Chapitre 4

Dix jours plus tard, je pousse la porte de l’atelier de l’astrologue, un petit endroit à l’atmosphère feutrée, empli de l’odeur enivrante de l’encens et éclairé par la douce lumière des bougies. Assise face à moi, Florence, l’astrologue, une femme d’une cinquantaine d’années aux cheveux argentés et aux yeux perçants, me fixe avec un sourire énigmatique.

J’ai donc pris rendez vous auprès de la dame recommandée par ma maman. J’avais vraiment besoin de ce moment pour moi, pour me reposer sur ce que je dois faire e ma vie. J’ai l’impression que tout va dans tous les sens… Marc qui s’enferme, la promotion, Sophie qui divorce, Antoine qui me court après.. ou peut être que je me fais des idées…

— Clara, entre, installe-toi.

 

Elle m’invite à m’asseoir à une table ronde recouverte d’un tissu étoilé. Une bougie brûle doucement à côté de son ordinateur portable, sur lequel trône une carte astrale que je ne comprends pas encore.

 

— Tu m’as donné toutes tes informations de naissance au téléphone, c’est bien ça : 15 mars 1986, à 14h20, à Nantes ?

 

— Oui, c’est ça.

 

Florence ajuste ses lunettes et commence à cliquer sur son clavier. Une nouvelle carte du ciel s’affiche, remplie de symboles mystérieux, de lignes et de cercles colorés.

 

— Alors, Clara, on va explorer ta révolution solaire, dit-elle en se penchant légèrement vers moi. C’est une carte qui montre les énergies dominantes de ton année, à partir de ton dernier anniversaire.

 

Je hoche la tête, curieuse et un peu nerveuse.

 

— Cette année est… intéressante, murmure Florence, les yeux fixés sur l’écran.

 

— Intéressante, comment ?

 

-Ta révolution solaire est fascinante cette année. Tu es au seuil d’un tournant majeur dans ta vie, lié aux transits planétaires qui touchent ta maison de l’amour et du destin.

 

Je hoche la tête, le cœur battant, alors qu’elle poursuit.

-« Saturne et Jupiter marquent un cycle de transformation. Ce que tu pensais stable pourrait se remettre en question. « 

« De plus, tu as un transit de Pluton en tension et ce n’est jamais agréable. Cela signifie que le Pluton actuellement dans le ciel fait un angle droit, un carré avec ton Pluton de naissance. Cela correspond à une période de crise existentielle. C’est totalement normal si tu te sens bousculée actuellement. Mais Pluton est là pour détruire afin de pouvoir reconstruire. Donc si les fondations ne sont pas fortes, elles ne résisteront pas.

Actuellement Pluton agit dans ta maison VII donc dans la maison des relations et en particulier du conjoint, du couple »

Mon souffle se coupe. J’écoute attentivement, tentant de déchiffrer ce que l’univers essaie de me dire. Les planètes se sont-elles liguées pour bouleverser ma vie ? J’ai l’impression d’avoir une boule dans la gorge. Je pense à mon couple, à ma relation avec Marc, à nos hauts et bas- plus souvent bas que hauts pour être tout à fait honnête avec moi-même.

J’écoute la suite :

« En même temps, avec ta Vénus natale en maison IX en Poisson, on sent que tu es en quête de ce grand romantisme et de cette grande histoire d’amour. Et généralement la maison VII étant le premier mariage, la maison IX peut signifier une deuxième union. « 

Elle me regarde comme cela, d’un coin de l’œil. Je crois qu’elle pense que je sais exactement de quoi elle parle mais pas du tout !

— Ta Vénus de révolution est en Poissons, conjointe à Neptune, dans ta maison sept.

Je fronce les sourcils, perdue.

— Et ça veut dire quoi, exactement ?

Florence pose ses mains à plat sur la table, comme pour ancrer ses mots.

— La maison sept, c’est celle des relations, des partenariats, des unions importantes. Avec Vénus et Neptune ici, il y a une énergie très romantique qui entoure ton année. Cela peut signifier un approfondissement de ton couple… ou l’émergence de quelque chose de totalement inattendu. Cela fait écho avec ton thème de naissance.

— Inattendu ?

Elle hoche la tête, et je sens mon cœur battre plus vite.

— Oui. Cette configuration peut indiquer que quelqu’un de ton passé refait surface. Un ancien amour.

Je reste bouche bée.

— Un… ancien amour ?

 

Florence me regarde avec douceur, presque comme si elle anticipait ma réaction.

 

— Oui. Peut-être quelqu’un que tu pensais ne plus jamais revoir, ou une histoire que tu croyais terminée. Mais cette personne pourrait réapparaître et réveiller des émotions que tu as enfouies.

 

Je ne sais pas quoi dire. Immédiatement, un nom surgit dans mon esprit : Guillaume. Cela fait des années que je n’ai pas pensé à lui. Pourtant, à cet instant, son visage me revient avec une clarté troublante.

 

— C’est étrange, Florence… Ça me fait penser à quelqu’un, mais c’est du passé.

 

— L’astrologie ne ramène jamais le passé sans raison, Clara. Si cette personne revient, ce sera pour une leçon, une fermeture ou, parfois, pour une deuxième chance.

 

Je secoue la tête, presque comme pour repousser cette idée.

 

— Mais… je suis mariée, Florence.

 

— Justement, dit-elle, le regard plus intense. Avec Uranus activant ta maison quatre, la maison de la famille, il est possible que des changements surviennent dans ta vie domestique. Ce n’est pas forcément négatif, mais cela te poussera à réévaluer tes priorités.

 

Je me sens soudain submergée.

 

— Tu es en train de me dire que ma vie va être bouleversée ? Mais après je viens d’avoir une promotion, donc le bouleversement familial, peut être celui là ?

 

Florence sourit, apaisante.

 

— Non, pas de bouleversement et oui cela peut venir de la promotion. Mais il est clair que cette année sera marquante. Tu devras faire des choix, Clara. Des choix importants.

 

Je prends une profonde inspiration, essayant de digérer ses paroles.

 

— Et si je ne veux pas que cet “ancien amour” refasse surface ?

 

Florence s’appuie contre le dossier de sa chaise, les bras croisés.

 

— Ce n’est pas une question de vouloir ou non. Ce qui doit se produire se produira. Mais tu as toujours le choix de la manière dont tu y réagis. L’astrologie laisse toujours le libre arbitre.

 

Ses mots me laissent songeuse. Je pense à Marc, mon mari, à nos enfants, à cette vie que nous avons construite ensemble. Est-ce que je serais folle de vouloir plus ? De rêver à un amour absolu ou d’avoir une ambition folle dans mon travail ?

 Mais au fond de moi, une petite voix chuchote autre chose, comme une curiosité que je n’ose pas encore nommer.

 

— Et qu’est-ce que tu vois d’autre pour cette année ? demandé-je, tentant de détourner la conversation.

 

Florence sourit, devinant mon besoin d’apaiser mes pensées.

 

— Ta Lune, cette année, est en Taureau, dans ta maison douze. Cela suggère une année introspective. Tu seras appelée à te reconnecter à toi-même, à tes besoins profonds, loin des bruits extérieurs.

 

Je hoche lentement la tête.

 

— Alors, c’est une année de… remise en question ?

 

— On peut le voir comme ça, répond-elle doucement. Mais c’est surtout une année de croissance, et d’expansion Clara. Tu as toutes les ressources en toi pour naviguer à travers ces énergies.

 

En sortant du cabinet, je sens l’air frais caresser mon visage. Les paroles de Florence résonnent encore dans ma tête : un ancien amour va refaire surface. Une partie de moi veut balayer cette idée comme une absurdité, mais une autre… Une autre se demande ce que l’univers a en réserve pour moi.

Le pompon ! Je venais chercher des solutions et me voilà encore plus dans le chaos et l’interrogation ! Avec 80 euros en moins en prime.. quelle ironie du sort.

 

 

Quelques jours plus tard, je retrouve Camille et Sophie dans notre café habituel. La mousse de mon cappuccino virevolte sous la cuillère que je tiens sans y penser. Je sens que cette mousse va encore plus me détraquer l’estomac donc je la regarde hostilement avant de l’écraser. Je me dis que si elle disparait sous le café et le chocolat, elle sera moins nocive pour mes intestins.

« Les filles, j’ai besoin de vous raconter quelque chose. Je suis allée voir une astrologue. »

 

Camille, la plus sceptique comme à son habitude, arque un sourcil. « Sérieusement ? Et qu’est-ce qu’elle t’a dit ? »

 

Je prends une grande inspiration. « Que je suis à un tournant de mon destin. Et… qu’un ancien amour va ressurgir. » Le silence qui suit est lourd de questions non posées. Sophie pose sa main sur la mienne, ses yeux emplis de curiosité et de compréhension.

 

« Clara, est-ce que ça a un rapport avec Guillaume ? » murmure-t-elle.

Ce qui est incroyable avec mes meilleures amies, c’est qu’elles vont penser comme moi et parfois même plus rapidement. Evidemment, j’ai pensé à Guillaume mais j’ai mis du temps avant d’absorber l’information et de vraiment penser que cela pouvait avoir un lien avec lui.

« Je ne sais pas «  je réponds doucement. «  Après, il n’y a pas eu que lui donc… »

« Oui , mais c’est le seul qui ait vraiment compté » réponds Camille du tac au tac.

Et oui bien sur qu’elle a raison. C’était le seul qui ait compté et il est parti. Dans tous les cas, qui dit nouvel et/ou ancien amour dit rupture.

Je fronce les sourcils. Rupture ? Non. Pas moi. Pas avec Marc, cet homme solide avec qui j’ ai bâti une vie tranquille. Je décide à cet instant précis que jamais je ne laisserais cette prédiction contrôler son avenir.

Sophie commence à rire :

« et bien dis moi, entre le nouvel amour de la tarologue et l’ancien amour de l’astrologue, on ne va plus te voir ! Donc peut être deux personnes différentes ou tout simplement un amour dans le présent, ca pourrait être aussi pas mal ! »

La soirée continue de battre son plein dans le bar au décor enchanteur, où chaque détail rappelle l’univers magique d’Harry Potter. C’est vraiment devenu notre QJ avec Sophie et Camille. Les lustres suspendus flottent doucement au-dessus des tables en bois sombre, tandis que des chandelles vacillent dans l’air comme par enchantement.

La porte s’ouvre et Antoine, mon collègue entre. Ses cheveux bruns légèrement ébouriffés et son manteau sombre lui donnent un air mystérieux, accentué par la lumière tamisée du lieu. Il m’aperçoit et s’approche, un sourire franc aux lèvres. « Clara, quelle coïncidence ! Je ne m’attendais pas à te voir ici ce soir. »

 

Je  souris, un peu surprise. « Salut, Antoine ! On s’est dit qu’on méritait une soirée entre filles dans un endroit magique. »

 

Antoine jette un regard complice à Sophie et Camille. « Je vois ça. Mais est-ce que la magie permet que je vous offre un verre ? »

 

Camille et Sophie échangent un regard complice avant que Sophie ne prenne la parole. « Bien sûr, Antoine. Après tout, peut-être que Clara a besoin de cet ingrédient secret dans sa potion pour un ‘retour d’amour. » «  Ca a un côté Baby come back  ton histoire. C’est un message caché pour qu’on aille voir les word’s apart ? « 

 

Je lève les yeux au ciel, un léger rouge aux joues. « Sophie, arrête ! » En plus, Antoine n’a pas besoin qu’on le relance sur mon sujet..

 

Antoine, amusé, se frotte nerveusement la nuque. « Eh bien, si c’est moi l’ingrédient, je suis flatté. »

 

Camille renchérit, l’œil malicieux. « Clara, tu nous disais justement que l’astrologue avait prédit le retour d’un amour… mais peut-être que tu n’as pas vu qu’un nouveau pourrait se manifester, juste sous ton nez. »

 

Je fais semblant de rire de gêne mais vraiment elle me mets dans des situations.

« Donc un nouvel amour, Clara ? et donc elle a précisé ou tu allais rencontrer cette perle rare ton astrologue ? Peut être sur ton lieu de travail, non ? » avec un clin d’œil forcé

Non je ne peux pas, c’est trop lourd.

« Tu sais Antoine, l’astrologie peut avoir plusieurs significations. Cela peut être un nouvel amour pour la cuisine : avant j’aimais bien, je n’ai plus eu le temps pour cuisiner à cause des enfants et je vais avoir un nouvel amour pour la pâtisserie par exemple ! »

Sophie ne me défend pas :

« techniquement ce serait plutôt un ancien amour car tu aimais bien avant et là » Je lui fais les gros yeux ..

Mon téléphone sonne. C’est Marc et pour une fois qu’il m’appelle c’est que quelque chose s’est passé :

« oui Clara, c’est Moi. Elsa a 40 de fièvre et la je ne peux pas gérer les deux c’est pas possible. J’ai une présentation demain donc ta sortie il va falloir la reporter ». Je le sens hyper tendu et stressé.

« tu as mis un doliprane » je demande

« ben non je ne sais pas ou ils sont « 

Je raccroche …

« les filles, Antoine, désolée mais je rentre. Ma fille est malade et mon mari n’arrive pas à trop gérer la situation « .

Antoine parait sincèrement déçu ; je ne sais pas à quoi il s’attend mais il sait très bien que je suis mariée et avec des enfants. J’embrasse les filles et file retrouver mes loulous.

Après avoir couché les enfants, j’entends Marc qui s’approche de moi et s’éclaircit la voix.

« Écoute, j’ai réfléchi à ce que tu as dit. Peut-être qu’un break ne serait pas une mauvaise idée, mais il faut que ce soit simple et rapide. »

Je pose ma tisane, intriguée.

« Tu proposes quoi, exactement ? »

 

Marc sortit son téléphone, affichant une page de réservation.

« J’ai trouvé une offre pour l’île Maurice. Une semaine dans un hôtel cinq étoiles, le Twist Rock. Tout est inclus : vol, transfert, repas. Et c’est à un prix vraiment intéressant. »

 

Les yeux de Clara s’illuminèrent.

« L’île Maurice ? Tu plaisantes ? Mais c’est merveilleux ! »

 

Il sourit, légèrement mal à l’aise.

« Avant que tu ne t’emballes, il y a des conditions. J’aurai peut-être à répondre à des mails, même là-bas. Et il faudra partir dans trois jours. C’est très court pour s’organiser. »

 

Je me lève,, contourne la table et l’embrasse sur la joue.

« Merci, Marc. Vraiment. On en a besoin. Les enfants vont être tellement heureux ! »

 

Et me voici à inspirer profondément avant de toquer à la porte du bureau de Richard. Je me répète les mots que j’ai mouliné et remouliné toute la nuit, mais mon cœur tambourine à l’idée de ce qui m’attend. La voix ferme de mon boss m’invite à entrer.

 

— Clara, entrez, dit Richard en relevant la tête de son écran, un sourire sincère éclairant son visage. Je me doutais que vous viendriez tôt ce matin. Alors, vous avez réfléchi ?

 

Je m’avance, un dossier dans les mains avec une notebook et ma trousse peluche pour ne pas laisser paraître mon stress, puis m’assieds face à lui.

 

— Oui, j’ai beaucoup réfléchi. Et… j’accepte votre proposition.

 

Richard se redresse, visiblement ravi.

 

— Vous acceptez de devenir notre nouvelle responsable marketing et communication ?

 

— Oui, je confirme en hochant la tête, un sourire timide aux lèvres. Je suis prête à relever le défi.

 

— Excellent ! Je savais que vous étiez la personne idéale pour ce poste. Votre travail ces dernières années a été remarquable, Clara, et c’est une promotion amplement méritée. Vous avez toutes les qualités pour briller dans ce rôle.

 

Je baisse légèrement les yeux, touchée par ces compliments.

 

— Merci pour votre confiance, Richard. Je dois avouer que c’est un peu intimidant, mais je suis motivée.

 

— Et vous avez tout ce qu’il faut pour réussir. N’oubliez pas, je suis là pour vous accompagner si besoin.

Je croyais que l’échange était terminé , mais non…

-Ah oui Clara, j’ai une autre demande importante à te faire. On va d’ailleurs se tutoyer maintenant que tu es au Comex.

 

Je le regarde, attentive. Le ton de mon supérieur est sérieux, presque solennel.

 

« Tu sais que notre séminaire de Noël approche. Cette année, il se tiendra à Lyon, à l’hôtel Lumineux Parc, à la Part-Dieu. C’est un lieu prestigieux mais écologique, parfaitement en accord avec l’image que nous souhaitons donner à nos nouvelles collections. »

 

Je sens une vague d’appréhension m’envahir. J’aime bien les séminaires mais pas forcément monter sur scène ni faire de discours.

 

« Je vais aller droit au but, » poursuivit Richard. « Je veux que tu présentes la nouvelle collection lors de ce séminaire. »

 

Un silence s’installa. Je fixe Richard, cherchant à lire dans ses yeux s’il plaisantait ou s’il était sérieux. Je me sens stupide à ne rien dire mais j’ai l’impression d’être figée. Mais son regard ne laisse aucun doute : il est on ne peut plus sérieux.

 

« Moi ? » je finis par articuler.

 

« Oui, toi, Clara. Qui d’autre ? Tu as travaillé sur ces produits pendant des mois, tu connais chaque détail, chaque nuance, chaque intention derrière leur création. Personne ne pourrait mieux défendre cette collection devant notre audience. »

 

J’ inspire profondément, essayant de rassembler mes pensées. Tout arrive vite , trop vite.

 

« Richard… je ne suis pas sûre d’être à la hauteur pour ça. Ce séminaire, c’est un événement énorme, et il y aura… »

 

« Les investisseurs, oui, » coupe Richard d’un ton ferme mais rassurant. « C’est précisément pourquoi c’est toi que je veux. Ils ont besoin d’être convaincus par une présentation authentique, sincère, portée par quelqu’un qui croit vraiment en ce qu’il dit. Pas par un discours corporate tout fait. »

 

Et voilà, il est est fort pour me mettre la pression gentiment mais surement. Présenter la nouvelle collection devant les investisseurs représentait un véritable saut dans l’inconnu pour moi.

 

« Richard, je n’ai jamais fait ça auparavant. Je veux dire… un séminaire de cette envergure, c’est une toute autre dimension. »

 

« Je le sais, Clara. Mais c’est précisément parce que tu sors de ta zone de confort que je suis certain que tu feras un excellent travail. Tu as un talent naturel pour capter l’attention des gens. Tu as une passion pour ce que tu fais, et crois-moi, c’est contagieux. »

 

Je baisse les yeux, tentant d’évaluer les risques et de calmer la tempête intérieure qui grondait en moi. De toute manière, je n’ai pas le choix et comme on dit : « foutu pour foutu « 

 

« Je vais avoir besoin d’accompagnement alors Richard, » je lui demande

 

Richard esquisse un sourire.

 

« Bien sûr. On mettra en place tout ce qu’il faut pour que tu sois prête. On organisera des répétitions, on travaillera sur le support visuel, et je serai là pour te guider. Si tu veux, tu peux même avoir un coach. Mais, Clara, ce que je te demande, c’est d’être toi-même. Rien de plus. »

 

Je lève les yeux, rencontrant à nouveau son regard. Il y avait dans les yeux de Richard une sincérité et une confiance qui commencèrent à dissiper ses doutes.

 

« Très bien, » je dis rapidement, avec plaisir !

 

Un sourire satisfait illumine le visage de Richard.

 

« Je savais que je pouvais compter sur toi. Tu ne regretteras pas de t’être lancé ce défi. »

 

Je souris extérieurement alors que je reste une boule de nerfs à l’intérieur.

 

« Et, Clara, » ajoute-t-il, « souviens-toi : ce séminaire ne sera pas qu’une présentation. Ce sera ta chance de montrer à tout le monde ce dont tu es capable. »

 

Il se lève alors de son fauteuil et tend une main énergique que je serre avec assurance.

 

— Parfait, dit-il en se dirigeant vers la porte de son bureau. On ne perd pas de temps. Viens, je vais vous présenter officiellement à l’équipe.

 

Je le suis, mon cœur battant un peu plus vite ; je ne m’attendais pas à faire un tour des bureaux dès à présent. J’ajuste légèrement mon chemisier en traversant le couloir. Les bureaux sont déjà bien animés, et tout le monde semble plongé dans ses tâches du matin. Richard s’arrête au centre de l’open space et tape dans ses mains pour attirer l’attention.

 

— Mesdames, messieurs, un instant, s’il vous plaît !

 

Les discussions s’interrompent, et une vingtaine de regards curieux se tournent vers nous. Je sens que je rougis ; c’est sûr c’est en train de me monter au visage et je n’ai même pas encore dit un mot.

 

— J’ai une excellente nouvelle à partager avec vous, reprend Richard d’une voix enjouée. À compter d’aujourd’hui, Clara prend officiellement le poste de responsable marketing et communication de notre entreprise.

 

Un murmure de surprise parcourt l’assemblée, rapidement suivi par des applaudissements chaleureux.

 

— Félicitations, Clara ! s’exclame une collègue au fond de la salle.

 

Richard lève une main pour calmer les réactions.

 

— Je suis certain qu’elle saura porter nos projets encore plus loin. Clara, un petit mot pour l’équipe ?

 

Je déglutis discrètement. J’étais sûre que Richard allait me faire le coup – un peu comme un petit test ou un bizutage. Je n’avais pas prévu de parler, mais j’avance d’un pas, les yeux balayant le groupe.

 

— Merci à tous, commence-t-elle, un sourire sincère sur les lèvres. Je suis très honorée de cette confiance et j’ai hâte de collaborer avec chacun d’entre vous dans ce nouveau rôle. Je vais faire de mon mieux pour que nous continuions à avancer ensemble, avec créativité et ambition.

 

Les applaudissements redoublent, et je sens une vague de soulagement et de joie.. vraiment je me sens heureuse à ce moment là. Et je me revois en train de lutter avec Marc et ça en valait la peine. Alors que Richard reprend la parole pour quelques détails pratiques, plusieurs collègues viennent déjà me serrer la main ou me féliciter.

 

— Bravo, Clara ! Tu le mérites vraiment, lui dit Amélie, une graphiste avec qui elle a souvent travaillé.

 

— Merci, Amélie. Je suis contente de pouvoir continuer à bosser avec toi, dit-je avec un clin d’œil.

 

— Eh bien, on sait maintenant à qui envoyer les idées farfelues, plaisante Julien, l’un des chefs de projet.

 

— En effet, préparez-vous à ce que je sois plus exigeante qu’avant, je réponds avec humour, ce qui déclenche quelques rires.

 

Richard finit par conclure.

 

— Bien, retour au travail, tout le monde ! Clara, je vous laisse prendre vos marques, et on se retrouve cet après-midi pour notre première réunion stratégique.

 

Je retourne à mon bureau, qu’il faut que je déménage pour prendre le bureau isolé d’Edgar. Ca va être étrange de ne plus être en open space. Et ne voilà accueillie par une pluie de messages de félicitations sur ma messagerie interne. Je lis rapidement quelques mots d’encouragement, mon sourire s’élargissant à chaque message.

 

Dans la matinée, je croise Thomas, un collègue du service commercial, près de la machine à café.

 

— Félicitations, Clara ! Je suis vraiment content pour toi.

 

— Merci, Thomas. Et toi, prêt pour que nos services collaborent encore plus ?

 

— Oh, je n’ai aucun doute. Tu as toujours été géniale dans ton travail, ce n’est pas maintenant que ça va changer.

 

Je ris doucement et retourne à mon poste. Je sens déjà les responsabilités peser sur mes épaules, mais aussi une énergie nouvelle m’envahir. Cette promotion, je la voulais autant que je la redoutais, et maintenant que j’y suis, je suis prête à me surpasser.

 

Les semaines passent, mais les paroles de l’astrologue me hantent toujours malgré mon esprit occupé par la prise de poste. Marc, pourtant stable et prévisible, semble de plus en plus distant. Je le surprends plusieurs fois absorbé dans ses pensées, presque ailleurs. Depuis cette annonce de voyage, j’ai l’impression qu’il a pris encore plus – même si cela me semblait impossible – ses distance.

Je multiplie les propositions de sortie : Sophie a proposé de garder les enfants pour qu’on fasse une sortie en couple et il a refusé sous prétexte qu’il est épuisé. Après, je comprends , ses semaines sont très chargées : il termine souvent des présentations dans la nuit pour les faire le lendemain matin.

Chaque effort que je fais pour raviver la flamme de notre mariage – des propositions d’escapades romantiques, des dîners surprises, des conversations – semble inutile. Plus je m’acharne et plus Marc s’éloigne et moins je comprends.

Un jeudi matin, on travaille tous les deux depuis chez la maison. On peut faire du télétravail de manière occasionnelle ce qui simplifie un peu les tâches ménagères, administratives et du coup je peux aller chercher les enfants plus tôt. Je suis dans le salon avec mon ordinateur portable, tandis que Marc est installé dans son bureau, casque sur les oreilles.

 

Clara (entrant doucement dans le bureau) : Marc, t’as une minute ?

 

Marc (levant une main sans quitter des yeux son écran) : Pas maintenant, je suis en pleine réunion.

 

Clara (croisant les bras, agacée) : Encore une ? Ça fait toute la matinée que t’es là-dessus.

 

Marc (coupant le micro de son casque et se tournant vers elle) : Oui, mais c’est important. C’est un projet prioritaire. Qu’est-ce qu’il y a ?

 

Clara : Justement, c’est toujours « prioritaire ». Ça fait trois fois que je te propose de déjeuner ensemble aujourd’hui, et tu trouves toujours une excuse.

 

Marc (soupire, l’air fatigué) : Ce n’est pas une excuse, Clara. Je suis vraiment occupé. Tu sais comment c’est en ce moment.

 

Clara (haussant légèrement le ton) : Oui, je sais. Mais ce que je vois surtout, c’est qu’on habite sous le même toit et qu’on passe plus de temps à se croiser qu’à vraiment être ensemble.

 

Marc : On est ensemble là, non ?

 

Clara (lève les yeux au ciel) : Tu plaisantes ? Toi dans ton bureau, moi dans le salon, chacun absorbé par son boulot. Ce n’est pas « être ensemble », Marc. Je te parle d’un vrai moment. Juste toi et moi, sans écran, sans casque, sans réunion. Je comprends que le sujet est prioritaire et que ton job est super important. Mais je te réclame un moment juste pour nous deux.

 

Marc (regardant l’heure sur son ordinateur) : Écoute, on peut en parler ce soir, si tu veux. Là, je n’ai vraiment pas le temps.

 

Clara (se plantant devant son bureau) : Non, on ne va pas en parler ce soir. Parce que ce soir, tu seras fatigué, comme d’habitude, et moi aussi. Et ça finira comme toujours : devant une série qu’on ne regarde même pas vraiment.

 

Marc (se passant une main sur le visage, visiblement stressé) : Tu dramatises, Clara. Ce n’est qu’une journée.

 

Clara (piquée au vif) : Ce n’est jamais « qu’une journée » ! C’est devenu une habitude, Marc. Avant, tu trouvais toujours une petite pause pour qu’on partage un café, un déjeuner, même un simple moment. Là, c’est comme si tout passait avant moi.

 

Marc (fronçant les sourcils) : Tu sais que ce n’est pas vrai. Si je fais tout ça, c’est pour nous, pour que le boulot tourne et qu’on soit tranquille.

 

Clara (secoue la tête, blessée) : « Pour nous », vraiment ? Moi, ce que je vois, c’est que tu es là physiquement, mais que je me sens seule. Et je déteste cette sensation.

 

Marc (s’adoucissant un peu) : Clara, je ne fais pas exprès. Je suis juste débordé.

 

Clara (d’un ton plus calme, mais ferme) : Alors débrouille-toi pour ne pas l’être. Prends une heure, juste une heure, pour qu’on se retrouve. C’est tout ce que je demande.

 

Marc (hésitant, puis soupirant profondément) : Tu sais quoi ? D’accord. On déjeune ensemble. Je vais décaler ma prochaine réunion.

 

Clara (surprise, mais méfiante) : Tu es sûr ? Pas juste pour que je te laisse tranquille ? Du coup on peut aller au nouveau restaurant d’à côté ? Le Terre/Mer ? Ca faisait un moment que je voulais essayer et le menu du midi est non et pas cher.

 

Marc (se levant et posant ses mains sur ses épaules) : Non, on ne va peut-être pas abuser. On va manger ici vite fait car après j’enchaine.

 

Clara: Ah oui tu as raison, on ne va peut être pas abuser effectivement. Tu sais quoi : tu n’as quand manger tout seul devant ton PC et je mangerai toute seule devant le mien. On aurait tort «  d’abuser » et de sortir comme un couple.

 

Marc (se mettant les mains sur les tempes) : Allez, donne-moi dix minutes pour régler ça ; tu peux préparer le repas ?

 

Ça hier – je suis perdue telle une bouilloire qu’on a mise sur ON ; la chaleur est en train de monter dans mon corps jusque dans ma tête. Je suis épuisée, énervée et déçue de chaque tentative. Je claque la porte du bureau de Marc et décide de sortir prendre l’air.

Et si je ne luttais pas pour mon mariage mais plutôt contre une prophétie que je refuse d’accepter ? Je sens qu’un changement arrive mais il est bien trop bouleversant et j’ai besoin de stabilité, et de fondations solides, et ce n’est pas le moment. Je pense que l’essentiel c’est de réussir à sauver notre mariage, que les enfants soient en bonne santé et que je m’éclate au travail.

Ca parait facile comme ça…mais le doute s’installe. Il est partout. Surtout dans ce type d’échange avec Marc où toute tendresse, envie d’être avec l’autre est oublié. Mais il va falloir que je me recentre sur le travail ; A commencer par ce fameux séminaire à Lyon.

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Marovska
Posté le 07/03/2025
Moi qui ne suis pas fan des moments où les personnages sont au travail ...et bien je ne sais comment tu réussis à me faire apprécier ça! Voir Clara évoluer dans le monde professionnel est agréable.
Je trouve que ton histoire a beaucoup de potentiel, il manque juste de la relecture :), sinon bravo pour ton travail!
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