Qu’est-ce que j’étais censé répondre ? Ça m’a tellement scotché ! Mon cœur est parti en vrille et mes neurones ont cramé direct. Anna Jackson, la fille la plus craquante que j’aie jamais rencontrée est amoureuse de moi, et bien sûr, comme un con, je ne suis même pas foutu de lui révéler mes sentiments. Alors, je lui montre avec mes lèvres, mon corps, à quel point je tiens à elle, parce que bordel, je ne connais aucun autre moyen. On ne m’a pas appris à exprimer ce genre de choses, je ne sais pas quoi faire des émotions qui m’envahissent quand je suis avec elle. Si je ne la vois pas, je suis en état de manque, et en sa présence, mon côté Néandertal entre en action. La jalousie est devenue ma nouvelle meilleure amie, dans ces moments-là, le connard qui est en moi ressurgit, tel un diable dans sa boîte monté sur ressort. Je suis excité en permanence, j’ai l’impression d’être à nouveau un ado boutonneux, tout en elle me rend fou. Il me faut des réponses, et seule Marlène pourrait m’en donner. Malheureusement, je ne sais pas si je peux me confier à elle, après tout elle sort avec Mike, qui est lui-même pote avec le père d’Anna. Je me demande si mes frangins pourraient m’aider ? Je n’en ai aucune idée, mais c’est ma meilleure option. Putain, je suis dans la merde !
Alors que je débarque dans le salon, mon frère met une grosse branlée à Elijah sur la console. Mario Kart* bien sûr ! Le jeu fétiche de Derek. Concentrés, ils ne me voient pas du tout arriver. Pour attirer leur attention, je leur file une bière fraîche.
— Merci, mon vieux. Je l’ai bien méritée cette bouteille. Et boom ! J’ai rétamé Luigi. Je… suis… le… meilleur.
Elijah vient de perdre une fois de plus. Derek, calé sur le canapé, lève les bras et les agite en faisant des bruits de basse.
— Oh ! Admirez la danse de la victoire, je suis le BOSS. Ouais, c’est moi le boss ce soir. Qui veut se prendre une raclée monumentale ? Je n’entends rien du tout !
— Ça va, j’ai mon compte ! Kyle aura peut-être plus de chance que moi.
Elijah me tend la manette. Pendant un bref instant, l’histoire d’Hugo Boss me revient, je devrais peut-être leur dire que ce n’est pas un gars…
— Pas de problème, mais avant, j’ai un truc à vous dire. Ça date un peu, mais Hugo Boss est une marque de vêtements, et pas le mec qu’on a croisé dans le parc.
Ils me fixent en mode : t’es con ou quoi ?!
— Parfois, je me demande si t’es pas un peu débile comme mec ! Évidemment que le type du parc n’est pas ce boss-là ! Je pourrais te parler de sa biographie, or je vois bien que ce n’était clairement pas le sujet que tu voulais aborder, alors accouche mec, me rétorque Derek avec le plus grand sérieux.
Interloqué, il me faut quelques secondes pour reprendre mes esprits. Je l’ai bien mérité celle-là !
— Ouais, ben tout le monde peut se tromper OK ? En fait, j’aimerais que vous me donniez votre avis…
Je leur parle de tout : de mes peurs, de ma façon d’agir avec Anna, de mon incapacité à m’ouvrir aux sentiments qui envahissent mon quotidien, de ma jalousie, et du fait qu’elle m’ait avoué être amoureuse.
— Soyez sincères, que dois-je faire ?
Elijah s’enfonce dans le canapé avant de me répondre.
— Je pense, arrête-moi si je me trompe, que tu t’es entiché d’elle. Dans ce cas, tu devrais te déclarer.
Je panique complètement.
— Oh ! Putain, ça craint. Je ne sais pas ce qu’être amoureux veut dire. Je suis jaloux, mais Anna est canon, alors, pas touche…
Derek prend le relais :
— Je crois que ce que notre ami essaie de t’expliquer, c’est qu’Anna est ce qu’il pouvait t’arriver de mieux. Bon, je résume.
Il se met à compter sur ses doigts.
— C’est une nana géniale, elle est naturelle, spontanée, super sympa, intelligente, sincère, belle et équilibrée. Elle a des parents formidables. Dois-je te rappeler que son père est le boxeur qui t’a toujours fait rêver ? Je vois bien que non. La question est, attention, roulement de tambour, dit-il en frappant ses cuisses en rythme, es-tu épris de cette fille ?
Comme le silence s’installe, il charge une nouvelle partie. Les bras croisés sur mon torse, je les regarde tour à tour. Hésitant, je me passe nerveusement une main dans les cheveux puis la tends devant moi.
— Bon, mais, comment je fais pour être sûr ?
Derek, excédé, balance sa manette à côté de lui.
— Tu n’écoutes rien… Après tout, elle n’est peut-être pas faite pour toi. Je dirais même que tu n’es pas digne d’une telle fille. Tu prends et jettes les meufs comme les chemises atterrissant sur ton lit, tu les essaies et au final aucunes ne te convient. Anna mérite un homme à la hauteur de ses attentes, ouvre lui ton cœur, ton âme. Elle est douce et sans artifices. Tu vas briser tous ses rêves, sans parler de la foi qu’elle a placée en toi. Tout ça, parce que MONSIEUR n’est pas capable de faire la seule chose qui lui permettrait de sortir de l’ombre pour trouver enfin la lumière. JE TE PARLE D’AVOUER TES SENTIMENTS.
Elijah regarde Derek avant d’intervenir :
— Il a raison. Demande-toi si tu peux vivre sans elle. Si la réponse est non, tu es amoureux.
Je regroupe toutes ces infos pour n’en faire qu’une.
— Elle est tout ce que j’ai toujours cherché, Anna est parfaite. Je suis… tombé amoureux d’elle !
Au moment où je prononce ces mots, toutes mes pensées, comme des morceaux de puzzle éparpillés, se rassemblent. Je suis parcouru de frissons, tout s’éclaire : JE L’AIME.
**
Deux jours plus tard, Derek me tend un bouquet de fleurs.
— Va voir Anna et fais en sorte qu’elle te pardonne ton manque d’éloquence.
Comme je reste sceptique, il soupire et m’explique d’un air découragé :
— les femmes aiment ce genre d’attentions, leur côté romantique s’épanouit à leur contact, alors arrête de réfléchir et va faire ton mea-culpa.
Comment fait-il pour savoir tout ça sur les meufs ? Par moments, il me fait vraiment peur, malgré tout je décide de lui faire confiance.
Assis dans le combi, je scrute la maison d’Anna. C’est bien la première fois que j’ai la trouille de frapper chez quelqu’un. Sa mère travaille sûrement à l’étage et ma petite amie ne s’attend pas à me trouver devant chez elle. Je croise mon regard dans le rétro.
— Tu peux le faire. Un peu de courage, mon vieux. Tu aimes cette fille alors vas-y.
Je souffle un bon coup et, dans la foulée, sors du véhicule.
Je m’apprête à frapper quand la porte s’ouvre à la volée. Lexi et Anna me dévisagent, aussi surprises l’une que l’autre. Ma gorge se serre, merde, je ne sais plus quoi faire, et comment expliquer le bouquet maintenant ?
— Kyle ? Ces fleurs sont magnifiques, sont-elles pour Anna ?
Lynn, que je n’avais pas remarquée, attend ma réponse. Par réflexe ou par manque de courage, je lui tends la composition.
— C’est pour vous, madame Jackson.
Merde, je n’assure pas du tout.
— C’est très gentil de ta part. Entre, je t’en prie, j’allais me faire une petite collation. Ma fille raccompagne son amie. Oh ! Mais tu connais Lexi Honnor, n’est-ce pas ?
— Oui, madame.
— Très bien maman. Tu mets Kyle très mal à l’aise là, donc on te rejoint pour le thé dans un petit moment.
— Aucun problème, pas de pression. C’est très mauvais pour la santé. Au revoir, Lexi. Donne le bonjour à tes parents !
— Je n’y manquerai pas. Lynn, Kyle, Anna ce n’est pas que je m’ennuie, mais j’ai des tas de choses à faire alors, à bientôt et merci encore pour le repas.
Anna accompagne Lexi jusqu’à sa voiture et revient rapidement. Lynn, de son côté, a préparé du thé et des biscuits. Nous passons presque une heure dans la cuisine à bavarder de tout et de rien. Cette attente me rend nerveux, irritable. J’ai bien envie de me retrouver en tête-à-tête avec Anna et le fait que je ne l’ai toujours pas serrée contre moi fait pulser mon sang dans mes veines beaucoup trop vite. Au bout d’un temps interminable, Lynn nous annonce qu’elle repart travailler. À peine sortie de la pièce, je prends Anna dans mes bras et l’embrasse comme un forcené.
— Kyle, serais-tu devenu fou ? Ma mère est juste en haut !
Je pose un baiser sur son front avant de plonger mes yeux dans les siens.
— Anna, j’ai…
Mon cœur bat à cent à l’heure. Moi qui n’ai jamais révélé mes sentiments à une femme, je m’apprête à sauter le pas.
— Je voulais te parler…
— Salut les jeunes ! J’espère ne pas trop vous déranger…
Oh, non ! Ce satané après-midi tourne au désastre ! Son père vient d’entrer. Et moi qui suis là comme un imbécile, collé serré avec sa fille. C’est quoi le problème aujourd’hui ?
Et voilà qu’on recommence à discuter. D’ordinaire, je n’en aurais rien à faire, mais pas maintenant, pas le jour où je trouve enfin le courage de me déclarer. Bordel, ça tombe vraiment très mal… Les heures passent sans que j’aie l’occasion d’avouer mes sentiments, c’est un vrai cauchemar !
Au moment du départ, les mots ne veulent plus sortir, je suis tellement énervé que ça n’aurait plus rien de romantique. Je sais bien qu’elle ne comprend pas ma réaction, alors je la rassure en réprimant ma frustration. Arrivé chez moi, je me change, fusille Derek du regard et file au complexe. À ce stade, le besoin d’évacuer mon stress est d’une urgence absolue.
**
Depuis qu’ils travaillent ensemble, Mike et Taylor ont investi dans des appareils de musculation et acheté du matériel neuf pour les boxeurs. La salle attire plus de monde. À regret, je ne retrouve plus l’ambiance de notre enfance. C’est mieux pour le chiffre d’affaires, mais j’ai vraiment du mal avec tous ces mecs du quartier nord. Tout ça pour se la péter parce qu’ils s’entraînent avec Taylor Jackson !
J’enchaîne les exercices sur les machines. Je ne veux plus jamais penser à cette journée de malheur. De toute manière, à quoi ça servirait de lui avouer mes sentiments ? Si elle n’est pas capable de s’en rendre compte toute seule, c’est qu’elle ne me mérite pas.
Je passe à une série d’abdos. D’abord, c’est n’importe quoi d’offrir des fleurs. Je ne suis pas aveugle, il y en a plein son jardin et en plus ça ne dure même pas ces saloperies. Derek peut garder ses conseils à la con. L’écouter était la pire idée de ma vie. Je change de place et commence à courir sur un tapis roulant. Qu’est-ce qu’il m’arrive ? Je ne me reconnais plus. Depuis quand est-ce que je mets des gants avec les meufs ? Pas la peine de se prendre la tête, il faut juste qu’elle sache qui est le mâle dans l’histoire. Un banc de musculation se libère, je m’y installe. On me tapote l’épaule.
— Ça suffit, rentre chez toi. Kyle… tu m’entends ?
J’enlève mes écouteurs.
— Salut, Mike, tu disais ?
Il soupire.
— Tu es là depuis des heures, et je ne vais pas tarder à fermer. J’ai retenu une table pour un dîner en tête-à-tête et je ne souhaite pas faire attendre Marlène.
— Aucun souci. Je passe sous la flotte et je me tire. Eh, Mike ?... Non, rien.
— Je te donne dix minutes. Après, je te mets dehors.
— Ça marche.
Tout en me savonnant, je pense à Anna. C’est plus fort que moi. Tout mon être veut cette nana. Quoi que je dise ou fasse, je l’ai dans la peau. Le battant des vestiaires s’ouvre.
— Kyle, je dois partir, je risque d’être en retard. Tu sors par la porte de secours. À demain, fiston.
— Salut, Mike. Bonne soirée.
Malgré la fatigue, je ne parviens pas à me détendre. Une main sur le carrelage, je baisse la tête, laissant l’eau me masser la nuque. Il faut que j’aille la voir… Mais pour lui dire quoi au juste ? Que j’ai galéré toute la journée pour lui avouer que je me suis entiché d’elle ? Ce n’est la faute de personne si je n’ai pas pu lui dire ce que je ressentais. Toujours aussi frustré, je sens que je ne suis pas loin de tout fracasser. Sans pouvoir me retenir, je frappe le mur du plat de la main, mon souffle s’accélère, je redonne un coup en poussant un cri de colère.
— Pourquoi je ne lui ai rien dit putain ?!
Je passe les doigts dans mes cheveux, la rage m’envahit, je serre le poing et l’envoi de toutes mes forces contre la paroi.
— Je l’aime bordel… Je t’aime Anna.
Je ferme les yeux, incroyable, je l’ai dit à haute voix !
— Tu es amoureux de moi ? Depuis quand ?
Merde ! Je suis vraiment vanné, j’arrive à entendre sa voix.
Soudain, deux bras encerclent ma taille.
— Moi aussi je t’aime, Kyle.
Seigneur. Elle est là, nue sous la douche avec moi.
— Anna…
Je murmure son prénom de peur qu’elle ne disparaisse et me tourne pour prendre son visage entre mes mains.
— Je suis tombé amoureux de toi…
Est la seule chose que je trouve à lui dire avant de capturer sa bouche et de l’emmener au septième ciel.
Ce chapitre est trop mignon ! Et en même temps, très drôle ! Non mais franchement, les réactions de Kyle me font rire, tu le ménages vraiment pas, le pauvre ! 😂
Merci Derek, y'en a au moins UN qui comprend la gente féminine !
Non franchement, je n'ai pas vu le temps passer 😉 Continue comme ça, cette histoire est vraiment top !!
Oh ! mille merci, pour ton gentil commentaire, ça me touche beaucoup. Je vais tout donner, j'espère que tu apprécieras 😂
Au plaisir