Chapitre 31 : Celui qui reste
Alix
– Tenez-le fermement, ordonna Ensgarde en terminant de préparer sa mixture.
Le spectacle désolant du prince qui se débattait en hurlant comme un forcené avait fini par arracher des larmes à Alix. Plusieurs fois sur le trajet, Albérac avait eu le plus grand mal à l’empêcher de tomber à bas du palefroi tant sa souffrance semblait dévorante. Les yeux révulsés, il criait des paroles indistinctes où seul le nom de son frère était compréhensible.
Albérac ceintura le garçon pour que la guérisseuse lui fasse avaler quelques gouttes d’une potion qui ne tarda pas à l’endormir. Ils l’étendirent sur la table recouverte d’un drap, puis ils le dévêtirent. Ensgarde examina ses brûlures, les baigna longuement à l’aide de linges imprégnés de lotion, les enduisit de graisse et les pansa.
Il dormait toujours lorsque Alix et le maître d’étude le couchèrent dans la chambre. Quand ils revinrent dans la pièce principale, Ensgarde préparait une tisane qu’elle leur servit sans les consulter.
– Les coupures et les brûlures ont été causées simultanément, dit la guérisseuse quand ils furent assis autour de la table. Quelqu’un a pris l’initiative de trancher les liens des jumeaux avec une lame chauffée au rouge, et pas avec finesse. L’idée n’était pas si mauvaise puisqu’elle a évité aux plaies de saigner — du moins pour celui-ci. Mais la douleur doit être atroce. Je vais le maintenir dans le sommeil le plus longtemps possible. Et nous verrons s’il survit à la séparation.
– Comment ça ? demanda Albérac.
– Le temps montrera s’il possède tous les viscères pour vivre indépendamment de son frère. Le sommeil lui permettra aussi de récupérer. Le corps a été éprouvé par la douleur, et le trajet n’a pas arrangé les choses.
– Je le craignais, en effet.
– Vous n’aviez pas le choix et il est mieux ici qu’aux Cimiantes. Quand les plaies deviendront moins cuisantes, je le réveillerai. Mais alors, il faudra s’attendre à une autre espèce de souffrance.
– Celle d’être loin de Themerid, souffla Alix.
Ensgarde la dévisagea de ses yeux perçants. Elle sembla enfin lui trouver de l’intérêt.
– Personne n’aime le changement. Or celui-ci sera de taille.
Elle remplit de nouveau les bols.
– Quant au second jumeau, il faut espérer qu’il ait été soigné avant de perdre trop de sang. D’après ce que vous m’avez raconté, son cœur ne le supporterait pas.
***
Elvire
Depuis la veille, Elvire était assise au chevet de Themerid et refusait de le quitter. D’abord désapprobateur, Iselmar avait vite cessé de protester. Cette surveillance permanente lui permettait d’aller et venir entre son laboratoire et la chambre avec la certitude qu’il serait averti en cas de problème. Son absence auprès du prince, la veille, l’incitait également à faire profil bas. Introuvable pendant plus d’une heure quand l’alerte avait été donnée, il avait laissé échapper qu’il était en compagnie du seigneur Bréol qui souffrait soi-disant d’un refroidissement. Abzal lui avait durement signifié qu’il valait mieux pour lui que Themerid reste en vie. Or, le temps que le médecin agisse, il avait perdu beaucoup de sang.
Iselmar avait appliqué des emplâtres sur les plaies du prince, après avoir retiré la peau brûlée morceau par morceau, parfois à l’aide de couteaux et de pinces. Même pendant cette opération, Elvire avait tenu à rester près de Themerid. Livide, au bord de la nausée, elle n’aurait lâché pour rien au monde le poignet du garçon.
La main posée sur la poitrine du jeune homme, elle ne vivait que pour les infimes battements que percevaient ses doigts à travers la chemise. Flore, inquiète, effectuait des allers-retours entre le château et la villa. Cette fois, elle arriva accompagnée de Godmert, à peine rentré d’un court séjour en Listène.
– Qu’est-ce que c’est que cette folie, ma fille ? tonna Godmert en entrant.
Il avisa la collation à laquelle elle n’avait pas touché.
– Ta sœur me dit que tu n’as rien mangé depuis hier matin ? Et je suis sûr que tu n’as pas dormi non plus !
– Bonjour Père, murmura Elvire en évitant son regard.
– C’est bien beau de montrer toute cette bravoure et cette bonté, mais ce n’est pas une raison pour te rendre malade à ton tour ! Tu vas rentrer sagement, maintenant !
– Pardon, Père, mais je veux rester là.
– Va-t-il falloir que je t’emmène de force ?
– C’est inutile, déclara-t-elle en braquant son regard vers lui, car je reviendrais aussitôt.
Godmert serra les poings et rougit comme si sa tête se remplissait d’eau bouillante.
– Mais pourquoi diantre le ciel m’a-t-il donné des mules plutôt que des enfants ?
– Je promets de manger quelque chose, concéda Elvire.
– Je m’en assurerai, intervint Flore.
Godmert grommela.
– C’est bien parce que j’ai d’autres chats à fouetter... Je compte sur toi pour veiller à ce qu’elle avale quelque chose ! lança-t-il à l’aînée avant de tourner les talons.
Les deux sœurs échangèrent un sourire pour cette petite victoire.
– Je pensais qu’il céderait moins vite, dit Elvire. Plus personne ne m’obligera à quitter cette chambre. Je monte la garde, puisque personne dans ce château ne semble capable de le faire.
Elle surprit la moue dubitative de son aînée.
– Tu me trouves ridicule ? interrogea-t-elle, les yeux rivés sur la poitrine de Themerid.
– Non, je te trouve héroïque, comme toujours, répondit Flore tendrement. Si droite et résolue... Mais je ne suis pas certaine que rester là soit le meilleur moyen d’aider les jumeaux. Et puis, tu ne pourras pas te tenir assise sur cette chaise éternellement ! Mange, maintenant, ou tu auras affaire à moi.
Sous cette fausse menace, Elvire attrapa une pièce de volaille qu’elle considéra d’un œil absent.
– Pourquoi Père a dit qu’il avait d’autres chats à fouetter ?
– Personne n’a vu Alix depuis hier à l’aube, avoua Flore, inquiète. Le seigneur Abzal a envoyé le chef de la garde, ce matin, pour nous expliquer qu’elle avait été aperçue avec Maître Elric. Ils... ils pensent que ce sont eux qui ont enlevé Venzald.
– Quoi ? Impossible ! s’écria Elvire en reposant la viande intacte.
– Bien sûr ! Je n’arrête pas de le dire, mais Père s’est mis dans la tête que Maître Elric avait emmené Alix en même temps que Venzald, et il est fou de rage.
– Comment peut-il penser que notre ancien maître d’étude pourrait s’en prendre à eux ? Alix aura fait un caprice pour l’accompagner quelque part, et le pauvre aura cédé, à bout de patience, voilà tout !
– Tu crois vraiment Alix à ce point inconséquente ? Sans parler de Maître Elric.
– Où se trouve-t-elle alors ?
– Je ne sais pas, souffla Flore.
Songeuse, Elvire se pencha de nouveau sur Themerid pour poser sa main sur sa poitrine. Elle la déplaça plusieurs fois pour déceler la pulsation familière. Rien.
– Il s’est arrêté ! hurla-t-elle.
Renaude entendit son cri alors qu’elle entrait dans la pièce. Elle se précipita vers le lit en écartant Elvire.
– Ramenez le médecin, ordonna-t-elle à Flore qui s’exécuta en courant.
Passant la main sous la chemise du garçon, elle chercha le pouls à son tour, les traits crispés par la concentration.
– Son cœur bat, dit-elle finalement — Elvire relâcha l’air qu’elle retenait dans ses poumons —, mais il est si faible qu’on peine à le sentir. Je ne sais pas s’il tiendra ainsi bien longtemps.
Elle plaça sa main devant le nez de Themerid pour vérifier qu’il respirait. Une fois rassurée, elle se tourna vers Elvire et caressa la joue blafarde de ses doigts ridés.
– Demoiselle Elvire, je vois bien que vous feriez tout pour le prince. Vous pourriez lui rendre un grand service, en allant chercher quelqu’un qui, j’en suis sûre, le soignera mieux qu’Iselmar. Jusque là, il s’opposait formellement à la venue d’Ensgarde, mais son manquement d’hier va nous donner l’avantage. Je vous remplacerai auprès de Themerid, c’est promis.
Elvire écouta les indications de Renaude en dévorant deux cuisses de poule. La requête de la nourrice l’avait ressuscitée. Elle sentait fourmiller jusqu’au bout de ses doigts l’énergie qui lui faisait défaut depuis que Themerid dormait de son sommeil malade. La vieille dame avait raison : elle devait agir. Sortir de cette attente malsaine qui ne lui ressemblait pas. Avant même que Flore revienne avec le médecin, elle courut jusqu’aux écuries pour seller sa jument, et partit précipitamment.
Sa chevauchée vers le marais attisa les braises de sa vigueur. Elle était prête à ramener la rebouteuse coûte que coûte, dût-elle la charger de force sur sa monture. Malgré la raison de sa venue et la frénésie qui l’animait, elle se sentait en paix. Redevenue elle-même, enfin. Sous les sabots de la jument, le sol se fit plus meuble. Elle sortit un instant de ses pensées pour se remémorer les repères fournis par la nourrice et longea un petit bois de peupliers. Comment avait-elle pu se laisser gagner par l’apathie ? La vision du prince inanimé lui revint. Mais tout bien réfléchi, ça ne datait pas de ça. Il y avait eu l’attaque d’Arc-Ansange, la fuite, l’installation à Terce sans nouvelles de Godmert. Et puis la mort du roi, l’avènement de l’Ordre, Themerid inconscient... Et maintenant la disparition d’Alix — mais dans quoi cette enfant s’était-elle donc embarquée ? Après tout ça, rien d’exceptionnel à ressentir de la tristesse. En quelques lunes, son monde avait changé. Qu’étaient devenus les murs familiers, les règles claires à respecter ? Il n’y a pas si longtemps, tout ce qui importait pour elle, c’était de gagner la fierté de son père. Cette vie-là volait en éclat, jour après jour.
Elle secoua la tête pour chasser les préoccupations parasites. Assez de plainte et d’inaction ! Elle allait commencer par trouver cette Ensgarde et s’arranger pour qu’elle soigne Themerid, qu’elle le veuille ou non. Elle atteignit le premier gué et poussa sa monture dans le courant, résolue. Elle ne tarda pas à apercevoir la petite maison de pierres, au centre du marais.
La lumière déclinait, mais elle reconnut avec stupeur le grand bai des princes qui broutait l’herbe grasse de l’îlot et derrière lui, la jument d’Alix. Elle sauta à terre, frappa à la porte et, sans réponse, poussa le battant. La pièce dans laquelle elle entra était vide, mais elle entendit des voix et se dirigea vers la chambre. Une vieille femme aux allures de meule de foin pansait Venzald, assistée par Maître Elric qui maintenait le garçon sur le côté et par Alix qui lui tendait de la charpie.
– Alors c’était vrai ! s’écria-t-elle en provoquant un sursaut des trois autres. Vous l’avez enlevé !
Quelques instants plus tard, Alix et Albérac lui racontaient les évènements de la veille.
– Vous comptez vous cacher ici ? interrogea Elvire.
– Au moins jusqu’à ce que Venzald soit guéri, répondit Albérac, puisqu’Ensgarde est d’accord.
– Mais qui a... fait ça aux jumeaux ? Et qui voulait les emmener ?
– Je me demande si ce n’est pas seulement Venzald qui devait être enlevé. Sinon pourquoi les séparer ?
– C’est incompréhensible, intervint Alix, pourquoi l’un plus que l’autre ?
– Peut-être parce que Themerid n’est pas transportable, répondit l’aventurier.
– Il en serait mort, marmonna Ensgarde, c’est certain.
– Vous pensez que celui qui a ordonné ça se soucie de les garder en vie ? interrogea Elvire.
Albérac passa ses mains sur son visage fatigué.
– J’y réfléchis depuis hier. Toutes les hypothèses paraissent plus tordues les unes que les autres. Pourtant, il me semble que si le commanditaire de l’enlèvement voulait les tuer, il lui aurait suffi de les poignarder dans leur lit, non ?
Elvire sentait qu’il était allé plus loin que ça dans ses déductions.
– Alors, pourquoi écarter Venzald ?
– Je crois que c’est en lien avec la Loi Régalienne. Il me faudrait en consulter le détail, mais d’ici...
– Alix et moi, nous allons rentrer à Terce. Peut-être pourrons-nous y avoir accès ? Expliquez-nous ce qu’il faut chercher.
– Non, je ne rentre pas, dit Alix en croisant les bras.
Albérac allait protester, mais Ensgarde l’arrêta d’un geste. Dehors, un des chevaux avait henni.
L’aventurier sortit, les deux sœurs sur les talons. À l’autre bout de l’îlot, deux silhouettes se dessinaient dans le crépuscule. Le maître d’étude laissa tomber sa canne et se précipita vers le palefroi, tandis que les hommes s’enfuyaient.
– Vous avez été suivie ! cria-t-il à Elvire.
Il lança le cheval au galop dès qu’il fut en selle. Dévalant la berge, il avisa l’un des intrus qui tentait de fuir à pied par le bras de rivière. Il fonça droit sur lui. Le poitrail bai percuta de plein fouet l’homme qui tomba dans l’eau de tout son long tandis qu’Albérac reconnaissait l’uniforme de la garde royale. L’aventurier fit demi-tour, talonna sa monture pour repasser sur le corps à demi immergé. L’un des sabots fendit le crâne au passage.
Pendant ce temps, n’y tenant plus, Elvire avait enfourché sa jument. Elle ne protesta même pas quand Alix l’imita. L’autre garde avait pu rejoindre son cheval attaché un peu plus loin. Sur le ciel bleu foncé, elles le virent traverser le canal vers le sud. Les filles jetèrent leurs montures dans le courant du gué. En escaladant la berge au galop de leurs bêtes légères, elles gagnèrent du terrain et se portèrent à la hauteur du fuyard, chacune d’un côté. Elvire se saisit de l’arc qui ne quittait jamais sa selle pour lui décocher une flèche. Le cavalier la vit, tira sa lourde épée et lui fonça dessus. Effrayé pour sa sœur, Alix poussa sa jument jusqu’à rattraper le soldat qui levait déjà son arme, s’accroupit sur sa selle et lui sauta sur le dos, arrachant à Elvire un hurlement de peur. L’homme, surpris, laissa tomber sa lame, mais se débarrassa de ce poids d’un large mouvement du bras. Éjectée, Alix toucha le sol avec un grand cri. Sa sœur arrêta aussitôt la poursuite, descendit de cheval et courut vers elle pour voir si elle était blessée.
– Tu es folle ! hurla Elvire après avoir constaté qu’Alix était indemne.
– Il allait te tuer et je n’avais pas d’arme, lâcha la benjamine, le souffle encore coupé par la chute.
Le cavalier avait continué sa course, il disparaissait déjà dans la nuit. Albérac, trop en retard pour le rattraper, mit lui aussi pied à terre. Il aida Elvire à ramener sa sœur jusqu’à la chaumière d’Ensgarde.
– Il faut partir ! annonça Albérac quand ils entrèrent.
Ensgarde, imperturbable, entassait des objets dans ses grandes besaces de cuir.
– J’ai vu, dit-elle sans même se retourner. Je me prépare.
– Vous n’êtes pas obligée de venir.
– Bien sûr que si, qui va soigner le petit ? Et vous croyez que ceux-là vont me laisser en paix, après ça ? ajouta-t-elle avec un vague geste en direction de Terce.
Le maître d’étude ne répondit pas. Elvire savait que la rebouteuse avait raison.
– Et pour Themerid ? demanda-t-elle.
– Iselmar est un bon médecin, répliqua la poison. Il faut juste l’inciter à rester dans le droit chemin. Dites-le à Renaude.
– Vous, vous rentrez avec votre sœur ! ordonna Albérac à l’adresse d’Alix.
– Non ! Je veux partir avec vous et Venzald !
– Elvire, emmenez-la !
Lentement, Elvire secoua la tête.
– Je ne pourrais pas la forcer. Et puis... elle a été vue avec vous, au château. La garde considère qu’elle est complice de l’enlèvement de Venzald. Père a beau crier au scandale, je ne sais pas ce qu’en pense Abzal. Peut-être est-il prudent qu’elle parte avec vous.
– Et toi ? demanda Alix.
– Je veux rentrer à Terce.
– Les hommes qui vous ont suivie appartiennent à la garde royale. Celui qui s’est échappé va sûrement vous dénoncer.
– Tant pis, je prends le risque. Il faisait nuit, nous étions au galop, il ne pourra pas affirmer que c’était moi. Enfin j’espère... ajouta-t-elle à mi-voix.
Ils devaient partager les forces autour des princes. Elvire protégerait celui qui restait.
***
Conrad de Bran
Les pieds dégoulinant de la neige qui persistait sur Hiverine, le garde poussa les battants de la salle à manger où le seigneur Conrad dînait avec sa famille.
– Eh bien ! s’écria le gouverneur avec une mine terrible. Que viens-tu répandre ta boue sur mes tapis ? J’espère pour tes oreilles que tu as une bonne raison !
Sa petite fille éclata de rire. Le soldat — qui savait qu’il ne risquait rien — chercha son souffle.
– Seigneur, toute une troupe, à la porte sud, lâcha-t-il d’une voix entrecoupée.
– Une troupe de quoi ? De loubles bleus ? Parle donc, animal !
– De pélégris, seigneur. Ils demandent à vous voir.
Conrad reprit son sérieux d’un seul coup.
– Je trouvais qu’ils avaient tardé, dit-il en faisant signe à son fils Aloïs de le suivre.
Une ligne de gardes hiveriniens, aussi grands que leur gouverneur, barrait l’entrée de la ville. Au-delà des remparts, une trentaine d’uniformes vert sombre patientaient dans un ordre impeccable. Même les chevaux se tenaient immobiles.
– Regarde-les, glissa Conrad au messager, on dirait des sapins plantés dans la forêt. Autant de personnalité, derrière leurs masques. Pourtant, je préfère quand même les sapins.
Le garde et Aloïs pouffèrent. Le gouverneur passa l’arche de pierres blanches et se campa face à la troupe. Ses soldats se rassemblèrent derrière lui. En tête des pélégris, un homme au visage nu semblait commander. Il mit pied à terre et s’avança vers Conrad.
– Par ordre du grand prévôt et du régent, la prévôté d’Hiverine doit m’être cédée, annonça-t-il.
Il brandit sous le nez du géant un parchemin qui portait le sceau de Bréol, celui d’Abzal et celui du royaume. Conrad prit le document sans y jeter un œil et toisa son interlocuteur.
– Et qui êtes-vous ? demanda-t-il alors que l’autre s’efforçait visiblement de ne pas reculer.
– Je suis Joss Cerben, Grand Érudit du Haut-Savoir.
Conrad leva le parchemin à hauteur de visage, le déchira lentement et en tendit les deux morceaux à Cerben.
– Voici tout le cas que je fais de votre message officiel. Vous pouvez aller le rendre à qui de droit.
Il tourna le dos et s’en retourna vers la cité blanche.
– Seigneur Conrad ! cria Joss Cerben.
Le géant roux s’arrêta et fit demi-tour en soupirant pour montrer qu’il accordait une faveur.
– Vous n’avez pas le choix. Que vous le vouliez ou non, nous allons pénétrer dans la ville, et dans toutes celles de la province. Et que vous le vouliez ou non, je suis le prévôt d’Hiverine, à partir d’aujourd’hui.
– L’Ordre n’entrera pas à Bran-Glace, gronda Conrad en détachant les mots. Vous et vos hommes, vous allez repartir d’où vous venez et ne plus revenir dans la région.
À nouveau, il se retourna vers la grande arche. Une rage froide crispait sa mâchoire. Si l’Érudit l’apostrophait encore, il ne répondrait plus de rien.
– Nous entrerons donc par la force, annonça Cerben dans le chuintement de son épée qu’il tirait du fourreau.
Il n’eut pas le temps de l’abattre pour ordonner l’assaut. Conrad avait dégainé à son tour et dans un mouvement tournant, il trancha le cou et le bras de Cerben. Les soldats de Bran-Glace avaient déjà entouré leur gouverneur, prêts à défendre le passage. Devant un tel barrage, les uniformes verts privés de leur commandement ne bougèrent pas.
Conrad attrapa par les cheveux la tête de l’Érudit dans la neige rouge. Il la lança au pélégri le plus proche, en rugissant :
– Vous pouvez amener ça à Bréol et au régent. Et leur répéter ceci : l’Ordre n’entrera pas en Hiverine !
J'ai fini ma session d'écriture plus tôt que prévu donc me revoilà ^^ C'est pas sérieux mais je n'arrive pas à m'en empêcher xD
Un chapitre qui permet de souffler même s'il y a beaucoup d'action, ce n'est pas plus mal.
Je me demande où vont s'en aller la poison, l'aventurier et le prince... En tous cas depuis qu'ils sont évanouis, on apprend à découvrir d'autres personnages, ta riche galerie continue de se développer.
Conrad a du cran, ça fait plaisir au milieu du marasme ambiant que quelqu'un tient tête à l'ordre. Mais j'ai bien peur que cet acte de résistance lui coûte cher... En tout cas, le personnage gagne beaucoup à mes yeux après ce coup d'épée bien badass qui intervient au bon moment XD
J'enchaîne un autre chapitre (=
En effet, d'autres personnages sont mis en avant dans cette partie 4. Tant mieux si tu n'es pas perdu : parfois je me dis que j'ai trop de persos !
Conrad, on ne le voit pas souvent, mais j'ai essayé de faire en sorte qu'il soit mémorable.
Nos amis s’enfoncent de plus en plus dans les problèmes. Elvire est bien courageuse. J’espère qu’on ne lui fera pas de mal et qu’elle pourra veiller sur Themerid avec Flore et Renaude.
Crâne fendu, tête coupée… Je vois que la séparation des princes a ravivé ton goût du sang. ;-)
Conrad est un brave, mais il vaut mieux ne pas le contrarier. J’espère qu’il arrivera à se défendre jusqu’à la victoire des gentils. Parce qu’elle est prévue, hein ? Hein ?
Coquilles et remarques :
— Vous pourriez lui rendre un grand service, en allant chercher quelqu’un [Je ne mettrais pas la virgule.]
— Jusque là, il s’opposait formellement [Jusque-là]
— Mais tout bien réfléchi, ça ne datait pas de ça. [Pour une correction minimale, je dirais « ça ne datait pas de là ».]
— Il n’y a pas si longtemps, tout ce qui importait pour elle [Il n’y avait pas]
— Assez de plainte et d’inaction ! [Je mettrais « plaintes » (au pluriel).]
— je suis le prévôt d’Hiverine, à partir d’aujourd’hui [Je ne mettrais pas la virgule.]
— vous allez repartir d’où vous venez et [Je dirais « retourner là d’où vous venez ».]
Nos héros s'enfoncent effectivement dans les problèmes, mais c'est normal car en fait, si elle s'étale sur deux tomes, c'est bien une seule et même histoire (ce qui avait d'ailleurs donné lieu à de grands débats sur mon JdB, car certaines plumes considèrent que chaque tome d'une saga doit avoir ses propres enjeux et résolutions, en plus de l'enjeu de la saga, alors que moi j'ai scindé simplement parce que c'était trop long et seuls les enjeux de la saga existent, rien ne sera résolu à la fin du tome 1). Donc nous en sommes au moment où les grosses complications arrivent. Et en effet, tu commences à me connaître, ça se manifeste notamment par du sang (désolée).
Conrad est très brave, mais comme tu l'as vu ensuite, il n'est malheureusement pas invincible (et surtout lui et ses hommes ne sont pas assez nombreux pour sauver tout le royaume !).
La victoire des gentils ? Prévue ? Va savoir... ;)
Themerid, ça craint pour toi, j'espère qu'Iselmar va te sauver, mais vu le titre du chapitre, je doute je doute....
Courage Alix et Albérac, et j'espère qu'Elvire ne paiera pas pour sa fuite, elle aussi....
Le titre du chapitre, c'était à la fois pour Themerid (celui qui reste... à Terce), mais aussi pour Conrad (celui qui reste... fidèle)
Ah j'adore ce grand Rouquin qui ne se laisse pas faire. Conrad a eu raison d'agir ainsi !
Oui, Conrad est attachant, même s'il coupe des têtes. Tu entendras encore parlé de lui dans pas longtemps.
Merci pour ta lecture et ton retour !
J'en reviens aux jumeaux... Pour quelle raison était il nécessaire de les séparer ?
Et quel rapport avec la loi regalienne ?
Ah lala j'espère avoir mes réponses dans les prochains chapitres !
Alors la séparation des jumeaux... il y a effectivement des clés un peu plus loin (et avec ton radar à indice, je suis sûre que tu les verras:) ), mais c'est un des nœuds de l'intrigue principale. Du coup, ça se clarifiera plutôt dans le tome 2.