Le lendemain… j’ai dormis comme un loir sur une chaise longue du restaurant, j’entre-ouvre les yeux, éblouit par l’éclatante lueur du jour. Je place mes mains devant mes yeux et les détournes sur ma gauche, observant Léa lisant un bouquin tranquillement assise sur une chaise à côté de moi, puis un ronflement me parvient de l’autre côté. J’y jette un œil et voit Tania allongée grossièrement sur le matelas qu’on lui a fournit, la couverture retournée dans tous les sens la recouvrant à moitié. Elle reste humaine après tout. Je me redresse et demande à Léa si elle a prévu quoique ce soit à faire pour aujourd’hui, et elle me révèle qu’effectivement, elle pense à quelque chose en particulier, mais qu’elle le garde secret pour l’instant. Elle fait ce qu’elle veut, après tout, il n’y a plus grand-chose ici. D’ailleurs avec tout ça, j’ai oublié de demander à Léa à propos de ce qu’elle a dit sur le toit l’autre jour, avant que je ne débarque. Elle semblait savoir quelque chose, et je ne sais toujours pas quoi en penser. Aurais-je mal interprété sa question ? Ou l’a-t-elle mal posée ? Pour le ‘‘ça’’ peut-être avait-elle devinée pour le virus et qu’elle y faisait référence ? Je ne doute pas d’elle, je ne le veux surtout pas, mais ça m’intrigue… oh puis tant pis, ça ne presse pas pour l’instant. Léa lâche son livre et s’exclame :
« -Il doit être pas loin de onze heures, on va pas tarder à y aller.
-Y aller ?
-Oui, je nous ai prévu une petite sortie sympa.
-Te connaissant, on va aller là-bas.
-Exact. Laisse-moi le temps de réveiller la souche et on y va.
-Si tu veux. »
Je me lève de ce qui m’a servit de lit, et me dirige vers l’intérieur du restaurant. Puis j’entends Léa crier :
« -Qu’est-ce tu touches Planche à Pain !? »
J’ai à peine le temps de me retourner que Tania est projetée violemment vers le restaurant. Elle brise la vitre qui sépare l’intérieur de l’extérieur et s’écrase sur une des tables en bois. J’en crois à peine mes yeux, mais le plus surprenant est que Tania ne s’est même pas réveillée après tout ça. La vitre et la table en morceaux, je regarde Léa qui se couvre la poitrine avec ses bras, l’air gênée et fâchée. Reprenant mes esprits après cette scène surréaliste je crie à Léa :
« -Qu’est-ce qui t’as pris de faire ça !? T’es malade !
-C’est elle ! Elle me moleste la poitrine et en plus, elle allait y porter la bouche, tu veux que je réagisse comment ?!
-Comme tu veux, mais on ne balance pas les gens contre des vitres et des tables ! C’est dangereux ! »
C’est bien à ce moment que je me rends compte que cette phrase, me paraissant anodine, ne l’est pas du tout en fait. Nos habitudes sont très différentes des gens à proprement dit ‘‘normaux’’, au final, ça ne me dérange pas plus que ça ce genre de phrase sortie de l’ordinaire. N’empêche, je me demande quelle genre de rêve Tania peut faire, peut-être qu’elle mangeait quelque chose. Je m’approche d’elle, et la positionne un peu mieux qu’ainsi tordue au milieu des débris de bois et de verres. Elle ne semble pas être blessée en particulier, elle a eu de la chance. Son corps est robuste sûrement grâce aux expériences subit chez les Survivants.
« - Ma… Ma… … Maman… Papa. »
Maman ? C’est ce qu’elle vient de dire, j’ai pas rêvé ? Maintenant que j’y pense, c’est vrai qu’avec ce qu’elle a vécu là-bas, que sont devenus ses parents ? Si elle en rêve aujourd’hui, c’est qu’ils doivent être encore en vie, quelque part dans l’autre partie du monde. On ne la connaît pas assez, on ne sait rien d’elle à part la façon dont elle est arrivée ici, sa nature, ses camarades et les petits événements qui se sont déroulés là-bas. Je crois que j’ai oubliée quelque chose d’important pour pouvoir coexister correctement : le partage et la confiance.
Elle se réveille, se frotte les yeux en se relevant, puis vient à se demander de quelle manière elle a atterrit là. Avant que Léa ne clame quelque chose je lui dis que ce n’est rien et qu’elle s’était vraiment endormit à cette endroit hier soir. Elle semble être certaine d’être resté dehors, mais après tout rien n’est certain après le sommeil, alors elle n’en demande pas plus. C’est Léa, qui ne vient absolument pas rajouter son grain de sel, qui nous annonce notre départ imminent pour sa surprise. Enfin, surprise, pour Tania, moi je sais déjà où on va :
« -Avant de partir, on va passer en boutique. Dit-elle.
-Pour quoi faire ? Demande Tania.
-Je suppose que tu n’as pas de maillot de bain ?!
-Si. »
Elle l’affirme en ouvrant sa combinaison noire qu’elle porte depuis hier, la fermeture éclair est dans le dos. Dessous, elle est vêtue d’un maillot de bain une pièce noire, au niveau de l’épaule gauche, il y a un soleil bleu dont les rayons descendent jusqu'au ventre. Elle a tout prévue, elle nous explique le ‘‘pourquoi elle porte ce maillot bain ?’’ :
« -La combinaison n’est pas très ‘‘étanche’’ je dirais, du coup on porte souvent des maillots de bain en dessous.
-En parlant de combinaison, tu ne voudrais pas changer ?! Lui demande Léa.
-Pourquoi ? Moi je l’aime bien.
-Je trouve ça d’un moche.
-Si ça te plaît pas tant pis, moi je garde ma combi.
-Si tu veux. Soupir Léa. Aller, je vous attends dans la voiture. »
30 minutes, nous sommes arrivés… au parc d’attraction. Il y en a un oui, à environ une demi-heure de notre restaurant à l'extérieur de Tokyo. Enfin, une demi-heure sans circulation, en temps réel si la ville était animée, cela aurait pris plus d’une heure. Avec le remue ménage de ce jour fatidique, la devanture est complètement démolit, on ne peut plus lire le nom du parc. La raison pour laquelle Léa a demandé si Tania avait un maillot de bain, c’est parce que ce parc a aussi une partie aquatique, avec plusieurs bassins, des jeux d’eaux et des toboggans parfois loufoques. Parce que Le Japon !
Pour tout avouer, je ne suis pas fana des sensations fortes contrairement à Léa, et il semblerait que Tania soit comme moi… en pire. La plupart des manèges à grand frisson lui ont donné l’envie de vomir. Heureusement qu’il y a beaucoup de toilettes. Ah oui, ça m’a surpris à moi aussi quand j’ai vu qu’il avait encore de l’électricité ici. C’est grâce aux générateurs de secours, il y en a plusieurs et permettent l’utilisation du parc pendant un bon moment. Pour ce qui est de la partie aquatique, les systèmes de filtres automatiques fonctionnent encore, et au moins une fois par semaine, Léa vient elle-même faire un peu de nettoyage. Au bout d’une bonne heure, on décide finalement d’aller dans la partie aquatique du parc. J’enfile un maillot de bain vert foncé et Léa un deux pièces striés horizontalement en blanc et bleu clair.
Il y a en tout trois bassins de réception pour les toboggans, un grand bassin, un bassin ludique où se trouvent plusieurs jeux d’eaux, et un petit bassin. Les trois toboggans se distinguent par leur parcours, le premier se nomme Rakka signifiant, comme me l’a dit Léa : Chute. Il est de couleur beige, et c’est simplement un toboggan haut d’une quinzaine de mètre, et dessinant une descente très raide, une vitesse de chute énorme, avec un atterrissage forcé qui vous éclate au visage et qui vous plonge au plus profond des quatre mètres du bassin.
Le second s’appelle Tatsumaki, signifiant toujours par Léa : Tornade. De couleur verte, et d’une taille similaire au premier, le principe de descente rapide est le même, sauf que cette fois-ci, elle se déroule en boucle, tout le temps, jusqu’à l’arrivée. Je peux affirmer qu’à la fin, tu as bel et bien la tête qui tourne.
Enfin le dernier qui est pour moi le plus dangereux, il s’appelle Tobiita, voulant dire : Tremplin, et il porte bien son nom. De couleur rouge, il commence normalement, mais en arrivant au bout, eh bien, on n’est pas plongé directement dans l’eau non… comme au saut à ski, le toboggan devient un tremplin qui nous envoie dans le bassin de réception plus loin. Heureusement que ce dernier est très grand et très large, au cas où une personne irait plus ou moins loin que prévue. Quand bien même cette sûreté, je trouve cette attraction pas très rassurante. Et ce n’est pas moi qui vais expliquer pourquoi ça existe, c’est certain.
Tania emprunte le rouge, cela me surprends vu les frissons qu’elle s’est déjà payée aux dernières attractions, enfin c’est mieux que le Rakka, niveau pression c’est lui qui en met le plus. Je ne compte pas faire un toboggan en particulier, je n’aime pas vraiment ça. Je compte aller faire quelques longueurs dans le grand bassin. C’est ce que je veux, mais ma main est forcée par celle de Léa qui me traîne jusqu’au Tobiita, me portant sur son épaule, je lui explique bien que je ne souhaite aucunement monter là-haut, mais trop tard. Une fois en haut, elle me jette dans le courant, j’arrive au moment de vol total, puis de chute avec mon dos plaquant bien la surface de l’eau. En remontant à la surface, mon dos me fait super mal, ça pique, je dois être aussi rouge que si j’avais attrapé un coup de soleil. Tania rit aux éclats en voyant cette scène, je lui renvoie un sourire, puis je sors de l’eau et m’éloigne de l’élément dangereux : Léa. Elle est toujours surexcitée quand on vient ici, et du coup j’en prends plein la tronche. Désolé Tania, mais pour cette fois, remplace-moi… bonne chance et survie.
Je pense que j’exagère vraiment pour Léa, mais vu le nombre de fois qu’on y a été et que j’ai pu prendre cher, je pense que j’ai le droit à une petite pause aujourd’hui. Je me suis rhabillé et rendu à l’entrée du parc. Ce qui est sûr c’est que Tania apporte un nouveau souffle à notre vie. Même si elle se chamaille avec Léa, elles sont devenues amies et moi je suis entre ces deux furies, ça ne va pas être de la tarte. J’en soupir d’avance. Cette journée a remplit mon temps de souvenir que je ne risque pas d’oublier et j’espère que ça continuera comme ça encore longtemps. J’y pense, l’amie de Tania est sur le continent, si elle est comme elle nous l’a décrit, peut-être pourra-t-elle nous rejoindre ?! La famille va s’agrandir encore un peu on dirait.
Hum ?! Qu’est-ce que c’est ? On dirait que quelque chose vient ici, à toute vitesse… ça vient du ciel. Je lève mon regard et aperçois ce que je ne pensais plus voir aujourd’hui, un hélicoptère. Il survole ma position. Quelqu’un ouvre la grande porte sur le côté et saute. D’une telle hauteur !? Il va se tuer… à moins que… … sa chute déforme le sol, il se fissure et la terre sous le bitume s’élève créant un nuage opaque. Je ne vois rien, je ne fais qu’apercevoir une silhouette. Progressivement, celle-ci me paraît plus claire, j’aperçois de longs cheveux bleus nuits attachés en une longue queue de cheval, un masque à gaz bleu foncé. La personne, à sa carrure est un homme, il porte un manteau noir fermé seulement au col, m’apercevant d’une chemise grise puis plus bas d’un pantalon noir avec une ceinture grise et des chaussures de même couleur. Il a quelque chose dans la main qu’il ferme bruyamment, il s’agit d’un livre, il le plaque contre sa poitrine et m’adresse ces paroles :
« - Jim Alex je présume ?! Tu ne nous intéresses pas aujourd’hui… ce que je viens chercher… c’est toi, Tania ! »
Il pointe du doigt derrière moi où se trouvent Léa et Tania. Je les vois, elles ont dû rappliquer quand elles ont vu l’hélicoptère arriver.
« -Tania, tu le connais ? Demande Léa alors que je reste abasourdit.
-Oui. C’est Cyril Edgward… lui aussi c’est un zombie artificiel ! »
Et il est venu ici… pour récupérer Tania… je réalise à quel point je suis naïf et trop optimiste. Tania doit rester avec nous, parce qu’elle le veut, parce qu’on en a besoin et parce qu’on s’est finalement attaché à elle en à peine deux jours. Elle rayonne de sa gentillesse et sa sincérité, elle a tant de qualité que l’on a perdu au fil du temps. Je n’ai pas envie qu’elle parte. Ce Cyril Edgward est ici pour… :
« -Tels sont les ordres Tania. Que ce soit de gré ou de force, je dois te ramener là-bas. Tu ne voudrais qu’il y ait des sacrifices inutiles, n’est-ce pas ?!
-Désolé mec. Dis-je. Mais c’est mon territoire ici. J’ai décidé que Tania resterait… elle restera !
-Hum… il semblerait que ta capture… soit plus proche que prévue. »
''Le temps qui te blesse, n'est pas le tiens''