Chapitre 36 : La génie

La réunion dans la salle centrale avait pris toute la nuit, continuant même le lendemain. Certaines discussions avaient été houleuses, et Orn avait dû défendre son plan face à ceux qui ne voulaient pas lui accorder leur confiance. La Rebelle aux cheveux noirs avait cependant insisté pour être l’un des faux otages du chasseur, espérant pouvoir mieux le surveiller si elle endossait ce rôle. Cara Dune, puisque tel était son nom, partagerait sa cellule à la prison de la Base Daala avec Rusk. Ne pouvant plus piloter de vaisseau, le Chiss avait décidé d’aider au maximum en se mettant au premier plan de la Mission "Liberté". Les deux Rebelles allaient partir sur Ryloth à bord du Vautour Couronné, avant d’être conduits par Orn à la Base Daala. Comme Cara Dune était une Générale, et Rusk un échappé, le Twi’lek n’aurait aucun problème pour faire croire qu’il avait été chargé par l’Empire de les chasser et de les capturer. Leur couverture était donc parfaite, ou presque. Du côté des troupes que l’Alliance allait envoyer sur Ryloth, les deux Régiments de Shock Troopers avaient été répartis dans chaque territoire des clans. Leur débarquement se déroulerait la nuit, pour éviter tout risque d’être repéré dès le début de la mission. En plus de cela, les guerriers des clans se chargeaient de récupérer leurs armes, et les chefs de clan avaient fourni des cartes de Ryloth pour permettre aux Shock Troopers de se familiariser avec les lieux, ainsi que de trouver d’éventuelles cachettes et plans d’attaque. En réalité, cette partie de la mission reposait presque entièrement sur l’effet de surprise. Une fois les communications coupées et la Base Daala partiellement détruite par les prisonniers du chasseur, les Shock Troopers et les guerriers Twi’leks allaient devoir faire preuve d’une vitesse d’action remarquable, pour ne pas laisser le temps aux Stormtroopers de s’organiser. Avec la présence des Death Troopers, les soldats d’élite de l’Empire, la rapidité était aussi importante que l’efficacité, car ces Troopers savaient comment prendre avantage de la moindre petite erreur de leur ennemi. Orn avait déjà combattu côte à côte avec eux, et même lui avait appris à se méfier d’eux et à ne jamais les sous-estimer.

Contrairement aux Stormtroopers, les soldats en armure noire n’intervenaient qu’en dernier recours, et souvent, à leur arrivée, l’espoir de leurs adversaires mourait instantanément. Ils étaient aussi précis que redoutables, et jamais leurs passages ne laissaient des traces. Lorsqu’ils étaient sur le terrain, rien ne pouvait les arrêter, sinon un ordre d’un haut commanditaire. Le chasseur n’avait jamais aimé intervenir avec eux. Une certaine aura, étrange et mauvaise, émanait d’eux. Des rumeurs traversaient les couloirs Impériaux, disant que ces soldats étaient en réalité le fruit d’une expérience mystérieuse et macabre, supervisée par l’Empereur lui-même. Sans pour autant croire à ces histoires dignes des plus anciennes légendes de la Galaxie, Orn ne pouvait s’empêcher d’être mal à l’aise à leurs côtés. Personne n’avait jamais vu le visage d’un Death Trooper, ni entendu leur vraie voix. Leur casque, aussi noir que leur armure, modulait leur voix et brouillait leurs conversations. Seul un Death Trooper pouvait comprendre un Death Trooper. Autrement dit, il était impossible de savoir ce qu’ils pensaient ou de connaître les informations qu’ils possédaient. Pour les Rebelles chargés d’attaquer la Base Daala, leur première cible était donc cette Sections de soldats d’élite. Le chasseur pouvait également essayer de se renseigner sur eux et leurs affectations, mais il savait que, une fois la Base infiltrée, il devrait faire profil bas. Sa mission était d’atteindre le poste de communications, une salle toujours fermée et protégée. Seul le personnel autorisé pouvait y accéder, signifiant qu'il devait gagner la confiance de la Moff Hekat, qui dirigeait toute l’occupation de Ryloth.

En tant que Chasseur Impérial, cela ne s’annonçait pas très compliqué, mais il était réputé pour être discret et silencieux. Présenter un intérêt prononcé pour le poste de communications, ou trop insister pour y accéder pouvait éveiller des soupçons, ce qu’il devait absolument éviter. Car non seulement Orn était un traître à l’Empire, mais Cara Dune et Rusk, en tant que faux otages, laissaient leur vie entre ses mains ; et la Mission "Liberté" reposait entièrement sur son succès. Pour empirer la chose, le Twi’lek devait également faire attention à ne pas donner d’informations sur son identité aux Rebelles. Devoir se retrouver sur sa planète natale, où il avait grandi, et prétendre ne pas connaître cette terre allait être difficile pour lui. De plus, la Base Daala était la base Impériale chargée de surveiller le clan Tualin, son clan. Parler à ces Twi’leks qui avaient un jour formé sa famille comme s’ils étaient des étrangers n’était pas non plus évident, surtout après sa dernière visite à Ryloth. Tous ces éléments à ne pas oublier, toutes ces choses à faire et à prétendre, toutes ces vies qui dépendaient de lui donnaient au chasseur le vertige. Il n’avait jamais eu autant de responsabilités, et, à vrai dire, c’était la première fois qu’on lui demandait de sauver des personnes et non de les condamner à un destin plus sombre. Ce n’était pas non plus un changement désagréable, bien au contraire.

Avant de lancer la Mission "Liberté", Mon Mothma avait accordé deux semaines pour tous ceux participant à l’opération. Cela laissait donc aux Rebelles qui enchaînaient interventions après interventions et ceux qui revenaient d’un long voyage le temps de se reposer, ce que fit Orn. S’il avait été prêt à dormir dans son vaisseau, en sécurité avec Twik dans le hangar du Starbird, Rusk lui avait montré les chambres réservées aux combattants. Le vaisseau étant avant tout un navire de croisière, d’innombrables cabines de luxe étaient à disposition, dans différents secteurs. Chaque secteur correspondait à une faction de l’armée Rebelle.

Ainsi, chaque escadron, chaque troupe étaient réunis dans une seule partie du Starbird. Orn n’avait pas encore intégré de section particulière de la Rébellion. Car s’il avait un vaisseau, il ne faisait pas partie d’un escadron, mais aucune division ne le comptait également dans ses rangs. Il avait donc docilement suivi Rusk, qui lui était un Shock Trooper de la Division Wolffe. D’après le Chiss, cette division avait été nommée en l’honneur d’un Clone mort pour la Rébellion. À son grand soulagement, Cara Dune ne faisait pas partie de cette division, et Orn pouvait donc circuler dans les couloirs du secteur en paix, sans craindre la fureur et l’hostilité de la Rebelle d’Alderaan. Au début, le chasseur s’était mis à l’écart des autres Rebelles du secteur, bien que tous toléraient sa présence, grâce à Rusk. Il avait passé beaucoup de temps dans la chambre qu’on lui avait donné, alternant entre sommeil et réflexion. Le Twi’lek avait rarement pu profiter d’un lit aussi confortable, qui lévitait silencieusement au-dessus du sol bleu et sombre. Une atmosphère presque rassurante y régnait, avec des murs sombres et des lumières douces qui n’éblouissaient pas mais parcouraient les murs et le lit sans violence. Un grand hublot se trouvait sur un des murs, d’où l’on pouvait voir la verte planète Chandrila et tous les vaisseaux qui s’y affairaient autour. Orn avait passé plusieurs minutes à observer la Galaxie à travers cette fenêtre, trouvant dans cette observation un repos bien plus profond qu’un simple sommeil. Au fil des semaines, il sortait de plus en plus de sa chambre, n’oubliant jamais son casque, osant finalement, avec l’aide de Rusk, à se mélanger aux autres Rebelles. Si une gêne flottait lors des conversations, le Chiss, de par sa sociabilité naturelle, réussissait à faire oublier pendant le temps d’un échange les anciennes animosités et rivalités. C’était pendant ces moments que le Twi’lek apprenait à connaître les Rebelles, les raisons de leurs engagements ainsi que les combattants qui avaient laissé à leur mort une légende.

Ainsi, Orn apprit la différence entre les Partisans de Saw Guerrera et les Rebelles. Les Partisans, qu’il connaissait de nom, étaient en réalité bien pires que l’Alliance, presque au même niveau que l’Empire. Ils faisaient tout, tant que cela leur apportait la victoire et affaiblissait l’Empire. Tuer, torturer, et piéger étaient leur mode d’opération. Quelques Rebelles avec qui il avait discuté étaient d’anciens Partisans, qui ne supportaient plus de tuer autant, malgré les nombreuses aides qu’ils avaient fournies par leurs actions. En effet, ils avaient libéré de l’esclavage de nombreux Wookies sur Kashyyyk, recevant l’aide d’un Jedi puissant et jeune et affrontant même deux Inquisitrices dangereuses et sanguinaires. Certains Rebelles étaient âgés, et, ayant connu les temps de la République, ne pouvaient pas accepter l’Empire.

Dans ces doyens se trouvaient même des Clones, tous ayant le même âge et le même visage, mais des personnalités bien différentes. Les regarder troublait Orn. Il voyait dans leurs traits le visage vieilli de son compagnon à l’armure verte, lui aussi un Clone mais qui n’avait pas été génétiquement modifié. C’était comme si le chasseur se retrouvait des années plus tard, à observer son Mandalorien vieillir à ses côtés. D’ailleurs, quelques-uns de ces Clones mentionnèrent Fett, posant des questions sur leur alliance renouvelée, curieux d’en apprendre sur un frère qui ne s’était jamais mêlé à eux. Ne voulant pas donner trop d’informations sur son compagnon ni sur lui-même, le Twi’lek répondait aux questions assez vaguement. Bien entendu, son identité et sa planète d’origine furent également abordées. Visiblement, Lando était passé par ici récemment, puisqu’on lui demanda s’il était bien originaire de Dathomir, et des interrogations sur les coutumes des Frères de la Nuit avaient fusé de toutes parts. Les anciens Partisans répliquèrent également, disant que le Jedi qui leur était venu en aide avait été accompagné d’une Sœur de la Nuit. Ne confirmant ni ne niant être de Dathomir, Orn avait néanmoins répondu aux nombreuses questions, ravi de pouvoir partager sa connaissance sur les coutumes et cultures de la Galaxie qu’il avait eu l’occasion de découvrir lors de ses nombreuses missions, retournant ainsi la faveur aux Rebelles qui lui avaient conté leurs histoires et leurs aventures.

Bien évidemment, Rusk avait été le premier à se lancer dans un récit, racontant comment il s’était blessé au point de ne plus pouvoir piloter de vaisseau. Lors de l’assaut par l’Empire de la planète hivernale Hoth, où Orn avait retrouvé Solo pour le chasser, l’Escadron Rogue dont il faisait partie s’était précipité à la rencontre des vaisseaux TIE, les affrontant avec violence au-dessus de la planète enneigée. Il avait été pris en chasse par un pilote Impériale, et avait tenté, dans une course effrénée, de se réfugier dans les montagnes glacées de Hoth. Cependant, son fier vaisseau avait été touché par une frappe précise et redoutable, et il fut forcé de s’éjecter pour survivre. Lorsqu’il avait atterri par terre, un missile explosa près de lui, et des morceaux de métal se logèrent dans son bras, maintenant à moitié paralysé. Si la technologie lui permettait de retrouver toute sa mobilité, l’ancien pilote avait refusé, préférant laisser les prothèses à ceux qui en avaient plus besoin que lui.

 

C’est donc ainsi que s’installa une certaine routine dans le secteur de la Division Wolffe, qui adopta au bout d’une semaine le chasseur dans leurs rangs, bien que ce fût encore officieux. En effet, si Orn voulait rejoindre une division ou un escadron, il devait y être affecté par la Chancelière ou un Sénateur Rebelle, comme Leia ou encore la Reine de Naboo. Pour autant, les Rebelles de la Division Wolffe, aussi surnommés par leurs frères d’armes "les Loups", n’avaient pas besoin d’une véritable affectation officielle. Le chasseur n’avait jamais pensé être accepté aussi rapidement par des Rebelles, qui étaient pourtant compréhensifs. Certains étaient d’anciens Impériaux qui avaient déserté pour rejoindre l’Alliance, ne pouvant plus en bonne conscience continuer à servir l’Empire. Si le Twi’lek avait fait de nombreuses choses qu’ils condamnaient et qui étaient immorales, ils avaient appris, de leur côté, à lui pardonner et à le comprendre en discutant avec lui. Alors, à chaque repas, ils attendaient que le chasseur vienne s’installer à leur table, pour qu’il raconte une énième aventure ou leur explique en détail le plan d’attaque de la Base Daala. Si les Loups allaient être mélangés avec les guerriers du clan Tualin, les Shock Troopers de Cara Dune étaient répartis dans les autres clans, avec encore d’autres soldats de différentes Divisions. Orn leur avait donc exposé en détails le territoire de son clan, prétendant avoir visité Ryloth auparavant pour des primes et non pour une sœur.

Il leur expliqua également les coutumes et modes d’opérations des guerriers Tualins, sans pour autant pouvoir les informer sur les armes que ces derniers avaient en leur possession. À chaque nouvelle histoire racontée et à chaque information apportée, un des Shock Troopers de la Division Wolffe parlaient à son tour, apportant lui aussi sa connaissance et ses aventures. C’était devenu, au fil des semaines, une habitude, presque un rituel. Un moyen pour eux d’oublier les moments dangereux à venir et de voyager sans pour autant bouger de leur table. En effet, beaucoup d’entre eux étaient restés sur le Starbird pendant plusieurs mois, dans l’attente d’une mission à mener. Très rapidement, le vaisseau Rebelle perdit cependant de sa population. Comme annoncé par la Générale Nouhr, l’Escadron Écho partit rejoindre les Escadrons Bleu et Rouge, laissant toute une table et un secteur vide. L’Escadron Rogue, dirigé par le Général Ikar, était le seul groupe de pilotes resté sur le Starbird, mais leur départ se préparait lentement, n’ayant besoin que d’un message pour rejoindre la mission qu’il devait assurer. Comme Rusk avait fait partie de cet escadron, il savait parfaitement en quoi consistait leur mission, et s’il ne voulait rien dire, il ne semblait pas pressé que ses anciens camarades ne s’envolent.

Pendant son temps libre, lorsqu’il n’était pas à échanger des histoires avec les Loups, Orn arpentait avec précaution les couloirs blancs et bleus du Starbird, comme il le faisait actuellement. Rusk, cette fois, l’accompagnait en silence, d’une compagnie que le chasseur appréciait de plus en plus. Il fallait dire que s’il était autant accepté et faisait maintenant intégralement partie de la Division Wolffe, c’était majoritairement grâce au Chiss, qui les avait poussés, lui et ses frères d’armes, à discuter et à tourner la page pour mieux se concentrer sur ce qui était à venir. Un certain malaise serrait pourtant lourdement le cœur du chasseur.

Le lendemain, lui et les Shock Troopers allaient partir pour Ryloth, pour enfin amorcer la mission "Liberté". L’appréhension, l’anticipation et le stress pesaient sur le chasseur, qui détestait cette phase d’attente insoutenable et sournoise, et qui était pourtant un passage obligé des opérations importantes. La peur de l’échec rendait même le sommeil difficile à trouver, mais il se faisait violence en voyant les attitudes des Rebelles. S’ils étaient inquiets, ou impatients, cela ne se voyait pas, et ils réussissaient à garder la face devant les dangers qui les attendaient. La petite balade du Twi’lek dans le vaisseau se transformait en faible diversion, une tentative vaine pour calmer sa frayeur et continuer à respirer. Le chasseur appréciait que Rusk gardât le silence à ses côtés, car il ne savait pas s’il avait la force de parler d’un ton léger et non serré. Tous deux étaient plongés dans leurs pensées, trouvant cependant un réconfort dans la présence de l’autre. Leurs réflexions intérieures furent interrompues lorsque, dans un bruit soudain, de nombreuses portes s’ouvrirent d’un seul coup et que les pilotes de l’Escadron Rogue sortirent en trombe du secteur qui leur était réservé. Le Général Ikar était en tête, sa peau verte facilement reconnaissable, courant à toute vitesse avec urgence. Orn et Rusk eurent à peine le temps de se plaquer au mur du couloir pour les laisser passer, évitant de justesse une collision brutale. Les autres pilotes suivaient leur chef avec la même rapidité, ne prêtant pas attention aux deux individus qui s’étaient écartés du chemin.

"Rogue Deux, Rogue Trois, couvrez les troupes au sol ! Rogue Trois et Quatre, avec moi contre les TIE !" cria Ikar d’une voix forte, tout en s'éloignant des deux Rebelles pour se diriger à toute allure vers le hangar où se trouvaient leurs vaisseaux.

Aussi rapidement qu’ils étaient arrivés, ils étaient maintenant partis, laissant à leur passage un silence plus lourd qu’avant. Désormais, plus aucun escadron n’occupait le Starbird, laissant à bord seulement les Shock Troopers et la Chancelière. Rusk se détacha du mur auquel il s’était plaqué par sécurité, affichant un air grave et triste, qui contrastait violemment avec son habituel air enjoué et heureux. Le chasseur, ne sachant quoi dire, regardait simplement son ami avec un air inquiet et interrogateur. L’apercevant, le Chiss afficha un regard sombre.

"La plupart d’entre eux ne vont pas revenir…" lâcha-t-il avec regrets, ne pouvant plus risquer sa vie auprès de ses anciens camarades de vol.

Le chasseur baissa la tête. Il ne savait pas dans quel genre de mission l’Escadron Rogue s’était embarqué, mais il savait que l’opération qu’ils allaient mener sur Ryloth n’était pas sans risque non plus. Il fallait s’attendre qu’un certain nombre d’entre eux soient tués au combat. Même lui, si sa véritable intention était découverte, pouvait y laisser sa vie. Mais jamais les Rebelles n’avaient reculé face à cette possibilité. Beaucoup s’étaient sacrifiés volontairement, se battant dans des circonstances qui ne laissaient pas de doute quant à l’issue du combat. Beaucoup de Rebelles avaient affronté Vador, et tous étaient morts. Pourtant, malgré la peur, malgré l’horreur qui saisissait tout leur corps et la mort douloureuse et obligatoire qui les attendaient, aucun ne reculait, mais au contraire brandissait son arme pour affronter l’invincible Seigneur Sith.

Orn lui-même devait faire preuve de ce courage. Il devait être prêt à donner sa vie pour la Rébellion, mais, et c’était encore plus difficile, le chasseur devait être prêt à voir ses amis mourir et se sacrifier. Il repensa à Nasha, qui était quelque part dans l’immense Galaxie, peut-être à l’endroit même où l’Escadron Rogue avait été appelé. Peut-être avait-elle accepté une mission qui demandait d’elle sa vie. Orn sait qu’elle se sacrifierait sans arrière-pensée, presque immédiatement, tant qu’elle avait la certitude d’aider l’Alliance. C’était le cas de tous ceux qui s’apprêtaient à débarquer sur Ryloth le lendemain, prêts à mourir pour sauver un peuple dont ils ne faisaient pas forcément partie. Une tristesse étrange, qui ne semblait pas être la sienne, s’installa dans l’esprit du chasseur, qui fixait le couloir maintenant vide. Il n’avait pas parlé avec les pilotes, et les connaissait seulement par le biais de Rusk, qui avait raconté lors des repas tous les combats trépidants et admirables que cet escadron avait mené. C’était dans ce genre de situation qu’il regrettait de ne pas avoir accepté une prothèse, mais il savait que, même cloué au sol, il pouvait les aider et combattre avec autant de courage. C’était un combat différent, certes, loin de l’Espace infini et des ciels divers des planètes de la Galaxie, mais un combat tout de même, avec autant de peur, d’adrénaline et de morts, sinon moins. Il espérait revoir au moins un de ses anciens camarades, mais le Chiss ne se faisait pas trop d’illusions. Leur mission était l’une des plus dangereuses, sinon la plus dangereuse entreprise par la Rébellion. Ils ne devaient pas se battre, mais protéger des personnes, et des informations. Leur survie importait peu, tant que les renseignements atteignaient les oreilles de la Chancelière Rebelle.

C’était donc dans cette ambiance maussade que les deux amis quittèrent le couloir pour rejoindre la Division Wolffe et manger avec eux. Cette fois-ci, aucun discours d’un Rebelle ou du chasseur n’anima le repas du soir. Aucun ne prononça un mot, et seul le bruit des couverts résonnait dans la salle où des tables étaient maintenant vides et allaient sans doute le rester pour toujours. Tous ne pensaient qu’à la mission du lendemain, au débarquement et aux plans qu’ils devaient exécuter. La victoire était loin d’être assurée, mais, pour Ryloth, ils devaient faire tout en leur pouvoir. Bientôt, ils espéraient, le peuple Twi’lek serait enfin libre. Mais la menace éternelle de la mort ternissait leurs espoirs et la vision qu’ils avaient du futur. Autour de cette table se trouvaient des camarades qui allaient mourir, qui allaient se sacrifier pour en protéger d’autres, ou qui allaient devoir continuer à vivre sans ceux qu’ils aimaient. Certains se tenaient la main, d’autres échangeaient des faibles sourires pâles. Certains encore, comme Orn, ne supportaient plus le visage des autres, ne voulant pas regarder quelqu’un de peur qu’il ne meurt. C’était étrange. Jamais cette sensation n’avait saisi le Twi’lek auparavant. Il n’avait jamais eu qu’à se protéger lui-même et Fett lors de ses missions. Il n’avait encore jamais perdu d’amis au combat - ou du moins le pensait-il, car il ne connaissait pas le sort de Nasha.

C’était étrange, de ne plus être seul de son côté. S’il s’en sentait mieux, il savait que la fin de la lutte contre l’Empire n’en serait que plus dure. Il ne le réalisait pas encore, il le savait, mais la chute de l’Empire allait être synonyme de pertes lourdes et douloureuses, qu’il ne se sentait pas prêt à affronter, si tout du moins lui-même survivait. Lorsque le chasseur se leva pour quitter la table, il lui sembla qu’une force puissante avait pris contrôle de ses jambes, qui refusaient de bouger. Il soupira longuement, et, sans même avoir le courage de dire un au-revoir aux Loups, se força à rejoindre sa chambre. Une fois à l’intérieur, il retira avec des gestes lents et mous son casque, puis s’assit sur le lit confortable. Il n’avait pas sommeil. Pourtant, il devait dormir, se reposer, pour pouvoir affronter les défis que la Mission "Liberté" dressait en son chemin. Il s’allongea, mais ne put que fixer le plafond d’un regard vide et brillant. Il aurait dû être content de pouvoir observer un plafond sans avoir l’impression que ce dernier allait tomber sur lui. À la place, il était étrangement et tristement vide d’émotion. Sa dernière pensée avant de s’endormir fut dédiée à Nasha, et l’espoir de la revoir un jour, si le destin le permettait.

Un haut-parleur annonça le départ imminent des troupes participant à la libération de Ryloth. Déjà prêt et sorti, Orn attendait Rusk et Cara Dune à la porte menant au hangar, le même endroit où plusieurs Rebelles avaient pris leurs armes pour le prendre en joue. Le Chiss arriva le premier, et força un sourire crispé et faux. Le chasseur lui rendit le geste tout en hochant la tête, puis, apercevant Cara, s’engouffra dans le hangar, sans prendre la peine de la saluer. La Rebelle aux cheveux noirs ne lui avait de toute manière pas adressé la parole, et se contentait de le suivre jusqu’à son vaisseau en silence. Une fois devant le Vautour Couronné, le Twi’lek ouvrit la porte, qui s’abaissa tout en libérant de la vapeur, avec un faible sifflement. Entrant le premier dans son vaisseau, il salua Twik, qui observa d’un air abasourdi les deux Rebelles qui s’incrustèrent.

"Ce n’est pas parce que j’ai accepté la présence de Nasha que j’accepte d’être une navette pour tous les Rebelles," lâcha-t-il d’un ton railleur.

Le chasseur esquissa un petit sourire.

"C’est mon vaisseau, Twik, donc j’y invite qui je veux," répliqua-t-il, la voix légère.

Si le droïde leva les yeux au ciel, les deux Rebelles le regardaient avec des yeux ronds. Aucun d’entre eux n’avait vu avant un B-1 de combat encore activé, et voir un de ce robot reprogrammé ainsi était fascinant, et absolument pas ce à quoi il s’attendait pour un co-pilote du Chasseur Impérial. Twik ne prêtait cependant pas attention à eux, préparant le Vautour Couronné au décollage, tandis que Orn fit signe aux deux Shock Troopers de s’avancer et s'asseoir par terre. Finalement, ce fut Cara qui réussit la première à s’exprimer.

"J’ai bien vu des droïdes impériaux chez nous, mais jamais un droïde séparatiste…

— Premièrement, je ne suis pas séparatiste, mes confectionneurs l’étaient. Deuxièmement, si un seul d’entre vous abîme le vaisseau, je me réserve le droit de l’éjecter par-dessus-bord," répondit Twik d’un ton plat et formel.

Rusk lâcha un petit rire, tandis que Cara Dune, à ses côtés, esquissa un petit sourire faible et discret. Orn s’installa sur son siège, et, avec Twik, fit démarrer le vaisseau, qui quitta le hangar avec rapidité et souplesse. Les deux Rebelles restaient derrière, assis au sol, observant silencieusement les moindres recoins du petit vaisseau à l’intérieur blanc. Il était évident que le chasseur l’avait modifié et même agrandi par endroit. Si Rusk était déjà entré dans ce vaisseau, il n’avait pas été conscient, et ne se rappelait que d’être frappé à la tête une fois à l’intérieur. Il était bon pour lui de s’y retrouver en meilleure forme, et conscient. Le trajet vers Ryloth dura deux semaines entières, pendant lesquelles peu de conversations avaient eu lieu. Cara refusait les dialogues inutiles avec le Twi’lek, et Rusk était trop occupé à réfléchir au sort de ses amis pour avoir la force de discuter. Ce fut donc un long voyage pour le chasseur, qui passa néanmoins quelques minutes à expliquer le déroulement de sa mission. Il ne savait pas combien de temps était nécessaire pour avoir accès à la salle des communications sans éveiller les soupçons, et les Rebelles devraient donc patienter dans leur cellule en attendant la visite du Twi’lek, pour enfin activer les bombes thermiques. Cette explosion de la prison de la Base Daala était primordiale à la Mission "Liberté" : c’était le signal qui allait lancer l’assaut des vingt-et-une bases Impériales. Si ce signal se faisait avant la coupure des communications impériales, alors la libération de Ryloth allait échouer, car les renforts arriveraient et les Rebelles ne pourraient plus rien faire.

Si Rusk et Cara l'écoutaient attentivement, ils étaient inquiets à l’idée de devoir se trouver dans une prison, surtout dans une base dirigée par une Moff aussi implacable et intelligente que Dyann Hekat. Leur inquiétude et leur nervosité s’agrandirent à l’approche de la planète, qui apparut rapidement une fois que le Vautour Couronné sortit de l’Hyperespace. Toujours aussi magnifique, Ryloth semblait recouverte d’or, et les larges étendues nuages argentées se mouvaient lentement, presque comme un serpent géant qui cherchait à enrouler la planète de son corps. Certaines parcelles de vert pâle interrompaient cependant la domination des continents dorés, et la gorge du chasseur se serra en voyant ces taches grandir avec l’approche du vaisseau. Dans quelques instants, il allait se poser, et la Mission "Liberté" allait débuter. Il pouvait encore faire demi-tour. Il n’était pas trop tard pour s’éloigner du danger avant de risquer sa vie et celles de nombreux Rebelles qu’il connaissait désormais. Pourtant, Orn continuait à faire avancer le Vautour. Il ne pouvait pas s’arrêter ici, abandonnant avant même d’avoir commencé. Rusk lui en voudrait pour toujours, tout comme les autres Shock Troopers, qui étaient prêts à sacrifier leur vie pour libérer les habitants de cette planète. Taano elle-même ne lui pardonnerait pas.

Soupirant avec appréhension, le Twi’lek dirigea le vaisseau vers sa cible : la Base Daala. Il aperçut avec un pincement au cœur les forêts du clan Tualin, dans lesquelles il avait grandi, au milieu des arbres géants et des chemins de terre. Son regard s’arrêta sur le cimetière où reposait sa sœur, et grande fut sa surprise lorsqu’il réalisa que la base impériale se situait à quelques pas de ce lieu sacré de repos et de recueillement. Les mains tremblantes, il conduit le Vautour Couronné près de la base, où déjà des Stormtroopers, accompagnés d’officiers et de Death Troopers, se réunissaient pour observer le vaisseau noir et rouge qui se posait au beau milieu d’eux.

À l’intérieur, les deux Rebelles mirent avec un certain dégoût des menottes, pour rendre le récit du chasseur plausible. Ils sortirent en premier du vaisseau, la tête basse et affichant une expression d’une haine défaitiste. Derrière eux, Orn les prenaient en joue avec son blaster, et, rapidement, Twik ferma la porte du Vautour. Le Twi’lek força d’un geste brusque ses deux pseudo-prisonniers à s’avancer, ses vieilles habitudes de chasseur de primes reprenant le contrôle de ses gestes. D’un pas lourd, les deux captifs obéirent de mauvaise grâce, se retrouvant maintenant entourés de toutes parts par des membres de l’Empire. Personne ne prononça un mot, les Impériaux faisant immédiatement confiance à celui qu’ils considéraient comme l'un des leurs. Puis, accompagnée d’un grand Death Trooper, une femme de petite taille en uniforme gris s’avança vers eux, une expression de désolation animant son visage. Orn comprit qui elle était en voyant le badge de grade épinglé sur son uniforme, et il remercia son casque de cacher sa nervosité et son incertitude. Des cheveux bouclés flottant avec le vent entouraient son visage hâlé, où un sourire gêné mais poli se dessina sous des yeux sombres et malins.

C’était la Moff Dyann Hekat, qui supervisait cette occupation d’une main de fer. Son jeune âge était sans doute le plus impressionnant. Seuls les officiers remarquables et redoutables atteignaient le rang de Moff, et la plupart d’entre eux avaient obtenu ce titre à la cinquantaine, et non à une vingtaine d'années, comme Dyann Hekat. Ce qui signifiait que la jeune Moff était d’une intelligence et d’une efficacité dangereuses. Les Moffs étaient nommés par l’Empereur lui-même, et ne répondait qu’à lui et aux Grands Moffs. Ils avaient le total contrôle sur le secteur qu’ils supervisaient, et personne n'osait les désobéir. En d’autres termes, la Mission "Liberté" venait d’être sérieusement mise en péril, face à la génie qui souriait gentiment devant les Rebelles et le chasseur, qui avaient l’impression qu’un piège venait de se refermer sur eux.

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SinnaraAstaroth
Posté le 30/05/2024
Ah, c'est cool de voir une nouvelle antagoniste qui a l'air assez intrigante et qui ne sera sans doute pas facile à gérer. Par contre quand je lis "Moff" mon cerveau comprend direct "meilleur ouvrier de France" et je vois la tête de Philippe Etchebest. x)

Sinon je me demandais pourquoi Orn tenait encore à cacher son identité de Twi'lek ? Au point où il en est, je pense pas que ça changera grand-chose et que ça le mettre plus ou moins en danger, limite ça pourrait au contraire jouer en sa faveur (du moins auprès des Rebelles).
Solaq G.
Posté le 30/05/2024
Ah, je connaissais pas du tout ce truc avec Etchebest ahah ! Mais mine de rien, il ferait un excellent antagoniste !

Sinon, pour le casque, t'as totalement raison : ça changerait pas grand-chose pour la Galaxie ! C'est pour Orn que ça changerait tout. Le casque, c'est un peu son armure autant physique que psychique. Depuis que Taano est morte, il a toujours gardé un casque ou un masque sur lui. Il préfère garder son casque ; ça lui donne une sensation de sécurité et ça lui laisse un anonymat pour sa potentielle retraite (ou si les choses tournent au vinaigre et qu'il doit vite changer de vie)
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