Chapitre 25 : Gwenn

Par Talharr
Notes de l’auteur : Le chapitre qui a détruit mon coeur...

Gwenn :

Les Tyrgrill, massifs et indomptés, hésitaient à s’élancer. Le serpent géant, tapi à la lisière de la forêt, restait dissimulé dans l’ombre des arbres.
Des archers enflammèrent leurs flèches et les décochèrent en direction de la créature.

L’éclat vacillant du feu révéla l’horreur.
Une gueule béante, garnie de crocs titanesques, se dessinait dans les ténèbres. Un sourire cruel, déformé par la haine. Et ces yeux jaunes, luisants comme deux lanternes maudites, semblaient sonder les âmes. Même les plus vaillants détournaient le regard.

     — Où est ton maître ? demanda Elira, d’une voix calme.

Elle… Elle lui parle ?

Gwenn resta pétrifiée. La peur lui nouait la gorge. Et le pire arriva.

Le serpent répondit.

     — Il n’a pas besoiiiinnn d’être là… Je sssuis là. Livrre-toi, Elira… et je llaisse la vie sssauve à tes camarrrades…

Gwenn sentit son cœur cesser de battre l’espace d’un instant.
La voix était un souffle glacial, venu d’un autre monde.

Elira balaya les visages alentour. Ils étaient figés, marqués par l’effroi. Puis elle croisa le regard de Gwenn. Et lui sourit.

     — A toi de les protéger, jeune Zarktys.

     — Moi ? Non… Je… je ne sais pas me battre…

     — Tu es forte. Tu l’as déjà prouvé. Aie confiance en toi.

     — Mais… on a besoin de vous. Pas de moi !

Elira se tourna vers le monstre.

     — Je me rends. Emmène-moi à ton maître. Je m’inclinerai.

Un ricanement s’échappa des mâchoires reptiliennes, un râle rauque, moqueur.

     — Persssonne ne sssait qui il est. Et tu penses que je vais t’amener à lui ? Non. Tu dois mourrrir, Elira… héritière de Malkar.

Un frisson parcourut l’assemblée. Tous les regards se braquèrent sur la magicienne.

Héritière… de Malkar ?

Elle n’avait jamais évoqué cela. Et pourtant, elle ne réagit pas. Stoïque.

     — Vous avez besoin de moi vivante, rétorqua-t-elle.

     — Nous avons… la fillle. Pourquoi aurrrrions-nous bessssoin de toi ?

Le serpent s’approcha, lentement. Sa langue fourchue traçait des sillons sur les mots.

     — Le Loup et l’Hirondelle sont ensemble. Ils vous arrêteront. Ils empêcheront Dalar de revenir.

     — Trop tarrd… Le père de tous ssssera bientôt de retour. Tu aurais dû rrressster parmi tes semblables, Elira.

     — Je suis une serviteuse de Malkar pas de votre Dalar qui ne souhaite que la destruction. Toute vie disparaîtra !

     — Pas toute la vie. Seulement celllle qui ne mérrrite pas de vivre.

     — Ça suffit ! Narkûl vesh’ar, thark dorûm !

Gwenn sursauta. Des flammes jaillirent autour de la créature, projetées par les flèches enflammées. Elles l’entourèrent.

    — Retourne auprès de ton maître ! lança Elira.

Mais nul ne bougeait. Même les Tyrgrill observaient, figés.

    — Ssahr’ik drâzim, kul’venar… souffla le serpent.

D’un geste brutal, sa queue balaya le feu. Il disparut à nouveau dans l’ombre.

Un silence sinistre retomba.

Puis une voix s’éleva :

     — Il a bougé !

     — Il est là ! cria un autre

     — Non ! Là-bas !

Gwenn fixa l’obscurité. Devant elle, les yeux jaunes s’étaient multipliés. Deux. Quatre. Six. Dix.
Il n’y avait pas qu'un seul serpent.

     — Reste près de moi, dit Elira d’une voix douce.

Elle se redressa, imposante malgré sa fatigue, et ordonna :

     — Il n’est pas venu seul ! Préparez-vous !  

Les guerriers se mirent en branle. Les Alkasrims brandirent leurs lances. Les Tyrgrill piaffaient.

Gwenn, elle, n’avait rien. Ni arme, ni courage.

À ses côtés, Elira tremblait. Le sort précédent l’avait épuisée.

Des sifflements sifflants fendirent l’air.
Les yeux jaunes approchaient. Rapidement.

Et le chaos éclata.

Des serpents bondirent de partout. Moins gigantesques que le premier, mais immenses quand même. Leurs crocs gouttaient de venin.

Les Tyrgrill se jetèrent sur eux. Le combat fut immédiat, brutal.
Des crocs contre des griffes. Des rugissements contre des sifflements.
Des lames. Du sang. De la peur.

     — Ils ne devraient plus être de ce monde… murmura Elira.

     — C’est quoi, ces choses ?!

Cette fois pas de Arnitan à protéger. Aucune volonté de foncer tête baissée.

Comment aurais-je pu être son Hirondelle ? Sa protectrice ? se lamenta-t-elle.

     — Des Serlar. Créatures de Dalar. Peut-être les premières nées sur cette terre.

     — Mais… comment ont-elles survécu ?

     — On verra ça… si on survit.

Malgré les années passées dans la prison sous-terraine de Mahldryl et leur fuite, la chevelure dorée d’Elira semblait devenir de plus en plus éclatante.

Un guerrier fut projeté dans les airs. Un hurlement, un claquement. Il disparut.

     — Une brèche ! hurla Elira. Refermez la brèche.

Trop tard.

Le serpent géant surgit. Une Zarktys et des hommes, des anciens esclaves, tentèrent de l’intercepter. Ils furent balayés comme des brindilles.

Elira se plaça devant Gwenn. Elle murmurait une incantation, les mains tremblantes.

Gwenn ferma les yeux. Les crocs arrivaient. Le souffle de la mort était là.

Mais rien.

Seul sa respiration et les battements de son cœur cassait ce silence.

Quand elle rouvrit les yeux, un champ de force protégeait Elira. Le serpent frappait encore, en vain.

Mais la magicienne faiblissait.

Elle ne va pas tenir… Qu’est-ce que je peux faire ?...

     — Si je tombe… tu fuis, dit-elle d’une voix étranglée. Compris ?

La teinte de son visage était proche de celui des morts.

Gwenn acquiesça.

Quelques secondes plus tard, la barrière céda. Elira s’effondra. Presque inconsciente.

     — Fuis, souffla-t-elle.

Gwenn hésita. Le serpent approchait. Il fixait Elira.

Pars. Pars ! se hurla-t-elle intérieurement.

Mais elle ne bougea pas.

Elle a dit que j’étais courageuse. Que je pourrais être une Zarktys.

Elle ramassa une épée tombée à ses pieds. Lourde. Inconnue. Pourtant, dans ses mains, elle devint légère.
Et elle hurla. Toute sa rage. Toute sa douleur. Toute sa vie.

Elle bondit sur le monstre.
Un coup d’épée. Un sifflement. Un coup de queue.
Elle fut projetée au sol. L’arme s’éloigna.

      — Tu mourrrras d’abord, idiote…

Elle tenta de ramper. Sa jambe la faisait hurler.

L’odeur de mort se rapprochait.

Allez Gwenn.

Un croc s’enfonça dans l’autre jambe.
Elle cria. Un rire la surplomba.

     — Il ne fallait pas jouer les hérrrrroïnes…

Et puis… un choc. Un croc la transperça.

La douleur. Immense.
Un liquide se déversait de son ventre. Partout.

Mais elle entendit un rugissement. Un Tyrgrill bondit. Valkys était là. Des formes bougeaient autour d’elle.
Mais tout devenait flou.

Le venin…

Il y avait tellement d’ombre face à elle. Que se passait-il ?

Le serpent géant sembla hurler quelque chose. Et après plusieurs minutes sans une once de bruit de bataille, une ombre s’approcha d’elle.

Elira. Sa chevelure blonde qui rayonnait sur ce champs de morts. 

Gwenn essaya de bouger mais elle était paralysée.

     — Tu aurais dû fuir...

La voix d’Elira était brisée.

    — Pourquoi ne m’as-tu pas écouté ?

    — Je… je ne pouvais pas. Je ne voulais pas vous voir mourir… Je suis une Zarktys… non ?

Elira pleurait. Gwenn aussi. 

    — Je suis tellement désolée… Tu avais tant à vivre…

    — Ne soyez pas désolée… Il fallait que je le fasse. Je l’ai senti.

Sa voix faiblissait au fur et à mesure qu’elle tentait de parler. 

Une autre ombre floue s’approcha. Valkys.

    — Je ne peux rien faire, se désola Elira.

La main de la Zarktys se posa sur l’épaule de la magicienne.

    — Tu as été grande, Gwenn de la vallée verdoyante. Jamais je n’oublierai ton courage. Une place t’attend, et nous t’y rejoindrons. Veille sur nous.

La vision s’assombrissait encore, les visages disparaissant. Gwenn pleura tout ce qui lui restait en pensant à sa famille, sa petite sœur qu’elle ne tiendrait plus jamais dans ses bras pour la calmer après un cauchemar. A Rif à qui elle ne pourrait plus ébourrifer ses poils tout doux. Aux blagues de Draiss qu’elle n’entendrait plus. Elle pensa même à la vieille Gabrielle.

Et à Arnitan qu’elle ne pourrait plus enlacer. 

Merci Tan d'avoir été là. Merci de m'avoir aimé. Je t'aimerai toujours. Mais s'il te plait ne sombre pas à cause de moi. Vit, aime... Je suis certaine qu'on se retrouvera. 

Un sourire la traversa avant que la douleur ne disparaisse. Tous ces moments magiques…

Puis il ne resta plus qu’elle. Au bout d’un couloir, une lumière. Une porte. Verte. Pure.

Elle entra, sans peur.

Je veillerai. Toujours. Je serai la protectrice de la Terre de Talharr.

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Scribilix
Posté le 13/08/2025
Nannnn pas Gwenn. Je me disais bien que son idylle avec Arnitan n'allait pas durer mais tu as laissé espérer qu'ils allaient se retrouver. Mais au final le serpent aura eu raison d'elle. J'imagine que Arnitan risque de mal tourner s'il l'apprends, lui qui ne voulait perdre personne d'autre. Au moins sa mort aura certainement sauvée Elira.


sur la forme :
- Il n’y avait pas un seul serpent. (qu'un seul serpent)
- Un guerrier fut projeté dans les airs. Un hurlement, un craquement. Il disparut. ( un claquement s'il s'est fait manger tout cru :)
- Le serpent géant sembla hurlé quelque chose. (hurler)
Juste cette phrase : Elira. Rayonnante. Je ne suis pas certain que l'adjectif soit bien choisit Sur la coup ca m'a fait rire. Gwenn agonise dans son venin et Elira vient la voir en plaine forme et grand sourire haha.
A plus,
Scrib.
Talharr
Posté le 13/08/2025
Oui... :,( j'ai eu un peu de mal à me remettre rapidement sur les passages suivants. Depuis le début je savais ce qui allait advenir à Gwenn mais l'écrire ça fait mal aha

Pour le moment Arnitan est loin de tout ça mais forcément à un moment il va l'apprendre. Mal tourné ? A voir :)

Mdrrrr c'est vrai que le rayonnant est bizarre, on dirait Elira est contente ahaa Faut que je trouve un autre mot, je voulais dire que malgrés ce qu'il venait de passer elle était toujours solaire. Je vais voir comment faire.

Va falloir que j'accélère d'écrire ahaa

A plus :)
Talharr
Posté le 13/08/2025
J'ai modifié pour qu'on rigole moins ahaa
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