De guerre lasse, la Souveraine Satia se laissa aller contre son dossier. Une nouvelle fois, les discussions s’emballaient sur des points de détail alors qu’il y avait bien plus important à ses yeux.
À son habitude, Lucas était debout près d’elle. Il n’intervenait pas durant les débats, mais sa seule présence l’apaisait. Cette fois, il alla jusqu’à poser une main sur son épaule.
— Cela ne te ressemble pas, souffla-t-il pour ses seules oreilles.
Mais l’Assemblée était sur les dents, prête à demander des comptes à leur allié impérial sur les incursions Stolisters sur leur territoire. Le Djicam Aioros avait été le premier à en faire les frais, et d’autres Royaumes, notamment Aquiléa et Déoris, avaient signalé des étrangers suspects sur leur sol. Pour le moment, les soldats de la Fédération les avaient repoussés sans subir de pertes, mais la situation ne pouvait perdurer ainsi.
Plus inquiétant, Satia n’avait aucune nouvelle récente de sa fille, ni des héritiers impériaux. Lucas pouvait bien tenter de la rassurer, elle le savait soucieux également.
Ils étaient en vie, rappela Séliak. Aioros t’as déjà dit tout ce qu’il savait.
Satia était bien d’accord avec son phénix, mais le temps passait et rien d’autre ne lui parvenait.
Savoir Surielle au cœur de la tourmente l’empêchait de retrouver son calme. Elle sentit Lucas se tendre, releva les yeux. Une faille miroitait en plein milieu de la salle, se déchira dans un éclair de lumière.
Les Stolisters avaient-ils osé pénétrer le coeur même de la Fédération des Douze Royaumes ?
Satia bondit sur ses pieds, une flamme dans sa main droite, prête à se battre. Lame en main, Elésyne s’était perchée sur la courte barrière qui séparait les loges des représentants de chaque Royaume, tandis que le Djicam Altaïr avait encoché une flèche.
Puis une dizaine de phénix se matérialisèrent dans l’enceinte ; certains se perchèrent sur les bras et les épaules de leur étrange visiteur.
Satia fit disparaitre sa flamme avant de s’asseoir, abasourdie.
La silhouette lui sourit.
— Je sais que j’ai été absent quelques siècles, mais j’avoue que je m’attendais à un autre accueil.
— Eraïm en personne, murmura la Djicam de Mayar avec respect.
Et tous les Djicams et leurs attenants plongèrent dans un profond salut.
— Que nous vaut l’honneur de votre présence ? s’enquit Satia avec une pointe d’inquiétude.
— Concise et directe, répondit Eraïm en s’approchant. La digne descendante de Félénor. Vos alliés impériaux font face à une menace inédite. Ils auraient bien besoin d’aide. La leur accorderez-vous ?
Satia balaya les Djicams du regard ; tous acquiescèrent, conscient que la demande de leur Dieu ne pouvait être ignorée.
— Bien sûr.
— Alors rassemblez vos troupes. Je vais vous ouvrir un portail.
Satia se leva, consulta son époux et prit sa décision.
— J’y vais. Jodörm, tu diriges en mon absence. Lucas, je te laisse la défense.
Le Durckma pâlit mais hocha la tête, Lucas se contenta d’un sourire. Aioros se leva à son tour.
— Je vous accompagne. Elésyne, rassemble ton escouade.
Grâce au lien qui unissait les Compagnons des Mecers, deux douzaines d’Emissaires accompagnés de plusieurs Messagers entrèrent bientôt dans le bâtiment. Après une brève conversation avec leur Djicam, ils s’élancèrent au travers du portail. Aioros donna ses consignes à sa deuxième fille Sidonie ainsi qu’au Messager Mithial qui l’épaulerait, et s’engagea à son tour.
— Il vous faudra des soins, dit Sanae en s’approchant. Je vous accompagne.
Satia sourit, ravie de la présence de la Soctorienne. La moitié de son crâne était rasée, et le restant de sa chevelure rouge était soigneusement tressée, symbolisant son statut de Mage. Au-dessus des Guérisseurs Novices ou Initiés, les Mages étaient les meilleurs soigneurs de Soctoris, et ils étaient peu nombreux. Ses liens avec le troisième Royaume lui avaient interdit la position de Djicam de Soctoris, mais Sanae restait la meilleure guérisseuse de la Fédération.
Le Djicam Altaïr du Troisième Royaume leur envoya un groupe d’archers et Sanae lui souffla un baiser auquel il répondit d’un clin d’œil. Un bataillon de centaures se joignirent à eux, ainsi que les soldats de la Garde du Phénix en faction. Puis Satia franchit l’ouverture à son tour et le portail disparut.
Les Djicams restants clignèrent des yeux, mais ils ne pouvaient nier la réalité de ce qui venait de se passer.
Eraïm était toujours là.
— À défaut de l’Empire, les Stolisters pourraient croire trouver ici une proie plus facile. Soyez sur vos gardes, dit-il avant de disparaitre, comme dissipé par un souffle de vent.
Le Durckma Jodörm déglutit, pleinement conscient des regards fixés sur lui, pleinement conscient des responsabilités qu’il devait endosser. Était-il prêt ?
Une main se posa sur son épaule, et Jodörm releva la tête vers le consort de la Souveraine. Les yeux bleu-acier, sereins, le fixaient.
— Satia a toute confiance en toi. Ne l’oublie pas.
Jodörm s’humecta les lèvres, se redressa pour s’adresser aux Djicams.
— Au vu de la menace qui plane sur nous, déclara-t-il. Je demande la déclaration de l’état d’urgence.
Il n’y eut pas besoin de plus de quelques minutes pour que les Djicams s’accordent et approuvent. Un conseil restreint se tint immédiatement ; le Wild transmit les consignes aux Mecers, prêts à se mobiliser sur les fronts. Les ailés étaient capables de parcourir de grandes distances rapidement et informèrent la plupart des grandes villes. Des courriers de la Fédération s’occuperaient de faire parvenir l’information jusqu’au plus petit village.
Les villes se fermèrent, s’armèrent.
Les Stolisters pouvaient venir. Ils étaient prêts.
*****
— Comment allons-nous faire ? s’inquiéta Jodörm.
— Les phénix vont nous aider, indiqua Lucas.
Le commandant Fédric avait déployé une carte des Douze Royaumes sur la grande table que des domestiques avaient installée au centre de l’Assemblée.
Les soldats de la garde du Phénix avaient quitté la garnison pour se déployer dans et autour du Palais. Son second, Sinoros, s’occuperait de protéger la Souveraine dans l’Empire.
À ses côtés se tenait Sidonie sey Garden, dans son uniforme gris d’Émissaire. Deux Cercles dorés brillaient sur la gauche de sa poitrine. Elle avait conscience d’être inexpérimentée dans ce rôle, heureusement le Messager Mithial à ses côtés serait là pour la guider. La présence de son oncle la rassurait ; Lucas saurait éviter qu’elle ne commette une erreur qui condamnerait la Fédération.
— Les Compagnons indiqueront la position des failles de la Barrière, approuva-t-elle.
En l’absence de son père et de sa sœur ainée, elle était responsable des armées massiliennes et se trouvait bien trop jeune pour remplir ce rôle.
— Et les phénix téléporteront nos troupes aux endroits ciblés, compléta Lucas.
Nous sommes prêts, approuva Iskor.
La théorie de Séliak était que le dieu des Stolisters, Orhim, parvenait à créer des brèches dans la Barrière générée par les phénix. Malgré leurs pouvoirs, les phénix restaient impuissants face à un dieu.
À l’extérieur, les troupes de la Fédération se rassemblaient par unités dans les jardins du Palais. Des escouades mobiles, diversifiées, accompagnées de guérisseurs de Soctoris.
Une faille. Déoris.
Lucas marqua l’endroit sur la carte. Une concertation rapide plus tard, et une escouade était envoyée sur place.
Un éclat métallique attira son attention.
— Des assassins, lâcha-t-il avant de bondir.
Fédric jura, les soldats sous ses ordres se précipitèrent. Vêtus de noir, cinq silhouettes franchirent la faille avant qu’elle ne se referme, dont deux archers. Les flèches sifflèrent, et les deux assaillants s’écroulèrent comme le Djicam Altaïr baissait son arme. Les autres étaient déjà engagés au corps à corps. Celui qui avait cru trouver en Lucas une proie facile en fut pour ses frais ; le Veilleur l’immobilisa en deux passes rapides.
Fédric terrassa son adversaire d’un coup imparable avant de s’intéresser au prisonnier.
— Que voulez-vous ?
— Votre mort à tous, sourit-il. Orhim vaincra !
Un bref échange de regard avec le Veilleur et le Durckma ; Fédric tua le Stolister d’un coup de dague. Mieux valait ne pas s’encombrer de prisonniers, surtout s’il n’y avait rien à en tirer. Fédric savait reconnaitre les fanatiques, et cette lueur de démence dans les yeux du Stolister n’augurait rien de bon pour la suite.
L’air pâle, Jodörm passa une main dans ses cheveux. Une flèche l’avait raté de peu.
— Restons sur nos gardes, dit Fédric, conscient d’être passé près de la catastrophe.
Jodörm acquiesça, posa sa hache.
— Ne laissons pas ces ordures nous déstabiliser.
Déjà des guérisseurs de Soctoris soignaient les blessés.
— Il faut prévoir une rotation des soigneurs, ou nous allons les épuiser, songea Jodörm.
— Bonne idée, Durckma, approuva le Djicam Altaïr.
Une autre attaque.
Les consignes furent données.
Les heures s’écoulèrent, rythmées par les attaques sur les douze planètes et de plus rares assauts au sein du Palais.
Des domestiques se relayaient pour s’occuper des blessés, apporter à manger, déblayer les corps.
La fatigue et la tension creusaient les traits ; les cartes étaient constellées de marques.
Tu approches de tes limites, nota Iskor, soucieux.
Je sais, grimaça Lucas.
La sueur perlait sur son front et des tremblements agitaient son corps. Bientôt il lui faudrait prendre du repos.
Une faille apparut dans les airs ; miroita quelques secondes avant de cracher sept soldats ennemis.
Fédric jura en se portant au contact. Il eut le temps de tuer deux ennemis avant d’être touché par une dague qui l’envoya au sol. Le commandant frémit mais ne se releva pas. Jodörm était aux prises avec deux soldats qu’il maintenait à distance avec sa hache de combat. Sa carrure gigantesque était ici un atout.
Lucas étourdit un ennemi avant de l’envoyer vers Sidonie qui le transperça de son épée ; à quelques pas, deux soldats de la garde du Phénix s’écroulèrent. Sidonie fut touchée au bras, contre-attaqua et perça la garde de son adversaire. Jodörm achevait le dernier survivant quand l’air se déchira de nouveau.
Le souffle court, Lucas retint un juron. La présence écrasante qu’il percevait n’était pas celle de simples soldats.
Orhim, confirma Iskor. Je t’envoie du renfort.
C’est de la folie. Tu n’as pas assez d’énergie pour une nouvelle téléportation. Nous nous débrouillerons.
Une dernière devrait être possible. Je ne peux pas te laisser ainsi à sa merci !
Je refuse.
Ça va le faire.
Non. Iskor, non !
Lucas hurla comme la douleur broyait son esprit ; tous se tournèrent vers lui, inquiets. Même vingt-et-un ans plus tard, Lucas reconnaissait la signification de cette souffrance brutale qui consumait chaque parcelle de son âme.
Son Compagnon à l’agonie, qui avait échoué à produire un miracle.
Il s’écroula.
*****
Satia cligna des yeux, se força à rester immobile le temps que la déstabilisation du voyage s’estompe. Ils étaient arrivés dans une vaste plaine, cernée par des collines à droite, et l’orée d’une forêt se devinait à leur gauche. Droit devant eux, derrière d’autres collines, une colonne de fumée noirâtre s’élevait dans le ciel. Peut-être aurait-elle du demander à Eraïm où il avait décidé de les envoyer. Sur quel Monde se trouvaient-ils ? Où était l’ennemi ? Où étaient leurs alliés ?
Elle n’aimait pas cette incertitude, mais se devait d’apparaitre confiante pour rassurer ses troupes. Le Djicam Aioros, comme Sanae, étaient restés à ses côtés tandis que le régiment de centaures se déployait autour d’eux, attentif.
Elesyne et ses Mecers se rapprochèrent, avant que la jeune femme ne gagne les airs pour vérifier les lieux, sûrement sur une demande du Djicam.
— Nous voici donc dans l’Empire ?
Satia acquiesça.
— L’endroit me parait plutôt désert. Étrange, mais si Eraïm nous a ouvert un passage ici… j’imagine qu’il y a une raison.
Tu imagines bien, confirma Séliak.
— Un village est en feu à l’Est, signala Elesyne qui avait effectué une rapide reconnaissance.
— Des signes de combats ?
— Peut-être mais finis depuis longtemps.
Un bruit sourd leur fit lever les yeux.
— Quelque chose approche, avertit Elesyne. Quelque chose qui vole sans ailes.
— Des aéronefs, précisa Satia.
Elle était inquiète. Les rares buissons et le peu de végétation n’offraient aucun camouflage. Lors de ses visites, elle avait beaucoup appris sur la technologie impériale. Satia avait compris l’importance cruciale de la Barrière générée par les phénix, qui protégeait les douze planètes de la Fédération. Sans elle, ils auraient rapidement écrasés par la domination technologique de leurs adversaires. Comment lutter contre des armes létales à énergie, utilisables à distance, sans aucune protection ?
— Qu’est-ce qu’on fait ? demanda le Messager Grafel.
— S’ils attaquent, on se disperse et on riposte, dit calmement Aioros.
Ils étaient tous inquiets, réalisa la Souveraine. Ils n’étaient pas chez eux, et doutaient logiquement de la capacité de leurs supérieurs à les protéger ici. Satia se souvenait parfaitement de ses premières incursions au sein des villes impériales, sa stupeur face à une technologie qui la dépassait. Elle devait avoir confiance en ses soldats, en leur capacité à s’adapter.
Une salve de lasers rouges se perdit au-dessus de leurs têtes ; tous se baissèrent en réflexe. Avant que Satia n’ait le temps de lancer ses ordres, une ombre immense les recouvrit, masquant le soleil. Un rugissement déchira les airs, puis Satia sentit son pouvoir lié au Feu réagir comme une onde de chaleur se répandait dans les airs.
Le vaisseaux s’écrasa dans un fracas qui fit trembler le sol, masquant presque l’arrivée de l’énorme bête qui se posa près d’eux. Plus qu’énorme, songea Satia en avisant l’œil immense qui se braqua sur elle un instant.
Un dragon de terre, dit Séliak.
Il n’était pas seul ; une silhouette glissa le long de la patte avant, freina sa chute de ses ailes écarlates. Et tituba en se réceptionnant.
— Que nous vaut l’honneur de votre visite, altesse ? salua-t-il à l’impériale.
Satia ignora les murmures qui couraient dans les rangs massiliens, ainsi que la tension soudaine autour d’elle.
— Eraïm nous a ouvert un portail, répondit Satia.
Le Commandeur haussa un sourcil.
— Intéressant. J’aurais cru Lucas avec vous.
— Il supervise la défense des douze Royaumes avec le Durckma Jodörm. Les Stolisters nous attaquent également.
Satia n’ajouta pas qu’ils combattraient mieux séparément, sans avoir le réflexe de garder un œil l’un sur l’autre.
Éric s’assombrit.
— Cela légitimera votre présence ici, ce n’est pas plus mal. Nous venons de raser un de leurs villages.
— Et les civils ? intervint Sanae, sans cacher sa contrariété.
Le Commandeur ne se démonta pas.
— Ils ont abrité des renégats qui ont tué le prince héritier Rayad. Sa majesté impériale a désiré faire un exemple.
Satia avait blêmi.
— Eraïm ! Où sont les autres ?
— Prisonniers de ce complexe, indiqua-t-il. Alistair m’a communiqué sa position il y a cinq jours.
— Cinq jours ! Pourquoi n’ai-je pas été informée ?
— Qu’auriez-vous fait de plus ? rétorqua Éric. Nous avons fait au plus vite, compte tenu de la situation.
Satia resta silencieuse. Elle était furieuse, tout en reconnaissant la justesse de son point de vue. Mais il s’agissait de sa fille, là-bas, et elle aurait donné n’importe quoi pour la serrer dans ses bras.
Fais-lui confiance.
— Que proposez-vous ?
— Notre camp est à plusieurs kilomètres. Je peux vous y conduire, afin d’y établir une stratégie en toute sécurité. Vos troupes seraient un atout indéniable.
— Nous n’avons pas que des ailés, précisa Satia.
Un sourire narquois revint sur le visage du Commandeur.
— Teildreirrointh nous transportera.
— Nous ? releva Satia en lui emboitant le pas.
Éric pinça les lèvres, jeta un coup d’oeil à son escorte, bien trop proche. Les Massiliens étaient crispés, et il le comprenait. Aioros n’avait pas décroché un mot, même si sa fille échouait à masquer sa curiosité.
— Il est préférable que je m’abstienne de voler pour le moment, répondit-il enfin.
Satia ne fut pas dupe, bien évidemment. Elle côtoyait les Massiliens depuis suffisamment longtemps pour comprendre les sous-entendus de leur vérité. Une blessure bénigne n’affecterait en rien sa capacité à gagner les cieux, et pour que ça soit sérieux, il fallait des combats récents et difficiles. Les Stolisters s’annonçaient comme des adversaires coriaces.
Ce ne fut que lorsqu’ils furent tout proche du dragon que Satia réalisa qu’il était bien plus énorme que ce qu’elle avait cru au premier abord. A elle seule, la tête avait la taille d’une petite colline. Si elle avait eu des doutes sur sa capacité à transporter l’ensemble de ses compagnons… ils étaient dissipés. Pour l’instant, l’oeil immense, couleur ambre, les contemplait, comme pour les juger. Puis la tête se releva, et il bailla, dévoilant des dents acérées bien plus grandes qu’eux. Dans son dos, Satia sentit ses compatriotes s’agiter. Même Elésyne avait eu un mouvement de recul. Aioros, lui, n’avait pas frémi. Le Djicam de Massilia ne se laisserait pas impressionner facilement, surtout devant ses hommes. Encore une question d’honneur.
Satia devait plutôt se réjouir que la rencontre entre les deux hommes ne se soit pas soldée par un règlement de comptes. Si Lucas et Éric entretenaient des rapports cordiaux depuis le Traité de Paix, Satia savait qu’Aioros faisait tout pour ignorer la chose. Encore un problème supplémentaire dont elle se serait bien passée.
Éric posa la main sur l’immense patte, et la Souveraine devina qu’il communiquait avec son Compagnon.
Un être sage et puissant.
Nous pouvons donc nous fier à lui ?
Totalement.
Le Commandeur se tourna vers le groupe. Était-il soucieux ou Satia se faisait-elle des idées ? L’atmosphère restait tendue ; si la plupart des soldats ici n’avaient pas connu la guerre qui avait opposé l’Empire et la Fédération, ils en avaient entendu les récits. Tous savaient qu’un Massilien avait trahi sa nation ; tous avaient connaissance du nom d’Éric aux Ailes Rouges.
— N’ayez crainte, tout se passera bien.
Malgré ces paroles rassurantes, aucun des soldats ne se pressait pour monter à l’assaut de cette montagne de pierre. Satia allait se dévouer lorsqu’Aioros la devança.
— Une sacrée taille, dit-il en posant son pied sur une écaille qui formait comme une marche. Un besoin de compenser quelque chose, peut-être ?
Stupéfaite, Satia se demanda à quoi jouait le Djicam. Après trois décennies à s’ignorer, elle aurait imaginé un peu plus de diplomatie dans cette première reprise de contact. En fait, elle n’avait même pas imaginé que les deux hommes se parleraient.
Pourtant, un léger sourire apparut sur les lèvres du Commandeur.
— Quelque chose comme ça, peut-être bien.
Comme s’il s’était agi d’un déclic, les Massiliens bondirent dans les airs, guidés par Elésyne. Satia avait eu le temps de voir la surprise sur son visage quand les deux hommes s’étaient parlé. Nul doute qu’elle aurait une discussion avec son père - s’ils avaient encore le temps pour ça.
Les centaures négocièrent la pente abrupte plus facilement que ne l’escomptait Satia, à qui l’ascension prit plusieurs minutes et la laissa essoufflée. Vraiment, ce dragon était immense.
Le Commandeur les rejoignit ensuite, s’assura d’un regard que tous étaient placés de façon à ne pas gêner le vol de Teldrei, s’assit devant, à l’écart.
Satia n’eut pas le temps de lui en demander la raison ; elle retint un cri lorsque l’énorme masse se leva puis accéléra pour gagner les airs. Bientôt, de ses puissants battements d’ailes, le relief leur apparut. La forêt, immense, qu’ils survolèrent un instant ; les ruines du village, dont les cendres fumaient encore ; et dans une autre direction que celle qu’ils prenaient, un entrelacs de bâtiments blancs. Si elle avait possédé des ailes, Satia aurait sauté en direction de l’endroit où sa fille était détenue.
Il faut savoir quelles sont leurs défenses, nota Séliak.
Satia était bien d’accord mais son coeur la pressait d’agir. A peine plus loin, de leur point de vue en tout cas, un campement. Les tentes bien alignées s’arrangeaient en carrés, et elle supposa que leurs couleurs dépendaient de leurs mondes d’origine. Elle reporta son attention sur le Commandeur. Poignet devant sa bouche, Éric était plongé dans une intense discussion. A propos de leur arrivée, devina la Souveraine.
Lorsqu’il se leva, elle réalisa qu’ils étaient de nouveau au sol. Concentrée sur ses pensées, elle n’avait même pas perçu leur descente. Suivie par Aioros, elle lui emboita le pas. Les Mecers se rassemblèrent autour d’eux ; avec les centaures et les archers, ils étaient près de trois cents.
Un homme portant l’uniforme gris souris des Maagoïs, orné de cinq étoiles rouges sur la poitrine, accourut aussitôt auprès de son supérieur et s’inclina.
— Colonel Nioboss, parfait. Trouve un endroit où les installer. Vois leurs besoins spécifiques avec leurs officiers. Tu seras tenu responsable de la situation, est-ce clair ?
— Très clair, commandeur, s’inclina Nioboss une nouvelle fois.
Il évalua rapidement les soldats devant lui, puis s’avança vers les chefs de bataillons et d’escouade. Satia sourit. Elle espérait que tout se passe au mieux avec leurs alliés, tout en ayant conscience de la précarité de cette même alliance. Peut-être pourraient-ils consolider leurs liens.
— Par ici.
Éric disparut sous une grande tente, et Satia s’empressa de le suivre, Aioros, Sanae et un Messager à ses côtés.
Penchés autour d’une table où s’empilaient des cartes, plusieurs Seigneurs se redressèrent.
— Voici le Seigneur Jahyr de Nienna, le Seigneur Evan d’Arian, et Kota sy Reysuri, représentant de Dame Anka de Bereth, annonça Éric, imperturbable. Et la Souveraine Satia des Douze Royaumes, le Djicam Aioros de Massilia et la Mage Sanae de Soctoris.
Le Commandeur s’était renseigné, nota Satia. A moins qu’il ne se souvienne du rang et des coutumes de chacun des douze Royaumes ? Non, il les avait quittés bien trop jeune.
Les impériaux se remirent vite de leur surprise pour les saluer.
— Votre présence ici est une agréable surprise, Altesse, déclara Jahyr en s’approchant.
— J’aurais préféré de meilleures conditions, hélas. Je n’ai que quelques troupes avec moi.
— Toute aide est appréciée. Éric a mis leur flotte en déroute pour le moment, mais ils restent susceptibles de revenir avec des renforts.
— Avec vos ailés, ajouta Evan, nous aurons la maitrise des cieux.
Comme souvent lorsqu’il était nerveux, il triturait les perles de ses bracelets. Satia était bien placée pour savoir que ces perles étaient loin d’être inoffensives. Maitre des poisons et des potions, Evan savait dissimuler ses armes pour mieux tromper ses adversaires.
— Que proposez-vous pour l’attaque sur le complexe ? questionna Satia. J’imagine que vous avez déjà un plan ?
Les trois Seigneurs acquiescèrent.
— Nous avons écarté l’option frontale, lâcha Éric. Trop de risques qu’ils soient pris en otage.
— Je suis d’accord, approuva Satia.
Il était hors de question pour elle de faire courir le moindre risque à sa fille.
Tu ne peux la protéger de tout.
Je n’en ai que trop conscience…
Le devoir, encore et toujours. Sa charge était de protéger les Douze Royaumes, d’aider leurs alliés. Évidemment, s’il n’avait tenu qu’à elle, elle aurait tenté sa chance malgré tout.
Surielle est forte. Fais-lui confiance.
*****
Satia balaya les Djicams du regard ; tous acquiescèrent, conscient que la demande de leur Dieu ne pouvait être ignorée.
→ dieu
— Alors rassemblez vos troupes. Je vais vous ouvrir un portail.
→ Ils ignorent tout de la situation de l’autre côté. Comment déterminer quelles troupes envoyées, combien, avec quel soutien ? C’est un peu trop précipité à mon goût.
Les Stolisters pouvaient venir. Ils étaient prêts.
→ Ben non. Ils viennent comment ? S’ils peuvent apparaître à volonté, rien ne peut préparer à ça. Ils viennent quand ? On ne peut pas rester sur le qui vive pendant des jours. Non, décidément, il n’y a pas assez d’informations pour permettre d’anticiper quoi que ce soit. De plus, je ne comprends toujours pas pourquoi les solisters devraient être les ennemis de la Fédération. Ils n’ont rien fait contre elle, que je sache.
Le commandant Fédric avait déployé une carte des Douze Royaumes
→ Une carte des douze royaumes ? Une carte du système solaire donc ? Vu de l’espace ? Ils disposent d’une telle chose ? Ca ressemble à quoi ? Douze ronds autour d’un soleil ? C’est en 3D ? J’aimerais beaucoup avoir une description car je me le représente difficilement.
Lucas marqua l’endroit sur la carte. Une concertation rapide plus tard, et une escouade était envoyée sur place.
→ Mais elle est précise comment cette carte ? Elle représente 12 mondes. Déjà, une carte juste de la Terre ne permet pas d’envoyer une escouade à un endroit précis ! On peut vaguement déterminer le pays, mais c’est tout. Non, décidément, je ne me représente pas cette scène.
— Votre mort à tous, sourit-il. Orhim vaincra !
→ Orhim veut régner sur le néant ? Je trouve vraiment étrange qu’il veuille leur mort plutôt que leur soumission ou qu’ils soient convertis à sa religion.
Mieux valait ne pas s’encombrer de prisonniers, surtout s’il n’y avait rien à en tirer
→ Et ils se considèrent comme les gentils de l’histoire ? Exécuter un prisonnier n’a rien de glorieux en fait. C’est aujourd’hui interdit par le traité de Genève. Je trouve ça particulièrement horrible de la part des « gentils ».
Les heures s’écoulèrent, rythmées par les attaques sur les douze planètes
→ Ils sont sympa ces méchants : on attaque les uns après les autres, surtout pas tous ensemble pour les surcharger. Affrontons-les de manière à perdre, c’est mieux. Ils sont débiles les solisters, non ?
les cartes étaient constellées de marques.
→ Ah ! Cette fois, il y a plusieurs cartes.
À la place des Solisters (puisqu’ils semblent vouloir attaquer par petits groupes), je viserai des lieux comme des écoles ou des hôpitaux et je frapperai là pour faire bien peur. Là, choisir d’apparaître dans des lieux avec des gardes (comme le palais), quel intérêt ? Surtout 7 par 7…
Tu auras compris que la première partie de ce chapitre comporte beaucoup trop d’incohérences à mon goût (et tu le sais : qui aime bien, châtie bien). J’espère que tu ne prends pas mal toutes mes remarques. J’espère vraiment que ça te permettra de le retravailler pour en faire un truc super !
Peut-être aurait-elle du demander à Eraïm où il avait décidé de les envoyer.
→ dû
→ ben ouais, mais c’est un peu tard pour se poser ces questions, non ?
Le Djicam Aioros, comme Sanae, étaient restés à ses côtés
→ était resté
Le vaisseaux s’écrasa dans un fracas
→ vaisseau
— Cela légitimera votre présence ici
→ d’où le fait que les solisters sont des imbéciles. Quelle urgence y avait-il à attaquer la Fédération alors même qu’ils sont encore en guerre avec l’empire ?
— Ils ont abrité des renégats qui ont tué le prince héritier Rayad. Sa majesté impériale a désiré faire un exemple.
→ les « gentils » ont vraiment des valeurs fort peu reluisantes…
Satia avait eu le temps de voir la surprise sur son visage quand les deux hommes s’étaient parlé.
→ parlés
Bientôt, de ses puissants battements d’ailes, le relief leur apparut. La forêt, immense, qu’ils survolèrent un instant ; les ruines du village, dont les cendres fumaient encore ; et dans une autre direction que celle qu’ils prenaient, un entrelacs de bâtiments blancs.
→ Description très visuelle. Aucun ressenti autre (estomac qui remonte, odeur, température de l’air, humidité, luminosité) ni émotionnel (cela lui rappela ses vols alors que Lucas la portait mais en moins agréable)…
avec les centaures et les archers, ils étaient près de trois cents.
→ ils ont réussi à faire venir trois cents mecs aussi vite ? J’ai eu l’impression qu’Eraim n’était resté que trente secondes…
Tu relèves de nombreux problèmes de façon très justes ^^
Pour la carte, oui, c'est une erreur il y en a forcément plusieurs (ce qui impliquerait aussi un méga bureau mais passons ^^).
Clairement, envoyer une armée par un petit portail où ils passent genre 2 par 2, ça ne peut pas non plus se faire en 2 min, et ne parlons pas de rassembler autant de monde. Bon, j'y avais mis surtout des Mecers comme ils ont la garnison pas loin, mais... faudrait vraiment que j'arrange ça.
Techniquement les Stolisters attaquent la Fédération pour l'empêcher de venir aider l'Empire (et c'est un peu un raté vu qu'ils ont envoyé des troupes - même si pas hyper beaucoup), mais... oui, ça mériterait + de détails sur les points où ils attaquent et comment Orhim peut diriger les failles. Je devrais approfondir sur son côté dieu de la destruction qui doit être canalisé pour justement ne pas finir dans le néant.
Les "gentils" ne le sont parfois pas tant que ça ;) Le fanatique oui c'est gratuit mais les Massiliens ne cherchent pas toujours à faire de prisonniers. Côté Empire, on n'hésite pas trop à tenter d'assassiner / empoisonner ou autre ses opposants, donc la vengeance un poil too much pour le prince héritier me semble dans la même veine - même si pour le coup côté Fédération on n'aurait jamais fait ça et que le but c'est aussi de se dire que oui c'était pas la bonne solution.
La description, pas faux, j'ai tendance à sur-utiliser le sens de la vue donc si je ne fais pas attention le reste passe à la trappe.
Bref de gros soucis de cohérence auxquels il va falloir que je cogite bien en effet. Surtout qu'au départ la Fédération n'était pas trop censée intervenir pour l'Empire (qui ne leur demande rien en plus) mais que je trouvais intéressant de réunir tout ce petit monde... bon, va falloir que je revois tout ça en profondeur !
Et merci pour relever tout ça. Je ne nierai pas que ça pique un peu mais en même temps c'est juste aussi et c'est ce qu'il faut pour réussir à améliorer son texte. Il faut urgemment que je me re-dégage un peu de temps pour ma routine d'écriture maintenant que la rentrée est passée.