Chapitre 44 : Rhazek

Par Talharr

Rhazek :

Les jours avaient passé depuis la bataille de Dralan. Le royaume de Balar était tombé. Non sans difficultés, non sans pertes. Mais une chose agaçait Rhazek : il n’y avait personne à gouverner. La population avait été massacrée ou avait fui vers Cartan.

Pourquoi ne plient-ils pas devant moi ? Devant la voix de Malkar !

Comme si cela ne suffisait pas, Erzic s’était arrogé une armée. Des créatures toutes plus hideuses les unes que les autres. Désormais, deux camps se faisaient face : celui du mage, installé dans les champs cramoisis autour de Dralan, et le sien, retranché dans la forteresse conquise.

Depuis l’une des hautes fenêtres de la grande tour, Rhazek observait. Ses hommes ne voulaient pas croiser ces abominations. Wosir, ses commandants et les autres seigneurs lui avaient expressément demandé qu’elles soient renvoyées d’où elles venaient.

Mais malgré son ressentiment, il ne pouvait refuser l’aide d’une telle armée. La sienne avait perdu trop d’hommes. Beaucoup des survivants ne pourraient reprendre la route avant plusieurs lunes. Cela l’agaçait, mais il n’avait pas le choix. Il avait donc décidé d’inviter Erzic, afin de clarifier leur position. Au moins jusqu’à la libération de Malkar.

Il le vit arriver dans la cour. Les portes s’ouvrirent, et lui-même descendit lentement les marches, vêtu de son armure de guerre dorée encore ensanglantée, la couronne serpentine sur la tête. Il fallait paraître fort devant cet homme : c’était le seul langage qu’il respectait.

Le mage à la tresse l’attendait, déjà l’air agacé, ce qui fit sourire Rhazek.

    — Bien. Je suis heureux que nous puissions enfin discuter seul à seul. Suivez-moi.

Ils gravirent quelques étages, longèrent un couloir, puis entrèrent dans une vaste salle à deux niveaux, remplie de chaises. Sur l’estrade, Rhazek s’assit sur le siège de l’ancien roi de Balar et fit signe à Erzic de prendre place plus bas.

C’est là qu’est ta place, pensa-t-il. Et à voir le visage rouge du mage, celui-ci avait bien saisi.

    — Nous ne sommes pas ici pour nous disputer, dit Rhazek. Je veux que nous marchions ensemble. Après tout, nous servons le même maître. Pourquoi nous faire la guerre ? Ce ne serait utile qu’à nos ennemis. Ensemble, nous les écraserons.

    — Soit. Mais pour que mon armée obéisse à vos ordres, elle doit rester sous mon seul commandement.

    — C’est moi le roi ! Pas toi ! Malkar m’a choisi ! s’emporta Rhazek.

Erzic retrouva son sourire insupportable.

    — Tu ne comprends donc toujours pas ? Ton dieu ne t’a pas choisi. Il t’utilise.

Il essaye de me faire perdre la tête. Ne l’écoute pas.

    — Je ne mens pas, reprit le mage. Mais pense ce que tu veux. Ma demande est faite. À toi de choisir, mon roi.

Rhazek hésita. Devait-il lui céder une telle armée ? Avait-il seulement le choix ?

    — Je ne peux pas…

    — Si tu refuses, je n’aurai d’autre choix que de raser cette forteresse. Et tes hommes mourront tous.

    — Alors tu ignores la force des guerriers de Drazyl !

Ils se défièrent du regard de longues minutes. Mais Rhazek finit par céder : une guerre entre eux aurait signé leur perte. Ils devaient conquérir le reste de la Terre de Talharr.

    — J’accepte que tu diriges ton armée. Mais tu devras obéir à mes ordres. Avons-nous un accord ?

Erzic le jaugea, puis sourit.

    — J’accepte. Pour Malkar.

    — Pour Malkar.

Ils se serrèrent le bras, puis se séparèrent. Bien sûr, Rhazek n’avait aucune confiance en lui. Erzic serait surveillé de près.

Il descendit dans une autre salle, plus petite. Deux gardes à l’entrée le saluèrent. À l’intérieur, ses commandants et seigneurs discutaient dans une pièce dorée aux tapisseries vertes. Quand il entra, tous cessèrent de parler et ployèrent un genou.

Il leur fit signe de se relever, s’assit et se servit un verre de Grozyl.

    — Mon roi, cette armée va-t-elle disparaître de nos terres ? demanda Wosir.

    — Non.

Des grognements éclatèrent aussitôt.

    — Mais on ne peut pas…

    — J’ai dit non. Nous avons trop perdu. Sans eux, impossible d’attaquer Cartan. Nous ne serions pas assez nombreux.

    — Alors coupons la tête de ce serpent d’Erzic et prenons son armée, lança un seigneur.

    — Et à qui croyez-vous qu’elle obéira ensuite ? À moi ? Nous serions tous morts à l’aube, répliqua Rhazek, agacé.

    — Mais vous êtes celui qui doit régner sur cette Terre, non ? insista Wosir.

    — Ces créatures n’ont qu’un maître, et ce ne sera jamais moi. Un accord a été scellé. Fin du débat.

La quinzaine d’hommes et de femmes baissa la tête. Tous, sauf Wosir, qui le fixait toujours de son regard perçant.

    — Bien. Maintenant, avez-vous un plan d’attaque pour Cartan ? demanda Rhazek.

    — Oui, répondit Niir en dépliant une carte. Nous enverrons des Dralkhar pour appeler des renforts. Ensuite, nous formerons deux armées : l’une marchera sur le comté de Vaelan, l’autre sur Baltan. Ils devront diviser leurs forces pour se défendre.

    — À condition qu’ils n’aient pas laissé trop de troupes devant la Forêt Sans Morts, ajouta un seigneur.

    — On ne peut pas combattre à l’intérieur, ce serait signer notre arrêt de mort, expliqua un autre. 

    — Alors brûlons-la. Plus de forêt, plus de problème, trancha Rhazek.

Un silence glacé s’abattit. Tous le regardaient comme un fou.

    — Vous plaisantez, mon roi ? Les dieux ont créé cette forêt, et vous voulez la détruire ? Ce serait attirer une malédiction sur nous, protesta Wosir.

    — Malkar est avec nous. Croyez-vous qu’une malédiction pourrait nous vaincre ? Nous brûlerons la forêt. Ce sera le glas de Cartan.

Personne n’était convaincu, mais aucun n’osa répondre.

    — Alors ? Allez-vous me suivre ou fuir comme des lâches ?

Finalement, ils acquiescèrent à contrecœur.

    — Bien. Que tout soit prêt avant le mois prochain. Aucun retard ne sera toléré.

Il les laissa organiser les préparatifs et quitta la salle, arpentant les couloirs sans but.

Il repensait au moment où Malkar lui était apparu. Pourquoi aucun d’eux ne comprend-il notre mission ?
Bientôt, ils ouvriraient les yeux. Erzic lui-même plierait le genou. Plus jamais il ne s’opposerait à lui.

Mais surtout… Rhazek pensait à Elira. Elle était là, derrière cette forêt maudite. Lui n’en avait pas peur. Rien ne l’arrêterait.

Mère… préparez-vous. Même vous, vous plierez devant moi, songea-t-il en souriant.

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Scribilix
Posté le 16/09/2025
Re,
Chapitre sympa, j'aime bien la tension entre les deux meme si l'affrontement est très direct. Peu etre qu'au lieu d'avoir Erzic qui insulte Rhazek je les aurait fait se lancer des piques ambigu tout du long. Quoi qu'il en soit j'aime bien leur relation. De meme que l'idée de Rhazek de bruler la foret, ca lui correspond bien
2 petites coquilles
- emplie de chaises. (remplie)
- se serait signé notre arrêt de mort, expliqua un autre. (signer)
A la suite
Talharr
Posté le 17/09/2025
Hello ^^
Oui j'ai pas mal modifié leur affrontement verbale, je voulais qu'on voit une vraie cassure entre eux.
Je viens de finir tout le tome, je vais me poser, relire, et essayer de voir comment ça rendre encore mieux :)
Ah brûlé la forêt, oui, ça ne pouvait être que lui aha
Merci pour les fautes je modifie de suite ^^
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