Chapitre 37 : L'occupation

La Moff Hekat affichait un sourire léger face au chasseur et ses deux otages, ne voyant pas derrière le casque du Twi’lek la peur et l’incertitude qui animaient son visage. Ce dernier n’osait pas parler en premier, ayant maintenant terriblement conscience que chaque dialogue allait être semblable à un terrain glissant. Un seul mot, une seule hésitation de sa part pouvait le trahir sur-le-champ. Il espérait seulement qu’il n’avait qu’à se soucier de lui-même et de ses paroles, et que les deux Rebelles devant lui ne se trahissaient pas par leurs expressions.

"Bienvenue à Ryloth, Chasseur. Pardonnez notre accueil désordonné, nous n’étions pas au courant de votre arrivée," lança la Moff d’une voix posée et agréable.

"C’est normal. Je n’avais pas prévu de m’arrêter ici," répondit froidement Orn, sans daigner s’expliquer plus.

Dyann ne parut pas surprise par une telle courtoisie sèche et brusque de la part du Chasseur Impérial. Elle ne l’avait jamais rencontré auparavant, mais elle savait qu’il fallait attendre de lui des réponses courtes, sinon inexistantes. Cependant, La Moff devait en savoir plus, car elle ne pouvait pas se permettre de laisser n’importe qui circuler librement sur cette planète qui désormais lui appartenait, même si cette personne était le Chasseur Impérial.

"Et pourquoi donc êtes-vous ici ?

— Mon vaisseau a un problème, et je devais m’arrêter immédiatement. Comme je savais que Ryloth était occupée, je me suis dit que ce serait un endroit plus sûr pour moi et ces deux Rebelles," expliqua-t-il sans gentillesse, désignant par un hochement de la tête ses faux otages.

Pendant les quatre semaines avant son arrivée sur Ryloth, Orn avait réfléchi à tout un scénario qu’il pouvait utiliser pour justifier sa présence et celle de ces pseudo-captifs. Son histoire, il le savait, devait tenir la route, et coïncider avec tout ce que pouvaient dire les deux autres Rebelles. Ainsi, il avait partagé avec eux ce scénario élaboré de toute part, dans lequel l’état du Vautour ne lui permettait plus d’atteindre la prison de Scariff immédiatement. Et ce prétexte, semblait-il, fonctionnait, car Dyann hocha la tête avec compréhension, et une petite inquiétude compatissante brilla dans ses yeux. Le Twi’lek dut s’empêcher de lever les yeux au ciel face à cette fausse sympathie. Les officiers Impériaux étaient tous les mêmes, en réalité. Tous étaient empreints de fausse bonté, de courtoisie exagérée et de bonnes manières dont l’unique but était de manipuler et de monter en grade. La Moff Hekat n’était pas plus différente. Au contraire, son jeune âge indiquait qu’elle excellait en ces matières.

"Voulez-vous qu’un Ingénieur Impérial s’occupe de votre vaisseau ?" demanda-t-elle gentiment, connaissant la réponse à l’avance.

Comme elle s’y attendait, Orn refusa. Sans perdre de temps, Dyann l’interrogea sur les deux Rebelles qui l’accompagnaient, n’étant pas au courant des missions confiées au chasseur et voulant connaître ces captifs qui occuperaient bientôt les cellules de sa prison. Répondant immédiatement pour ne pas paraître indécis, le Twi’lek répondit calmement, avec un petit air ennuyé.

"Le Seigneur Vador m’a chargé de capturer la Générale Dune. Pour ce qui est de l’autre Shock Trooper, c’est un Rebelle que j’avais déjà capturé avant, mais il a réussi à s'échapper de l’Étoile Noire. Et comme je n’aime pas avoir une cible en liberté, j’ai profité de cette mission pour rectifier sa situation. 

— Je comprends. Je vais contacter le Seigneur Vador, alors, pour l’informer de votre succès et de votre arrêt imprévu," répondit-elle, en faisant signe à un autre officier de s’en charger.

Un effroi parcourut les trois Rebelles, qui voyaient déjà le bras droit de l’Empereur arriver pour mettre fin à leur mission tandis que l’officier commençait à partir rentrer dans la base.

 

"Non !" s’écria Orn, trop rapidement et avec une panique qui lui serrait la voix.

L’officier s’immobilisa, et se tourna en même temps que Dyann vers le chasseur, le regardant avec étonnement. Face à tous ces visages qui le regardaient et qui ne comprenaient pas cette frayeur soudaine qui avait percé sa voix, le Twi’lek devait rattraper son erreur sur-le-champ, et fournir une explication solide. Il se força à se calmer et à garder une voix posée, évitant de parler trop vite ou de laisser sa peur visible à nouveau.

"Ce n’est pas la peine de déranger le Seigneur Vador pour cela. Mon vaisseau devrait bientôt être réparé, alors je ne resterais pas longtemps," expliqua-t-il, forçant son corps à ne pas être crispé et tendu et esquissant un faible sourire sous son casque.

La Moff Hekat sembla réfléchir un instant, puis finalement demanda à l’officier de ne pas le faire. En y réfléchissant, elle n’aurait pas dû être étonnée par cette réaction soudaine. Elle-même craignait Vador plus que la mort, alors qu’il ne veuille pas risquer sa colère était plus que compréhensible. Inconsciemment, Orn ferma les yeux un instant, un soulagement extrême le parcourant. Devant lui, Rusk et Cara se réjouissaient intérieurement, mais ils mirent un point d’honneur à ne pas montrer qu’une grande crainte quittait leurs épaules, de peur d’éveiller des soupçons.

"Très bien," fit Dyann, qui se tourna vers un Death Trooper. "Amenez les Rebelles dans leur cellule. Assurez-vous qu’ils n’ont aucune arme en leur possession, et séparez-les."

Rusk et la Rebelle aux cheveux noirs échangèrent un regard de défiance mêlé d’inquiétude. Ils n’avaient pas prévu d’être séparés, et Orn non plus. Si cela rendait plus compliqué la communication entre eux trois, le chasseur ne fit aucun commentaire, et réfléchit déjà à une manière dont les deux captifs pourraient coordonner leur bombe le temps venu. Il s’écarta à la venue du Death Trooper, qui le dépassait d’une tête et l’ignorait entièrement. Ce dernier dit quelque chose à la Moff, d'une voix modifiée et incompréhensible, cryptée par son casque sombre et fin. Dyann sembla cependant le comprendre et lança un regard rapide au chasseur, avant d’hocher la tête. Les deux Rebelles partirent donc dans la Base Daala, et une inquiétude supplémentaire serra leur cœur lorsqu’ils se retrouvèrent seuls, entourés par des Impériaux qui les observaient avec dédain et haine. Le Twi’lek les regarda partir, avant de tourner son attention vers la Moff Hekat, qui continuait d’afficher un sourire poli. S’avançant pour entrer dans la base à son tour, elle fit signe au chasseur de l’accompagner, ce qu’il fit, se mettant à marcher à son niveau, imitant son pas lent et posé.

Ses yeux se posèrent sur la Base Daala, grise et terne contre le paysage verdoyant et humide. Grande et large, la base formait un angle, et s’étendait sur plusieurs mètres. Son toit plat était couvert par de grandes paraboles qui assuraient la bonne communication des autres bases. Deux grandes tourelles se dressaient aux extrémités du toit, équipées de deux mitrailleuses lourdes, dont la portée était suffisamment grande pour tenir en respect des assaillants potentiels. Un TS-TT, un Transport de Surveillance Tout Terrain, se tenait fièrement à côté de l’entrée principale, où ses pilotes se trouvaient, prêts à grimper dans l’immense marcheur d’assaut à deux pattes. D’un gris plus clair que celui recouvrant les murs de la base impériale, il semblait en bon état, avec peu de marques d’impact sur sa carcasse blindée et résistante. Comme annoncé par Nephtyr, aucun vaisseau n’était visible, confirmant l’absence de force aérienne des Impériaux occupant Ryloth. Au-dessus de l’entrée principale, dont les portes s’ouvraient en coulissant en biais pour laisser passer les soldats qui entraient et sortaient, le symbole de l’Empire était fièrement gravé sur le mur, formant comme un avertissement à tous ceux qui s’approchaient de la Base Daala. Avec un pincement au cœur, Orn aperçut, à la droite de la base, plusieurs troncs d’arbres entassés les uns sur les autres. Ces troncs d’arbres, qui semblaient briller comme de l’or aux rayons du Soleil de Ryloth, étaient reconnaissables entre tous. C’était ceux de la forêt du Clan Tualin. Une douce colère commença à se former dans les entrailles du Twi’lek face à ces arbres morts et à la perspective d’une déforestation brutale et inutile que l’Empire entreprenait. Nul doute qu’un projet sombre et dévastateur se déroulait doucement ici, en secret, et le chasseur se rendit seulement compte de la gravité de cette occupation.

Il avait beau ne pas savoir la raison pour laquelle la forêt se faisait tuer à petit feu, il savait que l’Empire excellait dans l’exploitation totale des ressources d’une planète. La Rébellion n’avait pas pu sauver à temps les Wookies de Kashyyyk, mais il n’était pas encore trop tard pour Ryloth. Les forêts de la planète étaient encore debout, bien que réduites, et les Twi’leks n’étaient pas encore des esclaves. Orn sentait néanmoins que le temps pressait, en voyant arriver un grand véhicule blindé, qui transportait une centaine de troncs dorés. Peu importait ce que les Impériaux manigançaient ici. Bientôt - du moins Orn l’espérait - Ryloth serait libérée, et le paysage ne serait plus abîmé au service d’un dessin cruel et inutile. Suivant toujours Dyann en se forçant à paraître simplement curieux et non enragé, le Twi’lek finit par entrer dans la base, s’écartant pour laisser passer une troupe de Stormtroopers, qui saluèrent la Moff et son invité. Tout comme l’Étoile Noire, l’intérieur sombre de la base brillait doucement sous l’éclairage blanc qui ornait les plafonds noirs. Organisée en larges couloirs sombres, la Base Daala était typique des bases Impériales, mais les officiers paraissaient calmes, se baladant calmement et discutant avec légèreté ; tout le contraire de l'Étoile Noire, où même les Stormtroopers courraient dans tous les sens, sous les cris des Impériaux en uniformes gris. Orn les regardait tous, scrutant les couloirs et comptant leurs effectifs. Les informations divulguées par les chefs Twi’leks étaient encore une fois exactes, et un sentiment de sécurité, bien que faible, s’installa en lui, soulagé et rassuré de ne pas découvrir plus de soldats en armures blanches ou noires que ce qui avait été annoncé.

Ces derniers, d’ailleurs, se mettaient au garde-à-vous au passage de Dyann, qui répondait avec des salutations ou des hochements de tête, adornant toujours un sourire qui n’inspirait à Orn que de la méfiance. Lui aussi saluait les soldats et officiers d’un mouvement sec de la tête lorsqu’ils l’accueillaient, et certains lui souhaitèrent même la bienvenue, contents de trouver parmi eux le chasseur qui collaborait étroitement avec Vador. Quelques officiers brûlaient d’envie de lui poser des questions, de s’attirer ses grâces pour obtenir l’attention de leur Empereur ou de son bras droit, mais aucun n’osait s’avancer, tenus en respect par la Moff Hekat, qui, les mains liées dans son dos, conduisait le nouvel arrivant à travers différents couloirs, tous similaires. Orn se doutait qu’elle le menait à son bureau, pour qu’elle puisse obtenir des explications plus précises et discuter à l’abri des oreilles et regards indiscrets, mais il profitait de cette pseudo-visite de la base pour tenter de trouver la prison. Il n’osait pas le demander par lui-même, car il avait peur qu’une telle curiosité de sa part ne mette des doutes quant à sa loyauté envers l’Empire dans le cœur de Dyann.

Après quelques minutes à arpenter les couloirs noirs et brillants, la Moff Hekat s’arrêta en face d’une porte blindée épaisse, grisâtre et lourde, frappée de l’imposant symbole de l’Empire. Une interface était intégrée au mur, juste à côté, et Dyann entra rapidement un code, que le chasseur n’eut pas le temps de comprendre ni d’apercevoir clairement. La porte coulissa silencieusement vers le haut, révélant un unique bureau noir en plein milieu de la salle sombre. Des lumières au plafond s’allumèrent, révélant des murs où figuraient de nombreux papiers holographiques, et une holo-carte bleutée de Ryloth se mit à lentement tourner sur le bureau. Un écran transparent s’alluma également, s’ouvrant sur des symboles en langue Twi’lek. Orn ne tenta pas de les lire, préférant afficher un désintérêt total pour les actions de l’Empire sur sa planète natale, par pure sécurité. Dyann n’entra pas la première, mais fit à la place signe au chasseur d’entrer. Ce dernier obtempéra, mais n’aimait pas sentir la présence de la Moff, qui le suivit à l’intérieur. Sans un mot, elle partit s’installer dans son fauteuil noir, derrière le bureau, et observa un instant le Twi’lek avant de parler.

"Sachez que c’est un honneur de vous recevoir ici. Après tout, nous savons - et apprécions - tout ce que vous avez fait pour l’Empire. Vous êtes le bienvenu dans toutes les bases de Ryloth. Mais je ne vais pas passer par quatre chemins : vous avez sans doute remarqué l’absence de force aérienne, n’est-ce pas ?" demanda-t-elle, toute bienveillance et légèreté ayant quitté sa voix maintenant grave et sérieuse.

Lorsque le concerné acquiesça, Dyann soupira, et lança un regard inquiet mais sévère sur son écran.

"Vous devez nous penser désœuvrés… Mais je pense qu’il est bon que vous sachiez une chose : qu’importe ce que les Rebelles ont comploté pour mes bases, j’ai pire en réserve pour eux," lança-t-elle, posant ses yeux sur le chasseur, comme si elle le menaçait lui.

Son sang ne fit qu’un tour, et Orn dût se forcer à garder une respiration posée et calme pour ne pas montrer le stress qui l’envahit d’un coup. Il resta immobile, ne répondant rien, mais réfléchissant en panique à ce qui avait pu trahir le groupe de Rebelles. Peut-être que Vador avait informé la Moff. Après tout, le Seigneur Sith savait certaines choses qu’il lui était pourtant impossible de posséder en sa connaissance. Mais dans ce cas-là, le Twi’lek ne comprenait pas pourquoi les Impériaux ne les avaient pas abattus sur place, dès leur arrivée. Il n’y avait pour Dyann aucun intérêt à laisser entrer dans sa base trois Rebelles, qui avaient des alliés près des vingt autres bases Impériales de Ryloth, bien au contraire. Ou alors elle avait quelque avantage resté invisible pour l’Alliance, une arme secrète qu’ils étaient en train de conduire, une armée en plus, qui rendait les forces de l'Occupation Impériale intouchables et protégées. Devant la panique sourde qui alourdissait et immobilisait ses membres, Orn tenta faiblement de se raisonner. Il était pour Dyann le Chasseur Impérial, qui s’était battu aux côtés de Vador, et avait tué Enfys Nest quand personne ne pouvait la trouver. Il était aux yeux des Impériaux un stratège et un combattant hors-pair, qui avait réussi à impressionner le légendaire Grand Moff Tarkin.

Pour Dyann, dont la seule préoccupation, comme tous les autres officiers de son rang, était sa réputation, paraître faible et mal organisé devant lui était impensable, pensait-il. Elle avait tout à gagner à sembler sûre d’elle et en position de pouvoir face au Twi’lek, dans l’espoir de rejoindre les plus hauts commanditaires de l’Empire. Ryloth n’était pas la plus impressionnante et passionnante des planètes non plus. Située à la Bordure Externe, loin des Mondes du Noyau, elle était relativement calme. Peut-être la Moff Hekat voulait-elle une mutation vers une planète où plus de choses étaient à entreprendre, où de véritables enjeux se trouvaient, et elle espérait peut-être faire suffisamment bonne figure face au Chasseur Impérial. Toutes ces hypothèses fourmillaient dans son esprit, et il s’accrocha à ces pensées, unique réconfort que le Twi’lek pouvait s’apporter. Il était trop tard pour faire demi-tour, trop tard pour douter. Il devait aller au bout de la mission, coûte que coûte. Rusk et Cara étaient déjà en prison, leur sort était scellé s’il se désistait ou se trahissait en paniquant inutilement. Tant pis si Dyann savait, si leur destin s’était déjà joué sans qu’ils ne s’en aperçoivent. Orn devait au moins tenter d’achever ce pourquoi il était venu, mais désormais il savait que le temps pressait bien plus qu’il ne l’imaginait. Toujours silencieux, il menait ce conflit intérieur en face de la Moff Hekat, qui sourit lorsqu'il acquiesça d’un air satisfait, comme si ce qu’elle venait de dire le réjouissait et non le terrifiait. Il se raisonnait donc ainsi, voyant devant lui deux options : abandonner et sacrifier son peuple ainsi que sa vie, ou essayer malgré les doutes et peut-être mourir. Le choix était pour lui vite fait.

"Si cela n’est pas indiscret, quel est exactement le problème de votre vaisseau ?" demanda soudain Dyann, l’arrachant à ses pensées.

"Rien de grave, mais les communications ne passent plus très bien, et le poste de contrôle est ancien, donc deux commandes ne fonctionnent plus. Je ne peux pas me permettre de continuer à voler dans ces conditions, surtout avec deux Rebelles dans mon vaisseau.

— Je vois. Dîtes-nous si vous avez besoin de quoi que ce soit," dit-elle, avec un léger sourire.

Le chasseur hésita. Le moment parfait pour tenter sa chance se présentait devant lui, mais il avait peur de mettre leur mission en plus grand péril qu’elle ne l’était déjà. Il pesa rapidement le pour et le contre, puis préféra finalement sauter sur cette occasion, qui risquait de ne pas revenir.

"J’aurais peut-être besoin de connecter mon vaisseau à votre poste de communication, pour m’assurer de l’efficacité des réparations," lança-t-il, craignant la réponse mais parlant d’un ton détaché.

Dyann fronça les sourcils, comme si elle était embêtée.

"Ce n’est pas un poste auquel je donne facilement l’accès… Mais avec une certaine surveillance, alors oui, je pourrais probablement vous donner la clé à la salle des communications…," finit-elle par répondre, pesant ses mots au fur et à mesure.

Orn la remercia en un mot, puis la Moff se leva de son fauteuil.

"Bien, je n’ai plus rien à vous demander, alors à moins que vous ayez quelque chose à me dire, vous pouvez vaquer à vos occupations. N’hésitez pas à me faire demander, si jamais vous avez besoin d’un endroit où dormir ou d’une aide quelconque," fit-elle, tendant la main vers la porte, qui s’ouvrit à sa commande.

Le chasseur se sentit obligé de la remercier à nouveau, puis lui tourna le dos, se dirigeant d’un pas assuré vers la sortie. Il sentait le regard de Dyann sur lui, et ne put s’empêcher de se crisper, ayant à nouveau la terrible sensation d’être tombé dans un piège. Mais alors qu’il avait atteint la sortie, la voix suave de Dyann l’arrêta net.

"J’ai entendu qu’à Tatooine, Jabba le Hutt a été assassiné… N’étiez-vous pourtant pas revenu dans son service peu avant ?" l’interrogea-t-elle innocemment.

Orn ne devrait pas être surpris par une telle question, et pourtant il l’était. Ce n’était pas un secret qu’il avait regagné le Palais de Jabba pour à nouveau être accepté par le Hutt. Mais l’Empire savait également que Jabba avait comme prisonnier Solo, le Rebelle que Fett et Orn avaient capturé ensemble. Avec le Hutt mort, il était certain que les Impériaux savaient, ou du moins se doutaient, que le contrebandier s’était échappé. Dans un tel contexte, difficile de voir la présence du chasseur comme une simple coïncidence, surtout après qu’il avait disparu pendant des mois et des mois. Néanmoins, le Twi’lek devait agir comme s’il n’avait rien à se reprocher, puisque d’une certaine manière, c’était vrai. Il n’avait pas tué Jabba. Sans faire face à son interlocutrice, il tourna sa tête pour lui répondre, le dos tourné.

"Oui. Sa mort est regrettable… Mais il était vieux et lent. Je ne sais pas si vous connaissez le fonctionnement de la pègre, Moff Hekat, mais il était temps pour lui de laisser sa place à du sang neuf," expliqua-t-il sans mentir.

Sans attendre une éventuelle réponse de Dyann, le chasseur sortit, puis se mit à errer dans les couloirs. Être loin de la Moff et de ses questions redoutables lui faisait un grand bien, et marcher seul le calmait doucement. Son cœur battait la chamade, et il sentit la pression et la peur quitter son corps, laissant ses mains légèrement tremblantes et faibles. Orn lâcha un faible soupir, avant de se mettre à marcher avec plus de vigueur, évacuant définitivement la panique qui l’avait saisi lors de son entretien. Après quelques minutes à se balader sans but dans les couloirs de la base, ses idées redevinrent claires, et il songea aux deux Rebelles emprisonnés. Il ne leur avait pas encore donné de bombes thermiques, pourtant si nécessaires au déroulement de leur mission. Orn continua donc à arpenter la base, cette fois à la recherche de la prison. Aucun officier ni Stormtrooper ne vint l’arrêter ou lui demander ce qu’il faisait pendant son errance. Rassuré par cela, il prit son temps, scrutant chaque recoin de chaque couloir, passant sa tête à travers des portes discrètement si cela était possible. Alors qu’il commençait à désespérer en ne trouvant pas la prison, il aperçut du coin de l’œil un Death Trooper pousser violemment une Twi’lek à travers une porte. Supposant que derrière cette porte blindée se trouvait la prison, il s’approcha, avant d’être coupé net dans son élan par un officier à l’uniforme gris qui se planta devant lui.

"Excusez-moi, mais vous entrez dans la prison, chasseur.

— C’est bien ce que je pensais. Je veux voir mes cibles. Je dois les donner au Seigneur Vador et je veux m’assurer que tout est en ordre," rétorqua-t-il d’un ton froid.

Comprenant parfaitement la requête du Twi’lek, l’officier s’écarta et ouvrit la porte pour lui. Orn entra donc dans la prison, et fut frappé par le nombre de cellules. Toutes étaient serrées les unes contre les autres, avec des barreaux fins et électriques qui donnaient vue sur les différents prisonniers. S’avançant d’un pas lent, il observa un à un les captifs, à la recherche de Rusk et Cara Dune. Sans surprise, la majorité était des Twi’leks du clan Tualin, et certains le reconnaissaient même, leur visage s’illuminant à la vision de cet allié. La plupart cependant étaient en triste état, ayant des blessures sur leur tête ou leurs membres.

Le chasseur manqua de lâcher un juron en voyant, dans une cellule vraisemblablement vide, une petite Twi’lek aux yeux effrayés. Il s’arrêta, désirant plus que tout s'accroupir pour la rassurer, mais ne le pouvait pas. La jeune fillette avait la peau jaune et les yeux d’un bleu glacial, rougis par trop de larmes qui avaient coulé. Elle ressemblait étrangement à Warat’Ualin, avec qui elle partageait une expression de dignité et une peau atypique pour leur peuple. Orn comprit tristement qu’il avait en face de lui la petite-fille du chef du clan Tualin, maintenue dans cette cellule immense pour un petit être comme elle en tant qu’otage. Elle s’était blottie dans un coin sombre de sa cage, regardant d’un air apeuré le chasseur à l’armure noire et rouge, qui pour elle paraissait géant et menaçant. Se rendant compte de l’effet de la présence sur la jeune otage, Orn baissa la tête et la salua gentiment, avant de continuer ses recherches. Il ne fut pas étonné de trouver dans cette prison remplie de semblables quelques Rebelles humains, et lorsque le Death Trooper le croisa pour sortir de cette pièce où un lourd silence pesait, les prisonniers s’écartèrent d’un coup des barreaux, se réfugiant au fond de leur cellule, ayant plus peur de ce soldat d’élite que du Chasseur Impérial. Ne trouvant pas ses deux Rebelles, le Twi’lek s’enfonça plus profondément dans le long couloir, presque inquiet à l’idée de ne pas les trouver, avant de tomber nez à nez avec Rusk, qui afficha un air sombre à sa venue. Après s’être assuré qu’aucun Impérial ne trainait dans les environs, Orn donna discrètement à l’ancien pilote une bombe thermique, drôlement efficace pour détruire tout un bâtiment.

"Lorsque je reviendrais, après avoir coupé les communications, active-la quand j’aurais frappé deux fois la porte de la prison. Mais fais attention. Il y a des enfants dans cette prison," souffla-t-il sous son casque.

Une fois que Rusk, qui avait hoché la tête, s’était saisi de la bombe puis l’avait cachée, Orn repartit à la recherche de Cara Dune. Cette dernière n’était pas très loin, et tendit la main pour se saisir de la bombe, que le chasseur lui donna. Il lui répéta les mêmes mots, lui donnant les instructions. La Rebelle acquiesça, puis cacha la bombe, avant de faire signe au Twi’lek de partir. Ce dernier s’exécuta, puis, une fois sorti de la prison, fut pris par un besoin profond et une grande envie de visiter la tombe de Taano. Après tout, il était sur le territoire des Tualin, et ces terres étaient pour lui associées aux visites qu’il rendait à la Padawan assassinée. S’il ne se méprenait pas, le cimetière du clan Tualin se trouvait à une vingtaine de minutes de marche de la Base Daala. Le chasseur quitta donc la base et entreprit de rejoindre discrètement la forêt. Cette dernière perdait peu à peu ses arbres, emportés par l’Empire pour des raisons obscures. Se retrouver dehors, loin de tous ces Impériaux, faisait un bien fou au chasseur, qui leva sa tête pour observer le ciel nuageux de Ryloth qui commença à noircir à l’arrivée de la nuit. Il avait hâte de revenir voir sa sœur.

Avec tout ce qui s’était passé depuis la dernière fois qu’il l’avait visitée, il n’avait pas eu le temps de se recueillir sur sa tombe. Pourtant, plus que jamais, il avait besoin de la voir, de lui parler. Il savait que, d’où elle était, sa sœur veillait sur lui, et accompagnait ses moindres pas. Car c’était bien elle, il le savait, qui lui avait montré la vérité sur sa mort et sur l’Empire. C’était elle qui, alors que tous ses semblables se faisaient tuer un à un par leurs frères d’armes, s’était élancée pour protéger de sa vie les Novices innocents et terrifiés. Aujourd’hui, c’était Orn qui était terrifié. Il avait peur que l’Empire ne découvre le plan de la Rébellion pour libérer Ryloth, que Rusk ou Cara soient assassinés dans leur cellule, sans aucun moyen de se défendre. Orn craignait avoir perdu avant même que la bataille n'ait commencé. Il savait cependant que parler à Taano pouvait l’aider, pouvait éclaircir son esprit et réaffirmer son courage pour qu’il ne faiblisse pas. Le chasseur avait besoin d’elle, même si sa sœur n’était plus. En s’approchant du cimetière, il réfléchissait à ce qu’il allait lui dire. Il ne pouvait lui confier la mission qu’il était venu accomplir ici, il le savait. Finalement, peu importait si ce qu’il lui disait avait une importance significative. Tant que le Twi’lek parlait à Taano, se souvenait d’elle et continuait à honorer sa victoire, alors ce qu’il lui racontait n’était pas d’une véritable importance.

La nuit était entièrement tombée lorsque le chasseur arriva au cimetière, essuyant sur son casque les légères gouttes qui descendaient doucement pour abreuver la forêt et l’herbe verdoyantes. Il s’avança entre les tombes, avant de s’arrêter devant celle de Taano, où le symbole Jedi, deux ailes entourant un sabre-laser, était gravé. Dans un petit soupir, Orn s’assit, n’étant pas affectée par l’humidité recouvrant les brins d’herbe au sol. Il s’empara doucement du sabre-laser de sa sœur qu’il gardait sans cesse avec lui, se sentant immédiatement apaisé et calme à son toucher, avant de tourner ses yeux vers le ciel étoilé mais couvert de Ryloth. Des milliers d’étoiles brillaient faiblement, luttant pour être visibles à travers la pluie qui tombait doucement. Tout semblait suspendu dans le temps, car tout, même les gouttes de l’averse, donnait l’impression d’être immobile. Orn lui-même osait à peine respirer, de peur de briser ce spectacle si magnifique et rare. Il repensa à son enfance sous ce même ciel étoilé, pendant laquelle il avait grandi seul, recevant seulement de temps à autre des nouvelles de Taano, fière Padawan du Maître Paasik.

Malgré leur séparation, les deux jumeaux s’étaient toujours parlé à travers le lien que la Force avait tissé entre eux. Si les Maîtres Jedi avaient tout fait pour briser ce lien, seule la mort de Taano avait eu suffisamment de choc pour, après que le chasseur eut ressenti la même douleur mortelle qu’elle, couper Orn de la Force. S’il savait ces capacités mystiques pas totalement disparues, il avait conscience qu’il devait faire un effort conséquent pour utiliser la Force. De toute manière, il ne se sentait pas assez légitime, pas assez droit, pas assez juste, pour faire appel à ces pouvoirs que sa sœur avait utilisés pour servir le bien. Il lâcha un soupir, puis sourit lorsque son regard se posa sur la tombe de Taano. Il passa la nuit à lui parler de tout et de rien, évoquant Nasha, Boba Fett et Twik, cet équipage du Vautour Couronné qui se retrouvait inlassablement séparé. Il raconta l’histoire derrière son nouveau symbole, le plaisir qu’il ressentait à se retrouver à nouveau dans le centre de l’action, mais également sa peur de perdre encore plus de personnes, de devoir enterrer des amis et sa peur de les voir souffrir ou mourir. Il lui parla des Clones qu’il avait rencontré, qui lui avaient expliqué qu’ils avaient eu l’esprit contrôlé par une puce lorsque l’ordre de tuer leurs amis Jedi était tombé. Et lorsque la fatigue le submergea, Orn dormit sur la terre, à côté de sa sœur, tous deux protégés par les guerriers du clan Tualin, qui gardaient un œil attentif sur les jumeaux, qui se retrouvèrent en rêve.

Les premiers rayons de Soleil chatouillèrent l’armure rouge et noir du Twi’lek, qui se réveilla doucement. La pluie avait cessé depuis longtemps, et la forêt entière semblait faite d’or sous la lumière de l’astre diurne éclatant. Quelques oiseaux de Ryloth chantonnaient avec légèreté, ignorant tout de la sombre présence de l’Empire. Lorsque le Twi’lek se releva, un cerf géant, aux cornes presque infinies, partit rapidement en sautant avec grâce, apeuré par le mouvement soudain. Il y avait dans ce lieu isolé une paix et une atmosphère éthérée, presque divine ; comme si l’Empire, l’occupation et la déforestation n’existaient pas ici. Si le chasseur brûlait d’envie de rester ici, dans ce cimetière si paisible et reposant, il savait que ce n’était pas possible. Avec un soupir, Orn se mit debout, puis murmura un au-revoir à Taano. Il était temps pour lui de retourner à la Base Daala, pour accéder à la salle des communications et enfin enclencher l’assaut sur les vingt-et-unes bases. Cela allait perturber le havre de paix secret de la forêt, il le savait, mais néanmoins il se mit à se diriger vers la base, préférant causer un chaos temporaire plutôt que de laisser sa planète natale sombrer doucement vers sa perte. 

Mais alors qu’il venait à peine d’atteindre l’orée de la forêt, une explosion retentit dans tout le territoire, suivie d’une deuxième. Des oiseaux s’envolèrent des arbres en poussant des cris stridents, paniqués, et Orn regarda partout autour de lui, reconnaissant dans ces grands bruits la détonation d’une bombe thermique. Son cœur manqua un battement lorsqu’enfin il aperçut l’origine des explosions. La Base Daala, dont les communications étaient toujours actives et qui était visible au loin, était surplombée par deux grands nuages de fumée noirâtre qui montaient doucement vers le ciel. L’alarme Impériale se déclencha aussitôt, résonnant même jusque dans la forêt, d’un bruit assourdissant et répétitif. Le sang glacé, immobilisé par la surprise et l’horreur, le chasseur observa la prison de la base, impuissant. Le signal d’attaque avait été lancé trop tôt.

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SinnaraAstaroth
Posté le 04/06/2024
Hello !

Je reprends ma lecture, mais plus j’approche de la fin, moins j’avance, parce que je n’aime pas les fins, donc je prends mon temps. x)

Pour l’occasion, j’ai lancé l’ost de Star Wars, parce que tant qu’à faire, soyons cohérent avec l’univers !

Du coup je mets mes remarques tel qu’elles me sont venues :

« d’un dessin » : d’un dessein

« Le choix était pour lui vite fait. » : La question est vite répondue. x)

« Il ne pouvait lui confier la mission qu’il était venu accomplir ici, il le savait. » : Pourquoi pas ? Ce n’est pas comme si elle allait en parler à quelqu’un. x)

Je me demande si Orn va réussir à utiliser la Force à un moment. Après, séparer des jumeaux liés par la Force ce n’était pas très intelligent de la part des Jedi. Je sais que leur philosophie de vie c’est de couper tout lien sentimental, familial, etc. mais bon on a bien vu que ça ne fonctionne pas et que ça finit toujours par foirer leur espèce de mentalité monastique-là ! x)

Ah ben sans surprise, le plan a foiré ! Ce ne serait pas drôle sinon. Au moins ça promet de l’action dans le prochain chapitre ! x)
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