Je suis postée devant la porte de Nikolaï. J’essaye de trouver le courage pour frapper. Plusieurs semaines se sont écoulées depuis le réveil de Hans et, depuis notre discussion, il m’évite. J’ai dû grandement baisser dans son estime et cela me peine plus que je ne le voudrais. C’est Luna qui nous a permis de sympathiser et j’ai la désagréable impression que cette amitié ne tenait que grâce à ma sœur. J’espère me tromper. Nikolaï est un ami très cher que je ne désirerais en aucun cas perdre. J’inspire et expire une nouvelle fois longuement. Je dois lui parler avant que Hans sorte de l’hôpital. Je lève le poing et frappe à sa porte. Les secondes s’écoulent, puis une voix m’invite à entrer. Je pénètre dans la pièce. Il est à sa table en train d’écrire. Il relève les yeux en me remarquant, mais ne dit rien. Je referme derrière moi et m’avance vers lui.
- Je pense que nous devrions parler tous les deux, déclaré-je en me campant de l’autre côté de son bureau.
Il retire ses lunettes et les dépose sur le dossier sur lequel il était occupé.
- Je crois aussi.
Il désigne une chaise d’un menton.
- Assieds-toi, m’invite-t-il.
Je m’exécute. Je remarque qu’il aborde toujours cet air triste depuis que les combats sont finis. Lui non plus n’a pas encore réussi à faire son deuil.
- C’est à propos de notre dernière discussion, dis-je.
- Je m’en doutais.
- Nikolaï, commencé-je prudemment.
Il ne me laisse pas poursuivre. Son visage se tourne vers la porte et il déclare d’une voix gorgée d’émotion :
- Je sais que c’est impossible et pourtant j’ai tout le temps l’impression qu’elle pourrait surgir à tout moment ici.
Je comprends qu’il fait allusion à Luna et mon cœur se serre douloureusement. Une larme s’échappe des yeux de mon ami, mais il ne fait rien pour la cacher.
- Je… Je n’arrive pas à l’accepter, hoquette-t-il.
Il passe sa main devant ses yeux.
- Je ne peux pas, Elena.
Je ne peux m’empêcher d’être touchée par le fait qu’il ne dissimule pas sa faiblesse avec moi. Je sais à quel point c’est difficile de se dévoiler autant. Je me lève et pose une main sur la sienne. Je croise son regard humide où je peux y voir toute la détresse qui le submerge. Une boule se forme au creux de ma gorge : et dire qu’il a failli perdre son frère dans la même bataille. Je doute qu’il aurait survécu à cette nouvelle disparition. Hans m’a dit un jour que son ainé était assez impulsif et en observant Nikolaï depuis notre défaite, je ne peux que lui donner raison.
- Tu n’as pas à t’en vouloir, Nikolaï. Luna était comme ça. Un véritable ouragan et dès qu’il s’en va, il laisse un vide profond. Moi non plus, je ne peux pas l’accepter. Toutefois, vivre éternellement dans le passé…
J’essaye de trouver les mots justes, mais mes phrases semblent me filer entre les doigts. Je poursuis tout de même :
- Vivre dans le passé n’est pas la bonne solution. Luna n’aurait jamais voulu que tu souffres à ce point.
Il émet un rire bref, sans joie.
- Je ne suis qu’un égoïste. Tu dois endurer autant voire plus que moi et c’est toi qui me consoles. Depuis que ta sœur n’est plus là, j’ai vraiment été injuste avec toi. Je sais que cela n’excuse en rien mon comportement, mais te voir m’était tout simplement insupportable. Vous avez beau être différentes, tu lui ressembles pourtant tellement. Je ne comprenais pas pourquoi tu lui avais survécu. Pourquoi toi et pas elle.
Il se tait puis poursuit :
- Je me suis détesté d’avoir eu ce genre de pensée, car je savais bien que tu n’y étais pour rien.
Sa mâchoire se contracte, tandis qu’une expression de dégoût apparait sur son visage.
- Mais c’était plus fort que moi. Après le combat, c’était comme si j’avais perdu pied. Luna était partie et Hans dans le coma. J’ai passé ma frustration sur toi. Je tiens à m’excuser, Elena. Je n’aurais pas dû te dire ces paroles aussi dures quand tu es sortie. Je n’aurais pas dû me comporter de la sorte avec toi. Pourras-tu me pardonner ?
Je resserre mon étreinte sur ses doigts.
- Je ne t’en veux pas, Nikolaï. C’est vrai, tu as peut-être été maladroit dans tes actions, mais je sais à quel point tu es quelqu’un de gentil. En y repensant, j’ai été stupide de ne pas avoir voulu voir Hans à son réveil et par mon comportement, je t’ai blessé. Je te dois moi aussi des excuses. Tu as failli perdre ton frère et plutôt que de te soutenir dans cette épreuve, je n’ai pensé qu’à moi. J’ai été lamentable. Je regrette tellement.
Les émotions qui m’envahissent m’empêchent de continuer et je dois patienter un instant le temps de me reprendre.
- Toutefois, rajouté-je. Cela va sans doute te paraitre étrange, mais je souhaiterais te remercier d’avoir agi de la sorte. Grâce à toi, j’ai compris quelque chose d’essentiel qui ne serait pas arrivé si tu ne m’avais pas forcé la main.
Il me fait un pauvre sourire.
- Si te hurler dessus te permet d’avancer, je suis prêt à recommencer quand tu veux, ironise-t-il. Même si, me disputer avec toi ne me plait pas.
Les secondes s’écoulent avant qu’il ne reprenne la parole.
- Cela me fait du bien d’avoir cette conversation. Pour tout t’avouer, j’ai hésité à de nombreuses reprises à venir te parler. Tu as eu plus de courage que moi, regrette-t-il. En tout cas, sache que si tu le souhaites, je serai là.
- Merci.
Je me redresse. Une douce chaleur m’enveloppe le cœur. Le poids qui me pesait depuis plusieurs semaines s’est enfin dissipé.
- Quant à moi, Nikolaï, je te fais la promesse que je ne fuirai plus, déclaré-je d’une voix forte, avant de rajouter. Au fait, on m’a autorisée à me rendre dans la chambre de Luna. J’y ai découvert ceci et je souhaiterais te la donner.
Quelques jours après sa venue, Tellin m’a apporté la clé de la chambre de ma sœur. Avant que l’armée la vide, je pouvais m’y rendre et récupérer ce que je voulais. Cette prévenance de la part du major m’a étonnée. Il avait quelque chose à se faire pardonner, m’a-t-il dit. Cependant, j’éprouve de gros doutes concernant cette version. Je sors une enveloppe de ma poche et la tends à mon ami. Intrigué, il la prend et l’ouvre. Je remarque à son expression que le contenu l’ébranle quelque peu. Il me lance un regard incertain.
- Tu es sûre que tu ne désires pas garder cette photo ?
Je secoue la tête de droite à gauche.
- Accepte-la.
Ses yeux se posent à nouveau sur la photographie et il sourit.
- Je sais que c’est étrange de dire cela, mais elle a beau être plus jeune sur cette photo, elle est comme dans mon souvenir.
Je jette un regard à l’image. Luna fixe l’objectif, souriante. C’était moi qui avais pris cette photo peu de temps avant que ma sœur soit enrôlée dans l’armée. Nikolaï replace le cliché dans l’enveloppe et reporte son attention sur moi.
- Merci pour ce cadeau, Elena. Cela me touche beaucoup.
- Tout le plaisir est pour moi.
Je m’humecte les lèvres avant de reprendre :
- Je vais devoir te laisser.
- Passe quand tu veux !
Pour toute réponse, je lui souris. Je m’apprête à le quitter pour de bon, mais il m’interpelle une dernière fois.
- Tu fais ce que tu désires de cette information, mais Hans a quitté l’hôpital ce matin. Cela ne m’étonnerait pas qu’il vienne te voir dans la journée, mais si je pouvais te donner un conseil, je pense que cela vous ferait du bien de parler. Et pour être honnête, je crois que mon frère en a très envie.
- C’est également mon cas, avoué-je sans honte.
Étrangement, cela ne me dérange pas de me dévoiler à ce point à Nikolaï. Il y a plusieurs semaines, j’aurais nié en bloc, mais plus maintenant. L’instant d’après, je suis sortie. J’expire longuement. Cela fait une éternité que je ne me suis pas sentie aussi apaisée.
Alors que je me dirige vers mon bureau, je ne peux m’empêcher de jeter de fréquents coups d’œil tout au long du trajet. J’ai beau affirmer qu’il faut que je voie Hans, je dois admettre que j’appréhende nos retrouvailles. J’ai beaucoup réfléchi à son geste lors de son réveil. Je doute sincèrement qu’il fût tout à fait lucide. Cela se voyait dans ses pupilles dilatées qu’il avait encore les effets de la morphine. Et pourtant, je me demande si ce n’est pas dans cet état qu’il était le plus sincère. Nouveau regard circulaire, une pointe de déception et de soulagement émerge quand je me rends compte que mon collègue n’est pas ici. Sans m’en préoccuper davantage, je m’empresse de rejoindre mon bureau. Je m’apprête à pénétrer à l’intérieur quand je perçois des bruits étouffés de l’autre côté. Je me stoppe instantanément. Avec qui Isis parle-t-elle ? D’un geste sec, j’abaisse la poignée et entre sans me faire prier. La première personne que j’aperçois est mon aide de camp assise à sa place habituelle, toutefois mon regard se porte aussitôt après sur son interlocuteur près de l’entrée.
- Ha… Hans, bredouillé-je.
Il se redresse et un sourire s’élargit sur ses lèvres. La surprise passée, je suis soulagée de voir qu’il semble être en forme. Je suis contente qu’il ait rasé la barbe qu’il avait à son réveil. Cela ne lui allait pas du tout.
- Salut, Elena ! s’exclame-t-il.
- Comment te sens-tu ? m’empressé-je de savoir.
- Plutôt bien ! Les douleurs restent présentes. Vincent m’a autorisé à sortir ce matin. Je voulais te voir, mais comme tu n’étais pas là, j’en ai profité pour discuter avec Isis.
- Tant mieux, murmuré-je.
Je porte mon attention sur la jeune fille qui opine vivement du menton. Une légère contrariété s’empare de moi. Je lui fais signe d’approcher tandis que je referme la porte que j’avais laissée ouverte. Celle-ci obéit aussitôt. Nous nous écartons légèrement de mon collègue pour qu’il n’entende pas notre discussion. Je porte mon attention sur mon aide de camp.
- Je t’ai déjà dit à de nombreuses reprises que lorsque tu es seule ici, tu fermes la porte à clé et tu n’ouvres à personne sauf à moi, lui murmuré-je.
- Mais c’était Hans, tente de se défendre mon aide de camp.
- Peu importe qui c’est ! Tu m’as désobéie !
- À t’entendre, on dirait que je suis un danger public, raille mon collègue qui s’est rapproché. Si cela peut te rassurer, Isis avait bien respecté tes instructions, mais au moment où j’ai frappé j’ai perçu du bruit à l’intérieur. J’ai cru que tu m’ignorais délibérément, alors j’ai insisté.
- M’estimes-tu à ce point puérile pour refuser de t’ouvrir ? grimacé-je.
- Plutôt oui, me répond-il sans équivoque, une hilarité non feinte sur son visage.
Je soupire face à sa remarque.
- Plus sérieusement, se reprend Hans. Nous devons parler.
Mes doigts s’agrippent à ma veste tandis que mon cœur manque un battement. Je vais enfin être fixée.
- En effet, reconnais-je.
Je m’apprête à donner à Isis sa pause et l’envoyer dans sa chambre quand on frappe à la porte. Je peste. Décidément, c’est mon jour ! Qui cela peut-il bien être ? J’ouvre et tombe nez à nez avec le secrétaire du maréchal. La panique me prend à la gorge. Je devine immédiatement pourquoi il est là. Je sais que je n’aurai pas la force d’accomplir ma mission spéciale aujourd’hui. Toutefois, je suis interpellée par le classeur que l’homme tient en main. Il me le tend sans plus de cérémonie. Je suis surprise par son poids.
- Que dois-je faire avec ça, lieutenant ? demandé-je.
- Nous avons reçu les candidatures des potentielles nouvelles recrues. Le maréchal Darkan, étant surchargé, vous ordonne de classer ces dossiers et de désigner les soldats éventuellement recevables.
- Pourquoi moi ? m’étonné-je.
C’est bien la première fois que mon père me donne ce genre de boulot.
- Oseriez-vous contester les ordres de votre chef ?
- Bien sûr que non, me rattrapé-je, même si ce n’est pas l’envie que m’en manque. Mais n’est-ce pas la tâche du major général Tellin d’habitude ?
Un pli de contrariété plisse le front du lieutenant. À l’évidence, il ne doit pas apprécier mon intervention.
- Depuis la mort du major général Darkan, le major général Tellin est débordé, se contente-t-il de me répondre sèchement. Le maréchal désire le résultat de votre travail le plus rapidement possible. Je repasserai dans trois heures.
- Vous vous moquez de moi ! m’exclamé-je. Avec ce nombre de dossiers, j’en ai au moins pour la journée.
- C’est un ordre d’en haut, colonel Darkan.
Si ce n’était pas le secrétaire de mon père, je lui aurais rappelé sa position. Il ne manque pas de culot de me traiter de la sorte. Après un bref salut, il quitte la pièce. Je porte mon attention sur Hans qui a assisté à toute la scène.
- Les nouvelles recrues ne sont pas encore arrivées ? s’enquiert-il. Cela fait toute de même plusieurs semaines que nous sommes en sous-effectif.
- Malheureusement non, mais tu sais à quel point mon père ne rigole pas avec ça.
- L’élite avant tout, soupire-t-il faisant ainsi écho à mes propres pensées.
- Je n’ai pas une minute à perdre. Désolée, Hans. On se revoit ce soir ?
- Aucun problème ! Fais ce que tu dois faire. Je passerai après le boulot.
- Très bien, si jamais je ne suis pas dans mon bureau, viens frapper à ma chambre.
- Ça marche !
Je l’observe quitter la pièce après un dernier signe de la main. Ce n’est qu’au moment où il n’est plus visible que je me rends compte du sourire béat étirant mes lèvres. Toujours égal à lui-même. Savoir que je le reverrai ce soir fait battre mon cœur légèrement plus vite. Je secoue la tête comme pour me remettre les idées en place. Je n’ai pas le temps de penser à ça. Lasse, je contemple le classeur que je tiens dans mes bras. J’ai intérêt à me dépêcher si je veux être prête. D’un pas rapide, je me dirige vers mon bureau et dépose bruyamment mon fardeau dessus. Alors que je l’ouvre, je m’exclame :
- Isis, un thé, s’il te plait !
- À vos ordres, cheffe !
J’empoigne le dossier en haut de la pile et me plonge dans la lecture de la première candidature.
Il est presque 22 h passé quand Hans vient frapper à la porte de ma chambre. J’ignore pourquoi il passe aussi tard. Pourtant, c’est avec un certain plaisir que je lui ouvre. Tandis que je retourne m’asseoir sur mon lit, mon collègue s’installe avec précaution sur une chaise.
- Tu ne préfères pas plutôt le matelas, m’inquiété-je.
- Aucun problème ! s’empresse-t-il de me rassurer. Je dois juste être prudent.
- N’hésite surtout pas à demander.
Il laisse échapper un rire bref.
- C’est rare de te voir aussi prévenante me concernant. D’habitude, tu n’es pas aussi délicate.
Je pique un fard en entendant sa remarque.
- Pour une fois que je suis sympa, grommelé-je.
- Ce n’était pas une critique, rétorque-t-il légèrement gêné. Mais je reconnais que j’ai mal choisi mes mots.
Un silence passe alors que nous fixons chacun nos pieds. N’y tenant plus, je décide de me lancer :
- Et sinon, de quoi souhaitais-tu me parler ?
C’est au tour de Hans de devenir écarlate.
- Je pense que tu en as une petite idée, se contente-t-il de me répondre.
Incapable de sortir une phrase compréhensible, je désigne ma main où il a posé ses lèvres. Hésitant, il opine du menton. Il se gratte l’arrière du crâne.
- Je vais être honnête avec toi, j’ignore ce qui m’a pris sur le coup, reconnait-il.
- Tu venais de te réveiller, c’est normal. On n’a pas forcément toute sa tête lors de ces moments-là.
Je ris en parlant, mais cela sonne si faux à mes oreilles. Je me stoppe net en croisant le regard de mon collègue qui ne cesse de me détailler. Toute trace de gaité a disparu et c’est avec sérieux qu’il me fixe.
- Ne va pas croire que je regrette, me surprend-il à m’annoncer.
Il se tait quelques secondes puis poursuit :
- Désolé d’être direct, mais je n’ai aucune envie de te mentir davantage. Tu sais, j’ai beaucoup réfléchi pendant ma convalescence. Je n’arrivais pas à expliquer pourquoi j’avais agi de la sorte avec toi que ce soit lors du combat ou dans ma chambre.
Ses sourcils se froncent et pourtant il sourit. Ses yeux ont quitté les miens pour se porter sur ses mains qui sont serrées l’une contre l’autre.
- J’ai compris que je t’appréciais différemment que ce à quoi je m’obstinais à croire.
Il se lève et s’approche en gardant toutefois une certaine distance entre nous.
- Alors oui, c’est peut-être un peu précipité, lâche-t-il après un court silence. Mais désormais, c’est pour moi une évidence. Je ne vais pas te lancer des fleurs. Depuis que l’on se connait, tu me mènes la vie dure. Ta simple vue me mettait les nerfs à vif. Tu étais imbuvable, antipathique au possible, une vraie brute. Tu n’étais décidément pas quelqu’un d’agréable à vivre. Et pourtant, je ne me rends compte seulement maintenant que j’étais un idiot.
Pendant tout son monologue, je n’ai pas dit un mot. Je me suis contentée d’assimiler ce qu’il essayait de me dire. Désespérément, je tente de formuler une phrase cohérente et malheureusement pour moi c’est la plus maladroite qui traverse mes lèvres :
- C’est maintenant que tu le reconnais ?
- De quoi ? s’étonne Hans.
Les mots sortent sans mon autorisation.
- Que tu es un idiot.
Je me redresse brusquement. J’ignore contre qui, mais je suis furieuse.
- Tu crois réellement qu’en me traitant de la sorte, tu obtiendras quoi que ce soit ? C’est vrai je ne suis pas quelqu’un de facile, mais tu ne vaux pas mieux !
Je désirerais tant me taire, mais je ne parviens plus à m’arrêter :
- Tu ne penses qu’à toi. Tu es colérique, orgueilleux, insupportable. Depuis notre première rencontre, on passe notre temps à s’insulter.
Mes poings se serrent.
- Tu auras beau dire, cela n’ira jamais entre nous !
Je l’entends qu’il s’esclaffe. Je relève mon menton pour croiser son regard.
- Au contraire, je trouve que l’on se complète plutôt bien, déclare-t-il, amusé.
Pour la première fois depuis plusieurs semaines, j’éclate en sanglot. Je passe mes bras autour de la taille de mon interlocuteur pour le serrer contre moi.
- Je ne voulais pas que tu meures, Hans, hoqueté-je. Tu n’aurais pas dû te sacrifier pour moi. Tu aurais dû penser à toi.
Prudemment, ses mains se posent sur mon dos.
- Je suis vivant, Elena. Ne l’oublie pas.
La proximité d’un homme m’a-t-elle autant apaisée auparavant ? Honnêtement, je l’ignore. Enfin, rectifié-je, c’est surtout Hans qui m’apaise. Le temps s’écoule en silence. C’est finalement Hans qui le brise d’une voix quelque peu tendue :
- En revanche, si tu pouvais éviter de me serrer aussi fort, cela m’arrangerait.
- Pardon ! m’exclamé-je en me souvenant de ses blessures.
Je m’empresse de m’écarter, mais Hans s’est emparé de l’une de mes mains pour m’empêcher de m’éloigner davantage.
- Ce n’est rien, m’assure-t-il.
Il me fixe sans rien dire avant de déclarer :
- J’ai besoin de savoir, Elena. Je ne te poserai qu’une question. Peu importe ta réponse, je l’accepterai. Je te demanderai juste d’être honnête aussi bien avec moi qu’avec toi.
Il ferme sa bouche puis la rouvre aussitôt, cependant de longues secondes s’écoulent avant qu’il se lance enfin :
- Est-ce que tu veux de moi ?
Je ne peux m’empêcher de trouver ses gestes très doux. Ce n’est ni un ordre ni une supplication, juste une simple demande. Il me suffirait d’articuler trois lettres, mais comme à mon habitude, je complique toujours tout. Toutefois, c’est plus fort que moi. J’ai déjà tellement été déçue par le passé. Qu’est-ce qui me prouve que Hans ne deviendra pas comme Tellin ? Lui aussi était un homme bien avant qu’il ne bascule du mauvais côté. Et pourtant, je ne peux m’empêcher de penser que Hans est différent. Tellin ne m’a jamais demandé mon avis avant d’agir. Il ne m’a jamais considéré autrement qu’une femme. Pour lui, je ne suis et ne serai jamais son égale. Mes yeux se posent furtivement sur mon collègue. Alors que lui… Lorsqu’il m’a assuré qu’il respecterait mon choix, j’ai su qu’il était sincère.
- Pourquoi moi ? demandé-je finalement.
Mon interlocuteur hausse les épaules.
- Aucune idée, m’avoue-t-il. Des arguments, j’en ai à la pelle, mais j’aurais l’impression de te mentir. Toutefois, s’il y a bien une chose dont je suis certain, c’est que la seule personne avec qui je souhaite être en ce moment, c’est toi et cela me suffit amplement.
Je serre davantage sa main dans la mienne et me rapproche de lui. Mes joues me chauffent légèrement alors que mon cœur qui tambourinait un instant plus tôt retrouve son rythme normal. Je n’ai jamais rencontré un homme comme lui. Comment cela se fait-il que je ne le remarque que maintenant ?
- Moi aussi, soufflé-je.
En entendant ma réponse, le sourire de Hans s’élargit.
- Qu’est-ce que je devrais répliquer selon toi ?
- Pourquoi pas ça ?
Je me mets sur la pointe des pieds et l’embrasse tendrement. Peu importe ce qu’il pensait, je dois reconnaitre que j’en avais très envie. Je m’écarte.
- Ce n’est pas TA réponse que je t’ai demandée, dit-il en se retenant de rire.
Je lève un sourcil, pas dupe pour deux sous.
- Elle ne te convainc pas ?
Son expression se fait très douce.
- Au contraire, je crois que c’est la plus correcte.
Il se penche en avant et ses lèvres s’emparent des miennes. D’instinct, je passe mes bras autour de son cou pour l’attirer un peu plus vers moi. Cela n’a rien à voir avec ce que j’ai connu et je comprends que désormais Hans sera quelqu’un de spécial pour moi. Il s’éloigne légèrement et quand il me sourit, cela devient une certitude.
Petits details : Hans a dit de son frere qu'il etait "incontrolable". L'adjectif me semble un peu curieux. Qui est cense le controler? Veut-il dire "imprevisible'?
"Une douce chaleur m’a enveloppé le cœur." Le passe compose fait un effet bizarre. Pourquoi ne pas rester au present?
"PrisE sur le fait"
"il finit par attraper l’aliment" ca depend peut etre des regions, mais aliment me semble tellement generique que ca fait bizarre ici. Pourquoi pas "l'attraper"?
"Elle ne te convint pas " convainc
"Depuis quand, la proximité d’un homme ne m’avait pas autant apaisée ?" On devine ce qu'Elena veut dire mais la phrase a une drole de structure. Qqchose comme : "La proximite d'un homme m'a-t-elle autant apaisee auparavant? Peut-etre il y a tres longtemps".
Bon courage pour la suite!