Chapitre 3 : La ville des mouettes

Notes de l’auteur : Vos retours m'encouragent beaucoup, merci infiniment, c'est tout ce dont j'ai besoin en ce moment (=

Ewannaël grogna en sentant une main caresser sa joue. Il n’avait aucune envie de se lever, de délaisser sa couverture. Son corps éreinté autant par les efforts que les émotions des derniers jours, réclamait davantage de sommeil. Il lui fallut pourtant se redresser quand la voix de Jolyn parvint à ses oreilles :

— Ewan, prends ma place. Il faut que je dorme un peu.

En levant les paupières, son époux fut choqué par son visage défait. Jolyn avait de larges cernes, les yeux à peine entrouverts, le menton tombant. Malgré la confiance et la force qu’elle dégageait depuis leur départ, deux jours plus tôt, l’épuisement la guettait. Dès que son époux se leva pour prendre son tour de garde, elle s’effondra sur la place qu’il occupait jusqu’alors. Il ne lui fallut que quelques secondes pour trouver le sommeil. Son souffle régulier devint le repère d’Ewannaël dans l’obscurité. Il pouvait seulement deviner la présence de Faè dans le berceau accroché sur les planches, l’ombre de son frère juste à côté. Le bruit du vent et la lumière des lunes constituaient sa seule compagnie.

Au loin, un soupçon de lumière rouge annonçait l’aurore. Ewannaël s’étonna de cette découverte, qui lui confirmait que Jolyn avait largement excédé la moitié de la nuit. Elle n’avait pas voulu le réveiller, quitte à veiller plus que de raison. Il se promit de rendre la pareille à sa femme. Bientôt, un mouvement au sol l’informa du réveil d’Edenn. Son petit garçon ne tarda pas à le rejoindre tout en se frottant les yeux. À la lueur lunaire, ses yeux émeraude brillaient comme des étoiles. Ewannaël s’accroupit pour l’accueillir dans ses bras, l’embrassa sur le front.

— Tu as bien dormi ?

— C’était mieux à la maison. On arrive quand ?

— Je l’ignore, Edenn. Ça ne devrait plus prendre très longtemps, je sais qu’il y a d’autres villages sur la côte.

— Pourquoi on est partis ?

Avec cette question, les derniers espoirs de cachotterie d’Ewannaël volèrent en éclats. Edenn s’était bien douté que la pêche n’était qu’un prétexte, qu’il arrivait quelque chose d’inhabituel à sa famille. Il réfléchit un instant pour donner la meilleure réponse possible à son fils.

— Eh bien… Il y a des gens au village qui voulaient faire participer Faè à une cérémonie. Nous n’étions pas d’accord alors ils allaient nous forcer. Donc nous sommes partis.

— On reviendra plus à la maison ?

— Non, Edenn. On va aller habiter ailleurs. Mais le plus important, c’est que l’on reste ensemble, d’accord ? Si on est partis, c’est pas que pour Faè, c’est aussi pour toi. On veut que tu puisses grandir dans un endroit où nous serons libres.

— Est-ce que là-bas ce sera comme dans ton histoire ? Le pays où s’alternent la nuit et le jour ?

Ewannaël sourit, impressionné par la mémoire vivace de son fils.

— Je ne sais pas encore. Nous le découvrirons bien assez tôt.

*

À la vérité, la terre où débarquèrent Ewannaël et les siens ressemblait beaucoup à celle d’où ils venaient. Une immensité de neige en pleine fonte, où un petit village constituait la seule trace de vie. Il était plus petit que le leur, mais aussi habité par une majorité de pêcheurs. Un vieux couple les logea pendant deux nuits, permettant à tout le monde de reprendre des forces, en échange de services de couture et menuiserie. À l’aube du troisième jour, Ewannaël osa enfin poser la question qui lui brûlait les lèvres :

— Nous avons quitté notre village, pensez-vous que nous pourrions nous installer ici ?

— Non, il n’y a pas assez de maisons. Nous pouvons vous garder encore ce soir, mais après vous devrez partir.

— Je comprends. Merci de votre hospitalité.

Le lendemain, ils repartirent donc à nouveau, ravitaillés en énergie et en nourriture. Un ciel rose embellit ce nouveau départ, gonfla leurs cœurs d’espoir. Dans leurs esprits, le prochain village serait le bon. Malheureusement, chacune de leur halte ressemblait à la première. Un accueil chaleureux qui ne pouvait durer bien longtemps, les forçant à reprendre la mer. Par bonheur, le temps demeurait au beau fixe et la saison de la pêche appelait des nuits de plus en plus courtes. Cependant, alors qu’ils venaient de repartir d’un cinquième village, le ciel se chargea brusquement de nuages noirs et le vent commença à souffler.

Aussitôt, Ewannaël détacha la voile, craignant qu’elle se déchire. À grands coups de rame, il entreprit de s’éloigner du bord de côte, où les vagues grossissaient à vue d’œil, menaçant de les faire échouer. Comme la pluie tombait, Jolyn demanda à Edenn de s’enfermer avec sa petite sœur dans la cale, et de veiller sur elle en attendant la fin de l’orage. Le garçon acquiesça, conscient de sa responsabilité. Peu après la disparition de son visage, un éclair traversa le ciel. Ce fut le début du cauchemar.

De violentes bourrasques commencèrent à agiter la mer tandis que la pluie redoublait d’intensité. Il n’était plus possible de voir au-delà du bout de la coque, qui commençait à tanguer. Les vagues n’avaient aucun mal à balader la fragile embarcation de droite à gauche, menaçant de la renverser à chaque instant. Sous la menace d’une vague plus haute qui les emporterait, Ewannaël et Jolyn renoncèrent bientôt à l’usage des rames. Ils verrouillèrent la cale pour s’assurer que leurs enfants y demeureraient pendant le reste de la tempête. Puis Jolyn saisit un filet et entreprit de s’accrocher contre le mât avec son mari.

Ewannaël avait déjà vécu plusieurs tempêtes mais jamais il n’avait été aussi terrifié. Chaque vague faisait passer un frisson dans son dos, car elle menaçait la vie de son aimée, de ses enfants. Il cria plusieurs fois à Edenn et Faè de ne pas s’inquiéter mais les hurlements du vent le couvrirent. La pluie ruisselait contre son visage, s’infiltrait dans son manteau et coulait contre sa peau. De temps à autre, l’écume d’une vague plus haute lui éclaboussait le front. Alors qu’il criait à nouveau à destination de ses petits, de l’eau lui entra dans la bouche. Il toussa en se cramponnant encore davantage contre le mât, contre le corps de Jolyn.

À cet instant, au milieu de l’enfer, il repensait à la conversation qui avait précédé le départ. C’était lui qui avait suggéré l’idée de partir en mer pour échapper à l’esprision. Cela était en train de tourner au cauchemar. Personne ne les accueillait, même la mer se montrait inhospitalière. Il avait engagé la vie de toute sa famille pour une perspective illusoire de sécurité, de liberté. Cela, il ne pouvait se le pardonner. Et pourtant, il peinait à regretter son choix. Laisser la vie de Faè en danger sans rien tenter aurait été insupportable. Il n’avait pas eu d’alternative.

Ewannaël sentit la main de Jolyn descendre le long de son bras, cherchant son contact. Il la saisit avec force, entremêlant ses doigts dans les siens. Sa femme les serra avec une vigueur en laquelle il voulut voir la confiance d’un lendemain meilleur. Il ferma les yeux en tentant d’oublier la pluie battante, les remous de l’eau, respira doucement. À cet instant, il crut entendre dans le vacarme un pleur d’enfant et souhaita à l’instant même se détacher pour aller secourir Faè et Edenn. Malheureusement, il ne pouvait rien pour eux. Ouvrir la cale les aurait condamnés à périr emportés par les flots, et lui avec. Il fallait tenir.

 Plusieurs fois, les vagues firent gémir les planches du navire. Les bruits de craquement étaient insupportables à Ewannaël, qui imaginait déjà des trombes d’eau s’engouffrer dans la cale, noyer les siens. Malheureusement, la mer restait bien trop forte pour envisager quoi que ce soit. Il serra davantage la main de Jolyn. Il ne pouvait rien faire d’autre. Il serra, serra, tentant d’imprégner dans ces gestes tout l’amour et l’espoir qu’il voulait transmettre à sa femme.

La nuit tomba, le voilier tint. Peu à peu, les vagues décrurent, les éclairs se turent et la pluie se calma. Sous le choc, Ewannaël et Jolyn mirent plusieurs minutes à se détacher. En dénouant le filet, le pêcheur se sentit lourd, tous ses vêtements étant gorgés d’eau. Sans prendre la peine de les éponger, il se jeta jusqu’à l’ouverture de la cale et l’ouvrit avec précipitation. Par bonheur, l’eau n’avait pénétré que par quantités infimes. Edenn tenait toujours Faè dans ses bras, roulé en boule contre le bord. Son genou et son bras saignaient sous l’impact des chocs contre le plafond de la cale. Les provisions entreposées autour de lui avaient cependant atténué l’effet de la tempête.

Ewannaël entendit avec un soulagement immense le souffle de Faè, qu’il prit aussitôt dans ses bras en la rassurant, lui promettant qu’un tel cauchemar ne se reproduirait plus jamais. Jolyn serra Edenn contre elle en faisant de même. Le petit garçon avait perdu connaissance. Il ne répondit pas aux interrogations inquiètes de ses parents mais sa respiration régulière les rassura. Le voilier n’avait subi que des dommages sommaires, l’eau avait quitté le pont par les ouvertures taillées à l’arrière. Ils s’en tiraient à très bon compte.

Aussi soulagé que sonné, Ewannaël tenait sa fille avec un amour immense. Il sentit des larmes couler sur ses joues et murmura :

— Ma petite, j’ai eu si peur de te perdre.

À ces mots, Faè se réveilla. Jamais Ewannaël n’apprécia autant ses pleurs qu’à cet instant-là. Edenn se réveilla aussi peu après, encore choqué par ce qu’il venait de vivre. Les stimulations de sa mère finirent par lui arracher un sourire, mais ce sourire différait des autres. Il était un peu triste, effacé, le genre de sourire que l’on fait pour rassurer une personne alors qu’on est soi-même terrifié. Rien de plus normal au vu de ce qu’ils venaient de traverser. Cela ne l’empêcha pas de se retrouver au cœur de l’étreinte familiale. Ne pouvant que deviner les visages de ceux qu’il aimait dans la nuit, Ewannaël se réjouit de sentir leurs peaux, d’entendre leurs souffles. Ils vivaient. Tous.

Soudain, Jolyn poussa une exclamation de joie, dispersant les pensées inquiètes de son tendre :

— Là-bas ! Une lumière !

Un regard vers l’arrière confirma la nouvelle à Ewannaël. Une puissante lueur brillait à l’horizon, avec une intensité bien trop grande pour être un feu ou un village. On aurait dit qu’une étoile était venue se poser sur la mer. Le pêcheur reposa sa fille dans des draps pour aller accrocher la voile. Pendant ce temps, Jolyn réinstallait les rames avec l’aide d’un Edenn volontaire. Leurs efforts s’unirent dans une même destination. La lumière. La vie.

*

Ce qu’Ewannaël avait cru une étoile était en fait une immense tour construite sur une île rocheuse. La lumière émanait de son sommet et balayait la côte et la mer. Cette tour avait une jumelle à côté d’elle, éteinte. Poussés par un vent d’est, ils passèrent entre ces deux constructions sans la moindre difficulté. D’innombrables lumières scintillaient sur la côte, signalant une importante présence humaine. Un peu plus loin, la terre prenait du relief. Malgré l’obscurité, on pouvait deviner à la lumière des lunes les silhouettes de montagnes enneigées.

Edenn ouvrit la bouche, admiratif, en découvrant les centaines de navires amarrés au port. S’il l’exprimait moins, Ewannaël était au moins aussi stupéfait. Certains voiliers étaient dix fois plus longs et hauts que le sien. Ils étaient faits d’une étrange matière, lisse et claire. Un ponton de bois permettait d’y accéder depuis la côte. Jolyn dut manœuvrer pour leur frayer un chemin dans ce désordre de coques promenées par les vagues. Ils se glissèrent dans un espace juste assez grand pour eux. Jolyn sauta hors du navire et l’attacha à l’anneau de fer prévu à cet effet.

— Enfin, nous y sommes ! dit-elle. Ce village gigantesque saura nous accueillir !

— Oui, nous y sommes, répéta son mari. Enfin.

Pourtant, il peinait à partager l’enthousiasme de son épouse. La méfiance avait chassé le soulagement, renforcée par l’absence de neige sur la côte. Cet endroit n’avait rien à voir avec les précédents. La multitude de passants traversant le port l’inquiétait. Ewannaël prit Faè dans ses bras et la donna à sa mère, puis aida Edenn à sauter jusqu’au ponton. Ils marchèrent ensemble vers les lumières de la ville. Certains bateaux étaient couverts de marins qui criaient des mots incompréhensibles. Ils croisèrent une femme au crâne rasé qui leur montra sa main en disant :

Tùn nonrak !

Ces mots confirmaient à Ewannaël que sur cette nouvelle terre, les gens parlaient une langue incompréhensible. Stupéfait, il ne sut réagir, se demandant même un instant si la tempête ne l’avait pas rendu fou. Heureusement, Jolyn eut la présence d’esprit de répondre à l’étrangère d’un geste de la main. Puis elle offrit à son époux un regard qui se voulait rassurant. Un instant plus tard, ils posaient le pied sur le port. Tout y était différent.

Ewannaël ne savait où tourner le regard tant il se passait de choses en même temps. La simple sensation du sol pavé dépourvu de neige sous ses bottes aurait suffi à le désorienter mais ce n’était qu’une nouveauté parmi des milliers. Ce qui le surprit le plus fut la présence de nombreuses lumières artificielles, disposées au sommet de grands pylônes de fer. Elles éclairaient des centaines de gens qui marchaient en discutant. En quelques instants, Jolyn et Ewannaël découvrirent plus de nouveaux humains que lors de leurs trente précédentes années. Ces gens étaient vêtus de manteaux de couleurs variées, avaient des pantalons de matières inconnues et portaient des coupes de cheveux originales. Ils allaient par groupes bruyants, ou seuls d’un pas rapide. Aucun d’entre eux ne regarda les nouveaux venus, qui se perdirent dans la foule.

S’il n’avait pas tenu la main d’Edenn, son père se serait bouché les oreilles, oppressé par le vacarme. Cependant, le choc fut peu à peu chassé par la nécessité pressante de trouver de l’aide. La douceur de l’air nocturne ne valait pas la perspective d’une place près d’une cheminée et de draps chauds. Ewannaël avait faim et savait que les siens avaient besoin d’une halte. Il chercha des personnes capables de l’aider. Son regard se porta peu à peu vers les passants à la peau noire. D’abord parce qu’il n’avait jamais vu des personnes avec une couleur de peau différente de la sienne. Ensuite parce que bien que peu nombreux, ils se détachaient du reste de la foule.

Entourés d’hommes en arme, ils portaient des habits aux coutures éblouissantes, des maquillages et coiffures raffinés. L’attention d’Ewannaël s’arrêta sur une mince femme aux cheveux courts qui portait un large manteau de cuir. Les traits de son visage avaient été surlignés par des traits noirs et son teint de peau rosissait au niveau des joues. Ses paupières et ses lèvres étaient couvertes d’une sorte de peinture blanche, de lourds bijoux étaient attachés à ses oreilles. Ewannaël ne pouvait qu’imaginer les heures de travail qui avaient pu permettre un tel résultat. Il n’aurait pu imaginer qu’un être humain puisse accorder tant de soin à son apparence.

En croisant le regard de Jolyn, il comprit qu’elle avait fait la même déduction que lui. Ces gens à la peau noire étaient les chefs de ce village gigantesque. Ils sauraient l’aiguiller. Avec un peu de chance, peut-être même qu’ils parlaient leur langue. Il s’approcha de la femme mince et lui tira l’épaule en la hélant :

— Je suis désolé de vous déranger, mais nous arrivons d’un long voyage. Nous cherchons un endroit où nous reposer et nous nourrir.

Il accompagne ces paroles de gestes pour s’assurer d’être compris. Malheureusement, à sa plus grande surprise, la femme ne lui accorda qu’un bref regard avant de détourner les yeux. L’un de ces suivants repoussa Ewannaël d’un coup de coude dans les côtes. Le pêcheur s’effondra, choqué de cette agression gratuite. Il s’attendait à recevoir de l’aide des personnes alentour mais aucune d’entre elles ne réagit. La femme au manteau de cuir s’éloigna, impunie. Jolyn vint relever son mari sous le regard choqué d’Edenn. C’était la première fois qu’il voyait quelqu’un frapper son père.

— Je crois que la violence est normale ici, grimaça Ewannaël.

— Peut-être ont-ils mal compris ce que tu voulais dire, dit Jolyn. Les gens d’ici ne nous comprennent pas. Allons plutôt vers leurs maisons.

La famille se dirigea donc vers le cœur du port. Une grande fontaine avec une mouette sculpté trônait au milieu de la place, entourée de badauds. Une inscription en lettres d’or ornait l’aile de l’oiseau. Jolyn et Ewannaël n’y prêtèrent pas attention, car là d’où ils venaient, il n’y avait pas d’écriture. Ils apprendraient plus tard que dans la langue de cet étrange pays, ces lettres composaient un mot. Maëlval. La ville des mouettes. 

Pendant qu’ils traversaient la place, le vent avait cessé de souffler. Le brouillard envahissait l’atmosphère, coupant la visibilité. Il n’empêchait cependant pas de deviner les silhouettes de longues tables devant les premières maisons. De nombreuses personnes y mangeaient ou buvaient en conversant. Il y avait des familles, des jeunes gens, des couples. En passant près de l’un d’eux, Ewannaël s’étonna de voir deux objets circulaires remplis d’une nourriture colorée et des gobelets transparents entre eux. Les gens d’ici avaient décidément d’étranges mœurs.

La famille avait si triste mine qu’un passant s’intéressa enfin à eux. Il leur posa une question, bien sûr incompréhensible. Jolyn lui mima sa fatigue et leur envie de manger. Voyant cela, il commença à tourner les talons mais elle l’arrêta pour lui tendre un petit couteau en os de phoque. Un objet qu’elle avait sculpté lors de la saison des pêches précédente qui attisa l’intérêt de l’étranger. Il fit signe à Ewannaël et les siens de l’attendre. Quelques instants plus tard, il revint avec deux miches de pain énormes. Elles fumaient encore et dégageaient une douce senteur. Ewannaël voulut le prendre dans ses bras en signe de gratitude mais l’homme s’écarta en riant. Il caressa les cheveux d’une Faè à moitié endormie avant de tourner les talons.

— Allons trouver refuge dans l’une de ces maisons.

Jolyn acquiesça. Ils marchèrent jusqu’à la porte la plus proche et frappèrent jusqu’à ce qu’une vieille femme se décide enfin à leur ouvrir. Voyant leurs visages défaits et leurs habits sales, elle referma aussitôt la porte. Ewannaël fut pris de colère devant un tel affront : ces gens ne pouvaient ignorer les devoirs de l’hôte. Il s’apprêtait à frapper à nouveau mais Jolyn le retint par la manche :

— Arrête, on va s’attirer des ennuis. Essayons autre part.

La colère se mua en déception puis en résignation à mesure que les refus s’enchaînèrent. Il y eut des cris, des silences, des moqueries, des signes du visage, des regards curieux, mais invariablement, la porte se refermait. Peu à peu Ewannaël comprit qu’à cet endroit, les gens n’avaient pas le devoir de s’accueillir. Cette quête les mena à traverser de longues artères, s’enfonçant toujours plus dans les entrailles de la cité. Le port bondé et bruyant paraissait loin désormais, à présent remplacé par des rues d’une largeur insensée. Sans l’angoisse pressante d’où loger les siens, Ewannaël se serait étonné des engins à deux roues qui les dépassaient à toute vitesse.

Après de nouveaux échecs, Ewannaël, Jolyn et leurs enfants finirent par s’arrêter au coin d’une ruelle sombre pour reprendre leur souffle. La température avait baissé et Edenn frissonnait. Il fallait se rendre à l’évidence : ils ne trouveraient pas d’hôtes pour la nuit. Le père de famille finit par annoncer :

 — Ne bougez pas, je vais chercher la tente.

— Ewan, il est trop tard pour ça. Les enfants sont épuisés, et nous aussi. On a marché longtemps, avec la nuit tu pourrais te perdre. Dormons derrière ce mur, on se serrera sous une couverture. Ça ira.

Son mari voulut rétorquer que c’était hors de question mais il savait que Jolyn avait raison. Ils s’assirent sur le sol froid et procédèrent au partage du pain. Manger fit du bien à tout le monde. Les inquiétudes d’Ewannaël se dissipèrent avec la douceur de la mie sous sa langue, le croquant de la croûte sous ses dents. Après avoir erré comme un fantôme dans cette ville inconnue, il se sentit revivre. Cette énergie lui donna le courage d’aller frapper seul aux portes environnantes. Cinq nouveaux échecs achevèrent de le décourager.

Le cœur serré, regrettant la chaleur de la maison qu’ils avaient bâtie, Ewannaël enroula Faè dans la couverture qu’il avait prise avec lui, accueillit Edenn sous son manteau puis se serra contre Jolyn. Elle lui embrassa le front avant de s’allonger sur le sol sale. Faè pleura à peine avant de sombrer dans le sommeil. Son frère l’imita bientôt. Quant à lui, Ewannaël peina à dormir.

Pour la première fois de sa vie, il laissait sa famille dormir sans un toit. Et cela l’accablait de honte.

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Cléooo
Posté le 01/06/2024
Bonjour :)

Joli chapitre. Je me sens bien en peine pour tes protagoniste à la fin de cette lecture, entre la douleur de quitter son chez soi et la difficulté d'arriver dans un endroit nouveau sans repère. Le fait qu'il y ait la barrière de la langue rend les choses tellement plus difficiles... C'était très bien réalisé.

Au passage, j'ai trouvé que tu avais fait une très belle description de la tempête.

Deux remarques :
"Il était un peu triste, effacé, le genre de sourire que l’on fait pour rassurer une personne alors qu’on est soi-même terrifié." -> j'aime vraiment beaucoup le personnage d'Edenn, que je trouve très touchant.

"Le port bondé et bruant" -> il doit te manquer une lettre.

Voilà pour aujourd'hui !
Edouard PArle
Posté le 06/06/2024
Coucou Cleoo !
En effet, pas beaucoup de choses positives dans ce chapitre et la barrière de la langue est une thématique importante de ce début d'histoire.
" j'aime vraiment beaucoup le personnage d'Edenn, que je trouve très touchant." MErcii, j'aime bien ce passage aussi.
Bien vu, c'est corrigé.
Merci de ton commentaire !
A bientôt !!
Contesse
Posté le 01/06/2024
Helloooo me revoilou !

C'est un plaisir de me replonger dans ton univers si spécial et unique !
On sent vraiment beaucoup l'impuissance d'Ewan et de sa petite famille dans ce chapitre, et on s'inquiète sincèrement pour eux. On sent aussi que tout peut arriver, que tu nous réserves bien des (mauvaises) surprises, et qu'on est pas dans un film américain où tout va se régler parce que les persos vont rencontrer un bon père de famille ou une mémé toute gentille qui fait des confitures ^^ (c'est ultra cliché mais je me comprends) Bref, du coup la tension est vraiment réelle et on s'inquiète VRAIMENT ahah
Cette nouvelle ville ressemble bcp à nos grandes villes modernes avec son élitisme et son dédain pour les personnes en détresse et qui dénotent. Ça attriste autant que ça dégoute. On reconnaît aussi des avancées technologiques qui semblent plus proches des nôtres que de celles que connaissent Ewan et sa famille. On dirait presque qu'ils sont arrivés dans un autre monde, j'ai hâte d'en apprendre plus sur cette terre qu'ils viennent de découvrir ! Est-ce que c'est l'équivalent de notre monde moderne ou pas du tout ?

Quelques petites remarques (des chipotages comme d'hab) :
"Le petit garçon avait perdu connaissance et ne répondit pas aux interrogations inquiètes de ses parents" -> je n'ai pas bien compris pourquoi il avait perdu connaissance ? Ça semble un peu excessif sachant qu'on n'a pas d'autre explication, peut-être une petite précision serait bienvenue :)
"S’il n’avait pas tenu la main d’Edenn, son père se serait bouché les oreilles, oppressé par le vacarme." -> cette phrase me semble bizarrement construite je crois, comme on suit quand même le pdv d'Ewan, cette phrase semble plutôt construite pour décrire le sentiment d'Edenn ce qui fait que ça détonne un peu avec le reste ^^
"Ils apprendraient plus tard que dans la langue de cet étrange pays, ces lettres composaient un mot. Maëlval. La ville des mouettes." --> je trouve ça étrange l'immixtion d'un narrateur omniscient ici ? On suit plutôt le pdv d'Ewan et là on dirait presque une sorte de dieu, d'observateur omniscient qui intervient d'un coup pour révéler quelque chose que personne ne peut savoir ^^
"Peu à peu Ewannaël comprit qu’à cet endroit, les gens n’avaient pas le devoir de s’accueillir." --> je trouve la formulation "s'accueillir" un peu bizarre, comme si quelque part y avait des gens qui s'accueillaient eux-même xD

Voilà voilou j'en ai fini !
C'était comme d'habitude un plaisir, à tout bientôt ;)
Edouard PArle
Posté le 06/06/2024
Coucou Conts !
Quel plaisir de lire tes comms, comme toujours xD
"du coup la tension est vraiment réelle et on s'inquiète VRAIMENT ahah" A raison ahah. Oui, il ne faut pas attendre de deus ex machina^^
En effet, Maëlval a un certain nombre de points commun avec notre monde. On découvrira davantage la ville par la suite...
"je n'ai pas bien compris pourquoi il avait perdu connaissance ? Ça semble un peu excessif sachant qu'on n'a pas d'autre explication" Il vient de passer une tempête enfermé dans une cale sans être attaché donc ça ne me paraît pas si excessif. Peut-être que sa situation pendant la tempête n'est pas claire ?
Hmm en fait, c'est un narrateur omniscient, qui utilise le pdv d'Ewannaël donc ça navigue un peu entre les deux. Je me questionne encore sur les passages omniscients que tu relèves. Certains me paraissent importants, d'autres peut-être dispensables. Je verrai plus tard.
Merci beaucoup de ton retour !
A bientôt (=
Contesse
Posté le 18/06/2024
Hello !
C'est bizarre, je n'ai pas reçu de notification quand t'as répondu à mes coms !
Oui, ben la suite m'a bien prouvé que oui on pouvait être inquiets hein lol x)
J'avoue que je ne sais pas, pour l'évanouissement. L'explication que je pourrais voir c'est s'il s'est cogné ou assommé quelque part ? Mais sinon, juste le fait de vivre une tempête dans une cale, je vois pas comment ça pourrait provoquer un évanouissement ? Ou alors oui, pour certaines personnes particulièrement sensibles à ça... Bon je sais pas j'avoue xD Mais en lisant en tout cas je me suis dit que j'avais sans doute manqué un détail xD
Pour les passages omniscients c'est vraiment à toi de voir pour le coup ! Moi je dirais qu'il faudrait juste être raccord : que l'omniscience apparaisse dès le début et reste tout au fil du récit. Là ce qui m'a choquée, c'est plutôt que ça arrive d'un coup pendant 3 lignes, alors qu'on se croyait dans un pdv interne, c'est plutôt ça ! Mais l'omniscience en soi n'est pas dérangeante !

A bientôt ;)
Emma
Posté le 27/05/2024
Salut Edouard,

Mon Dieu, j'ai beaucoup de peine pour cette gentille famille, tu es sûr que c'est une bonne idée de les faire venir dans un endroit aussi peu bienveillant ? Ce n'est qu'une question rhétorique, mais tout de même j'en ai mal au coeur. J'espère vraiment qu'il vont s'en sortir, qu'ils vont trouver un refuge ou bien repartir sur la mer, pour être accueilli comme ils le mérite.
Je vais continuer de lire, je suis pleine d'espoir.
A bientôt
Edouard PArle
Posté le 06/06/2024
Coucou Emma !
En effet, ce n'est pas le meilleur endroit pour arriver. A moins que... On verra dans les prochains chapitres, espérons que tes espoirs ne seront pas trop déçus.
Merci de ton commentaire !
A bientôt (=
Erzsébet
Posté le 24/05/2024
Hola Eduardo!

Voici mes commentaires préférés où L prof de français se réveille 😊:
On est partis__ on est parti x 2

Chacune ressembla __ peut être plus élégant de mettre ressemblait à la place

Et ne répondit pas __ comme tu as d'abord utilisé un imparfait, mettre ce verbe aussi à l'imparfait serait mieux, je pense.

Personne ne regarda les étrangers qui se perdaient dans la foule: là pareil, choisis : imparfait ou passé simple ?

Bon ben sinon, le chapitre est très intéressant, je trouve qu'il est très actuel et que la société que tu décris ressemble à la nôtre. On clame à tout vent qu'on accueille les étrangers mais dans ma réalité....

Je suis très peinée pour cette famille si attachante et ai hâte de lire la suite !
Je trouve que ne pas s' attarder sur leurs échecs à trouver un refuge dans les villages voisins est une bonne stratégie car ça permet de ne pas embrouiller le lecteur.

Buenas noches !
Edouard PArle
Posté le 06/06/2024
Coucou Erz !
J'ai bien pris tes remarques en compte.
Oui, tu te doutes que ce roman s'inspire pas mal des discours et enjeux de notre propre société sur l'immigration.
Merci de ce retour ! Je trouve aussi que ça apporterait peu de s'attarder sur les villages au vu de ce que je veux raconter ensuite.
Merci et à bientôt !
Gute nacht (=
Saskia
Posté le 09/05/2024
Coucou Edouard, c’est encore moi !
Je n’ai pas pu attendre avant de me jeter sur la suite XD

Ce chapitre est encore une fois très agréable à lire. C’est très immersif et j’avais totalement l’impression d’être aux côtés de la petite famille pendant ses débuts en mer, stressant et fatiguant, puis en pleine tempête à risquer leur vie, et finalement en plein choc des cultures lors de leur arrivée dans la ville des mouettes, malheureusement pas très accueillante. C’est vraiment chouette de les voir aussi soudés, à tout tenter pour s’en sortir malgré les déconvenues.

J’ai un seul reproche à faire : pourquoi on survole aussi vite leur passage dans les villages côtiers ??? Sérieux, à la fin du chapitre précédent, tu nous vends un dangereux voyage vers là-bas. Du coup moi forcément je m’imagine tout plein de trucs. Et puis… rien. A peine deux paragraphes et trois phrases de dialogue pour dire qu’en fait il n’y avait pas la place de les accueillir pour plus de quelques nuits.

Tu n’avais vraiment rien de plus à dire sur cette partie du voyage ? Parce que là ma frustration de lectrice est à son comble ! C’est pas que leur arrivée dans la ville des mouettes est inintéressante, loin de là, mais j’ai eu l’impression que ça arrivait trop vite et qu’il manquait un bout de l’histoire.

Puisque les différents villages ont un fonctionnement similaire et que les villageois semblent trouver naturel de s’accueillir les uns les autres, je suppose qu’ils entretiennent un minimum de contacts entre eux. Que peut-être que la mère d’Ewannaël est en lien avec les caciques d’autres villages ? Lui et Jolyn n’ont-ils pas peur qu’elle envoie des hommes à leurs trousses pour tenter de leur prendre Faè ? Après tout, même si Ewannaël et Jolyn sont désormais considérés comme des traîtres, Faè n’est qu’un bébé qui peut très bien leur être enlevée, esprisée, puis élevée par d’autres personnes. Et comme ils manquent déjà de filles au village, ça doit être un vrai problème d’en voir une disparaître dans la nature. Ils pourraient être très motivés pour la récupérer et vouloir fouiller les villages alentours. En plus, Faè n’était-elle pas destinée à devenir cacique à la suite de sa grand-mère ? (J’ai cru comprendre que le statut se transmettait de mère en fille, et comme la mère d’Ewannaël n’a eu que deux garçons, sûrement à sa petite-fille du coup ?)

Aussi, les habitants des autres villages, ça ne les interpellent pas de voir débarquer un couple avec deux enfants en bas âge ? C’est quand même un peu inhabituel de prendre le large avec un bébé à bord. Les villageois pourraient se montrer curieux. Pas forcément en les harcelant de questions, mais avec des regards insistants posés sur Faè par exemple. Ça pourrait inquiéter Ewannaël et Jolyn, qui pourraient craindre qu’on devine la raison de leur voyage/fuite. Ils pourraient se demander s’ils sont partis assez loin. (après tout, je suppose que l’esprision est également pratiquée dans les villages qu’ils traversent)

Il y a sûrement encore d’autres choses qui auraient pu se passer dans ces villages côtiers, mais je vais m’arrêter là parce que ce commentaire commence à être long. Je ne sais pas si ça te sera utile de connaître mes attentes déçues pour ce passage, mais je trouve ça tellement dommage quand je vois des choses inexploitées… Même si le reste est super intéressant.

Je reviens très bientôt lire le chapitre suivant.

Il faut absolument que je sache comment la petite famille va survivre dans cette ville inconnue ! Pourvu qu’ils trouvent quelqu’un qui comprenne leur langue…
Edouard PArle
Posté le 17/05/2024
Coucou Saskia !
Chouette que tu aies trouvé ce chapitre de transition entre deux mondes immersif.
Je comprends ta frustration sur le fait que je passe vite sur les villages côtiers. En fait, je prévois plusieurs ellipses de ce genre dans cette histoire car elle va se dérouler sur un temps relativement long et je passerai certains moments moins importants pour l'histoire que je veux raconter.
Je me demandais si après avoir lu la suite, tu ressens toujours le besoin de lire davantage sur les villages traversés par Ewannaël et sa famille ?
"Pourvu qu’ils trouvent quelqu’un qui comprenne leur langue…" ....
Merci de ton passage !!
Saskia
Posté le 18/05/2024
Coucou Edouard !

C'est vrai qu'après avoir lu la suite, ça ne me préoccupe plus trop de ne pas en savoir plus sur les villages côtiers. Je pense que ça n'aurait pas été inintéressant, mais que ce n'est pas indispensable à l'histoire, et une fois que Ewannaël et sa famille débarquent dans la ville des mouettes, on est tellement absorbés par les péripéties qui s'enchainent qu'on oublie vite tout ça. Du coup, oui c'est sûrement mieux de rester concentré sur l'essentiel, surtout si l'histoire se déroule sur un temps assez long.
Edouard PArle
Posté le 18/05/2024
Ok, merci beaucoup de ton retour !!
MrOriendo
Posté le 26/04/2024
Hello Edouard !

Je profite d'avoir un peu de temps libre pour rattraper mon retard et poursuivre ma lecture. Je m'étais préparé à te faire un pavé pour détailler mon ressenti à l'issu de ce chapitre, mais l'essentiel de ce que j'avais à dire, Nightbringer l'a déjà très bien exprimé.

Dans l'ensemble, j'ai beaucoup aimé ce chapitre. La vraie force de cette histoire c'est ta capacité à créer un lien vraiment émouvant entre les membres de cette famille, à les rendre attachants. Le personnage de Jolyn en particulier bénéficie de très belles tournures de style :)
Le passage de la tempête est prenant, intense. J'aime beaucoup l'idée de s'accrocher au mât avec un filet de pêche, ça rajoute de la crédibilité à ce passage et ça montre bien sans le dire la violence de l'orage qu'ils affrontent.
La découverte de la ville est très bien retranscrite aussi. On se prend de plein fouet le choc de culture entre la famille d'Ewan et les habitants. D'ailleurs, c'est vraiment l'attitude des citadins et leur dédain vis-à-vis d'Ewan qui exprime le mieux ce ressenti, plus encore que la foule, les véhicules, le décor et la langue.

On devine que ce nouveau monde ne sera pas tendre avec eux et que bien des épreuves les attendent. J'aime aussi beaucoup l'idée de clôturer ce chapitre sur le ressenti d'Ewan et son impuissance.

Au plaisir,
Ori'
Edouard PArle
Posté le 08/05/2024
Coucou Ori !
Ca fait plaisir de te voir !
Yes, c'est ce que je privilégie clairement, les persos et leurs relations (= Content que tu relèves les tournures sur Jolyn !
Oui, ce nouveau monde ne s'annonce pas tendre avec les nouveaux arrivants.
Merci beaucoup de ton commentaire, c'est super encourageant !
A bientôt (=
Nightbringer
Posté le 13/04/2024
Coucou !^^
Je voulais t'envoyer ce message hier, mais je me suis rendue compte que je n'aurais jamais le temps de clarifier toutes mes notes haha, donc le voici aujourd'hui au complet !^^

Rien à redire sur le premier paragraphe, sinon qu'il est parfait. Les deux premières phrases nous plongent directement dans le récit, dans les ressentis d'Ewan. C'est top^^
Ensuite, l'acte de Jolyn est vraiment très touchant. On reconnaît là son caractère, entre courage affection, mêlant ces deux traits pour protéger les siens.

“Le bruit du vent et la lumière des lunes constituaient sa seule compagnie.” Une très belle formulation qui vaut toutes les descriptions qui auraient pu être faites. En une seule phrase, on ressent intensément ce que vit Ewan^^.

“À la lueur lunaire, ses boucles blondes brillaient comme des étoiles.” J'aime beaucoup cette phrase, surtout la “lueur lunaire“ et son association avec les “étoiles” qu'elle fait naître :)) Mais... Edenn n'avait-il pas les cheveux noirs ? C'était en tout cas l'image que je m'étais faite de lui...

“C’était mieux à la maison.” haha, on reconnaît bien là la sincérité des enfants, qui ne comprennent pas pourquoi il faudrait répondre toujours “bien” quand on nous demande “comment ça va ?”. C'est encore une fois très touchant :)
“Avec cette question, les derniers espoirs de cachotterie d’Ewannaël volèrent en éclats.” J'aime bien la métaphore des espoirs qui se brisent, cela me donne l'image d'une vérité cachée dans une sphère de verre, qui explose lorsque l'on évoque son contenu...^^
“Si on est partis, c’est pas que pour Faè, c’est aussi pour toi. On veut que tu puisses grandir dans un endroit où nous serons libres.” Très beau... Et c'est vrai que c'est important qu'Edenn ne pense pas avoir perdu sa vie et son passé à cause de sa sœur :) En général, j'aime beaucoup ce dialogue entre père et fils. Ils ne s'expriment pas du tout de la même façon, ce qui est naturel (rien qu'en raison de leur âge), mais l'on sent la sincérité et l'amour qui les unit.
“Est-ce que là-bas ce sera comme dans ton histoire ? Le pays où s’alternent la nuit et le jour ?” Ce retour du caractère curieux et rêveur d'Edenn est adorable :) On voit qu'il a compris la situation, même sans en connaître les détails, et surtout qu'il l'a acceptée !^^

La situation de la petite famille dans le premier village est joliment décrite. La phrase “Un vieux couple les logea pendant deux nuits, permettant à tout le monde de reprendre des forces, en échange de services de couture et menuiserie.” résume très bien la situation :).
Une petite chose me dérange, dans la réplique suivante : “– Nous avons fui notre village, pensez-vous que nous pourrions nous réfugier ici ?” Il me semble qu'Ewan ne présente pas les choses de la meilleure manière pour se faire accueillir ; cela ne me semble pas être une très bonne idée de parler de “fuite” ouvertement. En effet cela rendra certainement leurs hôtes plus craintifs. Ils se poseront des questions sur les raisons de leur fuite et pourraient penser qu'il s'agit là de personnes malhonnêtes... Peut-être serait-il mieux de dire “Nous avons quitté notre village, pourrions-nous nous installer ici ?”, quelque chose de ce type... ?

Le basculement vers la tempête est très beau, et les réactions d'Ewan sont bien crédibles, en tout cas pour moi qui ne m'y connais pas en navigation haha^^.
“Peu après la disparition de son visage, un éclair traversa le ciel. Ce fut le début du cauchemar.” Waa, ces deux phrases sont merveilleuses, vraiment magnifique :) Et l'idée de l'éclair qui traverse le ciel et qui marque un réel “début” de l'orage est très jolie :))
Juste une petite remarque : “Il n’était plus possible de voir au-delà du bout de la coque qui commençait à tanguer. ” Ici, est-ce le bout de la coque ou la coque elle-même qui se met à tanguer ? Parce que j'aurais instinctivement mis une virgule avant le “qui”, mais cela dépend en fait du sens de la phrase : si c'est le “bout de la coque” qui tangue, alors il faut une virgule, sinon pas besoin :)
“Sa femme les serra avec une vigueur en laquelle il voulut voir la confiance d’un lendemain meilleur.” Waw. Cette formulation est incroyable^^

À la fin de l'orage, quelques petites choses m'ont un peu perturbée...
Tout d'abord, on nous dit qu'Edenn tient Faè dans ses bras, et que le garçon est blessé. Ensuite Ewannaël prend Faè dans ses bras et ne s'inquiète que d'elle - là j'ai commencé à me dire “tiens, étrange...” -, mais cela s'explique, puisque Jolyn s'occupe du fils. Cependant, voyant que sa fille n'a rien, Ewan ne devrait-il pas s'inquiéter aussi un peu pour son fils, qui, en plus de cela, est blessé ? Et est-ce si anodin que leur enfant perde connaissance ? Enfin je ne dis pas qu'Ewan devrait abandonner sa fille pour s'occuper d'Edenn, mais peut-être s'approcher, s'agenouiller... Enfin j'aurais vu une scène un peu plus “tous ensemble”, où l'on s'inquiète de tout le monde en même temps.

Après, à leur arrivée vers le port, j'ai eu un peu de peine à saisir la temporalité des évènements. Jusque là, je pensais qu'après la tempête, le jour était revenu. Seulement, Jolyn aperçoit un phare dont la lumière “balayait la côte et la mer”... Ce serait donc la nuit ? D'ailleurs, le fait qu'“Ils marchèrent ensemble vers les lumières de la ville” soutient cette hypothèse... Sauf que plus tard, tu écris “Si le soleil adoucissait l’air, il ne valait pas la perspective d’une place près d’une cheminée et de draps chauds.” Donc... c'est le jour ? Et justement après, des “étranges lumières artificielles” s'allument “avec la tombée de la nuit”. Donc si j'ai bien compris, mon erreur était de penser que voir un phare impliquait qu'il faisait nuit. Cependant cela me paraissait logique... Peut-être devrais-tu ajouter quelques mots dans une des phrases décrivant le phare, afin de préciser le moment auquel se déroule l'action ?

À nouveau, la sensation du port est très bien traduite par tes phrases, tu parles de l'absence de neige, de la multitude de passants, des gens qui crient, et cela suffit pour donner cette impression d'un lieu où tout va vite, ou tous se dépêchent de faire ce qu'ils ont à faire.
Petites remarques :
- “La simple sensation du sol pavé dépourvu de neige sous ses bottes aurait suffi à le désorienter mais ce n’était D'UNE nouveauté parmi des milliers.” Plutôt “qu'une”, non ? :))
- “Ces gens étaient vêtus de manteaux de couleurs variés, [...].” variéEs ?
- “D’abord parce qu’ILS n’avaient jamais vu des personnes avec une couleur de peau différente de la SIENNE.” Cela me paraît étrange, j'aurais mis soit ils/leur, soit il/sienne... ?

“Peut-être ont-ils mal compris ce que tu voulais dire, dit Jolyn. Les gens d’ici ne nous comprennent pas. Allons plutôt vers leurs maisons.” Dans ce milieu hostile, la confiance que Jolyn offre à ce peuple me fait un peu de peine... Mais ils vont bien vite comprendre que ces gens ne sont pas comme eux...

- “Une grande fontaine avec une mouette sculpté trônait au milieu de la place [...].” sculptéE
- “Jolyn et Ewannaël n’y prêtèrent pas attention, car là où ils venaient, il n’y avait pas d’écriture.” là D'OÙ ils venaient ?^^

Le petit passage sur la fontaine est très intéressant, avec un basculement vers une narration plus distante des protagonistes. Tu nous offres une information que les personnages ne connaissent pas, et nous annonces également qu'ils sauront, plus tard, ce que signifie cette inscription.
J'ai juste une petite remarque sur ce passage : “Ils apprendraient plus tard que dans la langue de ce pays, ces lettres composaient le mot Maëlval, ce qui veut dire : la ville des mouettes. ” je trouve que cette deuxième partie du passage pourrait être un peu modifiée... Je m'explique ; à mon avis, il serait intéressant de rallonger un peu la partie de la phrase “Ils apprendraient plus tard que dans la langue de ce pays, ces lettres composaient le mot Maëlval”, de broder sur certains mots, d'ajouter quelques adjectifs, etc. Puis, cela permettrait d'enlever sans trop de problème de rythme les quelques mots “ce qui veut dire :” et de faire de “la ville des mouettes.” une phrase à part entière. Je ne sais pas si mon explication était assez claire, de toute façon ce n'est qu'une suggestion, mais cela donnerait quelque chose comme : “Ils apprendraient plus tard que. dans la langue de cet étrange pays, ces lettres composaient un mot. Maëlval. La ville des mouettes.” Voilààà, enfin ce sont mes petits tics d'écriture qui s'expriment ici haha^^'.

“Le brouillard envahissait l’atmosphère, coupant la visibilité.” Ouiii, du brouillard !^^ J'aime beaucoup le brouillard :)) hihi

“En passant près de l’un d’eux, Ewannaël s’étonna de voix deux objets circulaires [...].” s'étonna de voiR ? ;))

“En passant près de l’un d’eux, Ewannaël s’étonna de voix deux objets circulaires remplis d’une nourriture colorée et des gobelets transparents entre eux. Les gens d’ici avaient décidément d’étranges mœurs.” Haha, ça m'a fait sourire en lisant :)

“Sans l’angoisse pressante où loger les siens, Ewannaël se serait étonné [...].” Il veut loger les siens dans l'angoisse pressante ? Haha, non, plus sérieusement je suppose qu'il manque un mot... Peut-être “Sans l’angoisse pressante D'où loger les siens” ? :)

J'admets que ce premier chapitre me fait beaucoup réfléchir... Je n'arrive pas à décider : la ville des mouettes est-elle une copie conforme du monde actuel, ou en est-ce juste un écho qui montre une société plus “moderne” que celle qu'Ewannaël et sa famille connaissaient ? J'ai tout d'abord pensé que c'était comme maintenant avec les bateaux, l'ambiance, mais ensuite l'allure des personnes et la langue m'ont fait douter... Et aussi le nom de la ville... Mais ensuite, avec les “étranges lumières artificielles”... Ce ne peut être qu'une ville très moderne, beaucoup plus que le village du début... ? Je ne sais pas... C'est très frustrant...

- “Le cœur serré, regrettant la chaleur de la maison qu’ils avaient bâti, Ewannaël enroula Faè dans la couverture qu’il avait pris avec lui, [...].” bâtiE ; prisE
- “Quant à lui, Ewannaël peina à dormir.” comme dans le chapitre 2, je mettrais “Quant à Ewannaël, il” ;)

“Pour la première fois de sa vie, il laissait sa famille dormir sans un toit. Et cela l’accablait de honte.” Les sentiments d'Ewan sont si beaux... Et tristes en même temps...
Enfin je me doute que cette phrase n'annonce rien de bon pour la suite de l'histoire x)

Voilà, encore une fois je te fais un peu de lecture hihi, j'espère que ça te sera utile :)

J'espère avoir le temps de lire le chapitre 4 aujourd'hui !^^
Edouard PArle
Posté le 13/04/2024
Coucou Night !
Content que les deux paragraphes soient efficaces et Jolyn touchante. Oui, c'est clairement un acte qui lui correspond bien (=
Oui, Edenn a les cheveux noirs. J'ai eu un petit cafouillage sur les premiers chapitres et apparemment j'ai oublié 2,3 corrections xD
"haha, on reconnaît bien là la sincérité des enfants, qui ne comprennent pas pourquoi il faudrait répondre toujours “bien” quand on nous demande “comment ça va ?”. C'est encore une fois très touchant :)" Oui, Edenn est un amour mais il sait aussi rappeler assez douloureusement qu'il aurait préféré rester chez lui...
"J'aime bien la métaphore des espoirs qui se brisent, cela me donne l'image d'une vérité cachée dans une sphère de verre, qui explose lorsque l'on évoque son contenu...^^" Merci (=
"Très beau... Et c'est vrai que c'est important qu'Edenn ne pense pas avoir perdu sa vie et son passé à cause de sa sœur :)" Clairement, il est encore trop petit pour pouvoir le comprendre.
Je suis ravi que tu apprécies les dialogues entre père et fils (=
Tu as raison, c'est plus sage de ne pas parler de la raison qui les a poussés à fuir.
"les réactions d'Ewan sont bien crédibles, en tout cas pour moi qui ne m'y connais pas en navigation haha^^." Tant mieux, ma connaissance va pas beaucoup plus loin que les romans que j'ai pu lire avec des tempêtes xD
“Sa femme les serra avec une vigueur en laquelle il voulut voir la confiance d’un lendemain meilleur.” Waw. Cette formulation est incroyable^^" Merci !!
Tu as raison au niveau de la fin de l'orage. J'ai fait des modifs sur ce passage, dis-moi ce que tu en penses :
"Ewannaël entendit avec un soulagement immense le souffle de Faè, qu’il prit aussitôt dans ses bras en la rassurant, lui promettant qu’un tel cauchemar ne se reproduirait plus jamais. Jolyn serra Edenn contre elle en faisant de même. Le petit garçon avait perdu connaissance et ne répondit pas aux interrogations inquiètes de ses parents mais sa respiration régulière les rassura. Le voilier n’avait subi que des dommages sommaires, l’eau avait quitté le pont par les ouvertures taillées à l’arrière. Ils s’en tiraient à très bon compte.
Aussi soulagé que sonné, Ewannaël tenait sa fille avec un amour immense. Il sentit des larmes couler sur ses joues et murmura :
— Ma petite, j’ai eu si peur de te perdre.
À ces mots, Faè se réveilla. Jamais Ewannaël n’apprécia autant ses pleurs qu’à cet instant-là. Edenn se réveilla aussi peu après, encore choqué par ce qu’il venait de vivre. Les stimulations de sa mère finirent par lui arracher un sourire, mais ce sourire différait des autres. Il était un peu triste, effacé, le genre de sourire que l’on fait pour rassurer une personne alors qu’on est soi-même terrifié. Rien de plus normal au vu de ce qu’ils venaient de traverser. Cela ne l’empêcha pas de se retrouver au cœur de l’étreinte familiale. Ewannaël se réjouit se sentir la peau de ceux qu’il aimait, d’entendre leur souffle. Ils vivaient. Tous."
Tu as raison, je me suis clairement embrouillé sur nuit et jour. Je me suis décidé pour la nuit suite à ton comm ! J'espère que je n'ai pas oublié de modifs^^
"Dans ce milieu hostile, la confiance que Jolyn offre à ce peuple me fait un peu de peine... Mais ils vont bien vite comprendre que ces gens ne sont pas comme eux..." En effet, elle est encore bien naïve... A voir si ce nouvel endroit est si hostile que ça...
Yes, j'ai basculé beaucoup plus souvent sur du narrateur externe à partir de ce chapitre. La plupart du temps ça reste centré sur la vision d'Ewannaël mais je donne quand même quelques éléments supplémentaires au lecteur (=
“Ils apprendraient plus tard que. dans la langue de cet étrange pays, ces lettres composaient un mot. Maëlval. La ville des mouettes.” J'aime beaucoup ta proposition !
"Ouiii, du brouillard !^^ J'aime beaucoup le brouillard :)) hihi" On est d'accord c'est sous côté le brouillard xD
"Ce ne peut être qu'une ville très moderne, beaucoup plus que le village du début... ? Je ne sais pas... C'est très frustrant..." J'adore, hihi. Non, en vrai je trouve tes questionnements géniaux parce que je veux clairement plonger le lecteur dans l'incertitude de savoir où il arrive. L'idée c'est quand même de découvrir ce nouveau monde petit à petit, avec Ewannaël et sa famille (=
"Les sentiments d'Ewan sont si beaux... Et tristes en même temps...
Enfin je me doute que cette phrase n'annonce rien de bon pour la suite de l'histoire x)" Content de te lire ! Je trouvais ça hyper intéressant de parler du sentiment de honte pour ce chapitre (=
"Voilà, encore une fois je te fais un peu de lecture hihi, j'espère que ça te sera utile :)" ça l'est !!
Merci beaucoup de ton commentaire,
A bientôt (=

Nightbringer
Posté le 13/04/2024
Hello hello :)
Le passage après l'orage est top maintenant !^^ J'aime beaucoup les dernières phrases :)

“A voir si ce nouvel endroit est si hostile que ça...” Hmmm...

“On est d'accord c'est sous côté le brouillard xD” Ouiii c'est tellement beau, tellement imprégnant^^ J'aime beaucoup me balader dans le brouillard en montagne :))

“L'idée c'est quand même de découvrir ce nouveau monde petit à petit, avec Ewannaël et sa famille (=” ça fonctionne bien, on est vraiment comme eux, on voit sans comprendre, et on en sait très peu sur cet univers... Ce qui donne envie de lire plus^^

À tout vite^^
Edouard PArle
Posté le 14/04/2024
Coucou !
Génial si c'est mieux comme ça (=
"ça fonctionne bien, on est vraiment comme eux, on voit sans comprendre, et on en sait très peu sur cet univers... Ce qui donne envie de lire plus^^" Honnêtement, je dessine aussi peu à peu l'univers et je le découvre seulement un peu avant vous, ça motive bien à écrire xD
Arod29
Posté le 09/04/2024
Hello Edouard!
C'est toujours aussi bon. Le passage de la tempête est particulièrement réussi.
Tu fais bien ressentir le désarroi des parents.
Bravo!
Petite remarque:
"Malheureusement, chacune de leur halte ressembla à la première." J'aurai laissé l'imparfait. "ressemblait" au lieu de "ressembla"
Merci!
A bientôt
Edouard PArle
Posté le 11/04/2024
Coucou Arod !
Content que tu aies apprécié, notamment la scène de tempête. Pas forcément évident comme c'est devenu un classique xD
Hmmm j'hésite encore sur ce verbe, je vais voir avec d'autres avis mais merci de l'avoir relevé.
Merci beaucoup de ton commentaire !
A bientôt (=
SagaLee06
Posté le 04/04/2024
Décidémment, tu as le don de nous tenir en haleine !
J'adhère complètement à ton roman, c'est une pépite comme on en trouve peu de nos jours !

Cependant, j'ai une toute petite remarque, elle va te paraître un peu ridicule mais j'aurais simplifié cette phrase « Merci de ce que vous avez fait pour nous » en « merci de votre hospitalité ».

Je réitère tout de même mon coup de coeur pour tes écrits :)
Edouard PArle
Posté le 07/04/2024
Coucou Sagalee !
Ton enthousiasme fait plaisir à lire ! Merci de ta remarque, je vais me pencher dessus.
Un grand merci pour ce commentaire et à bientôt (=
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