Louisa se réveilla le lendemain matin avec toujours cette impression que son cœur était déchiré en milles morceaux, mais avec un sentiment que ses larmes avaient arrêté leur course sur son visage, du moins pour un moment.
La jeune fille se leva. Maxime était déjà sorti. Alors, comme son père le lui avait apprit, Louisa maintint les apparences.
Ne paraît jamais négligée, ma fille, lui avait-il toujours dit. Les gens se fient à l’apparence des gens. Alors, ne la néglige pas.
Louisa se glissa dans la salle de bain, se lava entièrement, en imaginant qu’elle lavait sa tristesse pour une journée.
Une fois sortie de la douche, et attacha rapidement ses cheveux. Elle enfila le seul jean et la seule chemise qu’elle avait glissé dans son sac avant de partir pour l’hôpital où reposait son père, après l’émeute où il avait trouvé la mort.
Se plaçant face au miroir, la jeune fille déboucha le tube d’eye – liner qu’elle gardait en permanence dans sa troussa de toilette, et comme tout les matins, elle surmonta ses yeux d’une grande virgule noire. De cette même virgule qui lui donnait un air théâtral, celui d’une actrice qui allait monter sur scène. La voix de son père résonnai encore dans la tête de Louisa.
La vie est une théâtre, Louisa. Et tu dois toujours en jouer le premier rôle.
Alors Louisa sortit de la pièce, prête à reprendre son rôle.
Elle traversa le couloir, arriva sur le palier, et, dans le silence du foyer qui n’était troublé que par le bruit des ses pieds nus qui claquaient par terre, Louisa descendit l’escalier, et pénétra dans la salle de repos.
Maxime s’avança vers elle.
« Louisa, un homme te cherchait tout à l’heure. Il veut te parler de ton père, je crois. Il t’attend dans le bureau de la directrice. »
Aux mots « ton père », Louisa sut qu’elle ne pourrait affronter cette épreuve seule. Comprenant l’étincelle de panique qui brillait encore dans les yeux de Louisa, Maxime reprit la parole.
« Je t’accompagne - Il haussa la voix- Joffrey, Blanche, vous venez aussi ? »
Joffrey et Blanche, jusque là affalés sur un canapé, absorbés par la contemplation de l’écran allumé du téléphone de Joffrey, se levèrent.
« Allons y, dit Blanche en glissant sa main dans celle de Louisa. »
« le dernier arrivé range ma chambre ! Cria Joffrey à ses amis en s’élançant hors de la salle, et en dévalant les escalier. »
Sans même attendre la fin de sa phrase, Maxime se jeta à sa poursuite, suivit de Blanche, qui entraîna Louisa par la main.
Les quatre enfants dévalèrent les escaliers, et moins de trente secondes après leur départ, ils s’arrêtèrent en quelques glissades devant le bureau le la directrice.
« Tu n’es pas obligée d’y aller si tu ne te sens pas capable de parler de ton père dès maintenant… Dit Maxime en hésitant sur ces mots… Tu sais, on fait tous comme si on était forts et comme si on surmontait la perte de nos familles facilement, mais c’est faux, tout ça… Mes parents me manquent beaucoup plus que ce que je ne veux l’admettre, et beaucoup plus que je ne le montre… Alors ne pense pas que tu n’as pas le droit d’être dévastée. Et de le montrer.
- Maxime a raison. Renchérit Blanche. Si tu ne veux pas parler de ton père à cet homme, tu peux remonter dans ta chambre, on te couvrira.
- J’ai promis à mon père de rester forte, quoi qu’il arrive. Dit Louisa, sa voix à peine plus fort qu’un courant d’air. C’était son principe numéro un : toujours maintenir les apparences, toujours faire passer le devoir avant ses propres sentiments. Et ça semble complètement idiot maintenant, mais je tiens toujours mes promesses."
Le silence se fit. Les quatre enfants baissaient le regard troublés par leurs confidences.
Une souris sortit du col de Joffey, grimpa le long de son cou, passa dans ses cheveux, si bien qu’on ne la vit plus pendant un court instant, et redescendit de long du bras gauche de son maître.
" Tu sais, intervint enfin le garçon qui était resté muet depuis le début de la discussion, plus personne ne trouve les autres idiots, ici. On a tous nos manies. Je me passe la main dans les cheveux toutes les deux minutes, et je me balade avec des souris dans les poches. Blanche fait des fiches sur tout le monde, Maxime fait des manifestations dans l’internat, il y a une fille qui ne parle jamais, même pour demander le sel à table. Personne n’a jamais entendu le son de sa voix. Il y en a un autre qui dessine tout le monde, et un qui écrit le moindre des faits et gestes des autres dans un petit carnet. Alors, obéir à son père même s'il n’est plus là, on ne peut pas dire que ce soit la chose la plus étrange à faire ici. »
Sur ces mots, Louisa força ses lèvres à s’étirer en un sourire nerveux, tourna le dos à ses amis poussa la porte du bureau, et entra dans la pièce.Un homme s'y trouvait déjà. Il était assi sur le canapé, et se tenait aussi droit que s'il s’était tenu sur un tabouret en métal.
La peau pâle comme celle d’un mort, les cheveux gris comme de la cendre, et les yeux bleus glacier, vêtu d’un costume aussi grisâtre que sa peau et que tout son être, il serrait sur ses genoux une petite mallette, ne bougeait pas d’un poil et semblait affreusement morbide.
L’homme tourna son visage de faucon vers Louisa, qui baissa les yeux, et fixa ses pieds nus aux ongles recouverts de vernis bleu écaillé. L’homme à la mallette adressa à la directrice un petit geste, l’invitant à sortir de la pièce.
Toujours sans un mot, d’un geste, il invita notre jeune héroïne à s’asseoir sur la chaise qui était habituellement occupée par la directrice.
Obéissant à contre cœur, Louisa s’avança et s’assit.
« Louisa Dorsel, n’est-ce-pas ? Tu es la fille de Pierre. »
Sursautant à l’entente du nom de son père, Louisa hocha timidement la tête.
« Je suis, enfin, j’étais son notaire. J’ai donc, la responsabilité de t’expliquer ses dernières volontés et son testament. Comme tu dois le savoir, tu es sa seule héritière, depuis la mort de ta mère Frida. À tes dix-huit ans, tu héritera donc de sa part des usines qu’il possédait en copropriété avec son associé, et de toute sa fortune. Pour l’instant, il a laissé une lettre, à ton attention.
- C’est tout ? Demanda Louisa.
- C’est tout. Nous nous reverrons bientôt afin de mettre au clair les modalités de succession. Voilà ta lettre. »
Se taisant, l’homme ouvrit sa mallette, et en sortit une enveloppe de kraft qu’il tendit à Louisa. La jeune fille s’en saisit immédiatement, l’arrachant presque des mains de l’homme comme si elle avait peur qu’on ne la lui retire. L'enveloppe était épaisse et lourde, comme si un poids reposait dedans. Son père avait touché cette enveloppe. Et en lisant cette lettre, elle retrouverait sa voix. Louisa voulait se précipiter dehors, pour lire ces mots écrits par son père, mais elle s’obligea à se contrôler et à sortir lentement de la pièce, en saluant le notaire.
Poussant la porte un nouvelle fois, Louisa sortit de la pièce, son enveloppe serrée contre sa poitrine. Elle faillit se heurter à Maxime, Joffrey et Blanche, qui étaient tous les trois agglutinés contre la porte, sûrement occupés à écouter la conversation de Louisa avec le notaire. Blanche laissa échapper un rire gêné, Maxime fixa le sol.
Joffrey, le seul des trois enfants à ne pas sembler embarrassé d’un iota à l’idée que Louisa les avait surpris en train d’écouter sa conversation prit la parole, et brisa le silence gêné qui régnait entre les quatre jeunes gens.
« Si tu veux un endroit tranquille pour lire ta lettre, je peux te montrer où aller. »
Murmurant un faible merci , Louisa suivit le garçon qui s’éloignait déjà.
Le rattrapant en courant, la jeune fille le suivit dans un dédale de couloirs, puis le suivit dans un étroit escalier.
Les deux enfants débouchèrent dans une pièce immense, sous les toits, certes remplie de poussière, mais où personne n’irait jamais trouver Louisa.
« Voilà. Redescends quand tu veux, on te couvres. Dit Joffrey. »
Trépignant d’impatience, Louisa regarda son camarade redescendre l’escalier. Dès qu’elle ne put plus apercevoir les cheveux bleus pétants de Joffrey, la jeune fille se laissa tomber au sol, à genoux dans la poussière.
Suspense, qu'y a-t-il dans cette lettre ? Le personnage de Louisa est plutôt sympathique mais son père, pour moi, l'est un peu moins, un vrai dictateur de l'apparence ! Cette ambigüité est intéressante, on se demande comme à son âge elle se trouve aussi admirative d'un homme si à cheval sur les règles, est-ce qu'elle était comme ça avant ou est-ce que c'est juste à cause du deuil ?
j'ai rassemblé des coquillettes :
- La voix de son père résonnai encore dans la tête de Louisa. => résonnait
- Maxime, suivit de Blanche => suivi
- devant le bureau le la directrice. => de
- obéir à son père même si il n’est plus là, on ne peu pas dire que ce soit la chose la plus étrange à faire ici. => S'il, ne peut
- Il était assit sur le canapé, et se tenait aussi droit que si il s’était tenu sur un tabouret en métal. => assis, que s'il
- il invita notre jeune héroïne à s’asseoir sur la chaise qui était occupé habituellement par la directrice. => occupée
- Avançant à contre cœur, Louisa s’avança et s’assit. => deux fois avancer
- tu est sa seule héritière, depuis la mort de ta mère Frida. À tes dix-huit ans, tu héritera => tu es, tu hériteras
- à ton attention => à ton intention?
- brisa le silence gêne qui régnait entre les quatre jeunes gens. => gêné ?
- redescend => redescends
- cheveux bleus pétants => bleu pétant (la règle un peu bête des adjectifs de couleur en deux mots ;) )
A très vite !
Claire