Elle se réveilla en sursaut. Une impression étrange lui avait traversé le corps. Elle sentit une panique l’envahir. Une oppression approcher. Elle alluma une bougie, puis sortit prudemment de sa chambre à pas feutrés.
Elle savait. Elle le ressentait au fond de ses entrailles.
Lorsqu’elle arriva dans son bureau, la lumière vacillante de la bougie révéla une silhouette sombre qui l’attendait. Elle se constitua une prestance. Elle releva la tête avec supériorité et abaissa les yeux sur ce petit homme, chétif, et pourtant, le plus puissant du royaume à cette heure.
- Ce ne sont pas des façons d’obtenir une entrevue, déplora Sélène avec froideur.
Le sourire carnassier déforma le visage sous la capuche.
- C’est la mienne, rétorqua-t-il de sa voix éraillée.
- Vous devez avoir une bonne raison pour vous introduire ici.
- En effet. J’ai besoin de votre savoir.
Sélène en resta bouche bée. Elle était convaincue qu’un tel personnage n’avait besoin de personne. Puis, la raison de sa venue devint une évidence.
- Difficile de maîtriser plusieurs éléments dans un seul corps, n’est-ce pas ?
Le sourire s’effaça. Il écarta sa cape et révéla une dague noire à sa ceinture.
- Je vous conseille de ne pas vous moquer de moi.
- C’était une simple remarque, esquiva Sélène.
- Évitez, à l’avenir.
Il ne plaisantait pas. Sélène savait qu’il la tuerait si elle le contrariait, quand bien même il n’aurait pas eu sa réponse. Il était certainement assez intelligent pour la trouver seul en fouillant ses affaires.
- Vous avez commis une imprudence, dit-elle, mais par chance, les deux éléments que vous avez intégrés ne sont pas des forces d’opposition. La Terre et la Lumière forment une bonne harmonie.
- Sauf que je n’ai pas encore intégré la Lumière. Celle-ci sera ma troisième, rectifia-t-il avec un plaisir non dissimulé.
Sélène écarquilla les yeux. Elle le fixa, tentant de capter son regard à travers le tissu sombre qui lui mangeait le visage. Elle n’avait plus besoin de le chercher, le Mystique de l’Ombre était venu à elle. C’était encore pire que ce qu’elle avait imaginé. Pourtant, elle y vit immédiatement une opportunité intéressante.
- Je suis ravie de vous rencontrer enfin, reprit-elle avec politesse. Fenrir n’a pas daigné m’informer de votre nomination, qui, si ma mémoire est bonne, doit dater d’une vingtaine d’années, à la suite de la mort de Kregan Doileir.
Elle sentit la lame froide de Kerst appuyer sur son cou. Elle n’avait même pas eu le temps de le voir bouger.
- Ne prononcez jamais ce nom devant moi, menaça-t-il d’une voix grinçante.
- Veuillez m’excuser.
Kerst recula. Sélène commençait à se demander si négocier avec un tel personnage était une bonne idée, cependant, peut-être était-il le seul qui pourrait l’aider à mener à bien son projet.
- Ils ne vous ont pas prévenue car ma nomination n’est pas ce qu’on pourrait appeler… Officielle.
- Oh. Vous n’étiez pas prédestiné à être Mystique mais vous connaissiez les formules du sceau ?
- C’est une longue histoire.
- Je vois… Vous avez bien fait de venir me trouver dans ce cas. Si vous aviez tenté d’intégrer la Lumière alors que l’Ombre vous habite déjà, vous auriez littéralement implosé. Ce sont deux forces contraires.
- Je me fiche de tout ça. Est-ce possible, et comment ?
Sélène soupira. Elle devait la jouer fine si elle voulait réussir.
- Je pense que c’est possible. Mais je ne sais encore comment. Cela n’a jamais été fait auparavant, bien que certains l’aient déjà tenté. Toutefois… Je pense que notre collaboration à ce sujet pourrait aboutir.
Sans voir le regard de Kerst, elle savait qu’elle avait éveillé son intérêt. Il ne répondit pas avec son acidité habituelle.
- Vous avez réussi à faire cohabiter deux éléments dans un seul corps grâce à la possession des armes sacrées. C’est déjà un exploit, cela n’avait jamais été réussi avant vous. Je suis certaine qu’en mettant nos savoirs en commun, nous pourrions y parvenir.
- J’avoue que je suis un peu perdu, dit Kerst avec malice. N’êtes-vous pas la gardienne des Mystiques, Dame Eolas, censée protéger ces minables et leurs pouvoirs ?
- Ce n’est qu’un titre. En réalité, je suis la gardienne du pouvoir des Mystiques. Les individus ne m’intéressent pas vraiment. Ce qui m’importe, ce sont leurs armes, et ce qu’elles abritent. Tout cela ne doit pas se perdre.
- Mais si cela tombe entre mes mains, n’est-ce pas un problème pour vous ? Votre petit système s’effondrera, et vous avec, insista Kerst.
Elle avait la sensation qu’il lisait parfaitement dans ses intentions, elle marchait sur un fil. Un mot de travers et il lui trancherait la gorge.
- Je ne connais pas vos projets, monsieur. Je ne saurai vous dire si cela est problématique pour l’heure.
- Je viens de vous l’expliquer pourtant.
- Ce système ne m’appartient pas, mentit-elle, je ne suis pas forcée de tomber avec, par conséquent. De plus, j’ose croire que si je vous apporte mon aide, vous m’épargnerez des désagréments trop importants.
Kerst l’observa avec avidité. Elle avait la sensation qu’elle avait réussi à l’impressionner, ce qui était certainement une bonne chose pour elle.
- Très bien, je suppose que nous allons parvenir à nous comprendre. Je me charge de récupérer les armes sacrées, et vous m’aidez à faire en sorte que je puisse utiliser tous les pouvoirs. En échange, lorsque j’en aurais terminé, je vous garantis la vie sauve.
- Je suppose que nous ne trouverons pas meilleur compromis, conclut Sélène.
Il sourit avant de s’éloigner vers la porte. Alors qu’il touchait la poignée, il se retourna, un large sourire dévoilant ses dents pointues.
- Une dernière chose, Dame Eolas. Il est inutile de me mentir, je sais parfaitement qui vous êtes. Nox m’a tout dit de vous.
Il disparut avant que le visage de Sélène n’eut le temps de pâlir. Son cœur s’emballa. Elle serra ses mains de rage sur les accoudoirs de son fauteuil.
Autour d’elle, les ombres dansèrent dans un éclat de rire maléfique et sournois.
Mon Dieu... Tu vas poster la suite quand ?
J'ai adoré la description de Kerst aussi. On le voit sous un autre jour et c'est plutôt cool.
Deux passages que j'ai trouvé redondants :
"elle sortit prudemment de sa chambre à pas feutrés." - prudemment et à pas feutrés, ça sous-entend la même chose.
"Elle se constitua une prestance. Elle releva la tête avec supériorité et abaissa les yeux sur ce petit homme" La première phrase résume la seconde. Est-elle utile ?
Vivement la suite !
À bientôt ^^
La suite est déjà écrite mais il faut juste que je trouve le temps de lire des chapitres sur Plume d'argent ^^" J'ai été pas mal prise et j'ai fait un petit blocage sur l'histoire mais ça y est c'est réglé et j'ai fait le plan jusqu'à la fin... ;)
Je vais tâcher de ne pas traîner pour mettre le chapitre suivant !
Merci pour tes remarques, je prends note !
A bientôt :)