Chapitre 25 : La géographie de l'âme

Notes de l’auteur : Je vous laisse à ce chapitre, en ayant hâte de savoir ce que vous en pensez. :)

Alarmée, Bérénice bondit en se tournant vers Dimitri.

— C’est Decas ! Il fallait bien que cela arrive. Nous avons encore un peu de temps, affirma-t-il. Cachez-vous tous dans la chambre sous le rideau. Héloïse, Célestin, prenez avec vous, vos journalistes et vos fichus journaux.

— Lysandre, viens ! cria Pierre.

Tous se précipitèrent vers l’intérieur. Tandis que les journalistes couraient dans tous les sens, Bérénice surveillait la porte qui ne pliait pas face aux assauts répétés de la police. La voix tonitruante de Decas se fit entendre :

— Ouvrez monsieur Coeurderoy, vous cachez une fugitive ! Vous devez répondre de vos méfaits.

Au même moment, Icare plongea vers Bérénice. Une fois qu’elle sentit le poids de l’emblème sur son épaule, les bras croulant sous le poids d’une machine à écrire et plusieurs feuillets de tracts, Bérénice courut à la suite d’Armand, Héloïse et les autres. Célestin aidait Gabrielle à avancer. Bérénice entendit Dimitri s’écrier :

— Ariane, ne bouge pas. Que je sache, les réunions de famille sont encore légales dans ce pays !

Avant qu’elle n’ait pu comprendre, Bérénice sentit le souffle d’un énorme coup la projeter vers l’avant. Elle serait tombée, entrainée par le poids de la machine à écrire si Léopold ne l’avait pas attrapée. Bérénice n’eut pas le temps de le remercier qu’il la poussa un peu plus vers la chambre cachée, où se trouvaient déjà Célestin, Gabrielle, Héloïse et Armand et quatre journalistes. Tous avaient le souffle court et l’air halluciné :

— Pas le temps de fuir, restons ici, murmura Héloïse.

— Je sors, je vérifierai que la porte ne soit pas visible, fit Armand en se faufilant dehors.

Un doigt sur la bouche pour les intimer au silence, Héloïse récupéra les machines à écrire et Bérénice glissa le long du mur pour s’asseoir à terre. Bientôt, retentirent des pas précipités dans l’escalier et une voix donna des ordres :

— Il doit au moins y avoir mademoiselle Lépine et sans doute une certaine Vasari. Trouvez-les-moi. Je les veux vivantes. Octave Lépine payera cher pour retrouver sa désobéissante fille.

En un coup d’œil, Héloïse et Bérénice reconnurent Oscar, l’homme de main de Harcourt. Bérénice l’avait croisé à deux reprises. La première fois, lors de la fête d’anniversaire d’Auguste et la seconde, lors du vol au ministère. Il travaillait donc de mèche avec Decas.

— Mercenaire, cracha rageusement Léopold.

De la fenêtre, ils entendirent les policiers inspecter la cour intérieure, le petit passage par lequel Bérénice était venue, puis revenir sur leurs pas.

— Oscar, si tu aimes tant ma compagnie, il suffit de le dire. À force de venir ici tous les quarts d’heure, je vais penser que tu ne peux plus te passer de moi, fit la voix assurée de Dimitri.

Léopold ne put retenir un sourire.

— Très amusant. Mais croyez-moi, Dimitri, petit génie des Habiles, vous êtes fini. Vos jouets, vos passages de correspondances, vos automates…n’auriez-vous pas des petits secrets à me dévoiler ? Voire des passages secrets ?

Avant que Dimitri n’ait pu répondre, Oscar s’écria à l’adresse des policiers :

— Tapez les murs ! Ouvrez tout ! Mettez-moi cette maison sens dessus-dessous s’il le faut. C’est un Habile, il cache forcément quelque chose !

Héloïse lança un regard alarmé à Bérénice. Celle-ci n’hésita pas. Elle se releva, prit un stylo sur le bureau, un tract avec la tête de l’empereur surmontée d’un bonnet d’âne, et écrit : « Sortir par la fenêtre. Maintenant. » Elle lut sur les lèvres d’Héloïse « comment ? », et lui répondit en pointant du doigt Icare. L’emblème avait une force incomparable !

Les policiers s’étaient mis en tête de chercher une cachette. Ils frappaient tous les murs. Ce n’était qu’une question de temps avant que le rideau invisible par un froissement ou une vibration quelconque ne dévoile la porte cachée. Léopold se releva silencieusement, prit son pistolet qu’il pointa directement vers la porte, prêt à les protéger.

Bérénice tendit les extrémités d’un drap à deux journalistes et Icare s’en saisit au centre. Les deux hommes traversèrent la fenêtre, les pieds dans le vide.  À l’extérieur, Icare s’éleva doucement et les corps des journalistes avec lui. Douloureusement accrochés au drap, ils se laissèrent porter dans les airs, Icare pour seul parachute.

L’emblème hésita quelques instants, sans savoir quoi faire de sa charge, puis doucement descendit les deux étages, évitant les fenêtres. Bérénice crut entendre un bruit, mais ne fut pas sûre de l’atterrissage. Ce ne fut seulement que lorsqu’Icare pointa le bout de son bec devant la fenêtre qu’elle se rassura. Célestin et Gabrielle furent les suivants, tandis que Bérénice cachait à la hâte les machines à écrire et papiers sous le lit.

— Il n’y a rien, répondit Decas agacé. Je récupère mes hommes. Si tu veux, tu peux rester.

Oscar grommela. Les deux hommes n’étaient pas sur la même longueur d’ondes.

— Reste ici toute la journée, si cela te chante. J’ai autre chose à faire que de courir après des gamines.

Il y eut un bruit de verre brisé, puis un rire glacial et enfin une porte claqua.

— Ceux qui restent… On continue !

Les intrus reprirent leur raffut infernal, frappant sur chaque pan de chaque mur. Icare avait transporté le deuxième groupe de journalistes. Héloïse attrapa le tissu et pressa Bérénice de s’accrocher avec elle.

— Non, chuchota Bérénice.

Elle pointa du doigt Léopold, qui d’un revers de main balaya sa proposition et la poussa vers Héloïse. Il rangea son arme et vint s’allonger sur le lit, les mains sous la tête.

Bérénice hésita quelques secondes, toujours rongée par la peur du vide, puis traversa la fenêtre sans oser regarder le sol, un étage plus bas. Elle enserra la taille d’Héloïse, tout en s’accrochant de toutes ses forces au tissu. Elle n’avait plus le choix…

Elle se sentit soulevée, Icare portant leur poids avec peu de difficulté et le tissu se tendit à l’extrême. Leurs corps frôlèrent les deux murs de l’étroit passage emprunté la veille avec Dimitri. Elles se serrèrent l’une contre l’autre pour éviter qu’en ne touchant le mur, elles ne fassent du bruit, puis se laissèrent glisser. Au moment où Icare disparut sous la fenêtre en les emportant, la porte s’ouvrit dans un grand fracas :

— Ah ! Qu’est-ce que j’avais dit ! Comment ? Qu’est-ce que… ?

Oscar hurla, tandis que Léopold jouait la comédie à force de « Dimitri, quel est votre ami ? Mon cher monsieur, en voilà des manières de réveiller un homme ! J’ai tué pour moins que cela ! » Dimitri gardait le silence, sans doute aussi stupéfait qu’Oscar.

Bérénice toucha du bout des pieds le sol et soupira de bonheur. Héloïse jeta le drap sur le côté et elles se réfugièrent dans le jardin des Coeurderoy, aux côtés des journalistes. Bérénice posa une main apaisante sur l’épaule de Gabrielle qui cherchait encore son souffle. Sèchement, la vieille femme lui lança un regard revêche et se dégagea. Bérénice et Héloïse se lancèrent un regard de connivence : même dans l’adversité la sœur Loiseaux ne se laissait pas aller à un peu de sympathie.

Après une longue attente, la maison redevint silencieuse et la tête de Dimitri plongea par la fenêtre sans les voir. Bérénice se redressa et le salua. Il éclata de rire :

— La voie est libre !

Bérénice, Héloïse et les journalistes entrèrent dans la maison, alors que Dimitri et Léopold descendaient les escaliers. Ariane et Lysandre buvaient le thé, innocemment.

La porte d’entrée refermée, Pierre leur fit un état des lieux :

— Ils sont partis. La porte est fichue. Elle ferme, mais elle ne pourra plus séparer le bon grain de l’ivraie…

— Cet Oscar est terrifiant, reprit Armand en arrivant de la cuisine, l’air fatigué.

— Ah ! Mademoiselle Savary ! s’exclama Léopold sans se départir de sa jovialité.  Un fois qu’on se sera débarrassés de ce vieux fourbe qui nous sert d’empereur, je me charge personnellement de vous faire intégrer l’armée. De l’ingéniosité, du courage, de l’audace : quelle performance !

—Ils vont revenir, annonça Dimitri. Et cette fois, ils nous demanderont pourquoi nous passons tant de temps ensemble. Lysandre, tu ferais mieux de quitter Paris de suite !

— Nous prendrons le premier train pour le Nord cet après-midi, répondit Héloïse.

— Pourquoi le nord ? demanda Bérénice.

— Ce sont des villes ouvrières où la révolte gronde, expliqua Armand, comme une évidence.

Héloïse prit Bérénice par le bras et l’éloigna du groupe :

— Que vas-tu faire ? Où vas-tu loger ? demanda-t-elle, le regard plongé dans le sien.

— Je vais continuer à chercher des informations sur la carte et le cryptex. Je pourrais me trouver une chambre sous les toits. J’ai de l’argent ne t’inquiète pas.

— Pas question, fit Armand en les surprenant. Nous avons discuté avec Dimitri. Si ni vous ni les conventions n’êtes dérangées à cette idée, nous ne serions pas contre une troisième chambre habitée. En revanche, vous aurez sans doute à jouer à cache-cache avec Decas.

Bérénice jeta un coup d’œil à Dimitri qui avait tout entendu de leur discussion et lui lança un hochement de tête franc, avant de retourner à sa conversation avec Ariane.

— Tu vois, affirma Bérénice à Héloïse. Apparemment, j’ai déjà un toit. Tu n’as pas de souci à te faire.

Elles se prirent dans les bras. Elles savaient qu’elles ne pourraient pas communiquer par lettres, la poste étant surveillée par l’empereur. Ce lien leur manquerait.

— Reviens vite, chuchota Bérénice dans l’oreille d’Héloïse.

— Essaie de rester tranquille pendant quelques semaines, lui rétorqua cette dernière.

Tous partirent en laissant Armand, Bérénice et Dimitri. Ce dernier grimpa les escaliers avec énergie :

— Decas est un idiot ! s’exclama-t-il en s’assurant qu’Armand et Bérénice le suivaient. Il sait que je veux comprendre le fonctionnement des emblèmes, mais il croit qu’on arrêtera de surveiller l’empereur pour se jeter dans ce projet corps et âme !

— Et ce n’est pas ce qui est en train de se passer ? souffla Bérénice à Armand.

— Et encore…c’est pire quand il met un pied dans l’atelier. Il ne sait même plus son nom, répondit Armand sur le même ton, en essayant de garder le rythme de course de Dimitri.

Dimitri se tourna vers eux tout en continuant à marcher dans le couloir du second étage :

— Dans cette quête, je dois mettre tout ce que j’ai : mon esprit, mon habileté, mes tripes.

Bérénice évita un vase, en mille morceaux sur le sol. En progressant, elle redressa un cadre malmené par un policier et ramassa quelques tessons d’un plat tombé d’un vaisselier :

— Laissez, on s’en occupera plus tard, lui lança Dimitri en ignorant le chambardement.

            Bérénice, outrée, chuchotait à Armand :

— C’est de la porcelaine de Sèvres qui a un bon siècle ! Oscar et Decas sont des sauvages.

Ils atteignirent la petite chambre par laquelle Bérénice était venue la première fois. De la porte, seule l’ancienne poignée en or avait disparu, détruite par Dimitri lui-même pour échapper à leurs poursuivants. Il l’avait remplacée par une autre, en ivoire, en forme de monstre comme une de ces gargouilles qui ornent les cathédrales. Il l’empoigna et le soleil de l’atelier pénétra dans la chambre. Ils se trouvaient dans le ministère des Habiles.

La pièce avait été rangée, autant que faire se peut. Les jambes mécaniques avaient disparu, les outils étaient rangés sur l’établi, les chandeliers avaient été posés sur des étagères recouvertes de livres et d’objets. Même le vitrage cassé, par lequel Bérénice était entrée, avait été remplacé.

— Bérénice, aujourd’hui, ne vous aventurez pas en dehors de cette pièce, lança Armand.

— Venez, venez que je vous montre, s’exclama Dimitri.

Ils s’approchèrent du plan de travail central et aperçurent de nombreuses feuilles éparpillées, certaines récentes, d’autres très anciennes, toutes maculées de café.

— J’ai donc réfléchi aux objets créés par les Habiles. Les cabinets de curiosité en regorgent.

— Des automates en or, des horloges raffinées, des animaux mécaniques…, énuméra Bérénice.

— Exactement ! Les animaux mécaniques, la coupa Dimitri. Nos automates et nos animaux mécaniques sont pitoyables. Regardez Ulysse, notre jardinier, n’est pas capable d’avancer sans se prendre un arbre. Icare est le seul qui soit à la hauteur !

— Oui, mais on ne sait pas par quel miracle ! Icare n’est pas n’importe quel animal mécanique. C’est un emblème, rétorqua Bérénice.

— Comme si cela allait m’arrêter ! reprit Dimitri avec ferveur. Je vais trouver le fonctionnement des emblèmes et ensuite j’en construirai un. Et cet emblème appartiendra à mon frère !

— Mais il en a déjà un ! affirma Bérénice.

Armand reporta son attention sur elle, et avant que Dimitri n’ait pu parler, elle expliqua :

— Lysandre m’en a parlé le jour de notre arrivée à Paris. Il voulait récupérer son emblème chez l’empereur. Et puis il y a eu un cambriolage au palais ! La police a accusé les ouvriers, mais c’était, à tous les coups, Lysandre.  Et puis, à la Conciergerie, j’ai vu l’empereur…

— Vous avez vu l’empereur ? la coupa Armand, catastrophé.

— Oui, il n’a pas l’emblème. Il le cherche partout dans Paris et pense que mon père l’a caché.

— Il n’y a pas d’emblème, affirma Dimitri avec gravité.

Cette nouvelle fut accueillie par un silence abasourdi, avant que Armand ne souffle :

— Je n’y crois pas.

— L’emblème des Coeurderoy a été détruit bien avant ma naissance. Mon père se méfiait de son propre frère. Et il a bien fait. L’empereur et Lysandre sont persuadés du contraire. Tous deux cherchent un mirage !

            Voilà pourquoi Dimitri avait détourné le regard, lorsque Lysandre avait parlé de leur emblème durant la réunion. Armand se laissa tomber sur une pile de livres ; celle-ci vacilla dangereusement et se stabilisa. Il se tortilla sur le Guide à usage de l’apprenti Habile par Imbert Brone jusqu’à être confortable et reprit :

— Tu te rends compte ? Si l’emblème n’existe pas, cela signifie que l’empereur a bâti son empire sur un château de cartes…

— Exactement. Et nous devrons construire un emblème à partir de rien, conclut Dimitri.

— Pourquoi est-ce si important, les emblèmes ? Après tout, Lysandre n’en a pas besoin pour prendre le pouvoir.

Dimitri soupira et se tourna complètement vers Armand et Bérénice :

— Sans argent ? Sans armées ? Vaincre l’empereur en trois mois est impossible. Icare est capable d’une grande force, peut attaquer, transpercer les métaux les plus épais. Il est doté d’une vraie intelligence et anticipe vos besoins Bérénice. Il est une arme. Mais il est aussi un symbole. Pour que Lysandre gagne et soit légitime aux yeux de tous, il doit avoir l’emblème le plus puissant qu’il existe.

— Comment comptes-tu t’y prendre ? fit Armand en revenant près de la table. Tu n’es pas le premier à te lancer dans l’aventure des emblèmes. Tu sais que c’est dangereux.

— Dangereux ? fit Bérénice. N’est-ce pas un peu exagéré ?

— On parle d’une « géographie de l’âme » expliqua Armand. Le sujet est très sérieux, très documenté. Les Habiles sont partis de l’hypothèse que les emblèmes avaient une âme.

— Quand on voit Icare, cette idée ne semble pas complètement farfelue, ajouta Dimitri. Construire le corps d’un emblème est à la portée de n’importe quel bon Habile…

— Mais comment donner vie à ces bouts de métal ? Des générations d’Habiles ont essayé de décrypter les mystères qui entourent les emblèmes. C’est une chasse au trésor pour retrouver des carnets et journaux des premiers Habiles.

— Et qu’est-ce qui te fait dire que tu arriveras là où tant d’autres ont échoué ? demanda Armand en croisant les bras.

— Les plans d’Icare par Antoine ! lança Dimitri en les pointant du doigt sur la table. C’est une évidence. Et ensuite la généalogie héraldique, fit-il en pointant les plus anciens feuillets.

— Qu’est-ce ? fit Armand en se penchant dessus.

— L’histoire des emblèmes à travers les âges. Vu que les emblèmes sont inspirés des blasons de la noblesse, si j’étudie les blasons de ma famille, il y a des chances pour que je retrouve notre emblème.

— Mais il y a tellement de symboles qui représentent la puissance impériale : les aigles, les lions, les phénix, la salamandre… soupira Bérénice. Comment savoir lequel est le bon ?

— Il va falloir chercher dans tous les documents à notre disposition. Je soupçonne mon père d’avoir éradiqué de la surface de la Terre toute information susceptible de nous aider.

— Ce qui en dit long sur la puissance de votre emblème, murmura Armand, l’air rêveur.

Dimitri, Armand et Bérénice gardèrent le silence, chacun plongé dans sa vision onirique de l’emblème impérial.

— Bérénice, fit Armand en marchant sur des œufs. Dites-moi, cela ne vous dérange pas si nous examinons de près Icare ?

— C’est à lui qu’il faut demander ! fit Bérénice alors qu’Icare volait au-dessus de leurs têtes.

— Armand, il ne faut pas seulement disséquer les emblèmes. Il faut aussi étudier le lien tissé entre un emblème et son propriétaire. Pour Icare et vous, fit-il en pointant du doigt Bérénice, le lien est étroit…Je veux comprendre cette connexion.

— On a un problème aussi, lança Armand. On n’a pas de pierre diorite. Ce fichu caillou est de plus en plus difficile à trouver en quantité suffisante et on ne peut absolument pas utiliser des rubis pour un emblème.

— Je suis quasiment sûre que l’empereur en a volé sur des sites archéologiques en Égypte. Donc on sait à la porte de qui frapper pour en trouver, non ? suggéra Bérénice.

 

***

Les semaines passèrent et Bérénice accueillit sa nouvelle routine avec un certain ravissement : finis les séjours en prison, les attentats et vols, les sautes d’humeur de Blanche et les reproches d’Octave Lépine.

Elle avait définitivement emménagé dans la petite chambre cachée derrière le rideau, toujours remplie des tracts des journalistes du Cassandre. Ces derniers, partis en tournée avec Héloïse et Lysandre, rapportaient leurs succès et leurs échecs en province : ici, le jeune Coeurderoy était acclamé, là, il était menacé. Tandis qu’ils couraient à travers toute la France, Bérénice au contraire, se rendit compte qu’elle n’avait jamais aussi peu bougé de sa vie.

Elle se plaisait dans cette nouvelle vie, même si l’empereur déversait sa colère contre Lysandre et que Decas faisait suivre Dimitri par deux policiers, le forçant à toujours élaborer de nouveaux stratagèmes pour les semer. Dimitri et Armand passaient leurs journées le nez dans les entrailles d’Icare, tandis que Bérénice se réfugiait dans la bibliothèque du ministère des Habiles. Une fois travestie de l’uniforme des Habiles, les lunettes de Dimitri sur le nez, elle était méconnaissable.

Plongée dans des ouvrages sur les Habiles, Bérénice se familiarisait avec cet univers et renouait avec son père. Il faisait d’ailleurs partie des principales références bibliographiques des étagères. Mais le temps s’amenuisait et si Lysandre gagnait chaque jour un peu plus en popularité grâce à Héloïse, Bérénice avait de plus en plus l’impression de piétiner.

Comme de coutume, Dimitri, Armand et Bérénice poursuivaient leurs recherches et discussions jusque tard dans la nuit. Sans parvenir à se décider sur la forme que l’emblème prendrait, Dimitri avait commencé par l’essentiel. Ainsi, au centre de l’atelier trônait un cœur artificiel réalisé à partir de matériaux nobles. Si l’emplacement pour la pierre diorite laissait un grand vide dans la structure, celle-ci n’en demeurait pas moins belle et complexe.

— Pourquoi tant s’embêter pour la forme ? Après tout, n’importe quel animal majestueux ferait l’affaire ! lança Armand un soir.

— Ce serait une catastrophe, au contraire. L’animal choisi est essentiel, fit Dimitri.

— Héloïse m’avait expliqué que le choix de l’emblème influençait le comportement de l’animal. Il doit parfaitement correspondre aux Coeurderoy, reprit Bérénice.

— Par ailleurs, la pierre diorite n’est pas la clé pour obtenir une âme, sinon tous les objets qui en contiennent — et il y en a, mêmes s’ils sont rares — possèderaient une âme et n’en feraient qu’à leur tête, fit Dimitri en avalant la dernière bouchée de son dessert. Nous devons trouver le bon emblème, la pierre diorite et un troisième élément…dont nous ignorons tout.

— Qu’est-ce qui fait que l’âme est âme ? Avons-nous seulement une âme ? Voilà une question que se posent les Hommes depuis le début de l’humanité…philosopha Bérénice.

— Question à laquelle votre père avait une réponse, fit Dimitri, en jetant sa tête en arrière et en fermant les yeux de fatigue.

 Armand somnolait sous l’arbre. Dimitri réfléchissait tant et si bien qu’il n’était qu’un désordre de vêtements, de cheveux, d’idées, tandis que Bérénice se noyait dans son verre de vin, les coudes ancrés dans l’exocarte, la tête lourde. Ces derniers jours, ils étaient tellement accaparés par leurs recherches, que Bérénice avait fait tomber l’exocarte dans la baignoire et avait été forcée de la faire sécher des heures au soleil.

— Si j’entends encore une fois parler du mot « âme » pour la soirée, je deviens folle.

— Moi aussi, fit faiblement Armand en rabattant un chapeau sur son front.

Ulysse, l’automate-jardinier, s’approcha de lui et lui arrosa les pieds. Armand bondit, tout à fait réveillé, et s’enfuit dans la maison en grommelant.

— Vous pensez qu’ils vont bien ? lança Dimitri après un long silence.

— Si on se fie aux journaux, on dirait bien que oui. Vous avez peur pour Lysandre ? répondit-elle en devinant ce qui le préoccupait.

— On ne se refait pas. J’aurai peur pour lui toute ma vie. Et vous ?

Il avait les traits fatigués. Regrettait-il sa décision d’aider son frère à prendre le pouvoir ?

— Moi, quoi ? demanda Bérénice en ouvrant un œil.

— Avez-vous peur pour eux ?

— Je ne peux pas vraiment m’en empêcher, mais s’il y a une personne sur laquelle j’ai appris à compter, c’est bien Héloïse. Il faut avoir confiance en elle. Et puis il y a Pierre…d’ailleurs, quelles sont vos relations avec lui ? Je n’arrive pas à comprendre.

— Pierre ? fit Dimitri dans un rire. Après la mort de mes parents, j’ai fui Paris.  J’ai envoyé Lysandre à Marseille, à l’abri, puis j’ai voyagé. C’est en Grèce que j’ai rencontré Pierre. On était tous les deux matelots sur le même navire. On avait le même âge, la même envie de ne pas remuer le passé. Lorsque j’ai voulu revenir, je lui ai proposé de s’occuper de mon frère. En rencontrant Lysandre, il a vu le meilleur des frères Coeurderoy.

— Qu’est-ce qui vous fait penser cela ? demanda-t-elle en voyant avec quel sérieux Dimitri avait asséné cette dernière phrase.

— Je pense qu’il m’en veut, parce que j’ai fui là où Lysandre a décidé de poursuivre le combat. C’est facile d’aimer Lysandre, c’est un lion.

— Ah, je vois. Dans chaque famille il y a un lion…et l’autre. Je fais également partie de cette deuxième catégorie.

— Vous ? La fille chérie d’Antoine Savary ?

— Justement, mon père était le lion. Moi, je n’ai aucun talent particulier, si ce n’est celui de retrouver mon chemin. Je suis donc devenue géographe. Impossible d’être à la fois lion et géographe.

— Comment cela ? fit Dimitri, peu sûr de suivre.

— Être le lion, c’est facile ! Un lion suit une ligne toute tracée, sûr de ses valeurs, prêt à mourir pour ses convictions. Mais un géographe ne fonctionne pas ainsi ! Il sait qu’il n’existe pas une route à suivre, mais une infinie de possibilités. Il est pétrifié à l’idée de se dire « ai-je seulement pris le bon chemin ? ».

— C’est le destin des premiers nés…Nous ne sommes jamais sûrs de nous.

Dimitri était depuis longtemps allé se coucher que Bérénice profitait encore de la douceur du soir. Elle adorait ce jardinet qui rendait Paris un peu plus respirable. Au loin, elle entendait les sirènes des policiers, les cris, les rires, les disputes, mais elle n’en faisait pas partie.

 Icare voletait en poussant des cris et Bérénice sentit vibrer leur cœur à l’unisson. Elle adorait ses moments où elle avait l’impression de voir le monde à travers Icare.

Parfois, lorsque les yeux métalliques se posaient sur sa silhouette, elle se voyait au travers d’Icare, comme s’il l’invitait à prendre de la hauteur.

Ulysse, l’automate-jardinier, progressait dans sa direction, avec une lenteur maladive.  Chacun de ses pas lui demandait un effort considérable et jamais Bérénice n’avait vu quelque chose d’aussi fragile et immense à la fois. Le bruit du métal que faisait chacun de ses gestes résonnait comme un cri de douleur.

Une fois arrivé près de la table, il se tourna vers Bérénice qui se figea. Pendant quelques secondes, il ne bougea pas, puis attrapa fermement l’exocarte. Bérénice plongea sur lui pour l’arrêter, mais il la maitrisa avec une agilité nouvelle et terrifiante. Toujours calme, Ulysse la poussa de nouveau contre le dossier de sa chaise, tandis que Bérénice ne savait toujours pas si elle devait appeler à l’aide ou si l’automate allait reprendre son flegme habituel.

Comme poussé par un ordre mystérieux, Ulysse posa l’exocarte non pas sous les yeux de Bérénice, mais sur le rebord de la table vers le jardin. Il se posta derrière elle et l’invita, de ses mains lourdes de géant, à glisser ses yeux au même niveau que la carte. Enfin, il reprit sa route vers le bosquet.

Bérénice n’osait relever la tête de peur de voir Dimitri et Armand, hilares, à la fenêtre. La scène lui semblait quasiment mystique, comme si, à la lumière du clair de lune, la nature et les automates reprenaient leur indépendance. Les mouvements d’Icare interpellèrent Bérénice, le nez sur l’exocarte. Il ne cessait de plonger vers le sol, remonter vers l’arbre ou le muret, et replonger de nouveau sur le sol.

Encore et encore.

 Ce que Bérénice avait pris pour un amusement était en fait davantage un motif, une chorégraphie. Doucement, elle enfila les lunettes de Dimitri.

À présent, Bérénice avait l’habitude de voir apparaitre la maquette réduite de Paris. Elle s’était rendu compte que cette carte changeait d’échelle avec une facilité déconcertante. Sa seule limite était la présence de murs. Avec Dimitri, ils l’avaient testée : dans un salon comme dans un placard à balais, la carte augmentait ou se réduisait à l’infini.

Dans le jardin, la carte paraissait encore plus irréelle et Bérénice fascinée, ne pouvait que constater que son hypothèse était vraie. Icare, avec une régularité peu naturelle, plongeait toujours au même endroit, toujours sur le même bâtiment, que seule Bérénice percevait. C’était comme s’il avait su exactement où se matérialiseraient les différentes composantes de la maquette. Bérénice se releva brusquement et se précipita vers la maison.

En courant, elle aperçut Armand assoupi dans le salon et se précipita vers les escaliers. Elle prit à peine le temps de taper à la porte de Dimitri, qu’elle se précipita vers la forme cachée sous les draps :

— Dimitri ! Dimitri ! Réveillez-vous ! fit-elle en le secouant.

— Non ! répondit-il vivement en se retournant et en l’ignorant.

Bérénice recula, surprise, s’arrêta un instant et reprit encore plus vivement jusqu’à ce que Dimitri ne cède.

— J’ai résolu le secret de l’exocarte ! Je sais où se trouve la cachette de mon père.

Il écarquilla ses yeux ensommeillés et murmura :

— Où ?

— Aux Invalides, où se trouve le tombeau de vos parents ! Allons-y ! s’exclama Bérénice en le tirant hors du lit.

— Quelle heure est-il ?

Elle s’arrêta et consulta sa montre.

— Presque quatre heures du matin.

— Dans ce cas, je vais me recoucher, si vous permettez.

— Pourquoi ? lança Bérénice. Son cœur battait si vite, son excitation était si palpable qu’elle en oubliait de formuler des phrases.

— Parce que je suis fatigué de pénétrer dans des bâtiments illégalement à des heures indécentes. Femme, vous êtes inarrêtable, mais moi j’ai besoin de dormir.

— Oh ! souffla Bérénice, alors que Dimitri se recouchait dans son pyjama rouge et jaune, sans lui accorder un regard.

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Fannie
Posté le 03/02/2021
Dans la situation actuelle, c’est logique que Bérénice soit hébergée par Dimitri. Mais maintenant que la chambre cachée a été découverte par l’ennemi, j’imagine que ce n’est plus qu’une chambre comme les autres. Dimitri est suivi et nos amis devront constamment être sur le qui-vive parce qu’une nouvelle perquisition pourrait leur tomber dessus à tout moment.
La géographie de l’âme est un concept intéressant, mais il me semble que justement, c’est une chose invisible et impossible à localiser, à moins que les anciens habiles aient inventé une sorte de processeur connecté à divers détecteurs, dont une caméra et un micro, ce qui impliquerait une technologie difficilement imaginable à l’époque. Si ces emblèmes ne sont pas dotés de vie ni de magie, ça ne peut être qu’une forme d’intelligence artificielle très élaborée, probablement plus que ce qui existe de nos jours.
Qu’en est-il du fameux journal illégal ? Va-t-il poursuivre ses activités ? Si un jour, il y a une vraie fouille de la maison de Dimitri, ils trouveront bien les machines à écrire et les papiers. C’est quand même étonnant qu’il n’y ait pas d’espaces dissimulés, accessibles par des trappes ou des portes invisibles dans cette maison d’habile.
Coquilles et remarques :
Si j’ai bien compté, il y a 17 incises avec le verbe « fit » dans ce chapitre.
— C’est Decas ! Il fallait bien que cela arrive. Nous avons encore un peu de temps, affirma-t-il. Cachez-vous tous dans la chambre sous le rideau. Héloïse, Célestin, prenez avec vous, vos journalistes et vos fichus journaux. [Le verbe « affirma-t-il » ne convient pas à tout son discours. Je propose « lança-t-il ». / Pas de virgule avant « vos journalistes ».]
— Ouvrez monsieur Coeurderoy, vous cachez une fugitive ! [Virgule avant « monsieur ».]
— les bras croulant sous le poids d’une machine à écrire et plusieurs feuillets de tracts [On ne peut pas dire que ces quelques feuillets modifient le poids de la machine ; je propose « couverte de feuillets » ou « de tracts » (« feuillets de tracts » me semble redondant).]
— Avant qu’elle n’ait pu comprendre, Bérénice sentit le souffle d’un énorme coup la projeter vers l’avant. [Avant qu’elle ait ; le « n’ » explétif ne me semble pas pertinent. / Je ne comprends pas ce que peut être ce « souffle d’un énorme coup ».]
— Elle serait tombée, entrainée par le poids de la machine à écrire si Léopold ne l’avait pas attrapée [Il faudrait placer « entrainée par le poids de la machine à écrire » entre deux virgules.]
— où se trouvaient déjà Célestin, Gabrielle, Héloïse et Armand et quatre journalistes. [Il faut remplacer le premier « et » par une virgule.]
— Un doigt sur la bouche pour les intimer au silence, Héloïse récupéra les machines [pour leur intimer le silence]
— Bientôt, retentirent des pas précipités dans l’escalier et une voix donna des ordres [Pas de virgule après « Bientôt » ; il y a inversion du sujet.]
— Oscar, l’homme de main de Harcourt. [Je ne sais pas si tu considères le « H » du nom Harcourt comme muet ou aspiré ; il faut décider une fois pour toutes et ajouter ou enlever les éventuelles élisions.]
— Avant que Dimitri n’ait pu répondre, Oscar s’écria à l’adresse des policiers [Le « n’ » explétif ne me semble pas pertinent.]
— Mettez-moi cette maison sens dessus-dessous s’il le faut [sens dessus dessous  ; sans trait d’union]
— Elle se releva, prit un stylo sur le bureau, un tract avec la tête de l’empereur surmontée d’un bonnet d’âne, et écrit [écrivit ; passé simple]
— Ce n’était qu’une question de temps avant que le rideau invisible par un froissement ou une vibration quelconque ne dévoile la porte cachée. [La tournure est étrange ; je propose : « avant que le rideau invisible, mu par un froissement ou une vibration quelconque, ne dévoile la porte cachée ». / N.B. « mu » est la graphie rectifiée. D’ailleurs, le rideau lui-même n’est pas invisible (autrement il ne cacherait rien) mais plutôt indécelable, indiscernable. Il faudrait l’appeler « rideau d’invisibilité » (ce qui rappelle la cape dans Harry Potter) ou « de camouflage ».]
— Douloureusement accrochés au drap, ils se laissèrent porter dans les airs, Icare pour seul parachute. [Je dirais plutôt « dans les airs avec Icare comme seul parachute ».]
— Bérénice crut entendre un bruit, mais ne fut pas sûre de l’atterrissage. [La graphie rectifiée est « sure ».]
— Ce ne fut seulement que lorsqu’Icare pointa le bout de son bec [Il faut choisir entre « Ce ne fut que lorsqu’Icare » et « Ce fut seulement lorsqu’Icare ».]
— Les deux hommes n’étaient pas sur la même longueur d’ondes [longueur d’onde ; au singulier]
— Ceux qui restent… On continue ! [Minuscule à « on ».]
— Elles se serrèrent l’une contre l’autre pour éviter qu’en ne touchant le mur [qu’en touchant ; « ne » est en trop]
— Oscar hurla, tandis que Léopold jouait la comédie à force de « Dimitri, quel est votre ami ? Mon cher monsieur, en voilà des manières de réveiller un homme ! J’ai tué pour moins que cela ! » [« à force de » ne convient pas ici ; je propose « en disant » ou « en s’écriant » / je dirais plutôt « Dimitri, qui est votre ami ? »]
— Bérénice toucha du bout des pieds le sol et soupira de bonheur [« toucha le sol du bout des pieds » serait plus naturel]
— même dans l’adversité la sœur Loiseaux ne se laissait pas aller à un peu de sympathie. [Je mettrais une virgule après « adversité ».]
— Un fois qu’on se sera débarrassés de ce vieux fourbe qui nous sert d’empereur, je me charge personnellement de vous faire intégrer l’armée. [Une fois / je me chargerai (concordance des temps).]
— Lysandre, tu ferais mieux de quitter Paris de suite ! [tout de suite]
— Nous prendrons le premier train pour le Nord cet après-midi, répondit Héloïse. / Pourquoi le nord ? demanda Bérénice. [« Nord » les deux fois : c’est une région et il n’y a pas de complément de nom.]
— J’ai de l’argent ne t’inquiète pas. [Virgule après « de l’argent ».]
— Bérénice jeta un coup d’œil à Dimitri qui avait tout entendu de leur discussion et lui lança un hochement de tête franc, avant de retourner à sa conversation avec Ariane. [Ce n’est pas clair : Je propose : « Dimitri qui avait tout entendu de leur discussion et qui lui lança un hochement de tête franc avant de retourner à sa conversation avec Ariane ».]
— Bérénice, outrée, chuchotait à Armand [chuchota]
— Des automates en or, des horloges raffinées, des animaux mécaniques…, énuméra Bérénice. [Il ne faut pas mettre la virgule, en principe ; on la met seulement si les points de suspension remplacent un mot ou groupe de mots.]
— Exactement ! Les animaux mécaniques, la coupa Dimitri. [Toujours ce même problème de COD. Je propose « interjeta Dimitri »]
— Regardez Ulysse, notre jardinier, n’est pas capable d’avancer sans se prendre un arbre. [La phrase est bancale. Je propose : « Regardez Ulysse, notre jardinier : il n’est pas capable d’avancer ».]
— et avant que Dimitri n’ait pu parler, elle expliqua [Le « n’ » explétif ne me paraît pas pertinent.]
— Vous avez vu l’empereur ? la coupa Armand, catastrophé. [Toujours ce même problème de COD. Je propose simplement « coupa Armand ».]
— Cette nouvelle fut accueillie par un silence abasourdi, avant que Armand ne souffle [qu’Armand]
— Voilà pourquoi Dimitri avait détourné le regard, lorsque Lysandre avait parlé de leur emblème durant la réunion. [Pas de virgule avant « lorsque ».]
— Armand se laissa tomber sur une pile de livres ; celle-ci vacilla dangereusement et se stabilisa. [Je propose : « celle-ci vacilla dangereusement avant de se stabiliser ».]
— Il se tortilla sur le Guide à usage de l’apprenti Habile par Imbert Brone jusqu’à être confortable et reprit [Dans ce sens, « être confortable » est un barbarisme ; je propose : « Il se tortilla (...) pour trouver une position confortable et reprit ». Voir ici : http://www.academie-francaise.fr/etre-confortable-au-sens-de-se-sentir-laise]
— Sans argent ? Sans armées ? [Sans armée]
— Icare est capable d’une grande force, peut attaquer, transpercer les métaux les plus épais. [L’adjectif « capable » n’est pas adéquat ici et la phrase est un peu bancale. Je propose : Icare est pourvu d’une grande force ; il peut attaquer (...) ».]
— Il est doté d’une vraie intelligence et anticipe vos besoins Bérénice. [Virgule avant « Bérénice ».]
— il doit avoir l’emblème le plus puissant qu’il existe. [Je dirais « qui existe ».]
— On parle d’une « géographie de l’âme » expliqua Armand. [Virgule avant l’incise.]
— Des générations d’Habiles ont essayé de décrypter les mystères qui entourent les emblèmes [de percer les mystères ; le verbe « décrypter » n’existait pas]
— Donc on sait à la porte de qui frapper pour en trouver, non ? suggéra Bérénice. [« Donc on sait à quelle porte frapper » serait plus fluide.]
— Tandis qu’ils couraient à travers toute la France, Bérénice au contraire, se rendit compte [Il faudrait placer « au contraire » entre deux virgules.]
— qu’elle n’avait jamais aussi peu bougé de sa vie. / Elle se plaisait dans cette nouvelle vie [Répétition de « vie ». Tu peux enlever « de sa vie » ou le remplacer par « de toute son existence ».]
— Une fois travestie de l’uniforme des Habiles, les lunettes de Dimitri sur le nez, elle était méconnaissable. [Je ne crois pas qu’on puisse dire « travesti de qqch » ; je propose « Une fois travestie en habile, les lunettes de Dimitri sur le nez ».]
— Mais le temps s’amenuisait et si Lysandre gagnait chaque jour un peu plus en popularité [On ne dit pas « s’amenuiser » pour le temps. Le temps passe, file, presse, le temps qui reste diminue, il reste de moins en moins de temps… Il faut puiser dans ces expressions.]
— Ces derniers jours, ils étaient tellement accaparés par leurs recherches, que Bérénice avait fait tomber l’exocarte [Pas de virgule avant « que ».]
— Il sait qu’il n’existe pas une route à suivre, mais une infinie de possibilités [« une infinité de possibilités » ou « un nombre infini de possibilités »]
— Elle adorait ses moments où elle avait l’impression de voir le monde à travers Icare [ces moments ; ceux-là, pas les siens / tu as déjà employé le verbe « adorer » à propos du jardin.]
— Les mouvements d’Icare interpellèrent Bérénice, le nez sur l’exocarte. [J’ai trois reproches. D’abord la syntaxe : ce ne sont pas les mouvements qui ont le nez sur l’exocarte. Deuxièmement, si elle est toujours assise sur sa chaise, elle n’a pas le nez sur la carte. Troisièmement, dans ce sens, « interpeller » (« interpeler » selon la graphie rectifiée) est une impropriété. Voir ici : http://academie-francaise.fr/interpeller. Je propose quelque chose comme « Les mouvements d’Icare attirèrent l’attention de Bérénice alors qu’elle avait le regard fixé sur l’exocarte » ou « Alors que Bérénice examinait l’exocarte, les mouvements d’Icare attirèrent son attention ».]
— Dans le jardin, la carte paraissait encore plus irréelle et Bérénice fascinée, ne pouvait que constater que son hypothèse était vraie. [Il faudrait placer « fascinée » entre deux virgules.]
— toujours sur le même bâtiment, que seule Bérénice percevait. [Je ne mettrais pas de virgule après « bâtiment ».]
— Bérénice se releva brusquement et se précipita vers la maison / elle aperçut Armand assoupi dans le salon et se précipita vers les escaliers. / Elle prit à peine le temps de taper à la porte de Dimitri, qu’elle se précipita vers la forme cachée [Il y a trois fois « se précipita ». / La tournure « qu’elle se précipita » ne fonctionne pas ici ; je propose : « Elle prit à peine le temps de taper à la porte de Dimitri avant de se précipiter vers la forme cachée ».]
— et reprit encore plus vivement jusqu’à ce que Dimitri ne cède. [La conjonction « jusqu’à ce que » ne justifie pas l’emploi du « ne » explétif.]
— Femme, vous êtes inarrêtable, mais moi j’ai besoin de dormir. [Virgule après « moi ». / Le mot « inarrêtable » est d’apparition récente, probablement inventé par un journaliste sportif, et il ne figure pas dans les dictionnaires. Je propose « inlassable », « infatigable », « indomptable » « irréductible » ou une périphrase : « Femme, rien ne peut vous arrêter ».]
— Oh ! souffla Bérénice, alors que Dimitri se recouchait dans son pyjama rouge et jaune, sans lui accorder un regard. [Rouge et jaune : les couleurs de Genève (huhu).]
Luna
Posté le 23/12/2020
Encore un très chouette chapitre ! L'action retombe un peu mais c'est bienvenu car cela nous permet de souffler un peu. Et c'était nécessaire pour nos héros de prendre le temps de réfléchir. J'ai beaucoup aimé les réflexions des personnages dans cette deuxième partie, notamment ce qui a trait à la géographie de l'âme (c'est tellement bien trouvé !). Et la réaction de Dimitri à la fin ha ha ! Décidément je l'adore lui <3

Pour ma part j'ai plutôt bien réussi à visualiser la scène avec l'exocarte où Bérénice comprend enfin il faut aller chercher grâce à Ulysse.

Bref, rien de plus à ajouter, je n'ai qu'une envie, poursuivre ma lecture ;)
Alice_Lath
Posté le 29/04/2020
Hahahaha, je compatis tellement avec Dimitri pour le coup, j'aurais réagi exactement pareil à sa place. En tout cas, une piste, enfin! Je me demande d'où provient cette part de l'âme chez les emblèmes en tout cas, je suis toute curieuse à cette idée. Un algorithme? Un mécanisme? Et le pauvre Ulysse, ça a beau être un robot dénué de tout état d'âme, il me fait de la peine à se traîner comme ça, surtout pour jardiner, ça doit être un sacré cauchemar pour tailler les haies.
Arabella
Posté le 30/04/2020
Et bien Alice tu es redoutable ! Tu progresses à une vitesse folle (et de bon matin en plus !) Je n'en dis pas plus sur la part d'âme dans les emblèmes, tu es à 2 chapitres de le découvrir. j'espère que ce sera à la hauteur de ton imagination. Héhé en tout cas, sans que tu ne le saches, je te vole des idées que tu distilles dans tes commentaires en faisant des suppositions (ça m'inspire pour le tome 2) et pour Ulysse...héhé j'avoue m'être inspiré des créatures du chateau dans le ciel...C'est comme ça que je l'imagine.
Rachael
Posté le 12/04/2020
Oh, je sens une nouvelle expédition pour trouver les secrets du père de bérénice… En attendant, ce chapitre nous permet de souffler un peu, tout en faisant avancer l’histoire. Il faut donc un emblème à l’Empereur (le futur…) et Dimitri aimerait bien réussir dans cette entreprise… Je ne suis toujours pas très sûre de pourquoi les emblèmes sont si importants, puisqu’après tout, l’empereur n’en a pas… Je vois le coté symbolique, plus ou moins, mais le côté « utilitaire » m’échappe toujours.

détails
tous avaient déserté la maison. Armand et Bérénice essayaient de garder le rythme, tandis que Dimitri gravissait les marches deux par deux, poussé par l’excitation : je ne comprends pas bien. Ils sont où ? dans la maison ? mais tu viens de dire que tous l’avaient désertée…
Bérénice évita un vase en mille morceaux sur le sol : une virgule après vase
un cadre bougé par un policier : bougé, c’est très vague
comme une de ces gargouilles qui ornaient les cathédrales : qui ornent ? (présent de caractérisation)
Et un objet extraordinaire, de majestueux ou bien de rare ? pourquoi les « de » ?
Armand fit quelques pas en arrière et se laissa tomber sur une pile de livres, celle-ci vacilla dangereusement et se stabilisa. Un point ou un point virgule avant celle-ci ?
on ne peut définitivement pas utiliser des rubis pour un emblème : angliscisme (definitely). Assurément, vraiment ?
Bérénice s’était surprise à retrouver : avait été surprise de retrouver ? (s’était surprise, ça n’a pas le même sens, cela signifierait qu’elle fait les choses inconsciemment, mais ici ce n’est pas elle qui a mis l’exocarte dans la baignoire, si ?)
Bérénice sentit vibrer leurs cœurs à l’unisson : leur cœur ? (ils n’ont ont qu’un chacun)
Le nez sur l’exocarte, le mouvement d’Icare interpella Bérénice : phrase disjointe
cette carte changeait d’échelles : d’échelle
Arabella
Posté le 13/04/2020
coucou Rachael ! merci pour ta lecture et tes notes, je reprends tout cela la semaine prochaine ! Pour l'utilité des emblèmes, je ne peux pas vraiment te répondre. Les derniers chapitres devraient t'offrir une réponse. Si elle n'est pas satisfaisante, n'hésite pas à me le dire, c'est très important ! Je peux juste te dire que les emblèmes sont des armes. Pense bien qu'avec les pierres diorites, ils peuvent se battre. Imagine Lysandre sans emblèmes et les nobles aux côtés de l'empereur avec plein d'emblèmes. C'est un peu comme si Lysandre se battait avec des arcs et des flèches et l'empereur des pistolets. :)
peneplop
Posté le 10/04/2020
Coucou !
J'ai beaucoup aimé ce chapitre ! L'ellipse passe très bien de mon point de vue ! C'était encore bien écrit, très fluide et drôle.
La fin du chapitre m'a fait rire ! Diantre que je comprends Bérénice, j'aurais réveillé tout Paris pour un truc pareils :D
Petit bémol : le passage où Bérénice perce le secret de l'exocarte grâce à Ulysse. J'avoue ne pas avoir compris par quel stratagème ce petit malin de jardinier a réussi à l'aider ! J'ai relu : où met-il la carte ? Il demande à Bérénice de regarder, mais où ? Quoi ? Du coup, moi qui avait trop envie de savoir, je reste sur ma faim :D
Arabella
Posté le 11/04/2020
Coucou Peneplop, je suis contente que ça t'ait plu et que tu aies trouvé ça drôle (toujours l'impression d'être la seule à me marrer). Je vais essayer d'éclaircir le passage avec l'exocarte, c'est difficile à décrire tout cela. En fait, ce qu'il faut comprendre c'est que parfois il n'y a rien à comprendre. Ulysse est une machine et par conséquent, on part du principe qu'il n'a pas sa propre volonté. Mais si on part du principe que les machines ont une âme on comprend qu'Ulysse en fait s'autonomise, il est pris d'une fulgurance. Et la carte en fait est positionnée de sorte d'être un peu plus proche du jardin et un peu moins de Bérénice. Elle est toujours sur la table, mais cela permet de changer de perspective. Voilà voilà, je vais retravailler ça. merci beaucoup et des bisous :)
Gabhany
Posté le 04/04/2020
Haha xD la fin !! J'ai beauoup aimé la réfléxion sur les premiers nés et les lions vs les géographes, j'ai trouvé ça très vrai ! Et le concept de géographie de l'âme est très intéressant ! Ca y est on va avancer dans les recherches et en savoir plus sur ANtoine, j'ai hâte de voir ce que ça va donner !
Arabella
Posté le 06/04/2020
recoucou Gabhany ! Cela me fait plaisir que la discussion t'ait plu, j'avais peur qu'elle soit en trop et j'ai failli l'enlever à la dernière minute. Oui, j'aime beaucoup aussi cette idée de géographie de l'âme. J'espère que la suite prochaine te plaira :) notamment sur les révélations :) des bisous :)
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