Chapitre 37

Notes de l’auteur : Alice se rapproche de plus en plus de son objectif : la citée d'Ys où devraient se trouver Léa.

MAJ : le 28 Juin

Auberge « Ildorwyn» , Ville d'Arborflor - Brocéliande.

Alice se réveilla en se tournant vers sa source de chaleur la plus proche et vit les yeux de Garen la fixer. Ils se sourirent mutuellement et la jeune femme s'étira lascivement, ne ratant pas une miette de la réaction de Garen, qui la regardait faire, la mâchoire crispée.

Elle se redressa, coiffa grossièrement sa chevelure en une tresse lâche, et alla se rafraîchir le visage avant de remettre ses vêtements propres et secs, délaissant malgré elle la chemise de Garen qui lui servait de tenue de nuit. Il attendait qu'elle revienne, et ils partirent déjeuner, rejoignant les autres en bas de l'auberge.

— Ça y est ! Aujourd'hui, nous arrivons à la capitale. Je vais pouvoir retrouver Léa.

— Ça signe la fin de ton périple...

— Ohh, ne dis pas ça comme ça. Je n’ai pas encore la solution pour revenir dans notre monde.

— Ton amie va me détester, après la peur que je lui ai faite, répondit Garen, l’air abattu.

Alice fronça le nez en lui prenant le bras, qu'il décrispa à son contact.

— Je ne vais pas disparaître du jour au lendemain. Et il suffira de t’excuser auprès de Léa. Puis je ne veux pas encore m'imaginer partir totalement.

— Je te manquerai ?

— Bien sûr... Et c'est ça le problème. Il faut bien que je rentre un jour et je me sens très attachée à vous tous... à Gwen, à Georges, même à Eilix, ton ami druide, et surtout à toi. Mais je ne veux pas encore penser à la suite. Baby step par baby step !

— Je ne sais pas ce que ça veut dire. Alice rit, un peu maussade, et tira Garen par le bras pour qu'il se baisse à son niveau.

— On parlera de tout ça plus tard, d'accord ? Elle poussa un soupir tremblant alors qu'il acquiesçait silencieusement et se perdit un instant dans ses beaux yeux noisette avant de se reprendre, retrouvant sa pétillance habituelle.

Dans la grande salle, l'agitation du matin la mit de bonne humeur. Des odeurs de plantes, de pain et de gras appétissant lui ouvrirent l'appétit, lui permettant de mettre de côté les pensées qu’elle voulait occulter. La bande des korrigans était là au complet, et Grym boudait encore, au bout de la table, allongé en rond sur un coussin, le dos tourné. Elle appréciait de retrouver un semblant de civilisation et s'installa à côté de Grym, Garen en face d'elle, avant qu'on lui apporte une assiette débordante de choses aussi appétissantes que déraisonnables.

— Oh purée ! C'est une tuerie cette cuisine. L'ambiance camping était super chouette, mais je suis contente de retrouver un vrai lit, de l'eau chaude, et de pouvoir m'empiffrer de ces machins, là, dit-elle en montrant de sa fourchette une sorte de pain rond fourré qui semblait frit.

— Du Gwiskornev melhaig ! Avec une compote de gwerenn, répondit Gwen.

— Je serai incapable de retenir ça ! Mais c'est vraiiiment bon. Meilleur que les donuts, le cheesecake et le pain au chocolat, enfin... Peut-être pas le pain au chocolat. Comment vous faites pour vivre sans chocolat ici ?

— On a du Gwiskornev melhaig ! Alice éclata de rire, et les korrigans, même Garen, souriaient. Elle caressa distraitement le chapalu alors qu'ils établissaient leur plan pour la journée.

Georges fit la route avec eux, et plus ils s’approchaient de leur destination, plus la tension montait. Elle ressentait de l'excitation à l'idée de découvrir un nouvel endroit, de savoir qu'elle allait, qu'elle DEVAIT trouver Léa. La brise marine emplissait ses poumons, et elle se forçait à rester joyeuse. Blaguer, faire ce qu'elle faisait de mieux, lui permettait d'occulter le reste. Ses compagnons se doutaient qu'elle se forçait, mais tant que personne ne lui mettait le nez dedans, elle maintenait le statu quo.

Georges ne pouvait pas traverser la route qui les menait à la presqu’île et resta à l'extérieur, puis rejoignit une forêt après des embrassades d'Alice. La rouquine se tourna vers la mer, laissant son regard s'abîmer vers l'horizon. Le soleil haut brillait intensément, lui brûlant presque les rétines, et le vent sécha les larmes qui menaçaient de déborder. Cette vue était magnifique, la mer sublime frissonnait lorsqu'elle se retirait à chaque vague.

Un goût d'iode envahissait sa bouche et son palais, et elle saisit le bras de Garen pour remplacer cette odeur par la sienne. Se parant de son sourire, son armure, elle marcha, le cœur battant, vers la cité qu'elle voyait au loin.

Si elle doutait encore de la véracité de ce monde, il lui suffisait de voir la ville. D'une blancheur immaculée, des remparts l'encerclaient, des tours jouaient avec les nuages qui passaient par là, et plus ils s'approchaient, plus ce qu'elle voyait comme des mouettes au loin devenait massif : des animaux ou des embarcations volantes.

Elle se revoyait petite quand elle avait traversé la baie du Mont Saint-Michel sur le dos d'un cousin. Cette grandeur qui l'avait marquée avec ses yeux d'enfant s'imposait de nouveau à elle.

Une arche monumentale marqua l'entrée de la cité qu'elle admira en levant le nez, comme la touriste qu'elle était.

— Bienvenue à la cité d'Ys, cria un garde près de l'entrée, dont la silhouette elfique se fondait parfaitement dans le décor.

Garen était passé devant elle, comme pour faire rempart, et les korrigans l'entouraient comme un gang d'enfants voulant s'accrocher à leur mère. Le chapalu leur donnait des indications à la manière d'un GPS en les baladant de rues en rues.

Au bout de quelques heures de marche ponctuées par des arrêts pour manger ou reposer leurs pieds, la troupe s'arrêta dans une auberge assez centrale pour reprendre leur exploration le lendemain. Alice partagea sa chambre avec Garen, sans qui elle n'arrivait pas à fermer l'œil. Seule sa chaleur et sa carrure gigantesque lui permettaient de se relâcher totalement. C'était son rocher, et il ne semblait pas se plaindre de la situation, donc elle continuait sans vergogne à profiter de sa présence.

Une fois dans l'obscurité, ils parlaient pendant quelques minutes. De ce qu'ils aimaient, de choses heureuses de leur passé, et chaque fois Garen la prenait dans ses bras et lui disait de sa voix grave, grondante :

— Ça va aller, tout va s'arranger, on va retrouver ton amie. Allez, dors maintenant. Et elle sombrait, le cœur au bord des yeux.

***

La troupe se remit en route dès la fin du petit déjeuner, avec bien sûr des Gwiskornev melhaig fourrés de viande bien juteuse. Le chapalu était convaincu qu'ils se rapprochaient du but. Alice se laissa porter par le mouvement, et ils se rendirent dans la partie la plus grande de la ville : le quartier à deux niveaux.

En hauteur, les harpies tenaient le quartier vertical aux oiseaux, où Mabinogi, Tylwyth Teg, et toutes sortes de créatures volantes évoluaient sans cesse ; en dessous de deux mètres, c'était le quartier du petit peuple, où korrigans, farfadets, et toutes les créatures les plus petites profitaient de la végétation luxuriante.

Jusqu'à la taille d'Alice, une quantité incroyable de plantes poussait, de la mousse qui tapissait le sol, permettant des espaces pieds nus, aux graminées et buissons fruitiers qui offraient aux habitants nourriture en abondance et protection contre le vis-à-vis. Les magasins se trouvaient à hauteur de regard et séparaient les deux espaces.

Elle s'essaya à marchander avec un korrigan édenté, un médaillon sculpté contre des fleurs très décoratives qu'elle avait ramassées en forêt durant leur périple. Arborant fièrement son acquisition, elle aida à rattacher un nid de guingois en montant sur les épaules de Garen et fut remerciée par un concert de chants d'oiseaux sublimes.

Une harpie aguicheuse, affublée d'une chevelure plumeuse irisée d'un blanc crème, approcha Garen pour le complimenter sur sa force, essayant de se saisir de son bras. Elle essuya un refus franc alors qu'il l'ignora totalement et laissa Alice lui crocheter l'avant-bras. La harpie rejoignit des amies de la même espèce qui riaient en utilisant leurs propres plumes pour s'éventer.

— On aura tout vu, une humaine et un géant, quelle idée ! répliqua la beauté aviaire en jetant un regard méprisant vers Alice.

Cette dernière ne supportait pas ce genre de filles et se tourna vers Garen en minaudant.

— Ahh, Garen porte-moi, je suis un peu fatiguée de notre nuit ! répondit-elle à haute voix en fixant Garen d'un sourire en coin pour qu'il comprenne la supercherie.

Il la souleva sans effort, l'asseyant sur son avant-bras pour qu'elle puisse l'enlacer, et elle profita de cette posture pour faire un rictus à la harpie qui la fixait, médusée.

Ils continuèrent leur chemin ainsi jusqu'au prochain croisement, et la jeune femme, toujours accrochée à lui, posa sa tête sur son épaule un instant.

— Merci d'avoir joué le jeu, je déteste les filles comme ça.

Elle entendit un petit gloussement grave et s'écarta pour voir Garen dans les yeux.

— Je ne les aime pas non plus... Les harpies comptent trop sur leur physique pour obtenir ce qu’elles veulent.

— Tu veux dire que j'ai blessé leur amour-propre ?

— Peut-être...

Le géant regarda derrière lui. Le chapalu tentait d'attraper des oiseaux, et les korrigans étaient trop occupés à jouer à cache-cache dans les herbes folles.

— Garen ? interpella Alice, qui regardait le profil de son géant, se sentant soudainement possessive.

Il se tourna en lui décochant un de ses rares sourires.

— Tu étais jalouse ?

Alice roula des yeux et glissa ses mains dans les cheveux courts et ondulés de Garen, les agrippant légèrement entre ses doigts.

Alors qu'il s'apprêtait à dire quelque chose, prenant une inspiration, elle se pencha et écrasa ses lèvres contre les siennes, sans douceur, comme un coup de bisous. Elle s'écarta, lui décochant son sourire de pirate, le regard défiant.

— À ton avis ?

Un grondement s'éleva de la gorge du géant qui enveloppa le corps de sa passagère de son second bras, l'emprisonnant contre son torse alors qu'il se rua sur sa bouche pour la dévorer. Elle souriait alors qu'il se frayait un passage à travers ses lèvres pour l'embrasser pleinement, un mélange de puissance et de douceur qui les laissa pantelants. Alice et Garen se regardaient, le cœur battant la chamade ; lui, un cognement puissant qu'elle entendait résonner à travers son ventre, et elle, un mouvement erratique agitant sa respiration comme après un sprint, lui faisant monter le rouge aux joues.

— Alice... Je...

— HEHEM ! Interrompit une voix qui les fit tous deux tourner la tête.

Le Chapalu était là, près de l'angle de la ruelle, les fixant de ses yeux olive moralisateurs.

— Alice, nous avions un accord ! Tu t'occupes beaucoup trop de ce géant et tu oublies mes gratouilles. Si tu ne comptes pas respecter ta parole, je n'ai pas à respecter la mienne.

Et sur ces mots, il partit.

— Merde... Garen, laisse-moi descendre. Va chercher les korrigans, j'essaie de le récupérer.

Elle courut comme une dératée à la poursuite du Chapalu qui filait comme l'éclair à travers un marché, slalomant entre les jambes ou les pattes des passants. Moins agile, Alice pouvait tout de même le suivre à vive allure, et ils débouchèrent dans une avenue. Elle vit le Chapalu la regarder en tournant la tête et traverser l'avenue pour s'engouffrer dans une ruelle juste en face.

Alors qu'elle le suivait en coupant la route d'un groupe de Brocéliandins aux tenues bariolées, elle entendit un grondement de tambour au loin, suivi du vrombissement d'un instrument à vent comme un cor de chasse. Le Chapalu l'attendait sagement, la fixant avec des yeux brillants.

— Je suis désolée si tu t'es senti mis de côté, dit-elle essoufflée en s'approchant doucement.

Elle le vit se métamorphoser en une bête géante, la surplombant. Elle ne sentait pas d'animosité, alors elle tendit la main vers son museau.

— Chapalu... Est-ce qu...

Elle n'eut pas le temps de terminer sa phrase qu'il la poussa brutalement d'un coup de tête, l'éjectant hors de la ruelle.

Elle se cogna lourdement contre un gigantesque cheval blanc, en tête d'une procession. Lorsqu'elle se redressa, le temps sembla ralentir ; elle fut saisie sous les aisselles par deux gardes blonds qui la relevèrent sans effort pour l'écarter de la route. Derrière elle, le Chapalu la fixait d'un air amusé, et elle entendit son nom crié à l'autre bout de l'avenue. Garen tentait de se frayer un passage parmi la foule observant le cortège mais fut stoppé par des gardes.

Le temps reprit son cours et elle se débattit, tentant en vain de se soustraire aux gardes.

— Lâchez-moi s'il vous plaît ! Qu'est-ce que vous me voulez ?

Elle aperçut un des gardes revenir en courant vers elle, accompagné d’un homme à l’apparence de loup qui la suivait de ses yeux noirs.

— Je m’occupe d’elle, rentrons au Palais ! répondit l’homme-loup de sa voix grave.

— Quoi ? Pourquoi ? Qu'est-ce que j'ai fait ? Je suis désolée d'avoir dérangé le cortège, mais je n’étais pas vraiment consentante ; un chapalu m'a projetée depuis la ruelle...

Il l'attrapa par les poignets doucement mais fermement, rapprochant son visage du sien.

— Tous les humains que nous trouvons doivent venir avec nous. Ne résistez pas, jeune humaine, et il ne vous sera fait aucun mal.

Alice ferma les yeux un instant pour reprendre son souffle. Il avait parlé « d’humains » ; elle n’était pas seule à avoir été embarquée. Léa s’y trouvait peut-être. Il fallait qu’elle s’en assure.

— Je vais vous suivre... Mais est-ce que je peux parler à mon ami là-bas ?

Elle montra du doigt Garen qui projetait un garde avec sa force herculéenne. L'homme-loup acquiesça et la suivit de près alors que Garen arrêta de se battre en la voyant s'approcher.

— ALICE !!!

Il la saisit fermement dans ses bras, la soulevant à hauteur de son visage. Elle lui prit doucement le visage entre les mains pour canaliser son attention.

— Garen, calme-toi s'il te plaît. Je dois suivre ces personnes, sinon ça va mal se finir. Je ne sais pas ce qu'ils me veulent, mais apparemment il y a des humains au Palais. Je ne veux pas qu'ils te fassent de mal, ni à toi ni aux petits...

— Je vais te faire sortir de là, je vais demander une audience à la Reine... je...

Alice posa son front contre le sien.

— Laisse-moi descendre maintenant. On va se retrouver, je te le promets. Si ce n'est pas toi qui viens, je trouverai un moyen de sortir.

Il la reposa délicatement sur ses pieds, alors qu'elle gardait les lèvres pincées. Si elle prononçait un mot de plus, elle serait incapable de le lâcher.

C'est la gorge serrée qu'elle fut hissée sur un superbe cheval blanc, monture de l'homme-loup qui prit place derrière elle, passant ses bras de chaque côté de son corps comme un rempart pour lui éviter de tomber, contrôlant l'animal fringant.

Alice ne put s'empêcher de regarder son géant sur le bord de la route, les épaules voutées et le regard désespéré prêt à bondir. Elle mordit sa lèvre pour s'empêcher de lui crier ce qu'elle pensait de lui, affichant son amour au grand jour et baissa la tête devant elle. Alice était certaine que si elle lui avouait ses sentiments, il risquerait de tout casser sur son passage pour la récupérer et elle voulait absolument éviter qu'il ait des ennuis ou qu'il soit blessé... Même s’il risquerait d'en faire voler avant qu'on l'arrête.

Elle pouffa nerveusement en imaginant les gardes valdinguer comme des quilles, à la manière de Romains balayés à coup de bras d'Obélix.

— Qu'y a-t-il ? résonna une voix grave dans son dos.

— J'imaginais vos amis voler en l'air... Garen est fort. Est-ce que c'était une blague mal placée ?

— Les géants sont redoutables, nous avons plusieurs gardiens géants en Brocéliande. C'est certainement ce qu'il se serait passé si vous n'aviez pas stoppé sa fureur. Merci.

— J'espère ne pas regretter de l'avoir fait...

Elle passa le reste du trajet en silence, pensant à Léa qu'elle devait retrouver, pensant à Garen qui lui manquait déjà, pensant à ses amis laissés derrière et au Chapalu, dont elle n'arrivait pas à cerner la réaction : est-ce qu’il savait qu’elle serait emmenée auprès d’humains en lui faisant percuter le cortège ? Ou était-il juste imprévisible et non fiable ? Dans tous les cas, cela remettait en question tout leur périple.

Arrivés devant une grande porte en bois, à l'écart du cortège, le loup-garou descendit de sa monture et se tourna vers elle pour l'aider à son tour. Elle le fixa, sérieuse.

— Prenez ma main ! dit-il enfin en tendant sa patte.

Elle se mit à rire, incrédule face à ce loup-garou gentleman, qui la fit descendre avec douceur.

— Je suppose que c’est le moment d’échanger nos noms, je m’appelle Alice.

— Niall, pour vous servir.

Niall s'ébroua et en l'espace d'un clin d'œil, son poil avait disparu et c'était un bel homme brun aux yeux noirs qui se tenait devant la jeune femme.

— Ouah ! Je suis bluffée. Vous gardez votre apparence de loup pour paraître plus menaçant ?

Il sourit et lui proposa son bras, qu'elle prit, sachant qu'ils n'iraient pas plus loin sans cela. Il ouvrit la porte et son cheval alla tout seul se mettre dans une écurie non loin.

— Je vous faisais peur ? demanda Niall.

— Non, je suis une grande fan de films sur les loups-garous, mais sous cette forme Garen vous casserait comme une brindille, sans vouloir vous vexer.

— Votre géant casserait tout le monde comme une brindille, comme vous dites, si nous n'avions pas d'autres cordes à notre arc.

— Vous avez des pouvoirs ? demanda Alice alors qu’ils entraient sur le côté d’un immense Palais.

Alice ne pouvait pas empêcher ses yeux de pétiller, son instinct lui disait que ce loup l’appréciait et sa curiosité était piquée.

— Vous ne me demandez quand même pas de me dévoiler dès le premier jour ? répondit Niall le sourire aux lèvres.

— Oh mince ! Ma ruse a été percée à jour, répondit Alice en affichant son habituel sourire en coin.

Ils traversaient des couloirs, des escaliers, jusqu'à arriver devant une pièce dont la porte en bois sculptée représentait une nuée d'oiseaux aux couleurs vives.

— Nous y sommes. La Reine m'a demandé de vous installer dans la chambre Tylwyth Teg.

— Jusqu'à quand ? Et comment avez-vous pu lui parler ? Vous êtes télépathe ?

— Je viendrai vous chercher pour le souper, répondit Niall un sourire énigmatique aux lèvres.

— Niall... Est-ce que je suis prisonnière ? et où sont les humains dont vous parliez ?

— Vous restez ici pour votre sécurité, mais vous serez en charmante compagnie, ajouta Niall avec un sourire. Mes crocs ne vous effraient pas.

— C'est vrai, mais c'est plutôt la compagnie de mes amis et d'un certain géant que je préférerais, sans vouloir vous vexer.

— Les Bugul Noz sont très fidèles, je vous assure que vous gagneriez au change !

— C'est ce que vous êtes ? Généralement, je me méfie des hommes beaux et célibataires, ça cache souvent quelque chose.

— Les Brocéliandins me respectent, mais me craignent, c'est la vraie raison de mon célibat.

Alice réalisa qu’il avait bel et bien ignoré sa question sur les humains.

— Vous m’avez parlé d’humains… Est-ce qu’une certaine Léa se trouve ici ? demanda Alice pleine d'espoir.

Niall retrouva une expression sérieuse.

— Elle n’est pas au Palais, nous avons perdu sa trace. En revanche, j’ai fait la connaissance de Noémie.

— Quoi ? Elle est ici ? Mais je pensais que… bafouilla Alice, incrédule.

Elle n’en croyait pas ses oreilles.

Alice se sentait agitée et inquiète. Noémie, qui était censée être sur Terre en attendant leur retour, était tombée ici.

— Où est-elle ? Je veux la voir ! demanda la rouquine soudain assertive, se rapprochant de Niall.

— Elle est retournée auprès de son sauveur, l’ondin Calys. Je doute que vous puissiez la voir facilement.

— Comment ça ? Si je ne peux pas la voir, je vous promets que je serai si insupportable que vous n’aurez qu’une envie, vous débarrasser de la furie aux cheveux roux. Autant me montrer le chemin tout de suite.

Niall éclata de rire.

— Je pense tout à fait apprécier cette furie rousse, mais je ne peux pas vous laisser aller sur son territoire. Calys pourrait vous faire du mal, il est assez… caractériel.

— S’il a touché un seul des cheveux de Noémie, je ne sais pas ce que je lui ferais, mais il faudra lui trouver un remplaçant...

— Il ne lui fera aucun mal, je peux vous le garantir. Je dois vous laisser pour aujourd’hui.

Il lui fit un baise-main et s'éclipsa, laissant Alice seule dans sa chambre.

Il fallait qu’elle trouve un moyen d'explorer, de négocier ou de s'enfuir. Niall était trop sympathique pour que ce soit honnête et elle ne connaissait pas encore la raison de sa présence ici. Noémie et Léa étaient ici, et elle comptait bien les retrouver.

Mais d'abord, un bain l'attendait, ainsi que des vêtements propres et un repas. Personne ne pouvait mener un combat le ventre vide.

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Bleumer
Posté le 02/05/2024
Un chapitre qui avance, j'aime!
Mais ponctué de petits détails qui m'ont fait soulevé un sourcil parfois:
- Alice a encore de la batterie sur son téléphone? Encore une fois, ça me fait me demander depuis combien de temps elle est là, car je ne pense pas que ce monde ait l'électricité pour le recharger.
- La rencontre avec Niall est un peu étrange à mon goût. J'admets que Grym ait poussé la jeune femme pour qu'elle rencontre Niall car c'était le moyen de la guider vers son but. C'est la suite qui me dérange un peu: Niall qui l'emporte sans rien lui dire: "Salut, tu vas me suivre, non je te dis pas pourquoi." Soit il devrait lui dire: "tu as perturbé la procession, je t'arrête!", soit "Ah! Une humaine, viens avec moi, la reine voudra te voir." Et je me rend compte que cette interrogation en appelle une autre sur le statut des humains dans ce monde: y sont-ils les bienvenus ou pas? Les filles reçoivent presque toujours une réaction accueillante des Brocéliandins et quand elles sont en conflit, c'est toujours (comme avec la harpie de ce chapitre) parce qu'elles flirtent avec des mecs beaux et pas sur leur statut d'humaine. Je ne me souviens pas avoir vu de réelles situations de rejet, de haine, de racisme ou même de curiosité envers les humains: "Je ne t'aime pas, tu n'es qu'une sale humaine!"
- Niall sait ce qu'est l'"Irlandais"? L'Irlande n'existe pas dans ce monde pourtant et très rares sont les personnes à voyager dans l'autre monde.
- Alice a l'air de se foutre qu'il puisse y avoir une autre humaine au palais, en tout cas, elle ne s'en étonne pas quand Niall lui en parle. D'autant qu'il lui parle d'un ondin alors que je crois qu'elle sait que Léa est avec un autre géant. Elle n'a aucune idée de la présence de Noémie ici.
Voilà pour les détails qui me chiffonnent! A tout de suite pour la suite.
Papayebong
Posté le 27/06/2024
Alors pour revenir sur les points que tu as soulignés :

- J'ai retiré l'histoire du téléphone, parce qu'effectivement elle ne peut plus avoir de batterie.
- J'ai retravaillé le dialogue avec Niall.
- J'avais déjà traité cette histoire de "haine des humains" dans des chapitres précédents réécrits.
- Pour l'histoire de l'irlandais, je l'ai supprimée pour éviter la confusion, mais il faut savoir que tous les noms de lieux, de personnages, de créatures, etc., ont des racines celtiques/bretonnes de manière très large. Dans le chapitre où Bryn parle d'Avalorn, il explique qu'avant la fermeture des frontières il y avait du libre échange et on suppose que les populations ont pu être brassées. De manière générale (pour répondre à une question sur un autre chapitre), en Brocéliande, tout le monde parle français.
- J'ai traité la question d'Alice et des humains.
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