Chapitre 29 : Une normalité fragile

Notes de l’auteur : J'aime poser mon ambiance et ceux qui me suivent jusqu'ici, l'ont certainement déjà compris .
J'ai peur de créer parfois trop de lenteur ,donc n'hésitez pas à m'en faire part.

J'aime rythmer mes chapitres entre la normalité et l'action, même si à ce stade, l'action va seulement vraiment démarrer. Je suis actuellement en train de rédiger le chapitre 40, j'approche doucement de la fin de ce tome 1.

Merci de me suivre !

Ayra soupirait de douleur. Installée sur un tapis, Élika appuyait sur sa jambe pour accentuer les flexions.

Elle savait qu’Ayra souffrait, mais il fallait en passer par là si elle voulait se rétablir au plus vite.

— Allez, encore cinq séries… Courage, l’encouragea-t-elle d’une voix ferme mais douce.

— J’en peux plus… Une pause… répondit Ayra d’un ton plaintif.

Elle était sur le dos, les bras écartés tentant vainement d’agripper le sol, comme pour y puiser sa force.

Élika jeta un coup d’œil distrait vers l’extérieur. Elle ignorait les plaintes de sa sœur.

Le vent faisait voler les feuilles aux teintes orangées, et les arbres dansaient au rythme de l’air.

Elle avait choisi le salon pour la rééducation d’Ayra. Vu les derniers ordres de leur père, Aeron, elle préférait l’éloigner pour l’instant de la salle d’entraînement. Il était encore trop tôt. Ayra avait l’humiliation en travers de la gorge.

Élika se demandait comment il avait su. Mira lui avait semblé sincère, et mentir irait à l’encontre de la demande presque désespérée de sa sœur.

Les soupirs d’Ayra la ramenèrent au présent.

— Allez, encore trois, dit-elle en insistant, tout en poussant doucement la jambe d’Ayra vers sa poitrine.

— Les filles, vous avez de la visite.

La voix de Mira résonna dans le salon.

Ayra tourna la tête dans sa direction, les yeux écarquillés.

— Mira, viens me retirer des mains de ce bourreau, s’il te plaît… souffla-t-elle.

Pour toute réponse, Mira lui adressa un sourire amusé.

Élika tourna la tête à son tour. Eren et Kael suivaient leur tante, calmes et silencieux.

_ Effectivement, tu es sadique, Élika. Je ne connaissais pas encore cette facette de toi, lança Eren d’un air amusé.

Kael, les bras croisés, observait la scène en silence, le regard posé sur Ayra sans rien dire.

Mais cela n’arrêta pas Élika pour autant. Elle était déterminée.

- Plus que deux…

Ayra soupira, mais ne protesta pas. La venue de Kael y était sûrement pour quelque chose. Elle avait sa fierté.

- La dernière. Allez… dernier effort, dit Élika en appuyant une dernière fois.

Elle relâcha enfin sa sœur, qui resta allongée sur le dos, les jambes tendues. Elle fixait le plafond, les yeux sombres encore brillants de l’effort.

Comme s’ils avaient compris qu’Ayra avait besoin d’un moment de calme, les garçons gardèrent le silence.

Eren s’installa dans un fauteuil, non loin d’elle, et adressa un clin d’œil à Élika. Elle lui répondit par un sourire bref.

Kael, lui, restait debout, les bras croisés, les yeux rivés sur Ayra. Il avait l’air contrarié.

Quoi que, pensa Élika, ce visage-là semblait faire partie intégrante de son quotidien.

Élika se leva et alla s’installer dans le canapé. Cette heure d’exercice l’avait fatiguée mentalement. Entre la concentration, la précision des mouvements et les plaintes de sa sœur, elle avait donné tout ce qu’elle pouvait.

Elle se tourna vers Eren.

- Alors, on s’ennuyait le jour de son congé ? lança-t-elle avec un sourire retenu.

- On voulait venir vérifier par nous-mêmes la progression d’Ayra, répondit-il en jetant un coup d’œil à la pièce.

- Et puis… on s’attache vite à cette ambiance familiale, ajouta-t-il en riant.

- Avoue plutôt que tu ne peux pas te passer de ma présence ! Le taquina Élika.

- Peut-être un peu… J’ai besoin qu’on me rappelle à l’ordre, de temps en temps.

Cela fit sourire Élika.

Eren, avec son apparence ténébreuse — cheveux noirs, regard sombre, nez droit parfaitement dessiné — contrastait totalement avec son caractère joueur et réfléchi.

Rien à voir avec Uriel.

Lui avait tout de l’ange parfait : clair, élégant, presque intouchable.

Mais avec elle… il se lâchait. Uniquement avec elle.

Il gardait ses distances avec le monde, mais dans leurs moments partagés, il révélait un autre visage. Moins froid. Moins lisse.

Eren, lui, était différent. Plus présent. Plus spontané.

Elle se demanda brièvement comment il allait. Elle l’avait aperçu, parfois, lorsqu’elle échangeait avec son père.

Mais il était toujours resté en retrait, fidèle à son rôle de garde du roi.

Il n’avait rien laissé paraître. Comme il savait si bien le faire.

Mira entra dans le salon avec un grand plateau chargé de boissons et de quelques biscuits — ceux qu’elle adorait préparer. L’odeur sucrée emplit immédiatement la pièce.

Élika se retira de ses pensées.

Mira posa le plateau sur la table basse carrée, en vieux bois poncé.

 

Kael avait enfin bougé. Il s’était approché d’Ayra pour l’aider à se relever.

« Aider » était un bien grand mot. Il l’avait soulevée comme une poupée et l’avait installée, avec une délicatesse presque étonnante, sur le canapé.

Élika fronça les sourcils.

Élika détourna un instant les yeux, comme pour s’épargner ce qu’elle voyait.

Elle n’aimait pas ça.

Ce rapprochement… il risquait d’éloigner Ayra de sa destinée.

Plus elle s’attacherait à lui, moins elle aurait envie d’aller là où elle devait.

Ayra était sensible. Il lui en fallait peu pour devenir nostalgique, et détourner les yeux de ce qu’elle portait en elle.

Élika croisa les bras, s’appuyant contre le dossier du canapé, le regard toujours fixé sur eux.

Quant à Kael… il était trop bourru. Trop abrupt.

Il n’avait rien à voir avec Ayra.

Il était de la même trempe qu’elle.

Elle fronça légèrement les sourcils.

Ils partageaient une dureté, une tension intérieure constante. Ce genre de tempérament, elle savait le lire. Elle en portait chaque jour les traces.

Mais Ayra… elle n’était pas faite pour ça.

Le pire, c’était qu’il semblait se ficher complètement du regard des autres, de l’avis qu’on pouvait avoir sur lui.

Alors si elle venait à s’en mêler…

Élika serra la mâchoire.

Il lui tiendrait tête.

Et Ayra lui en voudrait.

Elle le savait.

Mais elle n’essaierait rien pour améliorer leurs rapports.

Elle ne voyait pas l’intérêt de faire semblant.

Une vibration lui fit perdre le fil de ses pensées.

Elle tourna la tête vers Eren. Il parlait avec Mira, qui lui jeta un regard furtif, lourd de sens.

Ayra, elle, consultait les documents que Kael venait de lui apporter, concentrée, sans paraître troublée.

Kael, lui, lui montrait ce qu’il avait rédigé pour leur travail.

Élika remarqua qu’il serrait un poing, bien qu’il poursuive calmement ses explications.

À un moment, son regard dériva vers le jardin, fugace, avant de revenir sur la page.

La vibration s’intensifia.

Élika se redressa lentement, veillant à ne pas attirer l’attention.

Elle se dirigea à pas mesurés vers la vaste porte-fenêtre.

Comme si de rien n’était, les bras passés dans son dos, Élika arpenta doucement les vitres.

Elle regarda le jardin, les yeux plissés.

Elle sentait une présence. Mais impossible de la localiser.

Ses paupières lui piquaient. Ses pupilles, elles, demandaient à changer.

À redevenir noires.

Pour mieux voir. Pour voir ce que l’œil humain ignore.

Ce qui se tapit.

Ce qui attend.

Une pesanteur s’installa lentement dans son corps.

— Il est là.

Elle en était sûre.

Le Varnak n’était pas loin.

Elle perçut Eren se lever derrière elle.

Il vint se poster à ses côtés.

— Belle étendue… assez reposante.

Elle ne répondit pas tout de suite.

Son regard restait accroché au jardin, cherchant ce qui ne pouvait être vu.

Eren semblait calme, presque absent.

Mais elle sentait sa présence à ses côtés, solide, tendue, comme la sienne.

Une ombre glissa furtivement sous les arbres, loin derrière la rangée de buissons.

Son cœur se serra brièvement, mais elle ne montra rien.

— Oui… très reposante, finit-elle par dire d’une voix neutre.

Elle sentit qu’il tournait légèrement la tête vers elle, sans rien ajouter.

Elle ne croisa pas son regard. Ce n’était pas le moment.

Elle s’obligea simplement à respirer lentement, attendant que l’ombre s’éloigne.

La lumière vacilla. Élika leva brusquement la tête.

Les autres l’imitèrent.

— Oh, ça arrive souvent quand une tempête approche, lança calmement Mira. Le vent est fort aujourd’hui.

Eren observa un instant l’extérieur avant de sourire doucement.

— Pourtant, le ciel est bleu… dit-il en se grattant l’arrière du crâne, intrigué.

— Jeune homme, répliqua Mira avec un rire léger, je connais ma maison. Elle ne se trompe jamais.

Comme pour donner raison à cette dernière, une branche solide vint soudain heurter violemment le carreau. Tout le monde sursauta, les visages crispés.

Élika sentit sa nervosité grimper d’un cran.

Un grondement sourd roula au loin, suivi immédiatement par un éclair intense qui illumina brièvement la pièce.

Mira tourna lentement la tête vers Eren, souriant avec une pointe de triomphe :

— Alors, qu’est-ce que je disais ?

Élika jeta à nouveau un œil à l’extérieur. L’ombre était toujours là, tapie dans les hautes herbes au fond du jardin.

Elle ressentit une nouvelle vibration, plus forte, plus profonde. Comme pour accentuer son tourment, un deuxième éclair illumina brutalement le jardin, projetant brièvement l’ombre en silhouette sombre, inquiétante.

Elle serra les poings. Elle ne pouvait rien faire. Pas maintenant. Pas devant Eren et Kael.

Les faire sortir était exclu.

Cela risquait de les mettre en danger.

Sans avertissement, une pluie soudaine et brutale s’abattit sur la maison, frappant les vitres dans un crépitement assourdissant. Élika sursauta malgré elle, les sens toujours en alerte.

— Ce n’est qu’une petite pluie, rassura doucement Eren, qui avait probablement remarqué son sursaut.

Élika acquiesça silencieusement. Pourtant, elle ne se détendit pas tout à fait.

À travers les gouttes ruisselantes sur les carreaux, son regard restait fixé sur ce jardin soudain devenu hostile. L’ombre avait disparu de sa vue, mais pas de ses sens. Elle savait qu’elle était encore là, invisible, patiente.

Elle respira lentement pour calmer les battements de son cœur.

— Oui… juste une petite pluie, murmura-t-elle presque machinalement.

Mais au fond d’elle, quelque chose lui soufflait qu’il y avait bien plus derrière cet orage soudain.

Quelque chose qui n’avait rien de naturel.

Du bout de la pièce, Mira lui fit signe en désignant une fenêtre restée ouverte, dont le battant claquait violemment sous les assauts du vent.

Élika comprit immédiatement. Elle traversa rapidement le salon, sentant tous les regards converger vers elle.

Arrivée devant l’ouverture, elle hésita une fraction de seconde. Dehors, la pluie s’était intensifiée, le bruit devenait assourdissant, presque oppressant.

Prenant une inspiration discrète, elle saisit fermement le battant et referma la fenêtre d’un geste sec.

Le calme revint aussitôt, presque irréel.

Elle resta immobile un instant, la main toujours agrippée à la poignée froide, le regard perdu sur la vitre ruisselante.

Kael s’était levé et s’était approché lentement de la fenêtre. Les bras croisés, il observait la tempête avec un intérêt manifeste, les sourcils légèrement froncés.

— Impressionnant

Mira, que rien ne semblait jamais ébranler, déclara d’un ton joyeux, trop joyeux au goût d’Élika :

— Eh bien, les garçons, je pense que vous allez devoir rester un moment !

Comme pour lui donner raison, les grondements se firent plus forts.

La lumière vacilla une seconde fois… puis s’éteignit complètement.

— Ah ! fit Ayra, sursautant dans le noir.

- Tu ne vas pas me dire que tu as peur du noir? demanda Kael à Ayra. Sur un ton moqueur.

Le ciel s’était fortement assombrit et été presque noir, la pièce était dans la pénombre totale.

- pas du tout, j’ai juste été surprise !

Elika souria à cette retorque.

Alors que les rires s’éteignaient doucement dans l’obscurité, Élika reporta une dernière fois son regard vers l’extérieur.

À travers la pluie battante, elle distingua un mouvement furtif.

Une ombre… qui glissait entre les hautes herbes, plus loin, comme si elle se repliait.

Elle cligna des yeux, incertaine, mais son cœur, lui, savait.

Il s’éloignait.

Pour l’instant.

Un frisson la quitta. Une tension invisible se relâcha dans ses épaules.

— Ça va ? demanda une voix douce près d’elle.

Eren s’était approché sans bruit.

Il ne la regardait pas directement, mais elle sentait sa présence tout près, calme, stable.

Elle hocha la tête, un peu trop vite peut-être.

— Tu es sûre ?

Elle tourna la tête vers lui. Dans la pénombre, elle distingua son profil éclairé par la lumière grise du dehors.

Ses traits étaient tendus, mais sa voix, elle, était douce. Sincère.

— Je suis juste fatiguée, murmura-t-elle.

Eren ne répondit pas tout de suite. Il resta là, à côté d’elle, dans ce silence qui n’était pas vide, mais rassurant.

Il finit par lui demander, avec son ton blagueur habituel :

— Tu ne vas pas me dire que tu es impressionnée par le tonnerre ? Toi, si parfaitement maîtrisée…

— Je n’ai absolument pas peur du tonnerre, je l’adore même ! répliqua-t-elle, piquée.

Mais sa dernière remarque la fit tiquer.

Elle tourna légèrement la tête vers lui, intriguée.

— Comment ça… “maîtrisée” ? demanda-t-elle, interloquée.

Eren eut un petit sourire, presque gêné cette fois.

— Tu donnes cette impression. D’être toujours en contrôle. De ne jamais laisser rien paraître.

Élika haussa un sourcil, étonnée. Ce n’était pas souvent qu’on la décrivait ainsi. Et venant d’Eren… cela avait un goût étrange, presque personnel.

Élika haussa un sourcil, un peu déstabilisée.

— Je le sais, finit-elle par dire. Je suis comme ça.

Mais c’est… rare qu’on me le fasse remarquer.

Elle s’interrompit, comme surprise par sa propre sincérité.

Eren, lui, la regardait toujours sans insister, le sourire léger mais les yeux attentifs.

— Tu sais, reprit-il doucement, c’est pas un reproche. Juste… une observation.

Parfois, c’est bien d’avoir quelqu’un pour voir derrière ce qu’on contrôle.

Cette remarque la toucha plus qu’elle ne voulait l’admettre.

Elle détourna le regard, fixant les vitres ruisselantes, là où l’ombre avait disparu quelques minutes plus tôt.

— Peut-être. souffla-t-elle.

Un silence s’installa entre eux. Mais ce n’était pas un de ces silences gênants.

C’était… confortable. Calme. Presque nécessaire.

Eren baissa un instant les yeux, puis ajouta, plus bas :

— Je trouve ça… admirable, tu sais. Ce calme que tu gardes. Même quand ça hurle autour de toi.

Elle ne répondit pas tout de suite. Son cœur battait un peu plus fort, sans qu’elle comprenne vraiment pourquoi.

Peut-être parce qu’il avait vu juste.

Peut-être parce qu’il ne cherchait pas à la forcer, juste à… comprendre.

Elle détourna les yeux, un sourire en coin lui échappant malgré elle.

— Tu deviens sentimental, fit-elle, moqueuse, pour masquer l’émotion.

Il rit doucement.

— Juste réaliste.

Des pas légers dans le couloir annoncèrent l’arrivée de Mira.

Elle déboula dans la pièce, les bras chargés de bougies en tout genre — certaines hautes et torsadées, d’autres petites et rondes, toutes aussi excentriques les unes que les autres.

— Je refuse qu’on passe la soirée dans le noir comme au Moyen Âge sans au moins un peu de charme ! lança-t-elle, ravie.

Élika recula d’un pas, le temps qu’elle pose tout sur la table.

— Bon, on va mettre un peu d’ambiance, hein. Qui m’aide à les allumer ?

Le moment était passé. La pièce se réchauffait doucement sous la lumière tremblotante des premières flammes. Le calme était revenu… en apparence.

Comme si l’obscurité avait attiré tout le monde, le reste du groupe finit par entrer dans la pièce.

Élenor râlait déjà :

— Super, coupée en plein élan artistique...

Riven, lui, avait son carnet à la main, fermé avec frustration.

— J’étais dans un passage important de mon recueil.

Dahlia, au contraire, paraissait émerveillée par l’atmosphère douce et tamisée que les bougies diffusaient.

Lucas, fidèle à lui-même, grogna en s’installant :

— Génial. Et en plus elles sont parfumées. J’ai signé pour un club de méditation ou quoi ?

Tous vinrent s’installer dans le grand canapé d’angle, chacun à sa manière, ramenant une chaleur humaine diffuse dans la pénombre.

Élika fit la moue en remarquant que Kael s’était aussitôt réinstallé près d’Ayra.

Comme s’il voulait s’assurer que personne ne prenne cette place avant lui.

Comme si cela allait de soi.

Eren, qui n’avait rien manqué de son regard, lui donna une légère tape sur l’épaule.

Un geste simple, sans un mot, mais qui voulait dire : Ça ira.

Il accompagna ce contact d’un petit sourire, de ceux qu’il avait le don de glisser au bon moment. Celui-là était pour elle.

Le contact de sa main avait laissé un picotement sur sa peau.

Une sensation étrange, difficile à identifier.

Ni désagréable, ni tout à fait claire.

Mira, probablement décidée à animer un peu l’ambiance, lança joyeusement :

— Et si on chantait tous ensemble ?

Une vague de protestations s’éleva aussitôt dans la pièce.

Élika leva les yeux au ciel, amusée malgré elle.

Son regard croisa celui de Kael, qui, assis près d’Ayra, affichait un sourire en coin.

Amusé, lui aussi. Presque malgré lui.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

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