Chapitre 24

Notes de l’auteur : Hello !
Bon, je sais que ça fait un moment que je ne suis pas venu par ici et je m'en excuse. En ce moment c'est un peu le chaos dans ma vie mais je compte revenir. Tout doucement, mais sûrement. (les chapitres arriverons nettement moins vite qu'au début, faut vraiment que je me calme à ce niveau-là, à tout poster trop vite plus rien ne va). Je commence donc avec le chapitre 25.
En passant, le chapitre 24 a été modifier : ce qui était le chapitre 25 est maintenant la fin du chapitre 24 (une réorganisation que je trouvais indispensable à cause de sa petite taille). Donc avant de commencer ce chapitre, je vous conseille de revenir en arrière pour ne rien manquer.

Pour les autres, je vous souhaite une bonne lecture ! ^^

chapitre réécrit

La dernière fois que j’étais entrée dans le Temple de la Nuit, c’était aux Sélénites de l’an dernier. Père avait longuement insisté pour que nous l’y accompagnions, lui qui priait si souvent sa Déesse de Naissance. Je me souviens du calme qui régnait dans l’édifice, le même que dans celui du Temple des Rêves, apaisant.

Ce matin-là, pourtant, le silence qui nous entourait me mettait mal à l’aise. Il était rempli de larmes et de regrets, d’habits noirs et de chagrin. L’ambiance y était pesante, plus étouffante encore qu’au manoir lors des préparatifs.

Un enchevêtrement de bougies nous accueillit à notre arrivée au temple, s’alignant de part et d’autre à l’entrée de la nef dans le grand hall. Leur cire fondue formait comme un rideau ivoire coulant jusqu’au sol en damier.

Avec précaution, chacun de nous en alluma une nouvelle et la déposa où il pouvait. J’aidai Liam à allumer la sienne, très peu désireuse de le voir se brûler les doigts. Mon petit frère n’avait pas dit un mot depuis que je lui avais enfilé cet affreux costume noir. Cela me brisait le cœur de le voir ainsi accoutré. Tu n’aurais jamais dû connaître pareille épreuve si tôt… songeai-je en moi-même en l’aidant à placer sa bougie quelque part sur le promontoire.

Puis, sans lâcher la main de Liam, nous suivîmes le prêtre aspirant chargé de nous guider jusqu’à la chambre funéraire où le corps de Calista avait été mis en bière.

Tant de monde était venu pleurer ma sœur… Une grande partie de cette foule en noir, mouchoir en main, paraissait constituée de jeunes hommes. Il me semblait en reconnaître certains, d’anciens partenaires de ma sœur, des amants éconduits ou simplement des visiteurs venus admirer les Sélénites nocturniennes et étant tombés en amour pour Calista lors du concert. 

Je songeai avec un certain amusement que ma sœur était parvenue à leur briser le cœur à tous deux fois. Quelle autre jeune fille pouvait se targuer d’un tel exploit ? Puis la sombre réalité me rattrapa et je sentis le faible éclat de joie qui m’avait envahie s’évaporer.

La chambre funéraire n’était pas très grande mais permettait d’accueillir un certain nombre de personnes. Les murs couleurs de nuit étaient décorés de fines constellations. Le sol était d’un magnifique marbre gris perle et le plafond un entrelacs d’étoffes soyeuses comme un ciel nocturne d’où pendaient croissants de lune dorés et étoiles scintillantes. Enfin, trônant fièrement au fond de la pièce, se trouvait le cercueil de ma sœur. Ouvert.

Je retins mon souffle.

Alors que nous prenions place sur les chaises alignées devant le cercueil, père s’avança sur l’estrade, une rose blanche à la main. Je ne remarquai qu’à cet instant qu’il arborait le blason de la famille sur son gilet noir : une belle-de-nuit d’argent. J’aurais préféré le voir ressortir ce joyau pour une plus belle occasion que les funérailles de ma sœur.

J’ignorais où Marietta puisait la force de se tenir droite alors même que Meryl et les jumelles s’accrochaient à elle comme à une bouée. Seules quelques larmes silencieuses lui échappèrent, montrant tout le chagrin qu’elle gardait à l’intérieur.

Moi, je n’arrivais même plus à pleurer. Mes yeux étaient secs, ma gorge brûlante. Tante Vitali disait que c’était normal, que c’était le choc, que, bientôt, je pleurerai aussi fort que mes sœurs, quand je réaliserai… Mais, pour le moment, seuls les remords et la culpabilité m’habitaient.

Je l’avais vue mourir. Deux fois. Et je n’avais pu empêcher aucune de ces morts.

Je fermai les yeux, serrai les dents. Je me sentais tellement impuissante, tellement en colère.

Père observa un moment le visage paisible de Calista avant de se tourner solennellement vers nous.

— Merci d’être venus aujourd’hui…

Je détournai presque aussitôt le regard, rêvai de me boucher les oreilles. Je ne voulais pas l’entendre réciter cet affreux discours à nouveau. Je ne voulais pas entendre les trémolos dans sa voix, voir les larmes faire briller ses prunelles outremer. Ces mots qu’il récitait étaient quasi les mêmes que ceux d’il y a sept ans… assassins et tellement douloureux.

Je devais bien l’admettre, je détestais cordialement cette partie de la cérémonie, celle où tout le monde pleurait au plus fort alors que père persistait à parler inutilement, enfonçant toujours plus profondément le couteau dans la plaie. Une jeune fille resplendissante de vie, qu’il disait. Merveilleuse chanteuse à l’avenir prometteur… Tout le monde le savait, ça, et c’était ce qui rendait cette épreuve d’autant plus douloureuse à vivre pour moi.

J’aurais préféré me recueillir en silence, me rejouer tous ces beaux souvenirs avec Calista comme les moins beaux. Je voulais me souvenir de sa voix si douce à l’oreille, de son grand rêve de devenir chanteuse un jour à l’Opéra d’Aramore. Je voulais me souvenir de toutes ces colères qui nous avaient animées, ses bêtises qui nous faisaient enrager ou au contraire, celles auxquelles j’avais participé. Je voulais me souvenir de la joie qui faisait pétiller ses yeux quand elle parlait de musique, son enthousiasme constant qui la faisait danser et fredonner du matin au soir et jusque dans ses rêves. Je voulais me souvenir d’elle

Après avoir remercié tout le monde d’être venu, père assura que Calista aurait été heureuse de savoir que tant de monde était venu honorer sa mémoire. Et je serrai toujours plus fort les dents, me mordant les joues pour ne pas hurler de frustration.

Quel ramassis de bêtises ! Calista n’aurait jamais dit cela. Elle aimait vivre et s’amuser, elle se fichait éperdument de la plupart des personnes présentes aujourd’hui. Les seuls qui avaient vraiment compté pour elle, c’était nous. Je doutais même qu’un seul de ces jeunes hommes venus la pleurer la connaissait réellement comme nous la connaissions. Avaient-ils jamais vu ses mauvais côtés ? Calista pouvait être une peste, une diva et bien d’autre.

Ils ne voyaient que la surface bien lisse qu’elle présentait, cette comédie de jeune fille parfaite qu’elle aimait tant jouer. Ils ne savaient pas qu’elle avait tenté de nous apprendre à jouer de la musique et à chanter, qu’elle ne s’était jamais moquée lors de nos leçons alors que nous balbutions, qu’elle nous félicitait quand nous réussissions. Ils ignoraient les efforts qu’elle avait fait chaque jour pour se redresser après la mort de Rihite, après ce traumatisme qui l’avait tout autant touchée que Marietta ou le reste de notre famille. Ils ne savaient pas à quel point elle était forte, et sensible, et insupportable, et talentueuse.

Ma sœur était tellement, tellement plus qu’une jolie fille à la voix de sirène.

Et je réalisai alors que je ne valais pas beaucoup mieux que cette foule d’inconnus. Tout ce que j’avais pu détester chez elle, toutes ces manières insupportables qu’elle se donnait perpétuellement, tout ça, ça n’était pas elle, ça n’était que cette surface bien lisse qu’elle choisissait de nous montrer.

J’avais oublié quelle sœur merveilleuse elle avait été malgré les apparences. Et mon cœur se serra en songeant que, si j’avais été plus patiente, si j’avais passé plus de temps avec elle, à essayer de la comprendre, peut-être ne nous serions-nous pas autant éloignées l’une de l’autre… Peut-être aurait-elle pu m’aider à me sentir plus courageuse face à Rhen, peut-être n’aurait-elle jamais cherché à lui courir après si elle avait su que je l’aimais…

Mais tout ça, je ne le saurai jamais. Elle était partie, c’était trop tard.

Vint ensuite le temps du silence. Son discours terminé, père revint prendre place au côté de mère qui ne cessait de trembler sous les sanglots. Le Grand Prêtre, jusque-là caché dans un coin de la pièce, s’avança dans son habit tout de blanc et d’argent et nous invita à nous recueillir.

Les uns après les autres – à commencer par les membres de la famille – les gens défilèrent devant le cercueil en bois d’olivier, admirant une dernière fois la beauté figée de Calista dans son berceau de roses.

Quand ce fut mon tour de m’avancer, je sentis mes jambes flageoler. Je tenais toujours la main de Liam dans la mienne. Chacun de mes pas était raide et douloureux, pareil à un automate rouillé. Quand je posai enfin les yeux sur le corps de ma sœur, la seule pensée qu’il me vint fut que le croquemort avait admirablement bien fait son travail.

L’image du corps brisé de Calista ne cessait de me hanter depuis cette nuit deux semaines plus tôt. Ici, ma sœur semblait dormir, un ange parmi les roses. On l’avait parée d’une robe blanche toute simple, ses cheveux blond vénitien encadrant son visage en de splendides boucles soyeuses. J’eus un sourire en songeant que Calista aurait hurlé de devoir porter une tenue aussi sobre. Bien loin était le temps des crinolines, des volants, des dentelles et des rubans.

Je fus la dernière de la famille à rendre hommage à Calista, la dernière à déposer sur son cœur l’une de ces roses blanches qui allait l’accompagner jusqu’au monde de Zaros.

Au moment de l’y mettre, cependant, je remarquai l’anneau hideux à son doigt, la fameuse rose d’obsidienne. Je sentis aussitôt la colère me monter. Qui avait permis qu’on laisse cette horreur sur ma sœur ? Il était hors de question qu’elle emporte cette chose dans l’autre monde, Calista méritait la paix, non le chaos que cet objet avait engendré dans son esprit.

J’exécrais ce bijou.

Je jetai un discret regard en arrière, m’attardant devant le corps. Personne ne faisait attention à moi, la plupart occupé à pleurer dans leur mouchoir. Alors, le plus discrètement possible, je retirai la bague et déposai à la place la jolie rose rouge que Liam peinait à lui offrir, seule trace de couleur dans cette marée de blanc. Je glissai le bijou maudit dans ma poche et regardai une dernière fois le visage de ma sœur. Elle semblait si sereine… L’injustice de la situation me noua la gorge. Ça n’aurait jamais dû être elle dans ce cercueil, jamais.

— Je suis désolée… lui murmurai-je tout bas.

Je m’écartai et retournai à ma place au côté de mes sœurs, Liam me suivant mollement. Avait-il seulement dormi ces derniers jours ? Sûrement aussi peu que nous. Pauvre chou…

Puis vint le tour du reste de l’assemblée. Les uns après les autres, les gens défilèrent, se plantant devant le cercueil, murmurant des paroles imperceptibles. Et je ne pouvais m’empêcher de me demander ce que tous pouvaient avoir à lui dire.

Quelques instants plus tard, quand la dernière personne vint dire adieu à Calista – un étranger des Terres d’Éther au vu de sa peau halée et ses cheveux d’or – il fut temps de se lever. Je remarquai alors Rhen quelques mètres plus loin et croisai son regard. Il afficha un pâle sourire que je m’évertuai de lui rendre sans grand succès. J’aurais tant aimé pouvoir m’écrouler dans ses bras, quitter cette assemblée lugubre et me perdre dans son étreinte. Je ne voulais plus porter le poids du deuil, de la culpabilité ou du devoir de suivre le cortège jusqu’au cimetière. Je voulais m’enfermer à l’abri des regards et oublier. Tout oublier…

Le Grand Prêtre appela les porteurs qui refermèrent le cercueil. Rapidement, tout le monde se retrouva au-dehors sur la grand-place. Quelques centaines de mètres plus loin, juste en face, je pouvais voir la tour du Temple des Rêves pointer vers le ciel. Que n’aurais-je pas donné pour courir dans sa direction et me cacher dans un de ces couloirs familiers…

Alors que la marche funèbre commençait à se mettre en place, le Grand Prêtre en tête de la procession, je remarquai une ombre non loin. Il me sembla reconnaître la silhouette de Ciaran, sentir son regard peser sur moi.

Excédée, je me retournai franchement, prête à l’affronter. Je le découvris au pied de la fontaine où il observait le cortège avec un sourire torve. Je serrai les dents, fusillant le dieu du regard. Je rêvais de lui faire ravaler cet air railleur et ces maudits papillons de nuit. J’aurais voulu le frapper, le réduire à néant comme il l’avait fait avec ma sœur, lui arracher la masse sombre qui devait lui servir de cœur. Avait-il seulement un cœur ? J’eus furieusement envie d’aller vérifier, là, tout de suite. Je m’apprêtais à le faire, j’étais sur le point de courir dans sa direction pour le frapper quand une main se posa sur mon épaule pour me retenir.

En me retournant, je découvris Rhen, l’expression assombrie. Il secoua simplement la tête, comme pour me dire que ça n’en valait pas la peine. Et, quand je posai à nouveau les yeux sur Ciaran, il avait disparu. Je soupirai.

Non loin, Liam me regardait de ses grands yeux brillants. Mes épaules s’affaissèrent. Je chassai le dieu de mes pensées et le rejoignis, reprenant sa petite main dans la mienne. J’aurais préféré que ce soit un énième cauchemar. Il m’aurait été beaucoup plus supportable de me réveiller en sursaut que d’entendre les pleurs de mes parents et de mes sœurs.

Le cortège s’élança dans les rues de la capitale, silencieux, lugubre. Le ciel lui-même paraissait en deuil, recouvert de cette épaisse couche de nuage gris déprimant. La ville semblait s’être parée d’un habit funéraire, ses rues d’habitude si animées à présent sombres et désertes. Le peu de couleur qui égayait Argencour paraissait alors monochrome, sinistre camaïeu de gris. Amore pleurait-elle la mort de Calista comme Typhon avait semblé le faire pour Rihite ? J’en venais presque à me poser la question.

La marche était incroyablement longue et sinueuse. Le temps s’allongeait-il réellement ou n’était-ce que le fruit de mon imagination ? J’avais l’impression de marcher depuis une éternité, engoncée dans mes habits noirs, alors même que le cimetière ne se trouvait pas si loin du temple.

Dans ma poche, la bague semblait peser une tonne.

En arrivant au cimetière, j’eus un frisson. Je détestais cet endroit depuis le premier enterrement auquel j’avais assisté des années plus tôt, bien trop similaire à celui-ci. Le cimetière lui-même paraissait mort avec ses arbres au tronc noirci, sa terre grisâtre et ses pierres tombales couvertes de mousse et de lichen.

Nous nous dirigeâmes vers l’emplacement de la nouvelle tombe, juste à côté de celle de Rihite qui était richement fleurie, comme tous les jours – nous y veillions.

La pierre de Calista, superbe granit rutilant, me donna la nausée. Des gravures splendides en forme de chérubins entouraient le nom de ma sœur et la date de son décès alors que le blason de la famille, cette belle-de-nuit d’argent qui brillait à la poitrine de notre père, avait été taillée en relief dans un cristal couleur de nuit sur la pierre. Rihite avait eu droit à la même fleur, bien que ses gravures furent différentes, dessinant comme des vagues cherchant à engloutir son nom dans la pierre plus sombre.

Les voir côte à côte, regarder cet immense trou dans lequel les porteurs s’apprêtaient à déposer le cercueil de Calista, ne faisait que rendre la chose encore plus réelle, plus atroce. Calista était vraiment partie. Comme Rihite…

Le Grand Prêtre se plaça derrière la sépulture, faisant face à toute l’assemblée endeuillée alors que les porteurs s’affairaient devant lui. À côté de moi, Liam s’accrocha si fort aux pans de ma jupe que ses petites phalanges blanchirent.

Si ce cauchemar avait un goût amer de déjà-vu pour nous, pour Liam c’était pire. C’était la première fois qu’il se retrouvait ainsi confronté à la mort, tout de noir vêtu, ses joues barbouillées de larmes. Lui expliquer que Calista ne se réveillerait plus fut une véritable torture pour moi. J’aurais préféré qu’il n’assiste jamais à ça, qu’il n’entende pas le sermon interminable du Grand Prêtre venu officier, ni les pleurs de tout le monde autour de nous, ni qu’il voit le corps sans vie de Calista, étendue comme une princesse de conte de fée dans un berceau de roses.

Je revoyais sans cesse son expression juste avant sa chute. Les cris de détresse muets qui avaient fait briller ses prunelles, le mince espoir que j’y avais lu avant qu’elle ne sombre. J’entendais encore le bruit de son corps s’écrasant sur les rochers, encore et encore et encore, sinistre écho qui hantait mes jours et mes nuits.

Derrière moi, je sentis quelqu’un s’approcher. Je n’eus pas besoin de me retourner pour savoir qu’il s’agissait de Rhen. Il me prit la main, simplement, et la serra fort, comme pour me signifier qu’il était là, que je n’étais pas seule. Le sentir près de moi me donna le courage de relever la tête alors que les porteurs descendaient le cercueil en terre. Bientôt les premiers coups de pelle retentirent, enfouissant à jamais un autre membre de ma famille.

Alors que le prêtre poursuivait sa litanie, rendant grâce aux dieux, je jetai de discrets regards alentour. Un peu plus loin, je remarquai un groupe de corbeaux perché dans les branches d’un arbre mort. L’un d’eux était complètement blanc, ses yeux laiteux. Des émissaires de Zaros, songeai-je alors. C’était étrange de les voir. Sous ce ciel nuageux, ils semblaient tout droit sortis du royaume des morts.

Une vieille légende racontait que le Dieu de la Mort, quand il ne régnait pas sur le ciel, envoyait sur terre ses messagers afin de rassembler les âmes errantes en vue de leur passage dans l’autre monde. Vitali avait toujours éprouvé une certaine fascination à leur égard. Quand j’étais petite, il me semblait qu’elle en avait recueilli un, un jour. Père avait beaucoup pesté en la voyant s’occuper de l’oiseau noir. Il le disait maudit et dangereux – personne ne voulait attirer le regard du Dieu des Morts – mais ma tante s’en fichait. Elle n’était pas superstitieuse comme une grande partie de la population et ne voyait là qu’un animal blessé. J’avais beaucoup aimé l’aider à s’en occuper. Le voir s’envoler à nouveau avait été l’une des plus belles choses que j’avais vues.  

Au demeurant, c’était la première fois que je voyais un corbeau sans couleur. Quand nos regards se croisèrent, j’eus un frisson. C’était presque comme s’il pouvait lire à travers moi, comme s’il pouvait voir mon âme, mes pensées profondes. J’eus soudain peur qu’il ne se mette à crier à tous ma culpabilité.

Mais il n’en fut rien. À la place, il s’ébroua et s’envola avec tous les autres dans un concert de croassements sinistres en direction de Ravenwood, le bois maudit. Mon regard vagabonda longuement sur la cime des arbres. Ces pins étaient si sombres que même sous un soleil d’été il était presque impossible d’en discerner les sous-bois.

Il y eut un long silence, puis le dernier coup de pelle retentit et le prêtre reprit.

— Que ta Nuit soit éternelle, que les Étoiles te veillent et que ton Rêve demeure dans l’autre monde.

Quand mes yeux se posèrent de nouveau sur le prêtre, il n’y avait plus qu’un tas de terre retournée et une pierre tombale ouvragée.

— À Zaros.

— À Zaros, reprîmes-nous.

Ce ne fut qu’à ces mots que je réalisai vraiment.

Ma sœur était morte.

Ciaran l’avait tuée.

Et je me demandais qui allait suivre.

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Tac
Posté le 13/09/2022
Yo !
J'ai bien aimé l'introspection d'Adaline concernant sa soeur ! je l'ai trouvée émouvante. Dans l'ensemble, je trouve que c'est vraiment un chapitre super, mais qui pourrait être encore plus épicé qu'il n'est déjà.
Je trouve un peu dommage qu'on en sache autant sur Rihite, je trouve que le moment aurait été approprié pour évoqué certains aspects, actuellement je trouve que le trauma laissé par son décès est sous-exploité alors que l'occasion était rêvée pour sur Show don't tell. Mais cela signifierait enlever des trucs au début, sinon cela ferait répétition, de mon avis, on parle déjà beaucoup de Rihite je trouve...
Aussi tragique que soit le décès de Calista, je trouve un peu dommage qu'il vienne si tard. En effet, soudain le dieu des cauchemars paraît effectivement effrayant ; il n'héiste vriament pas à tuer. A titre de comparaison, la mise en danger des jumelles m'avait fait assez peu d'effet. A choisir, je conseillerais de carrément enlever la scène avec la statue de glace, qui m'a pas paru apporter grand-chose à l'histoire à part du retardement pour les choses sérieuses, (si je puis m'exprimer ainsi) et amener plus tôt les événements autour de Calista. Pour moi, ils sont vitaux pour faire comprendre à Adaline que l'innocence est passée ; elle joue "dans la cour des grands", d'une certaine façon.
Enfin, je trouve l'absence de consistance des parents assez spectaculaire :') je sais que c'est fréquent dans les romans de YA de les faire peu présents, mais quand même...
Plein e bisous !
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