendrait plus longtemps, je le savais. Aussi lui fis-je cadeau de deux petites pauses, retardant l’éjaculation toute proche. Quand je décidai qu’il était temps que l’orgasme l’emporte, je fis le fameux mouvement du bec d’oiseau et mes doigts vinrent lustrer le gland épuisé. Nico se contracta, son bras autour de moi me serra plus fort contre lui pour que surtout je ne m’échappe, l’autre n’eut même plus la force de poursuivre ses caresses et stoppa sa charnelle exploration de mon corps sur mon sein droit, l’enveloppant de toute sa paume. Sa tête quitta mon cou et sa bouche se posa sur ma joue.
-Profite, Nicolas, profite.
Il me fit le plus long des baisers, ses lèvres écrasées contre ma joue, alors que la délivrance prit la forme d’un incroyable geyser qui sembla vider l’homme contre moi de toute sa substance en un seul jet immaculé qui stria son abdomen, comme une cicatrice blanche chevauchant mon bras coupable.
Je descendis de la table pour m’essuyer, puis passai quelques mouchoirs sur le ventre de Nicolas. Son pénis avait continué à envoyer quelques gouttes de sperme, mais l’éjaculation avait été réduite à ce seul jet impressionnant. L’homme vide semblait désorienté. Après avoir renoué le peignoir et caché une nudité dévoilée à l’extrême, je me penchai au-dessus du visage apaisé, et déposai un petit bisou sur le front moite.
-Ça va, Nico ?
-Je n’ai plus de mots.
-C’est que ça va alors, répondis-je en riant et en traversant la pièce en direction de la salle de bain, où je me rafraichis un instant et me lavai les mains.
A mon retour, Nicolas s’était assis, les jambes pendant de la table, le sexe entre les cuisses, le ventre gonflant sa bouée.
-Tu veux un verre d’eau ?
-S’il te plait, oui.
Il se désaltéra et parut revenir enfin sur notre planète. Je ne sais pas si mes massages avaient eu des effets à long terme, comme Agnès et lui avaient été les premiers à me le dire, mais visiblement ils en avaient sur l’état immédiat du pauvre Nico, qui, à cet instant, était plus proche du déambulateur que du trek en haute montagne. L’eau lui fit du bien et il tituba vers la douche. J’en profitai pour me rhabiller dans la tenue normale avec laquelle j’étais arrivée. J’avais enfilé ce matin un pantalon fuselé beige sept-huitièmes qui dégageait joliment les chevilles, un pull blanc à col roulé et manches courtes, ainsi que des ballerines blanches.
-Tu es très séduisante dans cette tenue.
-Ah tu trouves ? Et bien merci.
Je le laissai se rhabiller à son tour, rangeant le local puisque j’en avais terminé avec les massages du jour, riche d’un nouveau butin de trois-cent-dix euros. Puis je raccompagnai Nicolas sur le pas de la porte, contente de l’avoir encore émerveillé. J’éprouvai une certaine tendresse pour cet homme qui en débordait, et qui avait une gaucherie, une sincérité et une simplicité attachantes.
-Tu fais des abonnements ?
-C’est pas prévu.
-Tu es remboursée par la sécurité sociale ?
-Je devrais.
Un gros bisou sur ma joue vint clore cette journée de travail réussie.
Il était 15h20. Éric devait être dans son train et allait m’appeler pour terminer avec moi la journée qu’il me restait donc à réorienter vers la vie de Léa, la vraie. J’avais envie de voir mon amoureux, alors que Nicolas était encore dans mon champ de vision. J’avais envie de faire l’amour, alors que dix minutes plus tôt, le sperme d’un homme coulait sur mon avant-bras. J’avais envie de ses bras alors que je venais de quitter ceux de Nicolas, à la demande de tendresse duquel j’avais offert cette douce et sensuelle proximité. Pour la première fois, je fus consciente que juxtaposer d’aussi près les sensations érotiques de mes deux vies n’était ni simple, ni naturel, ni sans risque.
Je suis un homme au pied du mur
Comme une erreur de la nature
Sur la terre sans d'autres raisons
Moi je tourne ne rond, je tourne en rond
Je suis un homme et je mesure
Toute l'horreur de ma nature
Pour ma peine, ma punition
Moi je tourne en rond, je tourne en rond