Chapitre 4 : La sélection, Qualifications

Notes de l’auteur : Dernière version : 23/04/24

Baroudeur, nm. com.

Un Baroudeur est un légionnaire appartenant à la faction Fantassin (c.f. lexique Faction). Il occupe au sein du corps d’armée le rôle de première ligne. Sa principale mission est de tuer. En temps de paix, les Baroudeurs sont envoyés pour tuer des Akars afin d'apporter des ressources au Landau et gagner du terrain sur les Jardins-Perdus. Leur présence peut aussi être exigée sur d’anciens sites de combats ou de zones urbaines accidentées afin d’aider à la manutention ou la maçonnerie. 

Extrait de l’encyclopédie du Landau de la 5ème ère à nos jours. Opus Légion, Alinéa Faction.


 

Note : 

- It’s showtime !

- Du calme papi, tu vas nous faire une attaque.

Old - Attends, j’ai une idée. Ça va te plaire ! De toute façon, si ma note est encore là c’est que l’idée t’a plu au final. 

Young - Cette note s’annonce vraiment longue et tu sais qu’Ils aiment pas quand on coupe le récit comme ça… En plus tu spoil la fin de notre dialogue en disant ça. Tu te rends compte que tu es de moins en moins professionnel ? C’est quoi ton idée qu’on en finisse. 

Old - Mon idée c’est de mettre des initiales pour qu’on distingue mieux qui de nous deux parle lorsque l’on fait des notes. 

Young - Autant mettre des surnoms, c’est plus cool. Faut soumettre l’idée à ceux qui écrivent mon récit alors. 

Old - Notre récit. Il suffit de le faire. S’Ils approuvent, ça reste. Sinon, Ils effacent. Le monde éditorial est une dictature de toute façon. 

Young - Mais qu’est-ce que tu racontes ?! Bon, comme t'es vieux, tu t'appelleras “Old”. 

Old - Quelle originalité. Tu parles d’un surnom. 

Young - J'men fous. C'est moi le narrateur.

Old - Attention à ne pas te noyer dans toute cette créativité mon garçon. Et toi, tu seras qui ? 

Young - Suis mon raisonnement, je suis sûr que tu peux trouver. 

 

Aussitôt que le (récemment rétrogradé) Capitaine Goro prononça ces mots, le public se leva et cria : CO-CON ! CO-CON ! CO-CON ! À ces encouragements, tous les candidats se ruèrent les uns sur les autres avec force et violence. Certains furent poignardés, d’autres se frappaient avec des masses ou à poings nus. Du sang vint repeindre le pull de Ash déjà taché. Il se fit bousculer dans tous les sens. Quelque chose se heurta à ses cotes pendant qu’une épaule lui écrasait le masque sur le visage. 

- La bordure du cercle doit être l’endroit.. Non ! Avec mon poids je pourrais être facilement expulsé.. Ouch mon pied putain ! s’exclama Ash avant de replonger dans ses pensées. J’ai pas de quoi me défendre, si, la lame. Non, ça pourrait se retourner contre moi si je la sortais. Si je ne prends pas de la distance je ne pourrais pas utiliser mes cartes non plus. 

Un son de cloche retentit dans l’arène et le sortit de ses pensées. Un premier candidat s’était qualifié. Une gemme holographique projeta la photo d’une jolie fille rousse d'une dizaine d'années. Sous la photo, il était écrit « Charlotte Saint-Wonder, 6 secondes ». Elle sortit du cercle en marchant à travers la foule agitée. À ses pieds, dix hommes étaient allongés. Six d’entre eux dépassaient du cercle blanc. Le tumulte reprit avec entrain. 

Des groupes se formèrent rapidement. Personne ne semblait vouloir s’attaquer aux trois encadreurs mais un enfant finit par se lancer. Il s'appelait Jin. Il était vêtu de vêtements bleus qui épousaient les formes de son corps. Son visage était recouvert d'un cache-cou monté jusqu'au nez. Ses cheveux bicolores étaient bruns à la base mais blonds sur les pointes ; des mèches blondes qui tombaient sur deux yeux bleus, vifs et précis. L’encadreur qu’il comptait attaquer se nommait Zabimaru, c’était un jeune homme grand et musclé, un peu plus âgé que la vingtaine. Ses vêtements étaient semblables à ceux des moines, oranges et verts, ce qui le distinguait facilement de la foule. Il tenait un long bâton en bois pour se défendre. Sur le haut de son front se trouvaient six points oranges alignés en deux colonnes de trois, et des boucles d’oreilles créoles en or pendaient à ses lobes. Son regard était celui d’un homme blasé. Il semblait avoir la tête dans les nuages. Jin lança des shurikens tout en courant droit dans la direction de l’encadreur, puis prit dans ses mains les deux ninjatos qui étaient attachés dans son dos.

- J’ai nourri Moumoune ce matin ? se demanda le moine.

Le long bâton en bois tourna tout autour de Zabimaru, déviant les quelques shurikens que Jin avait envoyés pour faire diversion. Les projectiles tombèrent et se plantèrent entre les grains de sable. Zabimaru continua le fil de ses pensées malgré l'enchaînement :

- Oui, je suis quasiment sûr de l’avoir nourri, j’irai quand même vérifier. Oh ! Il faudra que je pense à lui racheter des croquettes.. Non je crois bien que j’ai oublié de le nourrir tout compte fait. La poisse ! 

Goro, en observant la scène de l’extérieur du cercle, pensa : 

- Zabimaru n’a toujours pas l'air concentré.. 

L’enfant aux cheveux bicolores disparut du champ de vision du moine. Un des sabres vint se faire bloquer par la tige de bois et le second se joint au combat pour viser le cou de l'encadreur. D’une rotation du poignet, Zabimaru para la deuxième lame avec le bâton sans lâcher la première, puis fit une balayette à l’enfant avec l’intérieur du pied. Jin sauta pour regrouper ses jambes et se servit de cet élan pour faire pivoter son corps sur son poignet. Il termina son mouvement en lançant sa jambe sur le côté du bâton maintenant en biais. La cloche retentit à nouveau. La pointe du pied de l’enfant ninja touchait le visage de Zabimaru, impassible. La gemme afficha le visage de l’enfant d’une dizaine d’années, en train de faire un doigt d’honneur en tenant son sabre, comme s’il savait où et quand la gemme allait capturer l’instant. « Jin Hogo, 40 secondes ». 

« Il m’a touché ? » dit Zabimaru à voix basse. 

Quelques rumeurs se firent entendre dans les gradins :

« C'est un Hogo ?

- Oui, quarante secondes.. c'est incroyable. 

- Les deux premiers sont des gosses, et le deuxième est un Hogo. J'ai hâte de voir ce qu'il  va donner ce dernier jour de sélection. »

Jin sortit du ring en observant par-dessus son épaule un autre participant dans l’arène. Il s’agissait d’un autre enfant, habillé de vêtements traditionnels blanc et noir, et portant un sabre à sa taille. Ses cheveux, tout comme ceux de Jin, étaient bicolores ; cependant, ils étaient bruns avec une tache blonde aux racines, l’inverse de Jin.

 

« Comment t’appelles-tu gamin ? demanda Zabimaru avant que l'enfant ne sortit du cercle. 

- Jin.

- Je m’en rappellerai. » 

Jin haussa les épaules et sortit du cercle. Autour de la zone de combat délimitée par la craie, il alla s'asseoir près de la fille qui s'était qualifiée plus tôt.

« Salut, j’ai vu tes combats. lui dit-il. Enfin, à ce rythme, c’est plus un combat mais une exécution...

-  …

- Moi c’est Jin Hogo. Et toi ?

- Charlotte St-Wonder. finit-elle par dire.

- Enchanté Charlotte. lui répondit-il souriant »

Suite à cet affrontement au dénouement surprenant entre Jin l’enfant ninja, et Zabimaru le moine costaud, beaucoup d’opposants foncèrent vers ce dernier pour tenter leur chance. Ils pensaient que si un enfant avait réussi, ils devraient aussi en être capable. Très vite, quelques coups furent portés à l’aide du long bâton et une quinzaine de corps immobiles se trouvèrent autour de son porteur : allongés, inconscients, ou morts pour certains. À l’extérieur de la ligne blanche, depuis les bancs, Jin entendit parmi les spectateurs quelqu’un dire :

« L’enfant a eu du bol qu’il soit si tête en l’air. 

- Qu’est-ce que tu racontes, on parle de Zabimaru. Ça n'a rien à voir avec la chance. À la limite il aurait fallu viser Le Rouge, mais avec ses deux mètres de muscles et ses bâtons qui volent partout on imagine pas que les deux autres puissent être meilleurs que lui.. » 

Non loin de Ash, Ladvard, un Première-Classe de la faction des Fantassins, faisait danser ses longs cheveux roux en tenant tranquillement ses assaillants à l'écart. Il les assommait à l’aide de petits bâtons qu’il envoyait dans leur tête, avec une certaine violence capable d’éloigner les moins sûr d’eux. Ash remarqua qu’il n'était pas en train de se défendre. En fait, il attaquait les autres. Ladvard était en train de lancer ses bâtons courbés sur les participants aux alentours sans distinction. En portant son attention sur les mouvements du bâtonnet, l’enfant masqué remarqua qu’ils n’avaient aucune logique. Le roux envoyait son arme à l’horizontal et le bâton revenait vers lui quand il avait touché sa cible. Mais parfois la trajectoire de l’arme dessinait un R, parfois un Y et même une courbe en C, sans le moindre rebond ! Comme par instinct, Ladvard se tourna et regarda Ash ramené à la réalité, qui s’aperçut qu’il était la proie. Ladvard esquissa un sourire en tendant son index dans la direction de l’enfant, vers un bâton qui vint frapper la tempe de ce dernier avec violence. Il s’écroula parmi les autres corps. Ladvard continua ses jongles, accompagnant avec ses mouvements les projectiles dans leur trajectoire burlesque, leur redonnant de la vigueur. 

- Habile. se dit le Capitaine Goro, ayant assisté à la scène depuis son estrade. 

Les combats continuèrent dans la violence mais les nombreux candidats ne se laissaient pas abattre si facilement. La plupart d’entre eux étaient de jeunes adultes ou des vétérans et sortir dix personnes n’était pas chose aisée. Quand bien même, la cloche retentit encore plusieurs fois. « 9 minutes », « 9 minutes 34 secondes », « 15 minutes 20 secondes », « 20 minutes 56 secondes ». Dans cette mêlée sans merci, certains perdirent un œil, d’autres des doigts ou des dents. Les plus malchanceux, la vie. Certains étouffaient en tombant au milieu du champ de bataille, à force de piétinements, de coups de masse ou de fractures. Si bien que très peu de ceux qui s'effondraient arrivaient à se relever.

Il est intéressant de noter qu’en temps de paix - comme celui que vit le Landau depuis déjà plusieurs décennies - il est difficile de se préparer à de telles souffrances et de telles brutalités. Mais la Légion est une organisation militaire de grande envergure qui permet le maintien de cette paix pour les trois tairikus : le continent de l’Ouest, Tsokubo ; celui du Nord, Oldan ; celui de l’Est, Nivisky. Aussi, lors de la Sélection qui n’a lieu que tous les cinq ans, les candidats ont généralement reçu un pré-entraînement afin de s’assurer de leur admission. De cette façon, un premier tri est effectué en amont de la Sélection simplement par la réputation des épreuves. La Légion s’assure ainsi de n’avoir que l’élite à ses portes lorsqu’elle entame la période de recrutement. C’est pour cela que l’on dit de la Sélection qu’elle s’effectue en trois parties même si officiellement il n’y a toujours que deux épreuves.  

 

Note : 

Old - Ah je comprends mieux. Mais là, il y a des enfants, ça arrive souvent ça ? 

Young - Non, bien que la majorité civile soit de 10 ans à Oldan (facilitant les condamnations des pédophiles en donnant plus de crédit à la parole des victimes), l’âge moyen des participants à la sélection est de 15 ans. Hormis les condamnés, les participants prennent souvent quelques années afin de s’entraîner avant de tenter le concours. 

Old - Même quand je cherche à faire une note informative, tu ne peux pas t’empêcher de la ruiner…

 

De l’autre côté de l’arène, un enfant habillé de vêtements traditionnels vert et blanc, et portant un sabre à sa taille, restait immobile. Il était entouré de candidats qui l’encerclaient sans l’attaquer pour autant. En raison de son âge et de sa petite taille, c’était une cible évidente pour la plupart des jeunes hommes et femmes présents, dont certains vétérans. Pourtant, ils avaient l’air d’attendre que l’un d’eux se jette en premier pour attaquer. Mais personne ne voulait prendre le risque. Un risque que l’on ressentait en regardant ses yeux verts, passifs devant l’agressivité et la violence des scènes qui se déroulaient autour de lui. Alors que des projections de sang giclaient sur son kimono et sa peau, il restait concentré. Son regard n’était pas porté sur ceux qui l'entouraient. Il observait Charles, un des trois encadreurs. Plus précisément, son attention était portée sur la rapière en bois, la taille élancée et l’armure légère du Première-Classe. Il l’évaluait. 

« Vas-y Seth, c'est un épéiste ! lui lança Jin depuis les bancs. Et puis, ça fait un moment que t'y es là ! »

 

Note : Young - Typique des ninja ça.. Toujours par derrière.. Toujours en traître. Même les encouragements on dirait des provocations.

 

« Une connaissance ? demanda Charlotte.

- Bien plus ! lui répondit Jin en souriant. C'est mon cousin.

- Drôle d’activité familiale. dit-elle tout en remettant une mèche de ses cheveux roux derrière son oreille.

- On est pas très câlins chez les Hogo. ironisa Jin, les yeux rivés sur son cousin Seth, toujours dans l'arène. 

- Nous, si. dit-elle d’un air taquin. »

Agacé par le cri de Jin, Seth se décida à aller à la rencontre de Charles. Il s'élança en bloquant les attaques des combattants qui se battaient devant lui, sans dégainer le sabre qu'il portait à la taille. De cette manière, il se fraya un chemin en courant, le fourreau tourné vers le bas. Quand il arriva auprès de l’encadreur élancé portant une armure légère, Seth tendit son bras et sortit la lame de son fourreau pour lui asséner un coup. Charles le bloqua sans efforts à l’aide de sa rapière en bois qu’il tenait fermement d’une main.

« Petit, ce que tu tiens là n’est pas un jouet. lui dit-il. Tu devrais faire attention. 

- Je sais, rétorqua Seth. Je suis aussi un épéiste ! » 

L'enfant asséna trois coups identiques de sabre qui furent parés à chaque fois d’un seul mouvement de Charles, amusé, tandis qu’il repoussait la lame de son opposant.

« Épéiste ? reprit Charles. Ne me fais pas rire ! Tu ne tiens même pas ton sabre comme il faut ! (il para un coup puis repoussa Seth) Je t’ai vu courir jusqu’à moi, tu tenais ta lame vers le bas dans ton fourreau, si tu étais épéiste tu saurais que ça réduit ton champ d’attaque. Dis la vérité, tu l’as trouvé par terre ce sabre ? 

- Non, il m'a été offert par ma mère ! 

Seth chargea de nouveau.

- Et tes coups sont prévisibles. Tu dois varier tes attaques ! ajouta le Première-Classe. On dirait que tu n’en connais que trois ! »

Charles le repoussa avec sa main tenant la rapière, tout en conservant l’autre dans le dos.

« Là ! (il porta un coup léger vers le bas que Seth esquiva) Tes jambes doivent se déplacer plus économiquement ! Je vois bien que tu es rapide mais tes mouvements sont trop décomposés. Tu ne vas pas à l’essentiel, c’est trop simple à prédire. Et surtout, tu n’as pas su juger ton adversaire. Tu devrais savoir qu’avec ton niveau tu ne peux pas espérer me toucher, va plutôt prendre d’autres candidats, tu en as le niveau, tu pourras te qualifier. » 

Seth se replaça, il chargea de face pour asséner un coup d’estoc, les deux mains sur le manche, la lame dressée comme une lance vers le ventre de Charles.

« Ça suffit ! dit Charles fermement. Reviens dans dix ans ! » 

L’encadreur se déplaça d’un pas chassé aussi rapide qu'un battement de cil sur sa droite et vint pour lui asséner un coup direct sur les omoplates. Pencher en avant, Seth se laissa glisser sur la tranche extérieur de son pied ce qui fit virer son corps à l’horizontale. Il prolongea sa chute pour se retourner en levant ses bras. La lame scintillante du sabre de Seth fut arrêtée en vol par deux doigts. Ceux de Goro, qui venait d’apparaître devant lui. Charles, bousculé par l'armure, recula de quelques pas. Surpris que sa lame ait été stoppée, Seth, toujours dans l'élan de sa chute, prit appuie en posant le pied sur le plastron de Goro qui lâcha la lame, et fit un salto avant d'atterrir sur ses pieds. 

Agile. pensa le Capitaine.

L’enfant rangea lentement son sabre dans son fourreau, lame vers le haut, après l’avoir essuyée contre la manche de son kimono. Sans l’intervention de Goro, Charles serait mort. Seth le savait, Charles aussi.

Tous les participants avaient arrêté de se battre. Goro n’était pas censé intervenir et ils le savaient. Depuis le début, l'épreuve ne comprenait que trois encadreurs. En son grade de Capitaine, Goro n’était censé servir que de représentant juridique de la Légion. 

« Merci. dit Goro, souriant à Seth. Tu es qualifié, ne t’en fais pas. » 

La cloche sonna « Seth Hogo. 23 minutes ».

« Je sais bien que je n’aurais jamais pu vous battre en temps normal. adressa Seth en direction de Charles. Mais alors que vous aviez l’avantage de la technique, du corps et de la force, j’avais celui de votre assurance et de votre insouciance face à un enfant de dix ans qui tient sa lame à l’envers. Vos compétences d’épéiste ne valent finalement plus grand chose quand elles sont couplées avec un aussi mauvais jugement. »

Sous l’impulsion de la colère et de l’humiliation subie, Charles effectua une fente en arrière, puis une sur le côté, à la manière d’un escrimeur. Tout se passa si vite que Seth eut à peine le temps d'observer que l'action était déjà réalisée. Le sable se souleva sous les pas de l’encadreur et laissa apparaître le béton nu en dessous, réduit en morceaux de gravas volants. Le Première-Classe disparut dans son mouvement. Seth ne vit pas l’attaque mais ressentit une onde de choc à quelques centimètres de son visage qui lui étira la peau. Le haut de son kimono se déchira en laissant quelques entailles visibles sur son corps. Il sentit une pression contre son corps qui le compressa légèrement pendant une courte seconde. Goro se tenait de dos devant lui, comme un mur. Sous son bras, Charles était inconscient. Les gravats soulevés par le pas de Charles retombèrent. Seth vit l’autre main du Capitaine Goro, ensanglantée, tenant la rapière en bois de l’encadreur. 

« Ça va gamin ? dit-il tout bas à Seth.

- Euh, oui, répondit Seth en reprenant ses esprits.

- Bon. (il se retourna et parla plus fort) Veuillez excuser le comportement de cet encadreur, nous continuerons le CO-CON sans lui. Je profite du silence pour prévenir les encadreurs qu’ils sont là pour encadrer pas pour aider tous les participants à se qualifier ! » 

Zabimaru se redressa et recentra son regard en face de lui. Son visage se referma dans une expression de concentration. Ladvard se releva, à l’écoute. Le public désormais silencieux, Goro continua :

« Reprenez-vous, sinon je me chargerais de votre prochain entraînement.

- Capitaine, intervint Ladvard le roux, ne prenez pas tout le monde à l'entraînement alors que certains d'entre nous sont sérieux.. ce serait une injustice. »

Après quelques secondes les yeux aux ciel, Goro lui répondit : 

« Regarde ta cheville avant de la ramener, Ladvard.

- Quoi ?! »

Par terre, allongé aux pieds du viking à l'allure robuste, comme un mort sur le ventre, Ash tenait la cheville de Ladvard.

« Touché » dit l’enfant.

Il se releva alors tranquillement en dépoussiérant son pantalon. Le silence brisé, le public dans les gradins se mit à rire à gorge déployée.

 

Note : 

Old - Allé ! J’étais sûr qu'il n'était pas mort. 

Young - Ça va ça va ! 

 

Ladvard se souvenait d’avoir vu le bâton lui frapper la tête. Il regarda Ash en train de s’essuyer la tempe avec le revers de sa manche, il n’y avait qu'une simple rougeur.

- Il a réussi à suffisamment pencher sa tête en si peu de temps ? s’étonna Ladvard. Non, c’est impossible. Il devait m'observer depuis le début et a réussi à prédire la trajectoire de mon bâton.

La cloche sonna « Not Ashleep. 24 minutes ». 

Dans les gradins, deux amis se lançaient des paris sur les futurs affectation des recrues qualifiées : 

« Là il y a pas trop de doute, dit l’un. Lui il va partir chez les Mandarins s’il réussit la seconde épreuve.

- Ouais tu m’étonnes… répondit l’autre. Je crois que c’est la première fois que je vois quelqu’un simuler sa mort à un CO-CON dans le but de toucher un encadreur. 

- Et pour le Tsokubien en kimono ? Tu penses qu’il ira dans quelle Faction ?

- C’est dur à dire. J’ai pas trop eu le temps de voir son combat parce que je regardais Ladvard défoncer de la recrue mais il a quand même réussi à mettre Charles en difficulté, un des Sept Perles de l’année 51.

- Et c’est un Hogo. ajouta l’autre.

- En tout cas, il a un bel avenir, peut-être un futur Milicien ?

- Ou un Fantassin. Mais c’est sûr qu’il ira pas chez les Mandarins avec de telles capacités, ça serait dommage. »

Parmi les participants encore debout à l’intérieur du cercle, une cohue montait en protestation à propos de cette qualification.

De l'autre côté de l'arène, une voix se fit entendre avec retentissement :

« MAIS FERMEEEZZ LAAAA !! »

Tout le monde se retourna vers un homme, d'au moins deux mètres, le torse poilu et lacé de cuir. Mais ce dernier aussi se retourna pour dévisager, comme le reste de l’arène, un petit garçon aux cheveux argentés, coiffés en pagaille. Ses yeux noirs entouraient deux pupilles rouges. Sous son regard sombre, deux traces claires qui partaient de ses paupières et descendaient comme des cicatrices le long de ses joues, apportaient un caractère effrayant à son visage encore enfantin. Il était petit, sec et trapu. Sa peau était mate, son torse nu. Il portait un pantalon déchiré et se tenait voûté comme un animal prêt à charger. Sa respiration était forte après avoir crié ce qui, ajouté à sa posture, lui donnait une allure de bête sauvage. Il prit une grande inspiration et reprit :

« PERSONNE N’A DIT QUE C’ÉTAIT FINI !.. VOUS AVEZ JUSTE LES BOULES DE PAS Y AVOIR PENSER AVANT ! »

Les participants se retournèrent vers Goro en attendant son verdict.

« L'enfant masqué a respecté les règles. » finit par déclarer le Capitaine.

 

Note : 

Young - Pour une fois…

 

La bête aux cheveux cendrés, sous l'excitation montante dûe au combat, dévoila des canines acérées pour ajouter : 

« VENEZ LÀ, J’VOUS PRENDS TOUS !! »

Le géant au torse lacé de cuir, se trouvant juste devant l’avorton, lança son poing fermé avec l'intention d'écraser la tête du petit être. Mais sa lourde main s'abattit sur le sol en laissant une impressionnante zone d’impact dans le sable. Quand le nuage de poussière retomba, le géant aperçut l’ombre de l’enfant, au-dessus de lui. Les petits doigts pointus de l’enfant lui attrapèrent la mâchoire et il serra jusqu'à enfoncer ses ongles sous la peau de la brute. La mâchoire de l’homme se fissura quand l’enfant tira dessus pour le projeter hors du ring. Une fois débarrassé de la masse gênante, le petit monstre se jeta sur deux autres personnes. Il arracha le nez du premier à coups de crocs puis le poussa hors du cercle avant de se jeter sur l’autre pour le tabasser au sol. 

 

Note : 

Old - Dis, ça compte pas double s’il remplit toutes les conditions sur les mêmes mecs ?

Young - Non non.

 

Depuis les tentes autour de l’arène, les onze participants déjà qualifiés étaient assis. Ash, Seth, Jin et Charlotte, peut-être à cause de leur âge, s'étaient mis côte-à-côte et regardaient l’enfant bestial sortir les opposants du ring, les blesser ou les tuer. Peut-être qu’ils le regardaient à cause de son jeune âge, ou bien c'était dû à la fascination que l'on ressent face à l’horreur d’un spectacle violent. Mais ils ne pouvaient pas vraiment regarder ailleurs, tout comme les spectateurs dans les gradins qui avaient aussi du mal à s’intéresser aux autres opposants. Ladvard s’aperçut alors que l’animal au fond de l’arène sautait, tournait, se tortillait comme un chat et esquivait les projectiles tout en tapant les autres participants qui étaient à sa portée. La cloche retentit avec la tête du jeune garçon au-dessus du projecteur holographique. L’enfant portait un bandana rouge sur le front qui retenait ses cheveux argentés en l’air. La photo était prise en pleine action mais le visage de l’enfant aux yeux rouges arborait un large sourire laissant apparaître des glaciers pointus. « Onyx Fedaï. 25 minutes ». En observant le garçon qui s'apprêtait à éliminer son onzième participant, Ladvard courba son bras et le contracta pour envoyer un de ses bâtons depuis l’autre bout de l’arène. Le projectile traversa les participants dans un circuit défiant les lois de la gravité et de la logique et finit dans la tête du garçon sauvage. Le bâton percuta le crâne de l'enfant qui se retrouva projeté hors du cercle de craie blanc.

« Voilà un monstre en roue libre, lâcha Seth. Il se bat comme une bête sans technique ni raffinement.

- En attendant, il a l’air d’avoir conscience de sa propre force. rétorqua Ash. Enfin.. (Il regarda la hanche de Seth) Il n' a pas besoin d’une arme pour se défendre ou se battre. »

Sous la provocation de Ash, Seth dégaina son sabre et porta un coup rapide et contrôlé dans sa direction avec l’intention de l’effrayer. Ash coupa le mouvement dans son élan en bloquant la lame avec une carte à jouer, tandis que Jin s’était rapproché dans un déplacement rapide et silencieux pour s'interposer entre les deux jeunes garçons en attrapant leur poignet respectif. Ash fut surpris par la puissance du coup d’épée malgré le peu d’élan, et l’intervention de Jin. Seth fut surpris par la précision du mouvement qui avait coupé ce même élan avec une simple carte.

« Un samouraï ne peut pas se permettre de céder à ce genre de provocations. adressa Jin à l’intention de Seth.

- Ouais, prends exemple sur 40 secondes.. rebondit Ash.

- N’en fais pas trop non plus, répondit Jin. Je serais pas toujours là pour empêcher ta mort. »

L’enfant sauvage, assommé jusqu’ici par Ladvard, reprit connaissance et se releva sans difficulté, comme s’il n’était pas tombé inconscient.

« Toi ! s’exclama Onyx en pointant Jin du doigt. T’es sorti en premier c’est ça ?!

- Non, deuxième. Charlotte était la première.

- Tu as retenu mon nom de famille aussi ? ironisa cette dernière.

- Bats-toi contre moi ! rétorqua Onyx sans quitter Jin des yeux.

- Ouais, bats-toi contre lui. répéta Ash.

- Non merc… »

Onyx bondit à quatre pattes comme un lion sur Jin avant qu’il ne puisse refuser. Seth tenta de s’interposer mais Onyx le vit et s’en débarrassa d’une main,  le projetant violemment au sol. Jin esquiva deux coups de griffes. Ladvard prit une grosse voix épaisse et retentissante pour dire depuis le centre de l’arène :

« STOP ! Encore une fois et je m’occupe de toi, adressa-t-il à Onyx. Et pas avec un bâton cette fois. Ça vaut pour les autres qui ont été qualifiés, ça devrait bientôt finir alors restez tranquille. »

Onyx s’arrêta dans son élan et se redressa pour se tenir sur ses deux jambes. Il poussa un râle avant de s'asseoir en faisant la moue contre le mur de l’arène. 

« Jin, pourquoi l’examen se terminerait-il rapidement ? demanda Charlotte. Ça doit faire une trentaine de minutes que l’épreuve a commencé et j’avais entendu que la sélection se faisait sur une journée complète.

- Eh bien.. Il me semble que c’est la seconde épreuve la plus longue. répondit Rudolf, une recrue venant de se qualifier. Et..

- Il n’y a que trois-cent participants aujourd’hui. le coupa Jin en s'asseyant sur le banc. Si on exclut la qualification en touchant un encadreur, seul trente personnes sur trois-cent peuvent se qualifier en éliminant dix personnes chacune. On pourrait croire que la Légion nous permet aussi de se qualifier en touchant un examinateur pour nous libérer des places mais je pense qu’il s’agit simplement de distinguer les différents types de participants et leurs forces. Peut-être pour mieux nous répartir dans une des Factions. 

- Ça veut dire que j’aurais peut-être mieux fait d’attaquer un encadreur si je voulais la Faction de mon choix, s’inquiéta Charlotte.

- Pour un participant qui se qualifie en touchant un examinateur, il y en a probablement plus de dix autres qui se font éliminer en essayant… Il est probable que la Légion propose des postes en adéquation avec la qualification du candidat et les circonstances qui l’ont accompagné. 

- Oh zut.. se dit Charlotte.

- Logiquement, une fois que les participants les plus faibles sont sortis, il est plus difficile de se qualifier en sortant dix personnes. poursuivit Jin. Donc en théorie, celui qui sort dix participants du cercle alors qu’il ne reste que peu de participants, il est plus fort que le premier qui s’est qualifié de la même manière. 

- Donc j'aurais mieux fait de sortir dix participants à la fin plutôt qu’au début.. J’ai rien fait comme il fallait. J’aurais dû y réfléchir plus longtemps. 

- Ne t’en fais pas, la rassura Ash qui écoutait leur conversation d’une oreille. Sortir dix personnes en six secondes, je pense que ça les impressionnera plus que de toucher un encadreur. 

- Vu sous cet angle.. souria-t-elle.

- C’est pour ça que cette épreuve est aussi une leçon. relança Jin. Comme en combat réel, ou sur un champ de bataille, plus la confrontation est longue et plus il est compliqué de vaincre son ennemi. C’est une question d’endurance mais aussi de chance. Dans notre cas, plus le combat dure et plus il est probable de tomber sur des opposants forts. Et si le combat dure, ils auront eu le temps d'observer nos techniques et nos points faibles. Les derniers debout devraient être soit les plus lâches, soit les plus forts. Mais en l'occurrence, je pense que nous arrivons simplement à la fin du temps imparti pour le Combat-Concours. »

Après une demi-heure supplémentaire, il ne restait dans l’arène que cinq participants encore debout. Ladvard et Zabimaru, les deux encadreurs restants, les regardaient sans bouger. 

Goro s’avança vers le cercle et déclara :

« Le CO-CON est officiellement terminé. Ceux qui respirent encore vous avez un train dans cinq minutes pour Tsokubo et dans vingt minutes il y en a deux autres pour Oldan. Bon courage et à dans cinq ans pour les plus téméraires d’entre vous. »

Il fit un signe de la main et les deux grandes portes de l’arène s’ouvrirent pour laisser entrer des hommes et femmes, vêtus d’un uniforme noir, qui commencèrent à ramasser les corps sur le sol en vérifiant leurs fonctions vitales. Ash vit le corps du jeune homme qu’il avait aperçu sur le quai, celui qui voulait payer pour rentrer chez lui, et vit qu’on le mettait dans une housse mortuaire. Parmi les derniers debout dans l’arène, certains se mirent à pleurer. La tension et l’effort se ressentait dans les muscles et l’esprit, et la déception de ne pas être qualifié les envahit.

Goro s’adressa maintenant aux participants sélectionnés se trouvant sur les bancs :

« Je vous félicite pour avoir réussi avec brio cette première partie de la Sélection. Vous avez fait la moitié du chemin pour faire partie de la Légion. Je ne suis pas très doué en discours mais vous en aurez bien assez par la suite alors je vais me contenter de vous amener à la prochaine étape. Cependant je tiens à vous féliciter. Vous avez réussi à finir la première des deux épreuves de la Sélection. Quelles que soient vos motivations, peu de personnes réussissent l’exploit que vous venez d’accomplir. Vous vous rapprochez encore un peu plus du rêve d’être au service du Landau, Légionnaire. Je vous le dis en l’honneur de vos proches et de votre tairiku : vous pouvez être fiers de vous.  »

Jin tendit sa main à Charlotte pour l’aider à se relever. Elle hésita puis la prit. Une fois levée, elle passa devant lui en le regardant du coin de l'œil, sans tourner la tête. Il lui emboîta le pas et passa devant Ash, assis, qui lui tendit aussi sa main.

« Et moi j’peux aller m’faire voir ?

- Reviens quand t’auras des yeux aussi charmants qu’elle. se moqua Jin. »

Quand les vingt-trois participants qualifiés furent réunis autour de lui, Goro appella les deux encadreurs et Charles, réveillé depuis quelques minutes, à le rejoindre. Il se tourna vers eux et leur dit :

« Merci à vous de m’avoir aidé dans ma mission. Conformément à votre contrat, pour avoir participé à l’organisation de cette Sélection vous obtiendrez donc six jours de permission à partir de Dimanche. Je vous souhaite un bon repos d’ici là et vous attends au taquet dès demain à vos postes. N’oubliez pas de faire votre rapport à vos Capitaines respectifs. Charles, il va sans dire que tu auras une sanction dont nous parlerons plus tard.

- Oui mon capitaine ! répondit l’escrimeur.

- Il va falloir que je me fasse à l’idée d’être appelé Capitaine.. dit Goro d’un air dépité en prenant son pendentif (un bouclier transpercé d’une épée) entre les doigts. 

- Bon, eh bien on se voit bientôt. lança Ladvard en tournant les talons.

- Ladvard, dit Goro en posant sa main sur l’épaule du viking. Tu les amènes à Kavga. Hilary devrait t’y attendre à dix-huit heures, c’est elle qui s’occupe de la seconde étape. Si elle n’a pas besoin de toi, tu pourras y aller à ce moment-là. Tu n'as pas oublié que tu n'as pas de permission, n'est-ce pas ?

- Non évidemment. répondit-il en dépoussiérant son débardeur de Fantassin. »

Zabimaru, toujours l’air lassé, fit un signe de la main en s’éloignant vers les marches de l’arène : 

« Merci. C’était fun. »

Goro partit vers les portes de l’arène et Ladvard, faisant signe aux recrues de le suivre, prit le même chemin. Seth, et d’autres parmi les qualifiés, eurent l’impression qu’ils avaient passé ces portes il y a bien longtemps. Ils savaient qu’il y a quelques heures ils n’étaient que des participants à un concours. Maintenant, ils avaient fait le premier pas pour être Légionnaire, le corps d’armée élitiste au service du Landau.

Le public quitta progressivement les gradins. Clyde, en se levant du banc sur lequel il était assis, s’adressa à Jack qui portait une cigarette à sa bouche :

« Bon, comme première épreuve du dernier jour de Sélection c’était intéressant. T’en as pensé quoi ? 

- T’as mon feu ? demanda Jack. Je pense que nous n’aurons pas de recrues plus drôles que celles d’aujourd’hui. Si je regarde une Sélection à nouveau, ce sera celle dans cinq ans, si un des cinq-là échoue cette année. (en allumant le bout de sa cigarette) J’en reviens pas que le gamin au masque soit pas mort.

- Je comprends ton ressenti. Et oui, c’est étonnant. Il y a pas mal de jeunes parmi les qualifiés en plus. Tu sais où est partie Stella ? 

- Qui sait. souffla Jack dans un nuage de fumée. On ne sait jamais où elle s’éclipse quand elle choisit de partir.

- C’est un trait commun à ceux du SRIL. ironisa Clyde. »

 

* * *

 

Après avoir guidé le groupe de recrues devant un portail géant incrusté dans les remparts de la zone centrale, Ladvard s’arrêta avant de se tourner vers le groupe qui s'agglutinait autour de lui.

« Sur votre gauche, montra-t-il de la main, le portail Ouest qui mène à la Zone I. C’est un des quatre seuls moyens d’aller dans la Zone I avec les autres points cardinaux Nord, Sud et Est. Je pense qu’il est inutile de vous l’expliquer mais c’est le protocole alors je le fais : l’Olympe est divisé en deux zones. La Zone II, dans laquelle nous sommes, entoure la Zone I. Et cette dernière est strictement interdite à toute personne ne faisant pas directement partie de la Légion. Vous aurez besoin de votre matricule de Légionnaire pour y accéder. Une plaque qui vous sera remise dans quelques heures. » 

Il marqua un temps d’arrêt pour s’assurer que tout le monde l'écoutait. Ash se remémora la plaque gris foncé que Jack (l’enquêteur qui l’avait arrêté puis ramené à la Sélection) avait montré à plusieurs reprises. Il l’avait utilisé pour monter dans le train gratuitement puis au bureau de recensement de la Sélection.

Après s'être assuré d’avoir l’attention de toutes les recrues, Ladvard reprit :

« Bien. Il est très exactement dix-sept heures. Vos badges vous seront remis à dix-huit heures dans la Zone I. Il vous reste donc du temps avant votre remise d’insigne. Je vous laisse ce temps libre pour que vous puissiez récupérer de votre combat et vous familiariser avec les lieux de la Zone II. Baladez-vous. Normalement il est impossible de se perdre puisque toutes les avenues principales de la Zone II remontent jusqu’aux murs de la Zone I. Il vous suffira de les emprunter puis de longer les remparts jusqu’au portail Ouest. Si néanmoins vous n’êtes pas présent ici à dix-huit heures, je ne vous attendrai pas et vous ne pourrez pas entrer en Zone I. Si cela venait à se produire et que vous n’êtes pas présent lors de la seconde épreuve, vous n’obtiendrez pas votre badge de Légionnaire et vous aurez survécu à la première épreuve pour rien. Vous avez une heure et cinq minutes. À dix-huit heures et cinq minutes je montrerai mon matricule au gardien pour traverser ce portail avec ceux d'entre vous qui seront là. Des questions ? (Aussitôt) Parfait. »

Il s’en alla vers l’intérieur de la ville sans se retourner. Un participant leva la main mais Ladvard était déjà à une dizaine de mètres du groupe quand il lâcha par-dessus son épaule : 

« Trop tard fallait être plus réactif ».

Onyx, au fond du petit groupe d’enfants composé de Seth, Jin, Charlotte et Ash, se retourna et commença à marcher vers les rues de la Zone II. 

« Tu vas où ? Tu pars déjà ? s’enquit Ash. 

- J’ai la dalle moi. déclara Onyx sans se retourner.

- Je t’accompagne, lui dit Ash, pas sûr que Onyx l’entendait. Je meurs de faim moi aussi. »

Certains des participants allaient directement s’asseoir contre les remparts de la Zone I pour être sûrs de ne pas manquer le rendez-vous.

« On va se balader ? proposa Jin à son cousin. Charlotte, tu veux venir avec Seth et moi ?

- J’ai pas dis que j..

- Oui avec plaisir, répondit Charlotte. Je suis jamais venue sur l’Olympe.

- Super ! répondit Jin en souriant à Seth. »

 

* * *

 

Après la deuxième intersection, Onyx se dirigea droit vers une auberge. Le bâtiment était en bois vernis et les fenêtres étaient entourées de décorations florales. À l'extérieur, des hommes et des femmes se tenaient assis sur des bancs en métal recouverts de coussins colorés. Certains mangeaient du riz avec de la viande juteuse dans des bols en bois. D’autres partageaient des boissons avec ou sans bulles en riant. Tous ou presque étaient en uniforme. Ash y reconnut les Enquêteurs, appartenant à la Faction des Mandarins, avec leur imper ; les Miliciens, avec leur pantalon et leur médaillon, et s’étonna en observant deux autres uniformes qu’il ne reconnut pas. Il y avait des hommes en débardeurs tout blancs avec un motif de griffures dans le dos, comme celui de l’encadreur qu’il avait touché pour se qualifier, Ladvard. Et ceux habillés d’une veste noire à manche longue, avec des boutons argentés alignés sur le côté du torse et un pantalon sobre de la même couleur. Ash se rappelait avoir vu ce deuxième uniforme porté par l’équipe de nettoyage, venue retirer de l’arène les corps des morts et des blessés à la fin de l’épreuve.

Onyx salivait devant les clients attablés. Il entra dans l’auberge et “demanda :

« Aubergiste, ton meilleur plat, rapidement ! »

L’homme derrière le bar était en train de rincer un bol, un torchon sur l’épaule. C’était un homme noir de la quarantaine, il portait une paire de lunette de vue qui soulignait les traits de sa mâchoire carré. Il était aussi vêtu de l’uniforme noir aux boutons alignés, dont il avait retroussé les manches.

« Bonjour messieurs. répondit-il. Vos parents sont là ? La maison ne fait pas crédit.

- Hein ?! Sers-moi à manger juste, je te passerais l’argent plus tard. J’ai super faim et y a pas de quoi chasser ici ! »

Ash, repensant à sa première vision d’Onyx en train de projeter un homme faisant trois fois sa taille hors du cercle, proposa alors : 

« Sinon, vous n’avez qu’à faire un bras de fer. Et s’il gagne vous nous offrez un repas !

Le barman amusé rit au éclat avant de leur dire :

- Au moins vous avez de l’humour. Je suis un Légionnaire vous savez, je ne sais pas si vos parents vous l’ont expliqué mais même les Utilitaires sont entraînés. Et qu’aurais-je à gagner si vous perdez ? Un bol coûte quinze Gramms. Vingt avec une boisson.

- QUINZE GRAMMS !! pensa Ash très fort. Quel escroc ! On mange à deux pour cinq Gramms avec Bensom ! Même si j’avoue que c’était pas les mêmes plats.

- Mmm.. Bon. (Onyx se gratta la tête et dit) C’est lui qui paye alors (en désignant Ash par-dessus son épaule). »

Après avoir dit ça, il sortit de l’auberge et partit s’asseoir sur une des tables extérieures.

« J’espère que vos parents auront de quoi payer les bols et son impolitesse. dit le barman en s’adressant à Ash. Vous êtes en vacances à en juger par vos déguisements..

- Nos déguisements ?

- Oui, répondit le barman amusé. Les yeux rouges, le masque..

- Ah oui ! Nooos déguisements… Tout à fait. 

- Où sont vos parents ?

- Oui. Euh, nos parents.. (Ash hésita et finit par dire :) Ils sont partis faire le tour des étales. Et ils nous ont dit de les attendre ici. Je m’excuse pour mon frère, il est à cran quand il a faim.

- Tu as l’air bien différent de lui. Tes parents vous rejoignent après c’est ça. Je vous sert deux bols ?

- Oui merci. Nous avons été élevés séparément, c’est peut être pour ça ! Je vais m’asseoir. »

Il rejoignit Onyx, assis sur ses pieds, accroupi sur un des bancs autour de la table la plus au fond de la terrasse. Ash s’assit face à lui (en pensant à L). Au bout d’une minute de silence, le barman amena deux bols en bambou. Derrière son passage, une fumée légère s’envolait en laissant une trace olfactive de viande grillée cuite au vin blanc. Il posa les bols sur la table.

« Voilà Messieurs, bon appétit. Des boissons ?

- Non, merci beaucoup. dit Ash en souriant sous son masque blanc.

- Mouirchui... »

Les doigts déjà pleins de sauce et de riz collant, Onyx répondait en mordant à pleine canines dans les morceaux de viandes et en mâchant bruyamment. Aussitôt que le Barman fut retourné dans l’auberge, Ash se pencha sur son bol et dit tout bas à Onyx : 

« Dis, tu sais que j’ai pas un rond hein. On vient juste de réussir la première épreuve de la Sélection alors vaudrait mieux qu’on n’attire pas l’attention avant qu’on ait nos badges. Tu m’écoutes ? Quand on aura fini.. »

Il se fit couper la parole par un homme assis à la table derrière eux. Habillé du même uniforme que deux collègues assis à la même table, un homme en débardeur avec des griffures dans le dos s’était retourné. Leurs bras nus étaient recouverts de cicatrices. L’homme retourné se pencha vers le petit corps recroquevillé d’Onyx et dit :

« EH ! Il va se calmer sur la bouffe l’animal ?! On dirait qu'il n'a pas mangé dep.. »

Sans s’arrêter de manger, Onyx prit la tête de l’homme derrière lui dans sa main gauche et la tira violemment contre la table qui défonça le crâne du Fantassin. La tête de l’homme perdit quelques dents à l’impact et le gaillard s’effondra par terre, la bouche en sang.

Les deux autres hommes se moquèrent de leur collègue étalé entre les deux tables. L’un se leva en s’adressant au corps immobile : 

« Pour un Baroudeur t’en mènes pas large face au minot là ! Hahaha ! (se tournant vers le troisième) Attends, je crois qu’il est inconscient. Oh ? Tu m’entends ? »

À l’intérieur de l’auberge, le barman entendit le vacarme puis les éclats de rire qui provenaient de l’extérieur. Il se dépêcha sur place et jeta un œil dans la direction des rires, au bout de la terrasse. Il vit les deux hommes riants ; et par terre, celui qui était inconscient, le front ouvert, baignant dans son sang. Derrière eux, la table des enfants était cassée en deux et seul un bol tournait en rond sur le sol tâché de sang.

« Ils sont où les deux gosses qui étaient là ?! cria le barman.


 

Note : 

Old - Juste, c’est qui L ? 

Young - La question c’est plutôt à quoi il ressemble… 

Old - On est d’accord que ça n’a aucun rapport avec notre récit ? 

Young - C’est sur… C’est carrément un autre manga !

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