Chapitre 5

Par Degmo

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Ils étaient regroupés autour de lui comme un troupeau. Un peu trop serrés, un peu trop silencieux. Mais leurs visages n’étaient pas si différents, comme si voir un corps tomber du ciel était une routine. D’un côté, ce n’était pas si surprenant : ces derniers temps, les cadavres pleuvaient sur la ville.

 

Sergeï Volodin gisait sur le capot d’une voiture, sa chair éclatée par l’impact, sa tête tournée dans un angle anormal. Son visage, lui, était… absent. Littéralement. Ses orbites vides fixaient le ciel. Quelqu’un s’était assuré de lui arracher les yeux avant qu’il ne fasse son grand plongeon.

 

Un murmure parcourut la foule des officiers présents. Un frisson mal à l’aise, vite dissimulé derrière le professionnalisme feint. Les cadavres, ils avaient l’habitude. Mais ce genre de mise en scène… c’était autre chose.

 

Boris Karpov s’était approché du corps. Il resta un instant immobile, une main serrée autour de son paquet de cigarettes. Il n’en alluma pas. Pas cette fois.

 

Lars Jensen, lui, arriva plus tard. Quand il franchit les portes du commissariat, la majorité des agents était déjà dehors, attirée par l’agitation. Il s’avança, observant la scène, et son regard croisa celui de Boris.

 

— C’est lui, confirma sobrement un officier. Sergeï Volodin.

 

Lars hocha la tête. Il n’avait pas besoin de demander comment il était arrivé là. Quelqu’un l’avait fait basculer dans le vide, et ce n’était certainement pas un accident.

 

Boris, lui, se détourna brusquement. Il ne regardait plus le corps, mais le bâtiment en hauteur.

 

— Il a été jeté d’une fenêtre du commissariat, déclara-t-il, sa voix rauque.

 

Lars suivit son regard. Les étages supérieurs du commissariat étaient plongés dans l’obscurité. Aucun signe de mouvement. Quelqu’un avait donc tué Sergeï Volodin, l’avait mutilé… et avait eu l’audace de jeter son cadavre en plein milieu du poste de police.

 

Un message clair.

 

Ils allaient à peine commencer l’analyse de la scène quand un nouvel élément s’invita dans l’affaire.

 

— Chef ? Un colis vient d’arriver pour vous.

 

Lars tourna lentement la tête. Un jeune officier tenait un carton coloré entre ses mains. Trop coloré. Trop… innocent.

 

Il était décoré comme un cadeau d’enfant. Des autocollants, des dessins naïfs tracés au feutre, des cœurs et des étoiles maladroitement gribouillés. Un contraste brutal avec l’atmosphère pesante de la nuit.

 

Lars prit la boîte avec précaution et l’ouvrit.

 

À l’intérieur, un dossier soigneusement rangé. Des photos. Des preuves. Tout ce qu’il fallait pour retracer les méfaits de Sergeï Volodin : corruption, trafic, disparitions de témoins gênants.

 

Et au sommet de cette montagne de preuves, une petite carte écrite à la main.

 

Un message, simple et cinglant :

 

« Peut-être que moi, je fais votre travail mieux que vous. »

 

Un silence pesant s’abattit sur eux.

 

Lars referma lentement la boîte.

 

Le tueur venait de leur offrir un autre puzzle à résoudre.

 

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