Chapitre 3 : Michaël

Notes de l’auteur : T_T Désolée du grooos retard... Mais ce chapitre ne s'est pas écrit sans peine, loin de là...  Certaines scènes étaient déjà écrites depuis six mois, et j'espère qu'elles rattrapent celles où j'ai eu pas mal de difficultés.
En tout cas, merci à toutes les plumes qui s'égarent ici, et un merci tout particulier et tout chaleureux à ma Cricri d'amour... le cobaye de toutes les émotions. XD
Bonne lecture et par pitié... PAS TAPER !

Chapitre Trois : Michaël

 

« Comme une ombre, je te suis et m'attache sans relâche... »

 

 

 

-        Laurier... Beau travail ! 18. J'apprécie l'expression de votre idéologie légèrement extrémiste. Au moins, vous savez faire preuve de tact et de délicatesse, ce qui n'a pas été le cas de tout le monde, souligna le prof de philo, coulant son regard sur Nathan et Eddy.

 

Deux copies doubles glissèrent silencieusement sur la table de Camille, silencieuse. Tout comme Joël, qui paraissait avoir la mâchoire décrochée, stupéfait à l'idée que sa copine pût avoir une telle note.

 

-        Ajacier, par contre... 6. Une belle preuve de sans-esprit. C'est bien vous qui désirez faire une fac de droit l'an prochain ? Et ben, ça promet...

 

Le jeune homme attrapa sa copie et l'échangea aussitôt avec celle de Camille. Ils les lurent, et commentèrent ce que l'autre avait fait.

 

-        C'est ringard, Joël... « La justice sert à départager les gens ». C'est même pas français ! Et écoute-moi ça : « Ce que certains trouvent juste, d'autre le trouveront injustes » ! J'hallucine !

-        Et toi, tout un paragraphe sur la réhabilitation de la peine de mort, causes et conséquences ! C'est pas de la justice, la guillotine !

-        C'est pas de la justice ?! répéta Camille, en colère. Non, mais t'as vu ta copie, Ajacier ?! Toi, tu parles de bagarre entre deux parties ! Ça ne veut rien dire ! Ça, c'est pas de la justice, tu vois !

-        Et alors ?!

-        Mais alors, arrête de critiquer !

-        Je pourrais te dire la même chose !

-        C'est quoi ton problème ?!

-        Mon problème ?! Mais bordel, Camille, ce prof note à la tête ! Je sais qu'il n'a jamais pu me blairer, mais de là à me mettre un 6 !

-        Ajacier, ta copie vaut ce qu'elle vaut. Et elle vaut un 6. Et encore, il a été sympa. Moi, à sa place, j'aurais mis zéro.

-        Et ben, dans ce cas, j'espère que tu ne deviendras jamais prof, répliqua Joël, s'enfonçant dans sa chaise, les bras croisés.

 

Et il bouda. Camille haussa les épaules et ils ne s'adressèrent plus la parole durant toute l'heure. Au moment de l'interclasse, Joël ne prononçait toujours pas un mot, mais avait bien fait comprendre à Camille qu'il attendait des excuses. Des excuses pour quoi ? La rouquine n'en savait rien, et pensait que c'était plus pour la forme qu'autre chose. Et bien évidemment, elle n'avait pas l'intention de se faire pardonner. Après tout, elle n'avait rien fait.

 

Cependant, elle connaissait un bon moyen pour essuyer tout caprice. Certaine de son effet, elle sortit le Métro du jour qu'elle avait volé le matin même. La mine de Joël changea radicalement.

 

-        Voyons l'horoscope, annonça Camille, ouvrant le journal pour dissimuler son hilarité. Alors, Cancer, c'est bien ça, Joël ? Attention à un sentiment d'infériorité qui vous paralysera aujourd'hui. Ne vous laissez pas submerger par vos émotions !

-        Et en amour ? ne put s'empêcher de demander le jeune homme, sorti précipitamment de son mutisme.

-        Y'a rien écrit.

-        Merde. Et toi, t'es quoi comme signe ?

-        Vierge.

 

Joël pouffa de rire, mais se ravisa assez vite devant l'air furieux de Camille. Il lui arracha le journal des mains et y plongea le nez en guise d'échappatoire.

 

-        Vierge, vous aurez besoin de vérifier l'intérêt véritable que vous porte votre partenaire. Vous privilégierez la sécurité affective au sein de votre relation, lut-il après avoir toussoté. Oh Camille ! C'est super bon, ça !

-        Des conneries. Et du côté de nos amis, quelles nouvelles ? demanda la jeune fille, curieuse.

 

Joël, soucieux, feuilleta le journal avec empressement. Depuis leur dernière dispute à ce sujet, il paraissait montrer un certain intérêt envers les Espions. Il posait parfois quelques questions à Camille qui, d'abord surprise, finissait par lui répondre évasivement, craignant un nouveau désaccord. Mais il n'en était rien. Le jeune homme l'écoutait en silence raconter les dernières interventions terroristes parues dans la presse et ne prenait aucune d'entre elles pour une plaisanterie.

 

-        Ils ont ouvert une enquête sur l'incendie de l'Ambassade de Grande-Bretagne, raconta Joël, les yeux rivés sur un article de faits-divers. Ils sont persuadés que ce sont eux qui ont fait le coup. Tu en penses quoi, Camille ?

-        J'en pense que la Reine va nous regarder de travers une fois de plus.

-        C'est bizarre, pourtant... Ils n'ont rien fait, les Anglais.

-        Peut-être que si, peut-être que non. Il faudrait voir ce qui aurait pu être sujet de désaccord entre le gouvernement britannique et les Espions. Mais j'avoue que c'était plutôt fort de leur part de s'attaquer à l'étranger. Dis, Joël, tu crois que ton père a droit à des infos intéressantes à son boulot ?

-        Il bosse au Sénat, Camille, pas chez les flics. Il n'en sait pas plus que nous.

 

Ils s'avançaient lentement vers la salle de leur prochain cours, de façon à gagner un peu temps pour discuter. L'adolescent referma le journal, embêté.

 

-        N'empêche, reprit-il, je ne comprends toujours pas ce que cherchent à faire les Espions. Ça les avance à quoi d'espionner les gens, de brûler les ambassades et d'infiltrer les grands corps de l'État ?

-        Ils espionnent pour rester au courant des choses, ça me paraît évident. Et selon les choses qu'ils peuvent apprendre..., ça peut dégénérer, Joël. Imagine qu'en ce moment même, l'État prévoit des milliers de licenciements. C'est un exemple, on est bien d'accord, hein ? Les Espions apprennent cette affreuse nouvelle à l'instant précis où elle est prononcée. Admettons que cette information soit restée secrète pour le moment. S'ils sont contre, ils pourront réagir plus vite et prendre des mesures pour euh... dissuader l'État de licencier des milliers de salariés. Tu piges le truc, Ajacier ?

 

Joël se gratta la tempe, un peu perdu. Les explications de Camille lui paraissaient plus ou moins claires, mais deux points le perturbaient encore.

 

-        Pourquoi on dit que c'est des terroristes alors ?

-        Tu crois qu'un syndicat mettrait le feu à une ambassade, Ajacier ? railla la rouquine.

-        D'accord. Mais qu'est-ce que mon père vient foutre dans les espionnages ? En quoi ça nous concerne, lui et moi ?

-        Joël, si j'étais de mèche avec le grand patron des Espions, je te l'aurais dit. Mais aux dernières nouvelles, ce n'est pas le cas, et tu vas devoir te contenter de mes maigres déductions. Ton père...

 

Elle ne put finir sa phrase. Citronnade venait d'apparaître sur le seuil de la salle et les toisait férocement, les bras croisés sur sa grosse poitrine.

 

-        Et bien alors, vous deux ! Vous pensez peut-être que c'est le moment de papoter ?! Vous avez deux minutes de retard ! Dépêchez-vous d'entrer, de vous installer et de sortir une feuille ! Devoir surveillé sur les primitives !

 

 

Joël rendit une copie quasiment blanche. Encore une fois, il avait passé l'heure à contempler Camille secrètement, sans s'empêcher de soupirer toutes les deux secondes. Trop de pensées contradictoires se bousculaient dans sa tête. Camille, Mélissa, Camille, la bouche de Camille, les cheveux de Camille, les mains de Camille, Mélissa, Camille, le Truc, Camille, Camille et Camille. Le Truc.

 

Le Truc, n'était-ce pas ce chamboulement de cœur qu'il ressentait lorsqu'elle fronçait les sourcils devant une réponse incompréhensible de sa calculatrice ?

 

Joël n'en savait rien. Il ne trouvait peut-être pas Camille Laurier belle, jolie, ou même mignonne, mais c'était la fille la plus fascinante qu'il n'eut jamais rencontrée. Que serait d'embrasser une fille comme elle ? Rien que de l'imaginer, il en avait des sueurs. C'était donc ça, l'amour ? Une sorte de musique techno qui résonnait dans tout le corps ?

 

À la sortie de la classe, Camille sentit son regard insistant, mais n'osa pas lui faire face. Ce n'était pas la première fois qu'elle devinait être le centre d'attraction de Joël durant les cours. Elle se forçait de rester indifférente, mais sa gêne grandissait de plus en plus. Elle n'avait pas l'habitude de se faire lorgner de cette façon. Une boule d'angoisse vint se former dans le fond de sa gorge. Joël venait-il de découvrir le Truc ? À cette idée, la jeune fille ravala difficilement sa salive.

 

Silencieux, ils déambulaient dans le couloir, au milieu d'une foule de lycéens, lorsque Joël agrippa le poignet de Camille et l'obligea à bifurquer. Il refusa de la lâcher avant d'avoir atteint un petit préau désert.

 

Quand il la plaqua contre le mur et qu'elle se retrouva emprisonnée entre ses bras, la rouquine ne broncha pas un mot et regarda ailleurs. Frustré, le jeune homme enroula ses mains autour des siennes, mais là encore, Camille ne lui accorda aucune attention. Sa colère s'agrandit à l'instant où il la prit brusquement dans ses bras et qu'elle l'ignora une fois de plus.

 

-        Réagis Camille, réagis, bon sang ! Tu ne vois pas que je ne sais plus quoi faire avec toi ?!

 

Elle ne répondit pas et se dressa sur la pointe des pieds pour observer par-dessus son épaule Nathan et Eddy. Elle jura. Ils avaient pris possession de leur banc attitré. Joël crut devenir fou. Il se cramponna à ses hanches et il lâcha ce qu'il avait sur le cœur.

 

-        Camille ! s'écria-t-il alors qu'il la secouait furieusement comme un prunier. Tu le fais exprès ou quoi ?! Dis quelque chose ! Réagis ! Je t'aime, merde !

 

Enfin, il y eut une réaction. Camille se raidit, le regarda vaguement et essaya de se dégager de son étreinte. Ses efforts furent vains : il la tenait fermement.

 

-        Je t'en prie, Ajacier, c'est pas le moment.

-        Avec toi, c'est jamais le moment ! s'énerva Joël.

-        Boucle-la.

 

Il n'avait pas dit son dernier mot. Il emprisonna son visage entre ses mains et se pencha vers elle, sourcils froncés. Camille eut tôt fait de lui broyer le poignet et d'écraser son pied.

 

-        Pas ici, grogna la rouquine tout en le repoussant.

 

Joël soupira, exaspéré et légèrement endolori. Son amie semblait aussi agacée que lui. Après un instant d'hésitation, il sentit une main de fer entourer de nouveau son poignet et le tirer hors du préau.

 

Camille l'entraîna dans un curieux couloir dans lequel il n'avait jamais mis le pied. Il n'en connaissait même pas l'existence. Ils grimpèrent les étages, les jambes de Camille dévorant chaque marche qui se présentait à elles. Arrivés au dernier palier, une forte odeur leur perça les narines et que Joël sut très bien identifier.

 

-        Beuh, ça pue la chimie ! C'est là qu'ils viennent les intellos ?! Ben putain !

-        Personne ne vient ici, à part quelques profs de temps en temps, assura Camille. Les intellos ont leurs labos au rez-de-chaussée.

 

Il faisait une chaleur étouffante qui ne semblait pas déstabiliser la rouquine. Joël, en revanche, sentait ses yeux et son nez lui picoter désagréablement, et espérait sortir le plus vite de cet enfer chimique.

 

Un gémissement fit reporter son attention sur Camille. Elle s'acharnait sur la poignée d'une large fenêtre donnant sur une terrasse. Elle tira de toutes ses forces et la poignée céda. Un courant d'air frais frappa Joël en plein visage, qui lui permit de reprendre peu à peu des couleurs.

 

-        Bienvenue aux Jardins Suspendus de Bobigny, la huitième merveille du monde ! ironisa Camille, grimpant sur le rebord de la fenêtre pour passer de l'autre côté.

-        C'est ça que t'appelles un jardin ?! s'étonna le jeune homme, qui avisait trois plantes mortes.

-        Bah... Allez, viens. Viens voir le lycée et Bobigny dans toute leur splendeur !

 

Joël s'exécuta. Il grimpa à son tour sur le rebord de la fenêtre et sauta pieds joints sur la terrasse. Son amie lui sourit et se recula pour qu'il pût profiter de la vue. Ses yeux s'arrondirent de stupéfaction. Jamais Bobigny ne lui était apparue sous ce jour. Il ignora le béton et les grands immeubles des quartiers douteux, puis reporta son attention sur les coins verts de la ville et les rues qui s'étendaient devant lui. Il remarqua la préfecture et la mairie, l'une en forme de pyramide dissymétrique et austère, l'autre triangulaire comme la tête d'une flèche. Il observa longtemps la tour de L'Illustration, bureau et imprimerie d'un ancien journal, ainsi que l'ancienne gare désaffectée où des trains renfermant des détenus juifs partaient pour le camp d'Auschwitz durant la Seconde Guerre mondiale. Au loin, Paris. Il ne voyait de la capitale qu'une masse d'immeubles grise et irrégulière, car le lycée Louise Michel n'était pas assez élevé pour y voir ses richesses.

 

Le regard de Joël se détacha de ce paysage urbain et s'arrêta sur Camille, assise en tailleur contre un muret. Une lueur d'excitation mystérieuse brillait dans ses yeux.

 

-        Alors, Ajacier, tu n'avais pas des choses à me dire ?

 

Tout à coup, les aveux qu'il avait à lui faire se dissipèrent et il resta pantois devant l'amusement de la jeune fille.

 

-        Je te taquine, reprit-elle, narquoise, avant de tapoter sur le sol en béton à côté d'elle. Allez, viens t'asseoir. Il nous reste encore une heure à tuer.

 

Il s'exécuta maladroitement. Se faisant, il frissonna dès qu'il sentit une vague de froid lui happer le fessier. Cette désagréable sensation ne dura que très peu de temps, car le flanc de Camille dégageait une mince chaleur contre ses côtes. Collés ainsi l'un à l'autre, ils restèrent silencieux dans le frais courant d'air d'automne. Les cheveux acajou de l'adolescente se tortillaient presque sensuellement autour de son visage. Dès fois, ils giflaient Joël. Mais il se fichait bien de ces petites caresses sur sa joue ou son nez. Joël Ajacier voulait toujours plus.

 

-        Parle-moi de toi.

-        Encore ?!

-        Oui.

-        Bon, alors, je m'appelle Camille et je déteste les cerises artificielles dans le clafoutis de la cantine.

 

En se remémorant le souvenir du clafoutis aux cerises, Joël éclata de rire. Les lèvres gercées de la jeune fille s'étirèrent légèrement, et elle y glissa sa langue pour les humidifier.

 

-        Mais encore ?

-        Hmm... J'aime la musique classique. J'ai fait un peu de danse quand j'étais petite.

 

Ayant beaucoup de mal à imaginer Camille se trémousser sur un air d'opérette, le jeune homme préféra taire les commentaires qui lui venaient à l'esprit. D'un autre côté, elle était si gracieuse qu'il n'était pas étonné qu'elle eût été danseuse.

 

-        Et comédienne avec ça, continua la rouquine, paisible. J'ai fait quelques années de théâtre, mais j'ai tout arrêté quand ma mère est morte.

-        Ah, fut tout ce que trouva à dire Joël.

-        J'ai jamais eu d'amis. Je ne suis jamais tombée amoureuse... et je n'ai jamais eu d'amoureux non plus. Ça va, Ajacier, j'en ai assez dit ?

 

Pour toute réponse, bien qu'hésitante, il glissa son bras autour de ses épaules. Elle ne dit rien et inclina sa tête jusqu'à la lover contre sa nuque. Elle ferma les yeux. Il soupira, quelque peu frustré. Elle sentit ses doigts faire des petits ronds distraits sur sa clavicule et cacha un sourire. Ils entendirent les cris des élèves dans la cour qui se dissipaient. Très vite, le lycée redevint silencieux et désert. La récréation prenait fin, mais comme l'avait remarqué Camille, ils avaient encore « une heure à tuer ».

 

-        C'est quoi, alors, le Truc ? demanda-t-elle pour briser le silence.

-        J'en sais rien. Y'a tellement de Trucs chez toi...

-        Tu n'en sais rien ?

 

La rouquine se redressa, d'abord étonnée, puis rit doucement.

 

-        Mais Joël, si tu ne sais pas, comment veux-tu que je le sache, moi aussi ?

-        Je ne connais qu'un moyen, répliqua l'intéressé, très sérieux.

 

Il encercla le visage de Camille de ses grandes mains, emprisonnant au passage ses cheveux rebelles, et l'attira à lui pour poser ses lèvres sur les siennes. Le baiser ne dura que trois secondes, mais c'en était assez pour que la rouquine ouvrît des yeux ronds comme des billes. En se reculant, Joël éclata de rire devant sa mine défaite, qui affichait également une pudeur que la jeune fille s'obstinait depuis toujours à dissimuler. De plus, ses oreilles avaient rosi, ce qui ne fit qu'augmenter l'hilarité de l'adolescent.

 

-        Bougre d'âne, marmonna-t-elle, les bras croisés.

 

Cela dit, elle ne tarda pas à se blottir à nouveau contre lui pour se protéger du froid. Joël fut tenté une seconde fois de l'embrasser, mais non loin de là, une porte claqua et brisa ce moment particulier. Surpris, le jeune homme sursauta. Camille, en revanche, bondit sans attendre et scruta le couloir désert, penchée à la porte-fenêtre.

 

-        Qui est là ? aboya-t-elle, hargneuse.

 

Seul le vent lui répondit par un sifflement. La rouquine fronça les sourcils, méfiante, et Joël vint la rejoindre pour observer avec curiosité l'autre bout du couloir. Il n'y avait personne.

 

-        J'ai entendu des pas quand...

-        Moi aussi, coupa sèchement Camille. Au son, je dirais qu'ils étaient deux ou trois. Mais je pencherai plus pour deux, si tu vois ce que je veux dire...

 

Le jeune homme opina d'un hochement de tête. Il ne connaissait que deux élèves capables de les espionner au sein du lycée Louise Michel. L'adolescente parut lire dans ses pensées et lui tapota sur l'épaule, conciliante.

 

-        Nous allons en avoir le cœur net, Ajacier, déclara-t-elle en revenant sur la terrasse. Par ici.

 

Il s'approcha du rebord du toit, là où elle se trouvait, et l'observa s'agiter avec la même droiture qu'une reine.

 

-        Règle numéro un, annonça Camille, le pouce levé en l'air. Voir sans être vu. Tu vois la bordure en pierre, Joël ? Elle est assez haute pour te dissimuler. Et en plus, elle est trouée. Couche-toi avec moi !

 

Ils s'allongèrent ensemble sur le ventre, côte à côte, et tendirent le cou vers les brèches.

 

-        Ta tête, Ajacier, elle dépasse ! s'énerva la rouquine, appuyant sur le crâne du lycéen pour l'abaisser. Voilà. Maintenant, regarde. Ils ne vont pas tarder à sortir du bâtiment. La porte est en dessous. Ils descendent quatre étages, c'est long... Attention...

 

Sa voix n'était plus qu'un murmure. Frissonnant d'excitation, Joël plissa les yeux, et vit alors deux silhouettes apparaître dans son champ de vision. Nathan et Eddy étaient de dos, mais les reconnaître n'était pas bien difficile.

 

-        Je m'en doutais, lâcha Joël, amer.

 

La rouquine opina sans un mot. Ils se relevèrent tout en se dépoussiérant. Le jeune homme semblait soucieux. Camille, elle, était perdue dans ses pensées, mais reprit bien vite de la graine.

 

-        Allons-nous en, Ajacier, déclara-t-elle sobrement. Nous n'avons plus rien à faire ici.

 

 

Ils n'avaient plus reparlé de Nathan, d'Eddy et des Espions, ni du baiser qu'ils avaient échangé dans la matinée. À la cantine, Joël avait bien essayé d'attirer l'attention de Camille, mais il avait senti sa réticence et n'avait pas insisté.

 

Pourtant, à la fin de la journée, quelle fut sa surprise lorsque la rouquine lui proposa de venir passer la soirée chez elle. Il s'empressa d'accepter, sans cacher sa joie. Ils se mirent donc en route, et sur le chemin, il glissa sa main dans la sienne. Elle ne protesta pas.

 

Petit à petit, ils en vinrent à terminer leur discussion du matin même sur les Espions.

 

-        Ton père est influent au Parlement. Je ne le connais pas, mais tous les hommes politiques ont tendance à se bagarrer pour un oui ou pour un non.

-        Tu n'as jamais été aussi près de la vérité. Quand mon père reçoit des invités, ils n'arrêtent pas de se lancer des piques sous les sourires. Ça pue l'hypocrisie. C'est pour ça que je ne peux pas les blairer. Je me demande vraiment pourquoi mon père les invite s'il ne s'entend pas avec...

-        Va savoir... maronna Camille. Ton père, c'est un malin. Il a bien compris que le meilleur stratagème pour obtenir les bonnes grâces de là-haut, c'est de faire des repas avec des gens populaires comme lui. La politique, c'est magouille et compagnie. Et crois-moi, j'en sais quelque chose !

-        D'accord, mais pourquoi les Espions visent mon père ?! C'est pas le seul sénateur du pays, que je sache ! Et les députés, alors ?

-        Les députés décident de voter les lois ou pas. Ce ne sont pas eux qui s'occupent de les rédiger et de les monter sur du ciment, même s'ils ont le droit de proposer des projets de loi. Non, ça, c'est le boulot de ton père et ses collègues.

-        Ouais, je sais bien, mais pourquoi...

-        Ajacier, tu m'agaces.

 

Joël se tut, vexé. Camille lui jeta un petit coup d'œil amusé et exerça une pression sur sa main. Le jeune homme se sentit tout de suite mieux.

 

-        Terminus, lança-t-elle, pointant devant elle un immeuble parmi tant d'autres. J'avoue que ça doit te changer de ton beau quartier, mais on n'a pas tous le salaire de ton père. Tu viens ?

 

Ils entrèrent dans le bâtiment, s'engouffrèrent dans un ascenseur miteux, dans lequel étaient inscrits des vingtaines de graffitis sur chaque paroi, et en sortirent au sixième étage. Camille sortit son trousseau de clés tandis que Joël observait distraitement le couloir mal éclairé.

 

Des gémissements le firent sortirent de sa rêverie. Derrière la porte de Camille, on grattait contre le bois. Douceur s'impatientait.

 

-        Oui, ma fille, je suis là, susurra la rouquine, tout en tournant le dernier verrou.

 

La porte s'ouvrit enfin et Douceur se jeta sur sa maîtresse, telle un boulet de canon. Joël éclata de rire, voyant la chienne danser sur ses pattes, aboyer et sauter dans tous les sens dans l'attente d'une cajolerie. Dès que Camille se baissa pour lui caresser le flanc, Douceur roula sur le dos, les pattes en l'air et la langue pendante. Elle adorait se faire gratouiller le ventre. Seulement, la jeune fille se lassait bien vite et poussait désormais sa chienne dans l'appartement.

 

-        Ouste, Douceur, tu bloques le passage ! gronda-t-elle, alors que l'animal s'obstinait à sauter sur elle. Allez, dégage !

 

Mais déjà, Douceur ne l'écoutait plus. En relevant la tête, elle venait de découvrir Joël pour la première fois et avait quitté sa maîtresse pour renifler cet inconnu, sans lui laisser le temps d'entrer dans la demeure. Le concerné se laissa faire, amusé, alors que Camille se cognait le front de la main.

 

-        Ajacier, je n'ai pas eu le temps de te le dire, mais... elle est en chaleur.

-        Euh ?

 

Pour confirmer ses dires, la chienne cessa de japper pour couver d'un tendre regard l'objet de ses désirs. Plus de doutes : elle avait trouvé là l'homme de sa vie. Joël ne sut s'il devait considérer les agissements du labrador comme un compliment, mais puisque cette dernière s'accrochait solidement à sa jambe, il décida de la remercier pour ce chaleureux accueil.

 

-        Joël, ne t'y mets pas à ton tour ! s'énerva Camille, sur le seuil, frustrée de voir sa chienne japper de plaisir par les gratouilles du lycéen. Je te préviens, tu ne pourras plus t'en débarrasser après. Douceur, viens ici !

-        Ma fille, qu'est-ce que t'es belle, toi, susurra Joël à l'animal qui le regardait amoureusement.

 

L'adolescent ne sut jamais si Camille avait fait à cet instant une crise de jalousie aiguë. Tout ce dont il se souviendrait serait ses poings serrés, son nez froncé et la vilaine grimace qu'elle affichait, alors que Douceur n'aspirait qu'à réclamer encore des câlins. Puis Camille s'éclipsa dans son appartement, et revint une minute plus tard avec quelque chose coincé entre ses doigts.

 

Il s'agissait d'un sifflet ultrason, et après avoir une dernière fois ordonné à sa chienne de laisser son ami tranquille - sans résultat, elle porta l'instrument à ses lèvres et y souffla de toutes ses forces. Le son le plus désagréable au monde transperça les tympans de Joël, qui porta aussitôt les mains à ses oreilles. Quant à Douceur, l'effet fut insupportable. Elle quitta immédiatement le jeune homme et disparut dans l'appartement, sans cesser de gémir.

 

-        Il faut ce qu'il faut pour se faire obéir, déclara fermement Camille à Joël, qui la fixait hébété. Viens Ajacier. À moins que tu ne préfères rester sur le perron.

 

Joël s'exécuta, plus gêné par la punition infligée à Douceur par sa faute que par le modeste appartement dans lequel il s'était introduit. L'endroit ne ressemblait en rien à son propre pavillon si propre et si bien décoré.

 

Le père de Camille avait tenté de camoufler les trous, auréoles et fissures des murs par une épaisse couche de peinture orange, mais le résultat ne semblait pas très convainquant. Quant au plafond, il n'était guère mieux.

 

Joël ne vit rien de la cuisine, mais ce qu'il put voir du salon lui confirma l'idée que l'appartement aurait pu être bien mieux tenu si la mère de Camille était toujours vivante. Son père avait toutefois fait de son mieux pour décorer la pièce, en accrochant aux murs divers tableaux et une multitude de bibelots qui ne renvoyaient pas davantage de charme à la demeure.

 

Le seul endroit plus ou moins sympathique restait le coin de Douceur, installé près du buffet, où Camille avait arrangé un petit espace entièrement canin pour sa chienne : un panier qui donner envie d'y dormir, un coussin en forme d'os, trois couvertures de couleurs différentes, deux gamelles, une cuisse de poulet en plastique et une balle de tennis en lambeaux.

 

Douceur se tenait justement recroquevillée dans son panier, encore tremblante par la mésaventure qui lui était arrivée. Joël lui lança un dernier regard inquiet, puis se décida à suivre Camille jusqu'à la pièce du fond.

 

La chambre de Camille était deux fois plus petite que la sienne, mais elle paraissait plus intime. Joël pouvait remarquer que les murs et le plafond avaient perdu leur blancheur d'origine, et que le linoléum était très usé. Enfin, il régnait dans la pièce un bazar incroyable. Avec une curiosité maladive, le jeune homme se mit à toucher à tout, sous le regard attentif de la rouquine.

 

Le premier objet qu'il tripota fut le cadre renfermant la photo de la défunte mère de Camille. Les cheveux rouge sang comme sa fille, la peau blafarde, presque translucide, les yeux doux mais cernés d'un bleu pâle, elle souriait paisiblement. Joël devina sans mal qu'elle avait contracté une de ces maladies dont on ne guérissait jamais, mais une beauté particulière se dégageait d'elle. La jeune fille scrutait sa réaction avec une impatience mal contenue.

 

-        Elle est vraiment très belle, dit enfin Joël, sans quitter le portrait des yeux.

 

Ceux de Camille s'arrondirent de stupéfaction, et ses lèvres se mirent à trembler. Le jeune homme voulut demander pourquoi elle affichait cette mine, mais elle ne lui en laissa pas le temps et sauta sans attendre à son cou pour l'embrasser. Devant ce geste brusque et spontané, Joël ne sut que dire, mais ne vit là aucune occasion de se plaindre.

 

-        C'est la première fois qu'on me parle d'elle au présent, s'excusa Camille, les oreilles toutes roses. Comme si elle était toujours là.

-        Mais elle est toujours là, s'obstina Joël. D'accord, je n'ai pas encore eu de décès dans la famille, mais ça me paraît évident que ta mère te suit partout, de là où elle est maintenant.

-        Arrête, sinon je te jette sur le lit.

 

Joël sourit et posa un léger baiser sur son front, avant de reprendre sa fouille. Camille s'amusait beaucoup à observer ses réactions, et éclata de rire devant sa mine interloquée lorsqu'il dénicha ses CDs.

 

-        Alors, tu ne mentais pas, ce matin ? Tu écoutes vraiment Mozart ?! s'écria-t-il, choqué, les yeux rivés sur la pochette du disque.

-        Ouais. Mais j'aime bien Chopin et Beethoven aussi. Y'en a d'autres, mais tu ne connais pas.

-        Non ?! Attends...

 

Il ouvrit le lecteur CD de la petite chaîne hifi et y plaça le disque de Mozart. Tout en s'exclamant « mais j'ai l'air de quoi, moi, avec mes Black Eyed Peas ?! », il appuya sur le bouton lecture et un charmant petit son de violons sortit des enceintes.

 

-        Ah, mais... je connais, ça !

-        C'est la quarantième symphonie de Mozart, expliqua Camille.

-        C'est la musique de la pub pour l'assurance ! Tu sais, celle avec les quatre saisons !

-        J'adore tes références culturelles, Joël.

-        Bah alors, tu l'as jamais vue, cette pub ?

-        Si. Et d'ailleurs, c'était pas Mozart. C'était Vivaldi.

-        Ah.

 

Camille lui lança un drôle de regard, mais se retint de justesse d'émettre une remarque moqueuse. Penaud, Joël regardait le bout de ses baskets, comme un enfant pris en faute.

 

-        C'est gentil de ne pas m'enfoncer. Mais n'empêche, je me sens... très con.

-        Ah ça, tu peux l'être.

-        Très drôle... Dis Camille, tu ne voudrais pas refaire le truc de tout à l'heure ?

 

La jeune fille se tourna vers lui, étonnée. Son regard manifestait une certaine incompréhension, accentué par un sourcil arqué, qui sut pourtant enflammer les intestins de Joël. Voilà que ça recommençait ! Cette fille allait lui faire perdre la tête.

 

-        Mais si, tu te souviens, continua-t-il, sans perdre son air malicieux, quand tu m'as carrément sauté dessus et que...

-        Oublie, coupa sèchement la rouquine.

 

Elle lâcha un cri surpris tandis qu'elle se voyait attrapée par les hanches et propulsée avec Joël sur son lit. Ils rebondirent trois fois et Camille ne put entendre si les lattes de son sommier avaient cédé sous leur poids à cause de l'adolescent qui riait à gorge déployée. Elle était bien la seule à ne pas trouver ça drôle.

 

-        Mais t'es cinglé ! hurla la jeune fille, dont le cœur battait à cent à l'heure. Ne refais plus jamais ça ! Et ça te fait marrer, en plus !

-        Tu devrais voir ta tête !

 

Crime de lèse-majesté. Joël n'en finissait plus de rire, ses mains toujours accrochées fermement à sa taille, et Camille maugréait de plus belle. Elle cherchait à tout prix un moyen pour se venger, mais l'adolescent remarqua qu'elle n'esquissait aucun geste pour s'échapper de ses bras ou le repousser.

 

Ils roulèrent sur la couette et, reprenant le dessus, il se fit alors un peu plus entreprenant. Cette fois-ci, Camille le rappela à l'ordre par une tape bien sentie sur les mains, mais qui ne sembla point l'offusquer. Elle le devina sourire dans le creux de son cou. Au bout de quelques instants, elle sentit ses lèvres chaudes presser sa peau, et elle eut l'impression de recevoir une décharge électrique.

 

-        Qu'est-ce que tu fais ?! s'écria-t-elle, surprise.

 

Joël ne répondit pas, trop occupé à remonter le long de sa gorge. Il était charmé par la douceur de cette peau si blanche et ces petits grains de beauté éparpillés sur son cou, ses épaules et le haut de sa poitrine. Il ne revenait pas de l'effet ardent qu'elle pouvait avoir sur lui. Ses entrailles étaient en feu, et son désir pour la rouquine de plus en plus croissant. Il devait à tout prix retrouver son calme. Il déposa un dernier baiser derrière son oreille et s'immobilisa, bercé par la chaleur qui émanait de l'adolescente. Elle se risqua à se tourner vers lui, et il bondit à nouveau sur ses lèvres. Malgré elle, la jeune fille glissa son bras autour de sa nuque et se laissa faire.

 

Quand Douceur tenta discrètement une intrusion dans la chambre de sa maîtresse, Joël et Camille étaient toujours allongés sur le lit, pelotonnés l'un contre l'autre. Camille écoutait le cœur du jeune homme battre lentement, et fredonnait un air de musique classique. Joël jouait avec une mèche de cheveux acajou et ne s'était jamais senti aussi bien de sa vie.

 

La porte grinça et brisa leur moment d'intimité. Les sourcils froncés, la rouquine releva brusquement la tête et vit la truffe blanche de la chienne dépasser de l'encadrement.

 

-        Douceur... avertit la maîtresse de l'animal.

 

Mais le labrador se risqua à entrer dans la pièce et commença à prendre son élan. Elle se baissa vers l'avant, prépara ses pattes arrière et, alors que Camille suppliait « non, non, non », bondit sur le lit et se lova contre Joël. Celui-ci, ravi, se mit à gratter la gorge, le ventre et les flancs de Douceur, qui ronronnait continuellement de plaisir. Vexée devant ce tableau trop affectif à son goût, la jeune fille croisa les bras et marronna quelques mots à voix basse.

 

-        Je vais commencer à croire que tu préfères ma chienne à moi.

-        Un peu. Regarde comme elle est folle de moi, elle n'arrête pas de me faire des bisous.

-        Des bisous qui sentent la croquette.

-        Jalouse ?

-        Pfft !

 

Délaissant Douceur, Joël s'assit en tailleur sur le lit et enlaça Camille pour l'attirer à lui. Elle se laissa aller contre l'adolescent qui lui offrait des mots qu'elle n'avait jamais entendus, et des caresses qu'elle n'avait jamais vraiment reçues.

 

-        J'ai quand même une légère attirance pour les humains, fit-il en riant doucement, alors qu'il entremêlait ses mains aux siennes.

 

Et sans attendre, ils basculèrent sur l'oreiller. Ils entendirent vaguement Douceur protester, mais cela ne parut pas les affecter : ils étaient à nouveau déconnectés de la réalité.

 

Somme toute, Camille aimait se peloter avec Joël Ajacier. Même s'il l'écrasait un peu de tout son poids, elle appréciait le contact de ses lèvres sur sa peau, caresser sa nuque et ses cheveux en bataille, et constater à quel point ses yeux brillaient lorsqu'il rencontrait son regard.

 

S'accordant une légère pause, ils soupirèrent rêveusement, chacun perdu dans ses propres pensées. À peine entendirent-ils une voix s'élever dans le salon.

 

-        Camille ? Camille, t'es là ?

 

L'adolescente repoussa aussitôt Joël en jurant. Devancée par Douceur qui aboyait, elle sauta du lit et quitta sa chambre sans un regard en arrière. Le jeune homme glissa une main dans ses cheveux pour les arranger et l'imita à son tour. Quand il débarqua dans le salon, il découvrit sans surprise Camille en train de saluer son père qui rentrait du travail. Ce dernier vit Joël s'approcher et ne put cacher son étonnement. Au regard soutenu qu'il lança à sa fille, celle-ci devint cramoisie et se maudit d'avoir à expliquer sa présence ici.

 

-        Papa, je te présente Joël... un copain qui est venu faire ses devoirs avec moi, fit timidement Camille. Et Joël, ben... voici mon père, quoi.

-        Enchanté, mon garçon.

 

Le père de l'adolescente serra la main de Joël qui, confus, bafouilla quelques formules de politesse. Puis il jeta un coup d'œil brillant de malice à sa fille, qui l'intercepta et sortit aussitôt de ses gonds.

 

-        C'est pas ce que tu crois !

-        Non, bien sûr que non.

-        Je t'assure, Papa !

-        Mais oui, mais oui.

 

Camille pesta entre ses dents et tourna promptement le dos à son père. Ce dernier sourit davantage à Joël, qui paraissait lui aussi s'amuser, et échangea quelques banalités avec lui. Il balança ensuite, non sans surveiller sa fille du coin de l'œil :

 

-        Joël, tu restes manger avec nous ?

 

Elle sursauta, surprise, puis résolut d'agir comme si de rien n'était.

 

-        Euh... c'est-à-dire que mon père reçoit des invités ce soir, et je suis censé être à la maison pour le repas.

-        Décommande, lâcha platement la rouquine.

-        J'aimerais bien, mais...

-        C'est pas bien difficile.

-        Oui, mais...

-        Tu préfères vraiment rester coincé avec ces salauds de politiciens plutôt que de rester avec nous, hmm ?

-        OK, t'as gagné, capitula Joël, sortant son téléphone de la poche de jean pour appeler sa mère.

 

Fière, Camille croisa les bras et tourna les talons vers sa chambre, suivie de près par Douceur et Joël, en train d'expliquer à sa mère qu'il ne mangerait pas à la maison le soir même.

 

Au final, il ne regretta pas un instant d'être resté pour le souper. Le repas était simple et l'ambiance chaleureuse, à l'exception de Camille qui s'était enfermé dans le silence le plus complet. Le père de la rouquine appréciait de plus en plus la présence de Joël, et ce dernier trouvait son hôte sympathique. Il s'étonnait légèrement du renfermement de son amie, mais comme son père ne s'en formalisait pas, il s'imagina ensuite que c'était une habitude. Même en temps normal, Camille n'était pas une grande bavarde.

 

Joël ne sut trop comment ils en vinrent à parler de l'avenir, mais le père de la rouquine avait tellement envie de discuter avec lui qu'il essayait d'amener le plus de sujets de conversation sur la table. Toujours plongée dans un silence déconcertant, Camille l'écoutait raconter qu'elle rêvait de devenir professeur des écoles.

 

-        C'est ce qu'elle veut faire depuis toute petite, confia le père de la rouquine au jeune homme. Je me souviens qu'elle volait des livres scolaires et qu'elle faisait le cours à ses peluches.

-        Elle volait ?!

-        Oh oui ! Elle savait bien les cacher aussi, ces foutus bouquins ! On a mis plus d'un an avant de s'en rendre compte !

 

La jeune fille buvait toujours sa soupe sans leur accorder la moindre attention. Effacée, elle n'émit bien sûr pas le moindre commentaire sur son enfance, ses vols et ses poupées.

 

-        Et toi, alors, Joël ?

-        Quoi, moi ?

-        Tu as une idée de ce que tu veux faire plus tard ?

-        Oh. Et bien, en fait...

-        Avocat, répondit Camille.

 

Tous deux se tournèrent aussitôt vers elle, surpris qu'elle eût pris la parole. Elle ne fit toujours pas attention à eux, et continua à boire son potage.

 

-        C'est vrai, Joël ? s'étonna le père de Camille.

-        Euh...

-        C'est son père qui l'a décidé, continua la rouquine sans les regarder.

-        Non, pas exactement, bredouilla l'intéressé, gêné. Il m'a laissé le choix !

-        Le choix entre le droit et la politique.

 

Joël foudroya Camille du regard, mais le geste fut parfaitement inutile. Le père de la rouquine souriait, amusé. Il était rare pour lui d'assister à un repas si vivant.

 

-        Alors, comme ça, tu as préféré le droit ?

-        C'est toujours mieux que la politique, marmonna le jeune homme.

-        Et tu te sens capable de mentir souvent ?

-        Bah... ça ne doit pas être très difficile.

-        Je t'admire, Joël, fit le père de Camille, après réflexion. Ce n'est pas un métier que je serais capable d'exercer. D'accord, tu défends des innocents et tu te bats pour la vérité, mais si tu tombes sur des assassins, tu es obligé de mentir. Mentir et défendre des criminels, ce serait quelque chose que je ne pourrais tout simplement pas faire.

 

Pour la première fois depuis le début du repas, Camille leva les yeux de son assiette et avisa ses deux voisins. Voilà un sujet qui la captivait bien plus.

 

-        Je serais curieuse de voir Joël défendre un criminel.

-        Ne te moque pas, pesta son camarade.

-        Je ne me moque pas. Je suis juste... intéressée.

 

Elle plongea son regard profond dans celui de Joël, lui promettant silencieusement d'être aux premières loges le jour où il se retrouverait dans cette situation. Les pensées du jeune homme étaient, en revanche, tout à fait hors contexte. Si elle continuait de le fixer de cette façon, il n'hésiterait plus, papa poule ou pas, à sauter sur elle et la tirer dans sa chambre pour faire des choses pas très catholiques. Au final, il préféra baisser la tête et se mit à ronger l'ongle de son pouce nerveusement.

 

Joël remercia intérieurement le père de Camille de relancer la conversation sur un autre sujet. La jeune fille inclina la tête vers son assiette et ne prononça plus un mot de tout le repas. Le souper prit fin aux alentours de dix heures du soir. Camille s'était fermement ennuyée devant les discussions trop longues des deux hommes assis à ses côtés. Pour se distraire, elle avait même fait signe à Douceur de lui tenir compagnie. La chienne, croyant qu'elle pourrait lécher le pot de Danette au chocolat, n'avait certes pas refusé et s'était tenue pendant une heure assise à côté de la chaise de Camille.

 

Bien évidemment, elle avait eu beau regarder avec insistance le pot de crème dessert vide, et faire les yeux doux à sa maîtresse, elle n'avait récolté que des caresses affectueuses. La rouquine avait bien cerné son petit manège, mais refusait de lui accorder ce qu'elle désirait. Camille savait parfaitement que si Douceur avait droit au reste de Danette au chocolat, elle, en revanche, devrait lui donner un bain supplémentaire pour lui ôter tout le dessert de son pelage blanc !

 

Comme il se faisait tard, et que le père de Camille appréhendait de s'attirer une mauvaise opinion de la famille Ajacier, il proposa à Joël de le ramener en voiture jusqu'à chez lui. Douceur voulut venir avec eux, prétextant un besoin pressant, et à la grande surprise de tout le monde (et notamment celle du labrador), Camille accepta.

 

Une fois la voiture garée devant le pavillon des Ajacier quinze minutes plus tard, Joël remercia et salua le père de Camille.

 

-        Je t'en prie, Joël, répondit ce dernier, j'ai passé une très bonne soirée. Tu reviens quand tu veux.

 

L'adolescent sourit et après une dernière caresse à Douceur, qui s'était coincée entre les deux sièges avant, il sortit du véhicule avec Camille.

 

Ils s'avancèrent lentement vers le portail de la demeure, et s'arrêtèrent devant en silence. La rouquine observa soucieusement les toits se découpant dans la nuit, puis reporta son attention sur Joël, qui la scrutait de ses yeux brillants.

 

Le couple se tourna simultanément vers la voiture des Laurier, contrariés. Nul doute que le père de Camille les épiait avec une curiosité insatiable. Douceur elle-même avait sa truffe collée à la fenêtre, fixant bêtement le couple. La jeune fille se frappa le front, blasée.

 

-        Je suis maudite. Une fois à la maison, il va m'en faire baver. C'est ta faute, Ajacier.

-        Ben voyons !

 

Le silence retomba entre les deux lycéens. Gêné, Joël se balançait d'un pied à l'autre, sans cesser de regarder succinctement Camille et la voiture derrière eux.

 

-        Là, je devrais te remercier et te souhaiter bonne nuit dans les règles de l'art, mais... comment dire ? Ton père nous espionne légèrement.

-        Le mieux serait que tu ne fasses rien. Ça m'évitera une discussion sur les rapports sexuels dans la voiture.

 

Joël éclata de rire, imaginant sans difficulté le papa poule de Camille s'inquiéter de ce qu'il adviendrait de sa fille. Il ignora le regard noir de la rouquine et se pencha maladroitement pour dérober un baiser furtif au coin de sa bouche pamplemousse. Pour l'heure, c'était bien suffisant. Elle le salua de la main et s'éloigna vers la voiture, dans laquelle son père trépignait d'impatience à l'idée d'en savoir plus.

 

-        À demain, Ajacier.

-        Bonne nuit... et rêve de moi !

-        Crève.

 

 

Pour être honnête, Camille s'attendait à ce que Joël la ridiculisât. En quittant son appartement au petit matin pour se rendre au lycée, elle était persuadée que « l'amour public », ce terrible fléau, tomberait sur elle comme un gigantesque pot de crème glacée chutant du ciel, et l'engloutirait jusqu'à en perdre le souffle. Elle s'imaginait déjà obligée de supporter les mamours incessants de Joël et les trucs dégoûtants qu'engendrait « l'amour public ».

 

Eh bien non.

 

Joël, qui pourtant était sorti avec pas mal de filles auparavant, n'était pas moins mal à l'aise qu'elle devant le portail du lycée. Comme si elle lui avait transmis sa panique de « l'amour public ». Il lui fit la bise habituelle et lui demanda seulement si tout allait bien.

 

Elle hocha la tête, soulagée de voir s'envoler le désastre de « l'amour public », et lui accorda même un léger sourire. Ils regardèrent ensuite chacun de leur côté, et pénétrèrent dans l'enceinte de l'établissement. Sauf que la rouquine n'avait pas envisagé une seule fois la possibilité de se faire entraîner dans un rez-de-chaussée vide, lieu incontournable des amants luttant contre « l'amour public ».

 

-        Ajacier, tu m'étonneras toujours.

 

Elle n'osait parler trop fort, parce qu'elle savait que l'endroit résonnait et qu'elle ne souhaitait pas se faire remarquer. Elle devina son sourire dans l'obscurité - il s'était abstenu d'allumer le couloir - et sentit qu'il la dévisageait. Alors, elle attendit. Pas très longtemps. Jusqu'à ce que, du bout des doigts, il replaçât une mèche de ses cheveux derrière son oreille. Puis leurs nez se touchèrent, et leurs lèvres les imitèrent. Et ils s'embrassèrent longuement.

 

Là, Camille se dit que, franchement, les adulateurs de « l'amour public » ne savaient pas ce qu'ils rataient. L'attente et l'obscurité, c'était le meilleur.

 

 

-        Qui peut me citer le dernier des pouvoirs du Président de la République ? demanda le professeur d'histoire à sa classe endormie.

 

Seule Camille, bien réveillée, tendit instantanément le bras en l'air, comme une automate. Certains élèves ne se retinrent pas pour soupirer d'ennui. Des stylos Bic tombèrent sur les tables en signe d'exaspération. La bonne élève qu'était la rouquine en lassait beaucoup. Pour preuve, c'était la quinzième fois qu'elle participait en deux heures.

 

-        Le droit de faire sortir les criminels de taule.

-        Très bien Camille, mais dans un langage plus soutenu ? ironisa le prof.

-        Bah, le droit de grâce.

 

Le prof décroisa les bras, satisfait, et demanda à ses élèves de noter ce qu'avait dit Camille. Les soupirs se multiplièrent par deux, mais les lycéens eurent l'excellente initiative d'obéir. Ils se pressèrent même d'écrire sur leur classeur, car la sonnerie venait à peine de se déclencher et ils étaient tous pressés de rentrer chez eux pour aller sur Facebook. Comme d'habitude, Camille sortit en dernier de la classe et rejoignit Joël qui l'attendait devant la salle. Comme le couloir se vidait peu à peu et qu'ils se retrouvaient seuls, le jeune homme bloqua sa copine contre le mur. Celle-ci leva aussitôt les yeux au ciel, devinant presque la suite des évènements.

 

-        Ça te dit pas de promener avant de rentrer chez toi ? Ou d'aller boire quelque chose au café du coin ?

-        Pas aujourd'hui, Ajacier.

-        Oh... Pourquoi ? demanda Joël sans cacher sa déception.

-        Des obligations personnelles, chéri.

 

Le ton d'excuse était légèrement camouflé par la raide ironie habituelle de Camille. Joël en avait l'habitude et ne releva pas la petite moquerie.

 

-        Pas de problème, chérie, répliqua-t-il, tout en l'attrapant par la taille pour un au revoir câlin. À demain alors, et ne fais pas de bêtises.

-        Bien sûr que non, tu me connais... chéri.

 

 

Alors que la nuit tombait sur la ville, accompagnée d'une pluie torrentielle, trois silhouettes encapuchonnées se découpaient sur les pavés d'une rue rejoignant la station Bobigny - Pablo Picasso. Direction Paris.

 

-        Foutez le camp, marmonna la première voix, basse et glaciale, qui appartenait au plus petit des trois.

 

Il s'agissait de la voix d'une jeune fille, dont le visage était caché par une capuche trop grande. Les deux acolytes marchaient sur ses pas.

 

-        Tu n'y vas pas seule, répliqua le second, féroce. On t'accompagne.

-        On n'a pas envie de rater ça, justifia enfin le troisième.

 

La jeune fille s'arrêta et se retourna pour toiser les deux compères. Devant le plaisir qui s'emparait d'eux, elle secoua négligemment la tête et préféra continuer son chemin.

 

-        Michaël ne me fera rien, railla-t-elle, le sourire moqueur. Sans moi, il est foutu. De plus, je ne vois pas ce que j'ai à craindre. Tu sembles avoir oublié que je suis sa protégée.

-        Sa protégée ! Sa protégée ! Alors que tu te la coules douce !

-        Tu sais très bien qu'il me défend de faire quoi que ce soit d'autre.

-        La bonne excuse.

-        Dis plutôt que tu es jaloux, Nathan. Les bonnes grâces du patron, les bonnes grâces du patron... chantonna la jeune fille, ravie de sentir la colère croissante qui se dégageait de son compagnon.

-        En attendant, j'ai bien plus de mérites que toi !

-        Ça ne durera pas. Quand je serai majeure...

 

Un éclat de tonnerre la fit sursauter. Les trois silhouettes levèrent le visage vers le ciel. La pluie avait redoublé de force et la foudre n'allait pas tarder à frapper.

 

-        Dépêchons-nous, pressa le jeune homme qui était resté silencieux.

 

Ils traversèrent l'avenue en courant et s'engouffrèrent dans la gueule du métro. La station était presque déserte. Une bande de jeunes délinquants squattait sur le quai et les dévisagea quelques instants. Comme une atmosphère inquiétante entourait les trois personnages, ils s'abstinrent de les provoquer.

 

Un grondement provenant du fond du tunnel annonça l'arrivée du métro de la ligne cinq. Dès que la rame s'arrêta devant eux, ils montèrent dans un wagon et se tassèrent dans un angle en silence, sous les regards intrigués des voyageurs. La jeune fille n'ôta pas sa capuche et ses deux compagnons ne prononcèrent pas un mot durant le trajet jusqu'à Paris. Ils sortirent à la station de la Bastille, pressés. Ils étaient en retard.

 

Ils traversèrent la place de la Bastille en courant sous la pluie et longèrent le boulevard Beaumarchais. Après avoir tourné à la rue du Pas de la Mule, ils débouchèrent sur la place des Vosges, et leur chemin s'arrêta au numéro 25. Michaël s'était établi dans ce beau coin de Paris pour quelque temps. Michaël ne cessait de changer de planque à tout-va.

 

-        J'espère que le luxe ne lui monte pas trop à la tête, n'est-ce pas Eddy ? ironisa Nathan, observant avec grand intérêt le magnifique jardin de la place des Vosges, bien que noyé sous la pluie.

-        Il ne restera pas ici, tu penses bien.

 

Pendant ce temps, la jeune fille appuyait six fois sur la sonnette de l'interphone. L'appareil grésilla une seconde ou deux, puis une voix lointaine se fit entendre.

 

-        Oui ?

-        Paul, c'est moi.

-        Qui ? demanda l'homme, méfiant.

-        Laurier, imbécile !

 

Il y eut un déclic et la porte se déverrouilla. Les trois visiteurs la poussèrent, pénétrèrent dans le hall, bien heureux d'être enfin au sec, et montèrent au premier étage. Eddy sonna, et ils purent entendre des exclamations derrière la porte.

 

-        Laisse, Paul ! Je vais ouvrir.

 

Le verrou tourna et la porte s'ouvrit sur un homme, plutôt jeune, âgé d'une trentaine d'années. Grand, le teint frais, les cheveux blonds et courts, il paraissait être un homme respirant la forme et la santé. Ses yeux bleus, deux glaçons, ignorèrent Nathan et Eddy. Il scruta attentivement la jeune fille, qui souleva sa capuche pour révéler son visage.

 

-        Camille ! s'exclama-t-il avec un sourire canaille.

-        Michaël, déclara la rouquine, en guise de salutations.

 

Il lui tendit les mains et la fit entrer dans son hall. Camille dégoulinait d'eau de pluie et se sentit de suite apaisée par la chaleur qui régnait dans l'hôtel.

 

-        Mets-toi à l'aise, chérie, fit le maître des lieux, en hôte exemplaire, avant de s'adresser à Nathan et Eddy d'une voix neutre. Et vous ? Qu'est-ce que vous foutez ici ? Je ne vous ai pas convoqués que je sache.

-        Oh tu sais, Bobigny la nuit... bredouilla Eddy. On ne voulait pas la laisser seule.

-        Je sais me défendre, marmonna Camille, qui ôtait son manteau trempé et le remettait à Paul.

-        Elle sait se défendre, répéta Michaël, les bras croisés. Bon. Je n'ai pas le cœur à vous renvoyer sous la pluie. Entrez.

 

Il leur céda le passage, claqua la porte derrière eux et les abandonna sans pitié dans le hall. Michaël faisait partie de ceux dont les volontés n'étaient pas contestées. Il y avait un roi dans cet hôtel, et c'était lui.

 

-        Michaël, nous... tenta Nathan, qui suivait son patron à travers la pièce.

-        Plus tard, décida l'intéressé, avant de s'adresser à son majordome. Paul, je prends le salon. Apporte-nous à boire. Je veux que personne ne vienne me déranger. Si Tonio appelle, dis-lui que je le rappellerai en fin de soirée. Les autres, envoie-les balader. Je n'ai pas le temps pour des broutilles.

 

Michaël s'exprimait beaucoup par des phrases courtes. Selon lui, les ordres rentraient mieux dans le crâne de ses hommes s'ils étaient clairs, précis et concis. En tant que chef d'un important réseau d'espionnage, il était essentiel que les instructions fussent bien comprises.

 

Il vint se placer derrière Camille, posa ses grandes mains sur ses épaules frêles et adressa à Paul, Nathan et Eddy le même sourire mielleux qu'affichait la rouquine.

 

-        Ce soir, je me consacre uniquement à ma petite Espionne préférée.

 

 

 

« Je t'offre mon cœur. Qu'est-ce que tu en feras ? »

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Keina
Posté le 11/08/2010
Ben voilà, je le savais ! ^^ Camille est une Espionne. En même temps, j'ai aimé comment tu as introduit cette évidence sans vague : pas de révélation "coup de poing". Au contraire c'est beaucoup mieux que si tu ne nous l'avais camouflé pour nous faire aimer Camille "de force" avant de nous asséner cette révélation. Là, on prend Camille comme elle est, avec son tempérament de feu et ses cachoteries à Joël, et on n'est au final que peu surpris de la voir pénétrer dans le repère d'un Espion. Ça coule de source !
Par contre, du coup, quel est le plan des Espions vis à vis de Joël ? J'ai peur... Il y a vraiment des scènes touchantes entre Joël et Camille. Notamment la scène du toit, qui m'a *encore* fait penser à l'animé "Karekano, Entre elle et lui". Il y a plusieurs scènes de complicité entre les deux héros qui se passent aussi sur le toit de leur lycée... Décidément ! ^^ Pourtant, à part peut-être un peu le caractère de Camille et la différence de situation familiale entre les deux héros, l'histoire n'a pas grand chose à voir...  
En tout cas, c'est un plaisir que de suivre les dialogues entre les deux héros. Tu les as tellement bien caractérisés qu'on a l'impression de les connaître depuis toujours ! Et je me suis vraiment sentie bien à lire une histoire où, pour une fois, il n'y avait pas un background super compliqué derrière, avec des magiciens, des prophéties, et un monde aux lois complexes... Bref, une histoire où on a juste à suivre les protagonistes, à se délecter de leurs interractions et à découvrir les personnages secondaires ! 
En parlant de personnages secondaires, je comprends pourquoi je ne les sentais pas, les deux autres Espions : ils sont carrément moins classes que Camille ! On a plutôt l'impression qu'ils jouent les rôles de rigolos de service... D'ailleurs l'arrivée de Michaël, qui les considère comme des sous-fifres, semble le confirmer. Ah, Michaël ! Enfin un homme sur lequel je vais pouvoir fantasmer (parce que bon, Joël est un peu jeune pour moi ^^') ! Blond aux yeux bleus, classe et ténébreux, nickel ! Merci Clo pour le fanservice ! :D
Par contre, tu as déjà mentionné "Polichinelle" auparavant dans le récit ? Parce que j'étais prête à te demander pourquoi ce titre, jusqu'à ce que je lise les notes de fin où tu dis que Polichinelle est un Espion mystérieux... or je ne me souviens pas du tout avoir entendu parler de lui dans le texte. J'ai dû zapper... il faut savoir que je suis une lectrice distraite, qui passe souvent à côté d'énormités... ^^'  
Une dernière mention pour le père de Camille, je l'adore. Et puis Douceur, comme son nom l'indique, qui met un peu de douceur dans le récit... ^^
Bon, j'ai maintenant hâte de savoir ce qui n'était pas prévu ! :)
<br /><br />
La Ptite Clo
Posté le 11/08/2010
=D *saute dans tous les sens*
Tu me gâtes décidément beaucoup, Keina ! *câlin*
Je suis vraiment très contente que cette histoire te plaise ! Accrocher les lecteurs SFFF qui n'ont pas trop l'habitude de lire quelque chose de plus réel, c'est plus facile à dire qu'à faire, et ça relève d'un véritable défi ! ^^" C'est peut-être un peu pour ça que dès fois, j'aime moins le SFFF... Pour moi, quand je plonge dans un roman, c'est pas trop pour me prendre la tête (le polar est pas mal dans le domaine également x)).
Quel est le plan des Espions à propos de Joël ? C'est un plan qui vient pas trop d'un génie vu qu'il vient de moi, et qui est assez banal dans son genre, mais je te laisse découvrir ça par toi-même. =D Dis donc, c'est vrai qu'il y a des élements qui se rapprochent avec l'anime dont tu me parles ! O_o En tout cas, c'est un pur hasard... ^^" Pour ma scène sur le toit, c'était aussi un peu volontaire, puisque les toits sont un peu les "routes" et les cachettes des Espions, donc j'aimais bien le clin d'oeil.
Pour Michaël, avant que tu fantasmes trop sur lui, je te préviens (parce que je ne souhaite pas te ramasser à la ptite cuillère comme Cricri =D), c'est un méchant alors attends-toi un peu à tout avec lui... et ne t'attache pas trop. ^^" Mais quand même, je suis bien contente de son succès ! ^^ Pareil pour Camille, son papa, et Douceur !
Concernant Polichinelle, je suis contente que tu me poses la question. C'est vrai, quoi, on m'a jamais vraiment demandé pourquoi "Polichinelle" alors que j'attendais cette question comme le Messie. =D Je n'ai effectivement pas encore glissé le nom de Polichinelle dans les chapitres (mais je crois que ce sera le cas au début du prochain chapitre), mais Polichinelle était là, depuis le début. Et tu as même trouvé son idendité sans savoir que cet Espion-là était "Polichinelle". =D J'ai choisi exprès ce petit sobriquet parce que Polichinelle est décrit comme un personnage cruel, sans coeur, menteur, manipulateur... etc... Tant de défauts qui convenaient si bien à cet Espion-là. =D (Et le summum, c'est que j'ai vu un dessin de lui avec un coeur sur la poitrine et un poignard dans la main (le gros coup de foudre)). xD
Bref, il me semble avoir fait le tour, je crois... =D Merci énormément pour ton commentaire, Keina, c'est vraiment très encourageant et j'ai l'impression d'avoir bu du Redbull ! =D Bien des bisoudoux !
Seja Administratrice
Posté le 30/07/2010
I knew it!<br /><br />Si si, le fait que Camille puisse être une Espionne faisait bien partie de mes théories. Surtout après son bras de fer avec l'autre là, l'Espion confirmé. Et voilà aussi l'arrivée du mystérieux interlocuteur de Camille. Pour lui, j'attends de lire le prochain chapitre pour m'en faire une opinion. Bon, évidemment, le passage du toit était une piste à suivre, le fait que Camille connaisse les ficelles pour espionner ses petits camarades, toussa.<br /><br />Mais ! Mais j'ai plein de questions qui arrivent du coup. Camille est donc une Espionne. Nathan et cie aussi. Dans ce cas, pourquoi diable dit-elle à Joël qu'elle les suspecte d'être des Espions ? Pour le faire psychoter ? Pour l'emmener à penser qu'il est épié ? Pour un petit lavage de cerveau ? Pour un plan plus vaste incluant un Joël qui non seulement croit, mais redoute les Espions ? Pour le rallier à leur cause ?<br /><br />Sinon, ils étaient choux les deux *o* Et connaissant les penchants sadiques d'une certaine fée, je me suis doutée d'un truc louche à venir. Je me suis pas trompée XD Well, well, well, je voulais continuer, mais je pense que je vais m'y replonger après mon retour de week end *o*<br /><br />
La Ptite Clo
Posté le 30/07/2010
=D
Je suis vraiment curieuse de connaître ton avis sur le très fameux Michaël. :D Malgré son charisme, il faut juste garder en tête que c'est quand même le Big Boss, et donc, en théorie, un méchant-vilain.  ^^
Camille essaie vraiment de rendre Joël plus conscient du monde qui l'entoure. Elle n'est pas obligée de le faire par les Espions, mais c'est quelque chose qui lui tient à coeur. Elle trouve Joël beaucoup trop insouciant et trop naïf, et elle cherche à l'inquiéter pour qu'il réalise vraiment qu'il n'est pas en sécurité. Faire passer Nathan et Eddy pour des Espions (ce qu'ils sont d'ailleurs) et raconter tout ce qu'elle sait sur le sujet est une bonne occasion pour le faire flipper.
Ensuite, je ne sais pas trop comment expliquer ça sans paraître ridicule ou incohérente, mais Camille est une bonne observatrice, et même si elle ne peut que connaître la véritable nature des deux Espions, elle sait généralement beaucoup de choses sur les gens qui l'entourent (lycéens et autres). Parce qu'elle aime savoir, justement, et Joël le sait. Ajoutons à cela son addiction aux journeaux, et cela paraît "normal" pour Joël que Camille sache lui en dire autant sur les autres, sans qu'il ne la soupçonne de quoique ce soit. Donc, tout en le faisant resdescendre de son monde de bisounours, elle se rend insoupçonnable aux yeux de Joël, qui est de toute manière plus aveugle que les autres. ^^" Je ne sais pas si j'ai été limpide dans mes explications, mais bon. xD
Tu découvriras (une bonne partie de) l'objectif des Espions au prochain chapitre, mais je peux déjà te dire que ce n'est pas pour en faire de lui un Espion.
Et puis... beeeh... =D Oui, j'ai des penchants sadiques, et là en particulier. Polichinelle n'est pas une simple histoire d'amour avec des bisounours. =D J'avais envie de faire un truc plus fort, et plus compliqué aussi. Avec des hauts et des bas, et même des fins. Donc, les trucs louches sont bientôt à venir et à revenir, et à revenir, et à revenir. :D
En tout cas, merci infiniment pour ta lecture et tes commentaires plaisants. :) Bisoudoux Sejounette !
Cricri Administratrice
Posté le 06/11/2009
Bon, je ne vais pas me répéter, tu connais déjà mon sentiment sur ce chapitre XD Je l'ai adoré, même s'il va me falloir du temps pour encaisser la fin (surtout après ton dernier mail !!!). C'est une impression où ton côté sadique est en train de s'éveiller ?
Oh, et j'ai beaucoup aimé le petit ajout dans la scène du lit *o* c'est éléctrisant !
*fait un gros câlin de réconfort à Jojo*
Tu vas en bâver mon petit, tu vas en bâver T_T Il me ressemble tellement que je m'identifie à lui... Pauvre choupi.
La Ptite Clo
Posté le 06/11/2009
Mouarf mouarf mouarf... Vous allez tous les deux morfler : Joël et toi. XD C'est vrai que vous avez euh... une personnalité similaire ? Ben oui, vous êtes deux pâtes... c'est trop chou ! *_*
Ah ? T'as repéré les trois petites phrases en plus ? Je n'ai pas rajouté grand chose, j'étais pas très inspirée... 'Fin bon.
Tout au long de tes commentaires, tu m'as fait sourire... entre les "moooh", "j'adoooore", "*o*", puis le "O_O" de la fin... XD Ma Cricri, tu es inimitable !
Hmm sinon... je n'ai pas eu l'occasion avec les comédiens de me montrer aussi sadique que je l'ai été dans la V1 de Polichinelle... alors, je me fais un plaisir immense de renouer avec le sadisme, tu peux me croire ! ^^ J'ai vraiment beaucoup à rattraperde ce côté-là ! ^^
Bref, je te remercie une énième fois ma Cricri pour tout ce que tu fais pour moi... Tu es adooorable, et je te considère comme ma grande soeur de coeur ! (Tu te rends compte ?! Un frère et une soeur de 30 ans ?! Je vais mouriiir ! T_T Nooon, je plaisante ! ;))
Merci encore, et bien des bisouuuus ! ^^
Jupsy
Posté le 09/05/2010
...
 Je peux rester sans voix devant ce chapitre ? En fait, tu mens, ce n'est pas la vraie fin, dis ? Si... non, allez... s'il te plaît ! 
Non, mais tout commençait si bien. J'en avais presque mis les espions de côté avec ce réchauffement entre Camille et Joël. Je me suis laissée aller par mon côté fleur bleue... et cette fin vient me poignarder cruellement. Sadique, va ! 
Enfin... je ne peux que dire bravo pour ce chapitre, et n'avoir qu'une seule envie : lire la suite. Tu ne m'en voudras pas d'être plus longue, mais je dois me remettre... :P
En tout cas, un bon chapitre, un bon moment de lecture, bravo :)
La Ptite Clo
Posté le 09/05/2010
*offre un chocolat de consolation à Aresya*
Ce que tu as lu est bien la vérité... :D Mais ça ne va rendre que plus mouvementée la suite, après tout, ce serait pas drôle si tout était rose entre Joël et Camille...
Merci beaucoup, beaucoup, beaucoup, ma p'tite Aresya. Je te poutouille bien fort. MOUWAK !
 
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