Ce fut une odeur étrange, un mélange d’acidité et de chaud qui la sortit de son lourd sommeil.
Elle fronça le nez, gênée par cette forte fragrance, peu habituée par cette intensité. Cependant elle ne le fut pas assez pour qu’elle soit obligée d’ouvrir ses yeux.
Toujours dans l’obscurité rassurante, elle tenta d’étirer ses membres, en vain. Quelque chose empêchait ses muscles de s’accorder avec sa volonté. Comme si elle n’avait plus du tout de corps.
Cette idée la rendit légèrement sceptique, mais ne paniqua pas pour autant. Elle sentait la froideur de la pierre lui engourdir peu à peu son dos.
‘Je… Je suis alitée… Je suis vivante, mais pourquoi je ne peux pas bouger ?’
Têtue, elle réitéra une nouvelle fois. Rassemblant toutes ses forces et sa concentration et elle parvint enfin à lever son membre gauche.
Ce fut une terrible erreur.
Une douleur fulgurante la saisit dans tout son être, l’électrisant de part en part. Elle relâcha très vite ses muscles et voulu gémir de douleur, mais un grognement sortit de la bouche à la place.
‘Qu’est-ce que…?’
Malgré son envie de rester calme, la panique commençait à l’envahir.
Que ce passait-il ? Et où était-elle ?
Cette soudaine question la poussa à ouvrir doucement son œil droit.
La luminosité ne paraissait pas forte, cependant cela lui suffit pour l’aveugler un court instant.
Puis, peu à peu un environnement sombre et étriqué se dessina.
Elle était bien alitée à même le sol, dans ce qui pourrait être une bicoque, encombrée d’immenses étagères à l’équilibre plus que douteuses.
Sur celles-ci, un incroyable enchevêtrement de fioles contenants des mixtures plus suspectes les unes que les autres, de livres épais et poussiéreux et d’ustensiles pour préparer diverses potions ; les rendaient extrêmement dangereuses, si elles venaient à tomber.
Peu rassurée par ce qu’elle venait de découvrir, elle promena son regard vers sa gauche.
Une fenêtre à demi rongée par les mites, laissait passer une partie du vent qui hurlait dehors. De là où elle était, elle ne pouvait pas distinguer grand-chose… Juste des sommets montagneux lointains.
‘Je suis dans les montagnes ? Qu’est-ce que je fais là ?’
De plus en plus perdue, elle fouilla dans sa mémoire la moindre trace d’un début d’explication. Mais rien ne lui vint. Le trou noir.
L’angoisse continua de progresser quand elle se rendit compte qu’absolument rien ne lui revenait.
‘Qui suis-je ? Mon nom ? Ma vie ?’
La pression commença à bouillir en elle, quand brusquement un bruit de verre brisé venant de sa droite la fit revenir à elle.
-Par Hiekka ! Mais qu’est-ce qui ne va pas avec cet onguent ?!
Attirée par cette exclamation si soudaine, elle braqua rapidement son regard vers la droite. Au fond de la pièce sombre, elle découvrit une vieille personne, certainement une femme, juchée sur un tabouret haut, dos à elle.
L’inconnue faisait à peine la moitié d’un homme et était coiffée d’un bonnet à l’aspect ridicule : un ensemble de tissu violet et rouge entrelacé, qui cachait toute sa chevelure, hormis quelques mèches rebelle grisâtres. Sa toge était assortie avec la coiffe, quoi qu’un peu trop grande pour elle…
Elle paraissait fort affairée sur son plan de travail recouvert de sang, de liquide épais et nauséabond et d’un ustensile qui semblait, de loin, brisé.
-Et voilà ! Tout A coulé… Par Hiekka, si je n’avais pas que ça à faire je te jure que… Que…
Elle finit sa phrase dans une succession de marmonnements moroses.
Fatiguée de l’épier du coin de l’œil, elle tourna complétement sa tête vers l’inconnue et tenta d’ouvrir sa seconde paupière. Le mouvement pourtant simple lui était une fois de plus impossible. Seul un noir nébuleux lui était visible.
Subitement une idée lui vint.
‘Serais-je aussi borgne ?’
Cela ne lui semblait pas vraiment terrifiant, après tout, elle ne bougeait déjà plus alors un œil en moins…
Elle reporta son attention sur le plafond crasseux et prêt à céder au moindre coup de vent.
Soudain lassée par cette situation qui lui échappait totalement, elle faillit se replonger dans un sommeil sans fin, cependant, la voix de la vieille femme tonna de nouveau :
-Ah ! Te voilà enfin de retour parmi les vivants !
Subitement, le visage de celle-ci apparu dans son champ de vision. La peau de son visage était plus aussi fripée qu’un fruit trop longtemps laissé au soleil, ses traits durcis par le temps renforçaient la sévérité de la femme et les sourcils quasiment blancs semblaient froncés au-dessus de ses yeux d’un gris profond.
Elle lui afficha un sourire bienveillant.
-J’ai bien cru que cela n’arriverait jamais. Peux-tu bouger ?
Avec la plus grande de ses volontés, l’inconnue se hissa sur ses coudes. La douleur de son bras gauche et de son corps tout entier qui s’éveillait à l’unisson, lui arrachant un grognement sinistre.
Légèrement désorientée par l’effort, elle papillonna de l’œil et posa son regard devant elle. Ce qu’elle avait pris pour un drap qui lui tenait plus ou moins chaud n’était en fait que les couches successives de cataplasmes et bandages rougis par du sang.
‘Du sang… Mon sang ?’
Peu à peu, elle découvrit que tout son corps en était recouvert, ainsi que sa jambe droite et son bras gauche. A tâtons, elle passa sa main droite, moins difficile à utiliser, sur son visage. Son côté gauche, son nez et la moitié de sa bouche étaient dans le même état, et malgré la pression de ses doigts fins, elle ne sentait plus rien. De plus en plus inquiète de la situation, elle parcourut fébrilement le reste de son visage et fini par sa chevelure.
Celle-ci, d’un blond doré, lui tombait jusqu’aux épaules, comme une cascade de pièces.
-On dirait que oui.
La vieille femme lui passa alors la main sur son front moite. La chaleur douce et diffuse qui s’y propagea ne calma pas l’inconnue, mais la vieille femme ne se retira pas. L’espace d’un instant, son regard gris devint légèrement plus brillant, puis s’éteignit d’un seul coup. Elle retira enfin sa main et se laissa choir sur le sol.
-Tu semble bien récupérer. C’est un miracle.
Sentant soudain un flot de questions lui brûler les lèvres, l’inconnue tenta de formuler une phrase.
Les seuls sons qu’elle put sortir de sa caverne buccale ressemblaient à des grognements ou des couinements grotesques. Elle abandonna très vite cette activité, désespérée. Elle sentit alors une accumulation de salive pâteuse, difficile à avaler dans sa bouche. Manquant de s’étouffer toute seule, l’inconnue eut le réflexe de déglutir, seulement, elle remarqua que quelque chose avait changé. La jeune femme passa alors sa langue sur ses dents.
Ses dents !
Elles n’avaient pas du tout la morphologie normale, d’un humain standard.
-Il n’y a pas que tes dents qui ont changé en toi, jeune femme…
Cette dernière sursauta.
Elle avait complètement oublié la vieille femme, trop effarée par ce qu’elle venait de découvrir.
-Dents ?! Hum… Reprit-elle pensivement, avec un air amusé. Hum… Non, non, je dirais plutôt des crocs !
Le dernier mot transperça l’esprit de la jeune femme alitée.
Cette dernière, toujours incapable d’articuler correctement, regarda avec insistance son interlocutrice, exigeant des explications. Toujours autant amusée, la vieille dame commença à examiner les bandages saturés de sang, en marmonnant :
-Ho, ho ! Oui, oui ! Bien sûr tu ne me croiras pas si je te dis que je t’ai trouvée, il y a de cela plus de six cycles lunaires environ, oui, oui… Avec quelques membres estropiés, baignant dans ton propre sang, et tous les mauvais détails que je me garderais de dire, entre la vie et la mort…. Quoi que plus vers la mort, mais bon, le principal c’est que tu te remettes, n’est-ce pas ?
Elle lui tandis un bol, où croupissait une mixture douteuse, la jeune femme jongla entre elle et celui-ci. Un sourcil s’arqua avec raideur, sur son visage hésitant.
-Allons, allons…. Ça va, certes, te faire mal un instant, mais c’est cent fois moins que toutes les douleurs réunies dont tu souffres depuis plus de six cycles lunaires… Allez !
Elle lui porta le rebord du récipient aux lèvres. La jeune femme but à contrecœur.
Au bout de la troisième longue gorgée, elle commença à avoir des convulsions et dut arrêter de boire. Toussotant encore, la blessée reprit peu à peu le rythme de sa respiration normal, puis avec un effort incertain elle susurra :
-Où suis-je… ?
Sa voix rauque et graveleuse fit découvrir ses crocs d’un blanc vorace. Les plus petites mesuraient un peu moins d’un pouce et les plus grosses –les canines- deux pouces environs.
-Et bien, tu es chez moi, Enera de Davons, je suis une sourceyère Animal. Cette chaumière se trouve dans la chaîne Dromas, au sud de la mer d’Argon et au nord du royaume d‘Harëkki. C’est un excellent endroit pour étudier les rapaces vivants dans les montagnes.
Un silence pesant prit place dans la chaumière, la blessée semblait être perdue dans ses pensées.
-Bien, et toi, qui es-tu ?
La question était brève, mais directe.
‘Qui suis-je ?’
Cette pensée retentit longuement dans la tête de la jeune femme. Elle ne se souvenait pas, ou plus ! Après avoir réorganisé l’intégralité de ses pensées, ce qui fut étonnamment rapide, elle se rendit compte qu’elle n’en avait pas autant que ça. Une bribe lui revient légèrement.
Un combat avec quelqu’un… Ou quelque chose… Du sang… Beaucoup de sang... Et puis le plus rien.
Elle tourna le regard interrogatif vers la vieille femme toujours à son chevet. Son regard brillant s’intensifia. Un étrange rictus souleva la lèvre ridée. Était-ce du mépris ou de la satisfaction ? Elle ne le savait pas. Malheureusement, l’inconnue ne put s’étaler dans ses pensées, car la vieille femme avait repris un air bienveillant.
-Bah ! Perte de mémoire… Ce n’est pas très grave. Heureusement que j’ai trouvé tes affaires, à côté de ton corps.
D’un mouvement très souple, pour le nombre de saisons qu’elle accumulait, Enera se redressa et alla de l’autre côté de la pièce. Elle farfouilla rapidement, entre les vieux tonneaux et les sacs de toile, et revint vers elle, une besace encombrant ses bras chétifs. Elle semblait pesante, étant donné la difficulté pour la vieille femme de revenir vers l’inconnue ; et était maculé de sang noircissant en grande partie le tissu.
Enfin arrivée jusqu’à elle, Enera laissa retomber son fardeau entre elles deux et s’accroupit.
-Fiou… Il a été épargné par le carnage… Quoi que… J’espère que le sang n’a pas trop taché tes effets personnels. Tiens, regarde voir s’il y a quelque chose qui pourrait dire qui tu es.
Elle poussa un peu plus le sac vers elle, avide d’en connaitre le contenu.
Malgré l’appréhension qui pointait le bout de son nez, l’inconnue porta sa main valide jusqu’à l’ouverture. Ses mouvements étaient lents, tant ses muscles étaient tétanisés. Elle parvint enfin jusqu’au tissu devenu rêche et s’enfonça dans l’ouverture. Du bout des doigts, elle sentit plusieurs parchemins roulés, quelques bourses en cuir et des pierres à silex.
Sans grande conviction, elle se saisit d’un parchemin et le présenta à Enera. À première vue, le sceau de ce dernier était brisé et le papier violemment froissé.
Enera le prit avec précaution et lu à haute voix :
-De part ce jour… Hum, c’est flouté par de l’eau… Et par les directives de l’imp… Là encore, je n’arrive pas à déchiffrer… Par Hiekka, tu es tombée dans une rivière aussi ? M’enfin… Moi, Zenka du régiment… Toujours illisible… M’acquitte de retrouver les parchemins menant aux légendaires pierres d’Hierto et de ce fait, trouver la porte qu’elles permettent d’ouvrir.
Le bras d’Enera retomba lourdement. Sa mine avait soudainement changé. Comme si ces informations étaient terrifiantes. Puis, elle se ressaisit rapidement et afficha un faible sourire à sa patiente.
-Tu te nommes Zenka ? Oh, c’est un bien beau prénom ! Dort Zenka, demain je t’enlèverais tes bandages.
Perdue, celle-ci tenta de lui reprendre le parchemin des mains.
-Mais, et les pierres, la porte… Qu’est-ce que ça signifie ? Comment…
Esquivant ses mouvements grotesques, la vieille femme se redressa et reprit le sac.
-Taratata. Dors un peu. Je, je vais voir ce que tout cela signifie... On en reparle dès que tu seras en meilleur forme, hum ?
Peu convaincue, Zenka opina vaguement. Puis s’allongea de tout son long. Très vite, elle fut envahie par une fatigue générale. Son œil se ferma doucement et le sommeil vint la cueillir en quelques battements de cœur.
Quand Zenka se réveilla, le soleil qui dardait par la fenêtre ouverte lui indiqua que la journée était déjà bien avancée.
Se redressant, en douceur, elle prit le temps de regarder de nouveau la pièce où elle se trouvait. Rien ne semblait avoir bougé, cependant elle ne trouva personne.
Inquiète, elle voulut se lever, mais tressaillit presque instantanément.
La douleur intense de sa jambe droite l’avait coupé dans son élan. Elle porta sa main gauche à sa cuisse meurtrie et tenta de masser le muscle enraidit. Mais quelque chose n’allait pas. Les sensations n’étaient pas du tout habituelles.
L’appréhension noua brusquement sa gorge. Malgré tout, elle descendit son regard sur elle. Tous ses bandages avaient été retirés. Après un court moment d’hésitation, elle focalisa son attention sur son bras gauche.
Une vision d’horreur envahi d’un coup l’âme de Zenka.
A la place d’un bras, fait de chair et d’une peau douce, suivi d’une main légèrement moite, se terminant sur cinq doigts fins et surmontés d’ongles; se tenait un bras reptilien fait d’écailles d’un noir profond et sans reflet, suivi d’une patte squameuse puissante, avec une paume recouverte de coussinets gris mat, aussi épaisse que la peau d’un pachyderme, ce terminant par cinq griffes robuste et de serres dangereusement crochues.
Prise d’une panique, Zenka souleva le nouveau drap qui l’enveloppait et découvrit les mêmes dégâts sur sa jambe droite, ainsi que son estomac et toute la partie de son sein gauche.
Craignant le pire, elle se précipita en rampant vers un vieux miroir crasseux, exposé près de la porte d’entrée.
Elle découvrit alors, son visage scindé en deux. Tandis que son côté droit semblait normal, son côté gauche présentait de lisses écailles noires, s’étendant de son cou, parcourant la joue et faisant le tour de son crâne, entourant son œil rouge, surmonté d’un sourcil épineux. Son oreille aussi avait changé, elle était à présent pointue et mesurait près de quatre pouces. La moitié de ses lèvres étaient devenus des babines noires. Quant à sa chevelure d’or, les écailles de son crâne les laissaient passer via le peu d’espace qu’il restait.
N’en revenant toujours pas, Zenka risqua un regard derrière elle : son dos était complètement écailleux, avec en prime des toutes petites épines dorsales ; elle en dénombra une bonne trentaine, d’un à deux pouces rangés en ligne droite sur sa colonne vertébrale.
Et le pire, car ce n’était pas tout, fut la découverte d’un nouvel appendice : une queue. Dans la continuité de sa colonne vertébrale, et de ses épines dorsales, une cinquantaine du plus, longue de plus de deux pieds et demi, et se terminant en pointe.
Abasourdit par ce cauchemar, elle prit le miroir entre ses mains et tenta désespérément de trouver la supercherie.
-Hum… ? Ya pire, non ?
Cette réflexion fit sursauter le monstre qui fit volte-face.
Enera passa la tête par la fenêtre.
-Que m’avez-vous fait ?! Demanda-t-elle, maintenant apte à parler. Répondez-moi !
La vieille sourceyère prit le temps de passer la porte et de poser les victuailles qui encombrait ses petits bras, puis s’assit près du lit.
-Je t’ai sauvé.
-Que…. Quoi !? Vous appelez ça, sauvé ?!
L’incrédulité faisait vibrer sa voix, encore fragile.
La vieille femme sembla hésiter.
-Hum…. En effet, il est vrai que quand je t’ai trouvé tu étais hum… Un peu morte… Hum… Mais bon, maintenant tu es vivante… Ce n’est pas le plus important ?
Les yeux arrondis par l’absurdité de la situation, la jeune femme eut un rictus dédaigneux.
-Avec ses écailles, ces trucs dans ma bouche et tout… Et tout le reste ? Je préfèrerais être morte.
Enera ne put s’empêcher d’émettre un petit rire.
-Hi, hi, hi ! Et encore, tu n’as rien vu. Si tout se passe bien, dans quelques lunes, une belle corne prendra place au-dessus de ton oreille gauche…
Zenka la regardait, sans voix.
-… Malheureusement, je pense que ton comportement changera. Tu aimeras plus la viande que les légumes, tu aimeras aussi chasser des proies, comme des hum…, ajouta la vieille femme dans un murmure quasiment inaudible. Mais, assez parlé de ça !
Elle bondit sur ses petites jambes et parti farfouiller dans un recoin de la chaumière.
Toujours figée par les événements, Zenka la regardait faire avec son œil rouge. Les mouvements paraissaient plus fluides, plus lents, ce qui les rendait plus faciles à anticiper, à contrer…
Elle détourna vivement les yeux, brusquement déstabilisée par ses pensées obscures et commença à se lever.
Cette fois elle y arriva.
S’appuyant sur les briques mal taillés, toute tremblotante, la jeune femme réussi tant bien que mal à se mettre droite. Elle était totalement nue. Sa queue s’enroula doucement sur sa jambe humaine. Elle resta ainsi, sachant pertinemment qu’elle ne pouvait pas encore marcher convenablement.
Un temps infini s’écoula avant qu’Enera ne revienne enfin vers elle, toujours debout, agrippée au mur.
-Bah, ça va mieux !
Elle posa plusieurs vieux parchemins à côté du lit.
D’un rapide coup d’œil, Zenka reconnut la missive d’hier, une carte représentant un continent et un autre parchemin, soigneusement enroulé dans du tissu, à peine souillé de sang.
-Ça vient de ma besace ?
La vieille femme hocha la tête, en s’asseyant à même le sol.
-J’ai étudié ce que nous avons découvert hier. Je me suis permis de fouiller dans le reste de tes affaires. Et voilà ce que j’ai trouvé.
Elle l’invita à faire de même. Hésitant quelques battements de cils, Zenka s’exécuta enfin, peu rassurée.
-Apparemment, tu prenais ta mission à cœur, poursuivit Enera, en lui montrant la carte griffonnée de plusieurs annotations et de ratures. Tu es passé un peu partout, dans à peu près toutes les provinces.
Zenka fronça le nez, soudain désabusée.
-Autant de recherche pour rien ?
-Non, non, non !
Enera brandit alors le parchemin enroulé dans le tissu.
-Tu es parvenu à trouver l’un des parchemins sacrés ! C’est grandiose ! Et c’est peut-être pour ça que tu t’es fait tuer… Le prix pour ce genre de quête…
Avec souplesse, la jeune femme lui prit des mains et le secoua doucement.
-Et alors ? Qu’est-ce que vous voulez que je fasse ? Je suis un monstre maintenant… Reprendre là où l’on m’a interrompu ne…
-Pas un monstre ! Une hybride, un croisement avec un dragon et une humaine, voilà ce que tu es vraiment. Corrigea la vieille femme, avec un doigt inquisiteur. Et soit fière de l’être. Ça n’a pas été facile de faire ça, même pour une très bonne sourceyère Animal comme moi. Faire cohabiter deux animaux si différents en un seul être… Fiou…
‘Fière, fière… Mais de quoi ?’
-Je sais que ça va être difficile, au début, mais il faut vraiment que tu reprennes là où tu en étais. Ne serait-ce que pour tenter de retrouver la mémoire.
Elle lui reprit tranquillement l’objet et le défit de ses liens. Par miracle, le parchemin n’avait aucune tâche de sang. Puis, le déroula délicatement, de façon qu’elles deux puissent voir le contenu.
Un long texte y était inscrit, avec des caractères étranges.
Littéralement plongé dans une grande réflexion, Zenka sentit tout de même le regard attentif d’Enera.
-Je, je ne connais pas cette langue. Mais… où est la fin ?
Heureuse de son intérêt pour ce vieux texte, la vieille sourceyère tapota des mains, excitée.
-C’est du Drussic, un vieux langage perdu depuis des siècles. Les bons sourceyers connaissent encore quelques mots, et encore… Ce bout de texte n’est même pas le début du texte intégral. Les trois réunis racontent comment ouvrir la voie vers un monde extraordinaire : le monde d’Hierto.
Malgré son vieux dos, elle se redressa, un sourire émerveillé flottant sur son visage. Elle leva son doigt et poursuivit :
-Récupère les deux derniers morceaux. J’ai cru voir une ou deux villes entourées, sur ta carte. Ensuite, comme je t’ai sauvé…
Zenka pinça les lèvres.
Alors c’était ça ? La vieille femme voulait sa part dans l’histoire. Ce n’était pas si désintéressé que cela.
-J’aimerais que tu viennes me retrouver ici. Ce monde chimérique, Hierto, recèle toutes les réponses que je cherche depuis mes premiers entrainements de sourceyers.
Zenka arqua un sourcil, perplexe.
-Et c’est tout ?
Les yeux pétillants de la vieille femme la fixa un instant.
-Bien sûr ! J’avoue, je ne t’ai pas sauvé pour rien… Mes vieux os ne me permettent plus de faire des voyages aussi longs et mouvementés… Et puis, ta combinaison, mi-dragon mi-humain te confère un avantage non négligeable. Tu seras, et j’en suis sûre, en mesure de mener à bien cette quête, que ce soit pour moi ou pour toi. Nous sommes gagnantes toute les deux.
Déroutée, la jeune femme la regarda remettre toutes ses affaires dans son sac.
-Bien sûr, tu te feras des ennemis. Le monde légendaire d’Hierto est plus que convoité. Certains textes content qu’il renferme mille et une merveilles… Tu pourras aussi trouver des alliés, je l’espère… Hum…
Zenka ne l’écoutait presque plus. Perdue dans ses pensées, elle observait sans vraiment y faire attention les contours des montagnes, au dehors.
Et si la vieille n’avait pas tort ? Si reprendre là où elle s’était brutalement arrêtée lui permettrait de retrouver la mémoire ?
Ses yeux coulèrent discrètement sur la petite silhouette, qui se dandinait maintenant de l’autre côté de la pièce.
‘Et la contrepartie n’est pas aussi contraignante… Au pire, je ne reviens même pas…’
-Hum… Trouve les deux autres parchemins, reviens me voir pour qu’on chemine ensemble, des gens avec des tendances suicidaires pour t’accompagner... Résuma Enera pour elle-même.
Elle grinça des dents, le regard balayant toute la pièce.
Puis, d’un seul coup, elle fit volte-face vers Zenka et lança :
-Bon, maintenant, voyons comment tu t’en sors avec tout cet attirail.
J'ai aussi relevé quelques erreurs d'inattention, je te les liste :)
à l’équilibre plus que douteuses (douteux)
-Tu semble(s) bien récupérer.
Elle lui tandis (tendit) un bol,
le rythme de sa respiration normal (normale)
Dort (Dors) Zenka, demain je t’enlèverais (enlèverai) tes bandages.
On en reparle dès que tu seras en meilleur(e) forme
La douleur intense de sa jambe droite l’avait coupé(e) dans son élan
ce (se) terminant par cinq griffes robuste(s)
Abasourdit(e) par ce cauchemar
et de poser les victuailles qui encombrait(encombraient) ses petits bras
S’appuyant sur les briques mal taillé(e)s
Et soit (sois) fière de l’être
Les yeux pétillants de la vieille femme la fixa (fixèrent) un instant.