Chapitre 35 - N2

   Ça doit bien faire une demi-heure que je tourne en rond. Autant que me le permettent les murs perpendiculaires.

   Les poings serrés, j’essaye de contenir la rage en moi et de me concentrer sur ce que je peux entendre en dehors de ma cellule. Je sais déjà qu’il y a un long couloir au bout duquel se trouve un escalier sur la droite. C’est ce que j’ai déduit du rythme de leurs pas quand ils descendent ici. Nous sommes au sous-sol, c’est sûr et certain. Et je peux dire « nous » parce qu’entre le moment où ils descendent l’escalier et celui où ils entrent dans la salle de torture pour aller jouer avec son corps, il se passe bien moins d’une minute. Elle se trouve donc au même niveau que moi, tout près.

   Au bout à gauche du couloir, il y a une autre entrée. Avec un escalier aussi, mais contrairement à celui de droite, je ne pense pas que ce soit une porte au bout. Lorsqu’ils utilisent ce passage, le bruit résonne, plus fort, plus claquant, comme s’il y avait une tôle ou une trappe pour fermer l’entrée.

   Plus un son, je crois qu’ils viennent tous de sortir. Des fois, je me demande même s’il y a seulement un garde pour s’assurer que nous ne nous échappions pas. Je suis quasiment sûr qu’il n’y a personne. Notre évasion n’est probablement même pas envisageable à leurs yeux. Un an et demi qu’ils nous gardent prisonniers.

   Je m’assois à même le sol, au centre de la cellule et du symbole que j’ai gravé dans le béton à l’aide d’un morceau de pied de lit.

   « Ton symbole, c’est ta force ».

   En suivant du doigt le tracé du dessin, je me remémore les paroles de ma mère lorsqu’elle m’a offert ce carnet dans lequel je n’ai même pas eu le temps de commencer à écrire. Il y a tellement de choses que je n’ai pas eu le temps de faire. Que nous n’avons pas eu le temps de faire. On aurait dû être mieux préparés. Ils ont réussi à nous prendre par surprise. Un genou dans mon dos me tenait bloqué au sol pendant qu’un bras me tirait par les cheveux pour maintenir ma tête relevée. Pour que je voie toute la scène. Pour que je la voie évanouie au milieu du salon. Pour que je voie ces monstres traîner leurs corps inertes hors de la maison. Je me rappelle des larmes qui me brouillaient la vue et qui s’arrêtaient peu à peu, tout mon corps simplement vidé.

   Je n’ai plus jamais pleuré depuis ce jour-là.

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Renarde
Posté le 17/06/2020
Coucou Schumiorange,

J'avoue qu'à chaque fois que je vois que l'on passe à narrateur 2, j'ai un peu d'appréhension. Et pour ce chapitre, j'ai bien eu raison.

Pauvre gamin... J'espère que la cavalerie ne va pas tarder, sa description ressemble beaucoup à ce que Yi a perçu lorsqu'il a atterri dans leur camp par mégarde.
Schumiorange
Posté le 17/06/2020
Salut Renarde !

Et à chaque fois que je mets un chapitre de ce narrateur en ligne, je me demande s'il ne faut pas que je mette le suivant aussi pour compenser...

Bien vu pour la description, il y a de l'espoir !
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