Chapitre 35 : Mission "Liberté"

Un message retentit dans tous les couloirs du Starbird : les Rebelles étaient priés de se rendre dans la salle centrale, où un compte-rendu de la situation de Ryloth allait se faire, en la présence des chefs de clan. En entendant cela, un sentiment d’impatience mêlé à de l'appréhension se saisit du Twi’lek. Il allait sans doute revoir Warat’Ualin, chef du clan Tualin, qui, à l’instar de tous les autres membres de ce groupe dont Orn avait fait partie, savait parfaitement quel visage se cachait derrière le casque noir et blanc du Chasseur Impérial. Si Orn avait la certitude qu’aucun des Tualin n’allait trahir sa confiance devant tous les Rebelles, il ne pouvait pas se défaire de cette sensation de méfiance et de doutes. Se sentir en sécurité dans ce vaisseau Rebelle était pour lui impossible. Dès qu’il croisait un combattant, il était confronté à des regards de haine ou de suspicion extrême. Personne ne lui adressait la parole, préférant se tourner vers un frère d’armes pour mieux exclure cet ennemi de longue date qui voulait désormais les aider, à leurs yeux sans grande raison sinon les espionner. Orn acceptait cela, mais toujours sa main était prête à saisir une arme pour se défendre. Loin d’être détendu ou simplement sur ses gardes, il était éternellement à l'affût d’un mouvement hostile, aussi léger soit-il, sachant qu’il n’était pas le bienvenu ici. Mon Mothma avait beau avoir prévenu les Rebelles à bord du Starbird de leur alliance avec le Chasseur Impérial, il semblait que seul l’équipage du Faucon Millénium approuvait cette décision, bien que personne ne proclamait haut et fort son désaccord.

Cette mésentente, tous pourtant la partageaient et en discutaient discrètement dans les couloirs, surtout lorsque le Twi’lek, à la recherche de la salle centrale, arpentait l’immense vaisseau Rebelle. Sur ses gardes, il n’arrivait pas à ignorer les armes saisies par les Rebelles à sa vue, bien qu’ils n’osassent pas l’attaquer, soit par peur de réprimandes, soit par crainte que le chasseur se défende. Orn pourtant voulait absolument éviter un affrontement, car même s’il ne ferait que se protéger, les Rebelles se rangeraient aux côtés de leurs frères d’armes, et même la Chancelière de l’Alliance ne pourrait l’aider, ne pouvant pas favoriser un ancien ennemi au lieu d’un combattant loyal. Orn, en marchant dans ces couloirs, marchait en réalité sur une fine corde. Un seul faux pas, un seul mouvement brusque ou un retour en arrière pouvait signer son arrêt de mort en une fraction de seconde. Il ne bénéficiait plus de l’accord d’un être craint qui forçait ses subordonnés à respecter le chasseur et le laisser libre, comme Vador et d’autres officiers l’avaient fait à ses débuts dans l’Empire. Mon Mothma avait basé son pouvoir sur la confiance réciproque et l’écoute, et non sur la peur et la répression. Son soutien seul n’était pas suffisant pour aider Orn à être accepté par les Rebelles. C’est lui seul qui devait prouver sa fiabilité et sa véritable valeur pour gagner la confiance des combattants.

Ce n’était pourtant pas simple, bien au contraire, et la peur, ainsi que la méfiance qu’il ressentait n’aidaient pas. Il n’était pas du genre à se laisser être menacé par des armes, et encore moins à ne pas répondre. Orn se faisait violence juste en ignorant les regards des Rebelles, et s’il ressentait des remords et de la culpabilité en repensant à tout ce qu’il avait fait pour l’Empire, une part de lui-même commençait à s’en agacer sérieusement. Il avait tout de même risqué sa vie pour sauver l’équipage du Faucon Millénium, et se mettait dans un danger sans précédent en tournant le dos à l’Empire. Il n’avait pas non plus besoin que les Rebelles en rajoutent une couche, en le menaçant dès que leurs yeux se posaient sur lui, aussi justifiée qu’était leur méfiance et leur haine. Le chasseur se sentait coincé et pris au piège, en sécurité nulle part, mais en danger partout, en oubliant presque qu’il était ici pour aider la Rébellion et arrêter la domination de l’Empire. Il n'hésita donc pas une seule seconde avant d’empoigner discrètement son poignard sous sa cape, prêt à se protéger, lorsqu’il sentit une main saisir son épaule. Il se retourna aussitôt pour faire face au Rebelle qui venait de l’aborder. Ce dernier eut immédiatement un mouvement de recul, sentant la peur et la méfiance brutale du Twi’lek, ayant cependant un léger sourire compatissant flottant sur ses lèvres.

"Eh, doucement, Orn !" lança-t-il, d’une voix que le chasseur connaissait.

Entendre cette voix familière calma instantanément le Twi’lek, qui observa véritablement son interlocuteur. La peau bleue et les yeux rouges des Chiss reconnaissables entre tous, Rusk se tenait devant lui, un petit sourire animant son visage. Le chasseur de primes avait une tenue de combat grise, typique des Rebelles postés sur les vaisseaux. Le reconnaissant, Orn laissa son poignard dans son dos et se détendit immédiatement, bien qu’il ne comprît pas comment Rusk, son ancienne cible qu’il avait livré à l’Empire, pouvait être ici, libre et en vie. Pour autant, le Chiss ne sembla pas paraître rancunier, à en croire son attitude amicale.

"Comment… Je ne savais pas que tu t’étais échappé," finit par dire Orn, presque sous son souffle.

Le concerné hocha la tête, comme si lui aussi était surpris d’être en vie et de retour parmi ses frères d’armes.

"C’est sûr que je n’ai pas à te remercier pour ça. Mais tu serais surpris de voir à quel point les geôliers Impériaux perdent leurs moyens lorsque leur base est attaquée… Et dans le chaos, c’est facile de voler un vaisseau pour s’enfuir," expliqua-t-il d’un ton léger, avec une pointe de fierté.

Peu de Rebelles avaient réussi à sortir de la prison de l’Étoile Noire. Leia et Rusk étaient probablement les seuls à s’être enfuis, et tous deux avaient bénéficié d’une aide extérieure. La princesse Alderaanienne avait reçu le soutien de l’équipage du Faucon Millénium et d’un Jedi aguerri, tandis que Rusk avait profité de l’attaque de la Rébellion sur la Station Orbitale pour s'éclipser, presque sain et sauf. Les officiers Impériaux et les Stormtroopers avaient été préoccupés par leur propre survie, et avaient donc laissé les prisons sans grande surveillance. Le Chiss, malgré sa couleur de peau voyante, s’était faufilé dans un hangar, après avoir récupéré une arme d’un officier qu’il avait assommé. Une fois dans le hangar, il n’avait eu qu’à tuer un pilote Impérial, puis prendre son vaisseau de chasse TIE. Bien qu’il eût été affaibli par les quelques temps passé dans une prison où la nourriture était rare et la torture quotidienne, il n’avait gardé que peu de séquelles, et presque aucune rancœur à l’égard du Twi’lek qui l’avait capturé et amené dans cette Station Impériale. Ce dernier avait baissé la tête lors de l’explication de Rusk, content de sa fuite mais honteux d’avoir été la raison pour laquelle le Chiss s’était trouvé dans une telle situation. Alors que le Rebelle à la peau bleue s’avança pour aller à la salle centrale du Starbird avec Orn, le chasseur ne bougea pas, mais appela à la place Rusk, qui se retourna pour l’écouter.

"Je suis désolé," lança-t-il doucement, sincère.

Orn savait qu’une simple excuse était loin d’être suffisante, mais il ne pouvait rien offrir d’autre au Rebelle, sinon une aide à l’Alliance. Rien n’avait le pouvoir de changer ce qu’il avait fait ni ce que Rusk avait subi. Ce dernier en avait également conscience, mais il esquissa tout de même un sourire reconnaissant, et fit signe au Twi’lek de le suivre, qui se mit à marcher à ses côtés, la tête basse. Même avec son casque, il était facile de voir le regret et la honte qui l’animaient.

"Merci, Orn. Mais tu sais, je ne suis pas vraiment bien placé pour te juger. Ni aucun autre Rebelle, d’ailleurs. Pour la Rébellion, nous avons tous fait des choses horribles, presque inhumaines, des choses dont on est loin d’être fiers. Et quand on commence à se dire que tout ce qu’on a fait, c’était pour la bonne cause… On sait qu’on a pas le bon rôle," dit Rusk calmement, sans regarder le chasseur.

Ce dernier garda le silence, ne sachant pas quoi dire. Il n’avait pourtant rien à faire, puisque le Chiss continua, voulant montrer au Twi’lek quelque chose qu’il ne réalisait pas vraiment.

"Nos informateurs nous disaient quelles planètes allaient être occupées et exploitées par l’Empire. Alors, pour éviter que les Impériaux n’épuisent les ressources naturelles des planètes pour s’en servir pour leurs projets, ou qu’ils exploitent les fermiers et les agriculteurs pour leurs ravitaillements, on se rendait sur ces planètes avant eux, et on brûlait tout. Les champs, les maisons, le bétail… tout était réduit à néant, mais les populations étaient en sécurité, dans nos bases et nos réseaux. Le résultat pour les planètes et les habitants restait le même, mais au moins l’Empire n’avait pas pu bénéficier de cette destruction. Sur le papier, c’est joli, mais en réalité, on faisait la même chose qu’eux. Des personnes qui n’avaient rien demandé se retrouvaient sans maison, sans planète, et le travail de toute leur vie et de leurs ancêtres était parti en fumée, littéralement. Il n’y avait pour eux aucune différence.

— Mais l’Empire n’en a pas profité, au contraire.

— Quelle importance ? Au lieu d’être misérables sur leur planète, les habitants sont misérables sur une autre planète, avec une nouvelle identité pour la plupart. Même si c’était nécessaire, ça ne change rien pour les habitants… L’intention compte-elle vraiment, quand le résultat est le même ?"

Orn ne trouva pas de réponse à fournir. Il avait pourtant envie de dire à Rusk que cela n’avait rien à voir, que ses propres actions étaient bien pires, mais en réalité il avait compris que la situation était bien plus complexe que ça. S’il avait commis des horreurs au nom de l’Empire, il n’avait aucune idée de celles que les Rebelles avaient commises au nom de l’Alliance, malgré les intentions justes et nobles derrière. Nul doute que Rusk et ses frères d’armes avaient fait d’autres choses que brûler des villages. Ils avaient certainement tué d’autres Rebelles pour qu’ils ne disent rien, abandonné des alliés pour assurer leur sécurité et l’intégrité de leurs bases. Même Leia avait risqué la vie de son peuple tout entier en mentant à l’Empire pour protéger l’Alliance. La Rébellion avait beau être indéniablement meilleure que l’Empereur et sa dictature, beaucoup de sang teintait ses mains d’un rouge écarlate et abondant. Cela, Rusk en avait bien conscience, et avait même participé à cette effusion nécessaire mais cruelle, et il en portait le poids sur ses épaules. Lui aussi, à l’instar d’innombrables frères d’armes, avait une culpabilité dont il ne pourrait jamais se défaire. Malheureusement, pour arrêter l’Empire, pour libérer les peuples qui souffraient le plus de cette dictature, il fallait parfois se prêter aux mêmes jeux qu’eux, les combattre sur leurs propres termes. Alors il fallait rendre les champs stériles, les villages devaient devenir les demeures de fantômes, tous devaient tout perdre pour que l’Empire ne puisse rien prendre ; et cela était seulement la partie émergée de l’iceberg, facile à voir mais qui cachait tant de cruauté, aussi justifiée soit-elle.

Car dans l’ombre des Mondes du Noyau, la Rébellion influençait discrètement les politiciens dont le soutien donnait les pleins pouvoirs à l’Empereur, en échange d’argent et de faveurs multiples. Si le Sénat Impérial n’était plus, leurs actions empêchaient tout de même l’Alliance à avoir un véritable poids. Alors les Rebelles emprisonnaient ou tuaient ces politiciens, et les membres les plus imposants de la Rébellion, comme Mon Mothma, ou encore la Reine Sosha Soruna de Naboo poussaient leurs alliés à remplacer leurs prédécesseurs morts ou enfermés en cachette par les Rebelles. Mais faire tout cela laissait un goût amer dans la bouche des Rebelles qui obéissaient aux ordres, n’ayant comme seule consolation que ce qu’ils venaient de faire était pour la bonne cause. Maigre consolation pour Rusk et beaucoup d’autres, cependant, ne leur laissant que le choix de continuer à servir la Rébellion qu’importe le prix, pour que ces morts, ces prisonniers, ces planètes ravagées aient un sens. Et face au long silence du chasseur qui ignorait tout de ce qui se faisait dans l’ombre par l’Alliance, Rusk ne put s’empêcher de sourire. Il n’était pas difficile de voir que, tout comme lui, Orn portait le poids des horreurs qu’il avait commises, et que de nombreux remords assombrissaient ses pensées. Pourtant, ce qu’il avait fait contre la Rébellion, des Rebelles l’auraient fait sans hésiter contre l’Empire.

"Personne n’est innocent ici, Orn," reprit le Chiss. "Les remords, les regrets, tout ça ne sert à rien. Arrête de t’en vouloir et fais simplement ce que tu penses être juste ou nécessaire, sinon, tu n’avanceras pas, et tu nous seras d’aucune aide."

Le concerné leva la tête vers Rusk, comme si ce dernier venait de l’insulter. Le Rebelle avait raison, il le savait. Et alors qu’ils venaient d’arriver dans la salle centrale, où des combattants se pressaient d’entrer et s’y installaient, il réalisa qu’il n’avait pas besoin de la confiance ou du pardon des Rebelles pour les aider véritablement. Certes, les avoir aurait été bien plus simple et serait pour lui un soulagement infini, mais il ne pouvait pas se permettre d’attendre que tous se remettent de leurs souffrances pour faire ce pourquoi il était venu. Ils les aideraient qu’ils le veuillent ou non. Le Twi’lek les respectait, mais il ne pouvait pas laisser ses remords et les reproches des combattants ralentir la lutte contre l’Empire. Soufflant un remerciement à Rusk, les deux chasseurs entrèrent dans la grande salle ronde et blanche, rejoignant les autres Rebelles. La Chancelière Mothma était au milieu de la salle, derrière un poste de contrôle rond et noir, qui contrastait avec le blanc éclatant des murs. Des bancs étaient installés tout autour, où les Rebelles étaient assis et discutaient entre eux de compte-rendu tant attendu.

Suivant Rusk pour s'asseoir à ses côtés, Orn se sentit observé et trop visible. Son armure noire le détachait de tous les autres Rebelles, dont les vêtements colorés se différenciaient grandement. Il aperçut sur tout un banc les pilotes qui s’étaient regroupés, reconnaissables par leurs tenues oranges et blanches. Certains avaient même leur casque, blanc et rond avec une visière orangée, posé sur leurs genoux, blanc et orné du symbole de la Rébellion, dont la couleur variait selon leur escadron. Sur d’autres bancs, certains portaient des tenues de camouflage, verdâtres et tachetées de bruns, tandis que d’autres encore avaient des vêtements d’un brun pâle ou d’un bleu sombre, et certains portaient des casques blancs allongés. Seul le chasseur était entièrement en noir, et, lorsqu’il s’assit à l’écart, avec Rusk, il ajusta sa capuche, masquant son inconfort autant qu’il le pouvait. Quelques minutes passèrent, pendant lesquelles les derniers Rebelles arrivaient et se mettaient en place, au milieu des discussions à voix basse que ceux déjà présents entretenaient pour passer le temps et s’informer sur les dernières nouvelles. Pas un seul n’adressa la parole à Orn, mais beaucoup jetèrent des regards en sa direction. Certains, qui n’avaient pas encore été mis au courant, se figeait en l’apercevant, confus et sur la défensive, avant qu’un de leurs frères d’armes ne vienne pour leur expliquer la situation. Enfin, lorsque le dernier Rebelle fut installé et que le silence se fit dans la salle, Mothma put commencer.

"Comme beaucoup d’entre vous le savent, l’occupation Impériale de Ryloth s’est empirée, ces derniers temps. Les clans perdent de plus en plus de territoire et de liberté, un couvre-feu sévère vient d’être annoncé, et la nourriture est en majorité saisie par les Impériaux postés sur la planète. Agir sans le soutien de tous les clans était impossible, car les bases impériales sont trop nombreuses. Mais depuis plusieurs mois déjà, le clan Tualin, ainsi que les clans Fenn, Rha et Doneeta, se sont ralliés à la Rébellion. Désormais, les vingt-et-un clans sont tous prêts à mettre en place la libération de Ryloth, et ils ont besoin de notre soutien," annonça-t-elle, en activant une commande sur le poste de contrôle, tandis que la lumière de la salle s’éteignit.

L’un après l’autre, des hologrammes apparurent, montrant différents Twi’leks, tous chefs de clan. Si leur silhouette était parfois modifiée par les oscillations de l’hologramme, leur visage résolu et digne était clair et visible. Le chasseur parcourut tous ces visages, avant d’apercevoir celui qu’il cherchait. Warat’Ualin se tenait droit, apparaissant en bleu à cause de l’hologramme, et une expression discrète de surprise passa sur lui lorsqu’il rencontra le regard du Twi’lek. Il ne dit cependant rien, à l’instar de tous les autres chefs, qui ne prêtaient pas attention à Orn. Après tout, il n’avait jamais visité Ryloth pour une mission donnée par l’Empire, et les Twi’leks n’avaient pas souffert de ses actions en tant que Chasseur Impérial. Sa présence, bien que surprenante, n’était pas quelque chose dont ils se plaignaient, car ils avaient besoin de toute l’aide qu’ils pouvaient trouver. Un à un, chacun des chefs se présenta, annonçant son nom et le clan qu’il dirigeait. Si quelques tensions entre chefs étaient palpables, leur volonté de libérer leur planète les liguait contre un ennemi commun, et ils se forçaient à mettre leurs différends de côté.

La cheffe du clan Rha, Nephtyr, semblait être à la tête du groupe des Twi’leks. C’était elle qui avait en première rejoint la Rébellion, et presque depuis l'avènement de l’Empire, la Twi’lek à la peau blanchâtre et aux nombreux tatouages avait travaillé de près avec la Chancelière Rebelle. Sans surprise et sans grande dispute parmi les autres chefs, c’était donc Nephtyr qui menait les Rebelles de Ryloth, accompagnée de près par Cham Syndulla, qui se tenait à ses côtés. La tête haute et la posture droite, Nephty’Rha dépassait d’une tête les autres chefs. Elle fit un geste discret à Mothma, qui activa une autre commande sur le poste. Un nouvel hologramme apparut, ne montrant pas cette fois un Twi’lek mais la planète Ryloth. Sur cette holo-carte, vingt-et-un points rouges brillaient faiblement contre le bleu profond des hologrammes. Tous les Rebelles se penchèrent en avant pour mieux pouvoir observer, faisant preuve d’une concentration exemplaire. Certains cependant levèrent la tête lorsque Nephtyr, d’une voix graveleuse, se mit à expliquer en détails la situation.

"Vous l’avez vu, il y a vingt-et-une bases Impériales sur Ryloth, soit une par clan. Toutes sont reliées par des communications très étroites, mais seule une, la Base Daala, contrôle toutes les communications, dont celles avec l’extérieur. Chaque base possède un Bataillon, soit mille Stormtroopers, tous dirigés par un Commandant, et cinq Capitaines. La Base Daala, étant donné son rôle primordial, comporte également une Section de Death Troopers, c’est-à-dire trente soldats d’élite. Celle qui coordonne toute l’occupation, c’est la Moff Dyann Hekat. Comme nous n’avons pas de flotte et que Ryloth est une planète de la Bordure Extérieure, il n’y a aucune force aérienne Impériale en orbite. De notre côté, nous avons tous une armée par clan, qui est cependant en nombre inférieur. En moyenne, nous avons compté deux Compagnies par clan, donc quatre-cents guerriers, bien plus entraînés que des Stormtroopers. Avec l’occupation, nos guerriers n’ont pas le droit de s’armer ni de se réunir - comme nous tous - mais nous savons où sont stockées nos armes, et les récupérer n’est pas un problème. Le seul problème, en vérité, c’est notre nombre, largement inférieur. Même si nous attaquons en simultané les vingt-et-une bases, la Base Daala sonnera l’alerte via ses communications, et des renforts arriveront, et plus rien alors ne sera possible. Étant donné l’inexistence de la force aérienne Impériale sur Ryloth, nous les représentants de notre peuple, espérons pouvoir compter sur un escadron de l’Alliance. Nous espérons également le soutien d’une ou deux brigades, si cela est possible. Avec une force aérienne et un faible désavantage d’effectifs à terre, la libération sera à notre portée."

Orn avait écouté attentivement le discours de Nephty’Rha, anxieux de telles nouvelles. Si les bases Impériales avaient toujours été là depuis la chute de la République, jamais auparavant elle n’avait plié à sa volonté les peuples de Ryloth. Les informations de Nephtyr n’étaient pas non plus rassurantes. Les soldats de l’Empire étaient nombreux, et une intervention à nombre égal de la part des Rebelles ne pouvait pas passer inaperçue. Le plus inquiétant restait la base principale, la Base Daala. Toutes les communications entre officiers Impériaux passaient par elle, signifiant qu’elle serait immédiatement informée du moindre danger, et la Moff Hekat appellerait sans aucun doute des renforcements. Si un escadron menait une attaque par le ciel, il devrait être le plus discret possible, et sa première frappe serait obligatoirement la Base Daala. Cependant, si les communications se coupent trop rapidement, les autres bases, et même les officiers Impériaux extérieurs, se douteraient quelque chose. Le plus sûr restait de pirater le poste de communication, et de faire croire aux récepteurs des signaux que tout était normal. Pour cela, cependant, il fallait infiltrer la base ennemie et atteindre la salle de contrôle, mais cette dernière était forcément bien gardée, d’autant plus qu’une Section de Death Troopers y était postée. Une infiltration était donc impossible et risquerait de mettre en danger toute la mission, et tous les Twi’leks. Le chasseur trouva pourtant une faille dans ce système parfait, et l’ébauche d’un plan précis se dessina dans son esprit.

Pour le réaliser, il avait besoin d’un escadron de vaisseaux Rebelles. Par réflexe, il se tourna vers les pilotes perchés sur leurs bancs. Ces derniers, toujours visibles de par leur tenue colorée dans l’ombre, discutaient entre eux des demandes de Nephty’Rha. Ils avaient l’air gêné, certains semblaient même être énervés, tandis que d’autres tentaient d’apaiser les échanges. Mothma elle-même semblait mal à l’aise, et devant le manque de réponse, les chefs Twi’leks commençaient à s’inquiéter. Warat’Ualin fit même signe à Orn d’intervenir, mais ce dernier secoua discrètement la tête. Il ne savait pas ce que les pilotes se disaient, ni pourquoi la Chancelière Rebelle semblait désœuvrée. Elle leva cependant la main d’un geste calme, tentant d’imposer le silence aux pilotes et à leurs camarades, qui eux étaient occupés à compter leurs effectifs disponibles. À côté du chasseur, Rusk aussi était pris dans un débat presque houleux, évoquant une mission qui ne pouvait être reportée. Face à l’inattention générale de la salle, Mothma soupira, avant qu’un Rebelle ne remarque la demande de la Chancelière et intima à ses frères d’armes le silence, qui tomba rapidement, après des excuses murmurées à l’égard de la dirigeante Rebelle. Cette dernière fit signe aux chefs d’escadron de dire s’ils pouvaient apporter leur soutien aux Twi’leks. Deux pilotes se levèrent d’un seul homme, et l’un, qui avait la peau verte des Mirialans, se mit à parler.

"L’Escadron Rogue ne pourra pas aider à la libération de Ryloth. Une autre mission nous attend, et il est impossible de se désister," annonça-t-il d’un ton triste.

À côté de lui, l’autre cheffe d’escadron, une humaine à la peau mate, prit la parole à sa suite.

"Tout comme l’Escadron Rogue, l’Escadron Écho ne pourra pas venir à Ryloth. Nous partons dès demain assister les Escadrons Rouge et Bleu pour tenter de récupérer la Base Rebelle de Yavin IV. Je suis désolée.

— Qu’en est-il des autres escadrons ?" demanda Cham Syndulla, qui craignait la réponse.

"Nous sommes les seuls pilotes à être encore au sol," répondit le chef de l’Escadron Rogue, la tête basse.

Un frisson sembla parcourir les Twi’leks, dont le principal espoir venait d’être écrasé.

"Merci, Généraux Ikar et Nouhr. Que pouvons-nous attendre des forces terrestres ?" interrogea Mothma, se tournant vers les Shock Troopers Rebelles.

La Rebelle aux cheveux noirs se leva.

"Je crains qu’il soit impossible de réunir une seule brigade, mais deux régiments, oui. Nous sommes discrets, et la plupart d’entre nous avons déjà participé à des libérations," annonça-t-elle, au grand soulagement de tous.

Orn, quant à lui, continuait à élaborer son plan. Comme aucun escadron n’était disponible, il avait réfléchi à un moyen d’intervenir, qu’il avait trouvé. Il espérait simplement que les Rebelles voulaient bien l’écouter.

"Même avec deux régiments spécialisés, la Base Daala sonnera l’alerte dès la première attaque. Notre espoir reposait sur les escadrons, mais si tous sont indisponibles, alors, notre plan tombe à l’eau," finit par lâcher Nephtyr, d’un ton las et défaitiste.

Alors que même Mon Mothma semblait ne pas savoir quoi répondre, Orn, se leva d’un coup, se forçant à agir avant que son courage ne le quitte. Rusk l’observa avec incompréhension, tandis que les autres Rebelles se saisirent de leurs armes, prêts à intervenir. Soufflant légèrement avant de se lancer, le Twi’lek se tourna vers les chefs des clans, tentant en vain d’ignorer les yeux rivés sur lui.

"Il y a une autre solution… Mais vous n’allez pas l’aimer. L’unique problème, c’est la Base Daala, dont il faut pirater le poste de communication, ce qui n’est possible que de l’intérieur. Normalement, infiltrer une base Impériale est trop risqué, sauf que l’Empire ne sait pas que j’ai rejoint la Rébellion. Si j’arrive sur Ryloth, avec deux Rebelles qui prétendraient être des cibles que l’Empire m’a confiées, alors je pourrais sans difficulté entrer dans la base, et les deux Rebelles se retrouveraient dans la prison. Il faut que je gagne la confiance de la Moff Hekat, ce qui ne devrait pas être un problème, et une fois cela fait, je pourrais entrer dans la salle de contrôle et pirater les communications. Après cela, les deux Rebelles utiliseraient des bombes thermiques pour détruire un pan de la base. Ça serait le signal pour l’attaque coordonnée des vingt-et-unes bases," dit-il rapidement mais sûrement, gagnant de plus en plus d’assurance à chaque mot.

Le silence accueillit ses paroles. Mothma sembla y réfléchir, tandis que les chefs Twi’leks échangeaient des regards entendus. Derrière le chasseur, les Rebelles s’interrogeaient du regard, certains acceptant le plan, d’autres le refusant catégoriquement. La Rebelle aux cheveux noirs s’avança pour se mettre au niveau du Twi’lek, ne regardant pas la Chancelière mais plantant ses yeux sombres dans ceux de l’ancien ennemi de la Rébellion.

"Ton plan a un défaut, chasseur. Il te faut notre confiance, et tu ne l’as pas," cracha-t-elle.

Face à son hostilité, Orn ne baissa pas les yeux mais au contraire s’avança de la Shock Trooper d’Alderaan.

"Si tu as une meilleure solution, je t’en prie, dis-nous. Je sais parfaitement que je ne peux pas changer le passé, mais je peux tenter d’influencer le futur. C’est ce que j’essaye de faire, pour la Rébellion. Mais me haïr ne va pas vous aider, et ça ne va pas ramener ta famille. Alors soit vous me donnez une chance sur Ryloth, soit on laisse les Twi’leks entre les mains de l’Empire," siffla-t-il, déterminé.

"Moi, je lui fais confiance," intervint Warat’Ualin. "Et je crois que c’est aux chefs Twi’leks de décider quel plan suivre, non aux Rebelles humains qui ne connaissent rien de nos coutumes."

Une vague d’approbation se fit entendre de la part des autres Twi'leks, qui adoptèrent à l’unanimité le plan du chasseur. Ce dernier lança un regard plein de gratitude à Warat’Ualin, qui esquissait un faible sourire. L’espoir venait de renaître enfin dans les cœurs des chefs Twi’leks, qui, pendant plusieurs mois, avaient vu d’un seul coup leurs peuples souffrir. Si le combat n’avait même pas commencé, déjà ils voyaient leur planète libérée et en paix, sans l’Empire pour les forcer à rester dans leurs demeures, à mourir de faim et de soif.

La réunion elle-même était loin d’être terminée, puisque différents détails devaient être éclaircis, mais l’ambiance de la salle était tout autre. Les pilotes, malgré leur méfiance envers Orn, étaient soulagés que leur absence ne constituait pas un énorme désavantage, et les forces terrestres brûlaient d’atterrir sur Ryloth et d’aider à sa libération. Mothma adressa même un remerciement au chasseur, qui, après l’intervention de son chef de clan, se rassit immédiatement, content de ne plus exactement être le centre de l’attention. Rusk le félicita avec son habituel sourire de chasseur de primes, et la réunion reprit son cours, avec Orn qui passa au premier plan, discutant avec les chefs Twi’leks et la Chancelière pour établir un plan de libération le plus infaillible et précis possible. La Mission “Liberté” venait de naître.

Vous devez être connecté pour laisser un commentaire.
SinnaraAstaroth
Posté le 30/05/2024
Un nouveau chapitre plutôt intéressant, on comment à mettre en place des plans et on voit comment la mission va se profiler.

Je me demande si le fait que la situation se soit si soudainement dégradée sur Ryloth ces derniers mois ce n'est pas en lien avec le fait que Vador ait découvert que Orn était un Twi'lek ? Il essaye soit de le punir indirectement en opprimant son peuple, soit le provoquer pour l'attirer dans un piège ? Ou c'est juste moi qui me fais des idées. x)
Vous lisez