Cette impression d’être coincé dans un mixeur, tourbillonnant dans le néant sans pouvoir prononcer le moindre son, n’était pas étrangère à Thalion. Il reconnut Telepvri, le sortilège de magie noire créant ce portail. Aidé par les ombres, il l’avait utilisé pour fuir Eris avec Camille, se déportant dans les montagnes. Privé d’air, Thalion asphyxiait en s’efforçant d’endurer les supplications de ses poumons jusqu’à ce que le portail se réouvre. Après de longues secondes d’agonie, les ténèbres le recrachèrent finalement. Thalion heurta de plein fouet un sol dur et froid. Malgré le choc qui lui arracha un geignement, l’air qui envahissait ses poumons désespérés le plongeait dans un intense soulagement. Même si ce n’était pas la première fois, l’expérience restait effrayante.
Thalion se releva, vacillant, et essuya la terre sur son visage. Il avait échoué au milieu de la forêt. Autour de lui, des arbres engloutis par les ténèbres de la nuit l’encerclaient. Seul le ciel étoilé perceptible à travers la cime des arbres déshabillés de leurs feuilles le sauvait de l’obscurité. Thalion n’avait aucune idée de son emplacement sur l’île, il était complètement isolé.
— Cette impression de sombrer n’est-elle pas fabuleuse ?
Thalion se retourna vivement au son de cette voix d’outre-tombe. Le portail avait disparu, laissant place à un serpent dardant son regard écarlate sur lui. Le jeune homme recula pour mettre le plus de distance possible avec cette créature, refoulant tant bien que mal la peur qui s’emparait de lui.
Le serpent pencha la tête sur le côté.
— Tu ne sembles pas de mon avis. Quand tu cesseras de lutter contre ta destinée et que tu accueilleras les Ombres, tu comprendras. Je le sais parce que j’étais comme toi.
— Tu ne me ressembles en rien, Enfant Sanglant, cracha-t-il.
La créature se dressa de toute sa hauteur, et Thalion décela dans ses yeux l’éclat de l’amusement.
— J’aurais aimé me présenter à toi en bonne et due forme, mais déplacer mon corps ici était quelque peu compliqué... Traverser la barrière de l’arbre n’a pas été facile non plus. Sens-toi honoré des efforts que j’ai fournis spécialement pour toi.
Thalion lui aurait ri au nez si la situation n’était pas aussi critique. L’Arbre-monde empêchant toute attaque ou intrusion quel que soit le sortilège utilisé, l’affaiblir était donc le seul moyen pour l’Enfant Sanglant de posséder un corps et d’agir sur l’île de cette façon. Et parmi tous les réceptacles mis à sa disposition, il avait choisi le Nyctoplasme reptilien. Non pas qu’il aurait préféré qu’un des surveillants inconscients ou des élèves endormis soit impliqué mais… il était plus simple d’affronter un humain qu’un serpent.
— L’honneur est tellement immense que je m’en sens indigne. Vraiment, ne te sens pas obligé de t’éterniser ici rien que pour moi…
Le serpent siffla. Thalion ne sut s’il devait l’interpréter comme un rire ou un avertissement.
— Ne sois pas timide. On a beaucoup de choses à se dire.
Les poils de Thalion se hérissèrent. C’était à lui de ne pas s’éterniser, en fin de compte. Il n’était pas téméraire au point de s’imaginer faire le poids. Que son interlocuteur soit réellement le premier corbeau de l’Histoire ou non, il manipulait la magie noire sans aucun scrupule. Thalion était trop faible, pas moins qu’une souris face à un tigre. Et pour sauver sa vie, que faisait une souris face à un prédateur ?
Elle fuyait.
Dans ce genre de cas, Thalion se fichait de paraître lâche. Plus il restait, plus le risque de se faire retourner le cerveau était élevé. Il refusait que tous ses efforts pour tenir bon soient réduits à néant par quelques mots empoisonnés.
Ce fut sans honte qu’il piqua un sprint vers l'obscurité qui engloutissait le bois pour s’y fondre. Sa tentative échoua quand quelque chose attrapa sa cheville. Thalion s’étala par terre pour la deuxième fois, se cognant violemment contre le sol. Sonné par la chute, il mit du temps à comprendre ce qui lui tenait la cheville. En réalisant, il blêmit. Cette couleur blanchâtre, cette forme, cette pression froide et rigide contre sa peau… Était-ce la main d’un squelette qui le retenait ?
— Précisément, confirma Apocryphos. Celle d’un démon, vu les extrémités pointues des doigts. Leurs os ne se décomposent pas et comme cette île est un ancien champ de bataille… Disons que ton ravisseur a de la matière pour te convaincre de rester.
Être face à un nécromancien sur un terrain servant de tombeau pour les démons abattus par les dieux lui donnait vachement plus envie de discuter, tiens.
Avant d’avoir pu trouver un moyen de se libérer, Thalion avait devant lui le visage du serpent. Il était si proche que le maudit pouvait sentir son souffle sur sa peau.
— Si je veux discuter avec toi, alors on discute, siffla-t-il.
Thalion déglutit. Fuir allait s’avérer compliqué. Telepvri empêchait les sorts de localisation de remonter leurs traces. Soit il parvenait à signaler son emplacement d’une façon ou d’une autre, soit il devait tenir bon le temps d’être retrouvé, ce qui risquait de prendre du temps vu la taille de l’île. Dans tous les cas, il ne pouvait pas échapper à la volonté de l’Enfant Sanglant.
— « Discuter » ? Tu ne vas pas plutôt essayer de décortiquer le sort qui retient Apocryphos, comme avait tenté de le faire Eris ?
Le serpent se redressa, éloignant son visage du sien.
— C’est trop tard. Le sort se dégrade, il est incomplet maintenant, ce n’est plus intéressant. Je vais plutôt attendre que tu m’apportes le sortilège toi-même. Tes parents t’ont sûrement laissé de quoi le reconstituer pour t’en débarrasser. Ils n’auraient pas laissé leur fils adoré souffrir toute sa vie à cause d’eux, et encore moins mourir.
Thalion serra les dents. Jamais il ne lui donnerait la possibilité de manipuler la magie divine en plus de la magie noire. Il veillerait à ce que le sort ne tombe entre les mains de personne d’autre que lui-même.
— Donc tu vas rester caché en attendant que je fasse tout le travail ?
Les yeux couleur rubis du serpent étincelèrent.
— Je ne vais pas me fatiguer inutilement. Tu es intelligent et tu as envie de vivre, je sais que tu y arriveras. Tu es le seul à pouvoir trouver ce que tes parents t’ont laissé.
Thalion essaya de ne rien montrer de sa frustration. La position de l’Enfant Sanglant était plus confortable que la sienne. Il était comme un aigle qui attendait le bon moment pour fondre sur sa proie. Rien ne pressait, pour lui, ce qui n’était pas le cas de Thalion. Le point positif, c'était que sa survie lui était essentielle donc il ne chercherait pas à le tuer.
— Si tu ne comptes pas agir pour l’instant, discuter avec moi ne va rien t’apporter. Laisse-moi tranquille, exigea Thalion avec hargne.
Loin de se vexer, le serpent tourna autour de lui, presque amusé.
— Je fais preuve d’indulgence malgré ton insolence, je te fais comprendre que je ne m’en prendrai pas à ta vie, mais tu restes aussi récalcitrant à m’écouter.
— Je ne veux rien de toi, pas même de tes mots.
— Pourtant, je pourrais beaucoup t’apporter. Je suis aussi un corbeau, moi seul peux comprendre ce que tu ressens. D’autant qu’on se ressemble sur de nombreux points…
— Nous n’avons rien à voir, s’obstina Thalion. Et rien ne m’assure de ton identité…
— Effectivement, je pourrais mentir. Tu n’es pas naïf au point de croire aveuglément à ce qu’on te dit, c’est bien. En revanche, si tu tiens autant que ça à avoir des preuves, c’est parce qu’en attendant, tu peux laisser une place au doute. Te persuader que je ne suis pas vraiment comme toi. Mais, au fond, tu perçois ce lien entre nous. Tu me tutoies parce que tu sens cette proximité qui nous unit.
Thalion agrippa l’herbe en gratifiant le serpent d’un regard noir. Il aimerait crever ces yeux pourpres qui tentaient de lire son âme et qui savouraient la grimace fielleuse sur son visage.
— Je te tutoie parce que je ne veux pas te témoigner le moindre respect.
Les pupilles verticales rivées sur lui du serpent se rétractèrent, et sa langue frétilla.
— Tu ne me respectes pas, effectivement, mais tu me crains. Tu empestes la peur.
Thalion détestait cette émotion qui affolait son cœur et lui provoquait des sueurs froides. Elle suintait de son corps, fragilisait son armure, et devenait une faiblesse que l’adversaire pouvait retourner contre lui.
— Mais ce qui t’effraie plus que tout n’est pas ce que je suis ou de quoi je suis capable. C’est d’entendre la vérité, poursuivit l'Enfant Sanglant. Tu as peur que je te confronte à la réalité. Celle à laquelle tu espères d’échapper.
La première réaction de l’adolescent fut de vouloir nier en bloc, mais il se retient. Réfuter aussi agressivement aurait sonné comme une confirmation. Il refusait de lui donner ce plaisir.
Se munissant de toute l’assurance dont il disposait, il répliqua :
— Non. J’ai peur de ta manipulation. Cette réalité dont tu parles ne sera pas la mienne.
Le serpent siffla, le surplombant de toute sa hauteur. Ce son strident n’était pas un simple avertissement. Il pénétra jusque dans les entrailles de Thalion, le glaçant d’épouvante. Pris de panique, il tira désespérément sur sa cheville. Les doigts griffus du squelette lacéraient sa chaire, mais ne le lâchaient pas. Encerclé par le corps écaillé de la créature, il se sentait acculé.
— Tu persistes à t’accrocher à cette illusion et à ignorer ce qui se terre dans ton cœur, se désola son ravisseur. Te rafraîchir la mémoire ne te fera pas de mal.
Une fumée noire et épaisse s’échappa de sa gueule. Thalion n’avait aucune idée de ce qu'il comptait faire et ne voulait pas le découvrir.
— Explom ! cria-t-il sans réfléchir.
Une déflagration heurta le museau pointu du serpent, détonnant bruyamment dans le silence de la nuit. Pris de court par son attaque, il ferma sa bouche, quelque peu hébété. Thalion avait lancé le premier sort qui lui passait par la tête, se concentrant sur le visage du serpent. Cette explosion avait de quoi ravager un visage humain, mais ne lui causa pas le moindre dégât. Les résidus enflammés léchaient sa peau squameuse sans d’autres effets que de l’agacer. Les flammes s’évanouirent, mais pas la colère qui flambait dans ses yeux rouges. Thalion ressentit de nouveau cette pression autour de sa gorge, ce poids sur sa poitrine qui rendait sa respiration laborieuse, mais cela l’encouragea à attaquer sans relâche. Combattre était sa seule option. Quitte à être coincé, autant ne pas lui rendre la tâche facile.
Reprenant du poil de la bête, Thalion s’apprêtait à le mitrailler de sorts non incantés pour plus d’efficacité, et le serpent était prêt à régurgiter sa sombre fumée. Cependant, aucun d’eux n’eut le temps de passer à l’action car quelque chose sortit de l’obscurité du bois et fonça sur l’Enfant Sanglant. Ce ne fut qu’en apercevant le manche noir scintillant se planter dans l’œil du serpent et la paille sombre que Thalion identifia l’objet. Un balai, et pas n’importe lequel : Zéphire. Sans doute s’était-il inquiété en ne le trouvant nulle part ou en remarquant son absence parmi ses amis et était parti à sa recherche. Le bruit de l’explosion avait dû l’alerter alors qu’il se situait à proximité.
Thalion ne saurait décrire le soulagement qui l’envahit. La présence de Zéphire était comme un souffle ravivant la flamme de l’espoir. Avec lui, il pouvait fuir et rejoindre l’académie.
Zéphire se retira de l’œil d’un coup sec. Du sang noir gicla. Le serpent siffla de douleur. Zéphire ne lui laissa pas le temps de s’en remettre et de produire cette sombre fumée, tournoyant autour de lui comme une mouche agaçante et le cognant violemment dès que l’opportunité se présentait. Thalion n’aurait jamais cru assister un jour à un affrontement entre un serpent géant et un balai, mais il ne pouvait pas admirer l’audace de Zéphire plus longtemps. Son balai gagnait du temps pour lui, mais il ne tiendrait pas longtemps face à l’Enfant Sanglant. Thalion refusait qu’il finisse réduit en miettes.
Il porta son attention sur la main squelettique qui le tenait fermement. Avec ses propres mains, il essaya d’écarter les doigts osseux, en vain. Il songea à utiliser un sort pour les détruire, mais sa cheville risquait de subir des dommages. Ne restait plus que la magie divine. Même si cette carcasse était celle d’un démon, c’était malgré tout un mort. Avec Apocryphos à ses côtés, il parviendrait peut-être à le commander, mais il hésitait. Son corps pouvait-il encaisser une nouvelle incantation divine ?
— On n’a pas le temps de s’en soucier ! gronda Apocryphos. Fais plus simple qu’avec les flammes démoniaques et ça devrait passer !
Malheureusement, il avait raison. Il devait essayer tant que l’Enfant Sanglant ne faisait pas attention à lui. Alors il inspira, et se lança :
— « Lâche-moi ! »
Thalion serra des dents, sentant ses veines chauffer comme si de la lave avait remplacé son sang. La magie divine qui circulait dans son corps le brûlait de l’intérieur, aussi vivement qu’un feu qui grignoterait sa chaire. Toutefois, la main résista. Elle trembla comme si elle luttait contre l’ordre.
— Les démons sont naturellement peu enclins à se soumettre, mais je suis le dieu de la mort, et ça reste un cadavre. Recommence avec plus de volonté !
Thalion avait envie de s’arracher la peau tant la chaleur qui l’imprégnait l’étouffait. Il redoutait les conséquences en réessayant, mais il craignait encore plus de perdre Zéphire. De cette peur mêlée à un désir ardent de s’échapper naquit un ordre absolu qui n’acceptait pas l’insubordination :
— « Lâche-moi, maintenant ! »
Une féroce migraine perça son crâne. Il crut défaillir tant la sensation de brûler de l'interieur était douloureuse. Un haut-le-cœur le secoua et il vomit un liquide chaud et sombre qui lui fit craindre que ce ne soit pas qu’une impression. Toutefois, la main squelettique céda. Sa prise se relâcha. La cheville de Thalion était libre. Il se releva, chancelant, en proie aux nausées et aux maux de tête, avec l’unique envie que cette nuit effroyable prenne fin.
Zéphire, en le remarquant debout, délaissa le serpent pour foncer vers lui. Thalion le saisit pour l’enjamber et ils déguerpirent à toute allure sous les sifflements furieux de l’Enfant Sanglant. Pour ne pas se faire rattraper, ils filèrent vers le ciel en espérant que leur poursuivant ne revienne pas à la charge avec une paire d’ailes. Malgré son épuisement et son corps affaibli, Thalion s’accrocha aussi fort que possible au manche tâché de sang pour ne pas perdre l’équilibre et tomber.
Lorsqu’ils dépassèrent la cime des arbres, l’adolescent put enfin se situer sur l’île : il avait été emmené à l’opposé de l’académie, au plus proche de l’entrée de la grotte. Heureusement que Zéphire l’avait rejoint. Sans lui, il n’aurait jamais pu espérer atteindre l’école.
— Pas sûr que t’y arrive, même avec lui, intervint Apocryphos. Il vient quand même de ridiculiser un mage noir… ça n’a pas dû le mettre de bonne humeur.
Raison pour laquelle ils n’avaient pas de temps à perdre. Thalion s’élança vers le château, mais freina brutalement avant qu’un boulet de canon ne les percute. Il fixa l’objet rond et sombre qui volait à toute allure et qui revenait à la charge. Le jeune homme l’évita une seconde fois et, en plissant les yeux, remarqua la traînée de fumée dans son sillage et ses contours flous. Le boulet n’était rien d’autre qu’un amas de fumée compacte qui cherchait à le faire tomber. Un deuxième surgit derrière lui qu’il manqua de justesse. Thalion remarqua sous ses pieds que la forêt s’assombrissait. Les cimes dénudées des arbres se recouvraient progressivement d’une nappe de brouillard opaque.
S’ensuit un dangereux ballet entre Thalion et les projectiles qui tentaient d’entrer en collision avec lui. Ils l’assaillaient, ralentissant sa progression, à défaut de parvenir à provoquer sa chute. Avancer tout en esquivant était compliqué. La situation se corsa quand un troisième boulet s’ajouta à la danse. Chargé de tous les côtés, il lança Prostia fiorté, son sort défensif le plus résistant. Lorsque les masses sombres se fracassèrent contre la protection bleue qui l’entourait, celle-ci devint noire, comme si la fumée l’avait contaminée, avant de se désintégrer. Il n’allait pas tenir longtemps avec ça…
Il s’apprêtait à essuyer un nouvel assaut, mais rien ne vint. Les boulets ne s’étaient pas regénérés, il était seul dans le ciel, avec seulement son sang battant contre ses tympans qui troublait le silence. L’Enfant Sanglant avait abandonné ? Thalion n’y croyait pas. Les sens en alerte, il guettait autour de lui en appréhendant la prochaine attaque, le cœur tambourinant dans sa poitrine. Son attention fut attirée par un mouvement dans les bois. Le brouillard obscur s’agitait, comme les vagues ondoyant à la surface de l’eau, remuant de concert jusqu’à former un tourbillon. Leurs ondulations se firent de plus en plus rapides au point que l’air autour de Thalion était aspiré. À peine eut-il compris ce qui allait se produire qu’il était trop tard : le tourbillon de brouillard se mua en une tornade qui aspirait tout ce qui se trouvait à proximité. Quelques arbres furent déracinés, tournoyant en orbite, et Thalion se sentit glisser vers le cyclone. Horrifié, il s’empressa de s’éloigner, mais Zéphire peinait à progresser à contre-courant. L’air aspiré autour de lui le poussait dans les bras du typhon. Les cheveux plaqués en arrière, Thalion contractait son corps pour ne pas se faire emporter par le vent qui s’intensifiait, serrant si fort le manche de son balai que les jointures de ses mains blanchirent. Hélas, plus il luttait, plus résister devenait difficile et douloureux : ses muscles gémissaient et sa poigne faiblissait. Zéphire se démenait contre le souffle mais il perdait du terrain. Thalion jeta un coup d’œil derrière lui. Dans quelques secondes, ils ne pourraient plus lutter contre l’attraction de la tornade. Le jeune homme fixa son balai en repensant aux effets de la fumée sur Prostesia fiorté. Il n’avait pas à s’inquiéter de sa propre vie puisque son poursuivant avait besoin de lui vivant, mais qu’en était-il de Zéphire ? Allait-il être réduit en poussière au contact de la brume de magie noire ? Thalion préférait encore tomber seul dans la gueule du loup que de voir son acolyte disparaître.
— Zéphire, ne m’en veut pas… murmura-t-il. Poilour !
Il lâcha le manche, et son balai, devenu aussi lourd qu’une enclume, chuta, impuissant. Les balais ne pouvaient pas parler, ce qui n’empêcha pas Thalion de deviner la confusion et l’effroi de Zéphire qui aurait probablement poussé un hurlement déchirant s’il en avait été capable. Le cœur serré, il entendit le bruit des branches casser sous le poids du balai avant de se faire emporter par le vent.