Lya était rapidement devenue la nouvelle étoile montante de la promotion, attirant tous les regards et suscitant l’admiration de ses camarades.
Désormais, on comptait deux doubles mages… et ils faisaient partie de la même équipe. Une coïncidence aussi rare qu’inattendue.
— Eh bien, équipe 3, vous êtes pleins de surprises !, s’exclama Nata avec un sourire admiratif.
Ils étaient tous rassemblés à l’extérieur, dans l’espace réservé aux élémentalistes, attendant le début de la dernière épreuve. Le ciel s’assombrissait peu à peu, les premières étoiles commençant à percer à travers le crépuscule.
— Il ne manquerait plus qu’Archi soit élémentaliste, et vous seriez tout simplement imbattables, plaisanta Emrys.
— C’est le cas.
— Ah, mais imagine un peu !, surenchérit Matthew, hilare.
— C’est impossible, coupa Amanda en secouant la tête. Avoir deux doubles mages dans une même équipe est déjà exceptionnel, mais trois ? Ça n’est jamais arrivé.
— Pourtant, je vous l’assure, c’est le cas, affirma Archi avec un calme déconcertant.
Son assurance jeta un froid.
— Tu es sérieux ?, s’étonna son coéquipier en haussant un sourcil.
— J’ai une tête à plaisanter ?
Le groupe cessa de rire. L’aplomb du garçon les fit hésiter. Et s’il disait vrai ?
Lya brisa le silence, tentant de comprendre.
— Tu es à la fois un mage de soin et un élémentaliste ?
Archi esquissa un léger sourire, énigmatique.
— Tu verras bien.
Soudain, toutes les torches qui étaient disposées dans le jardin s'allumèrent. Les flammes rougeoyantes dansaient au gré de la brise du soir. Les extérieurs dévoilaient une tout autre facette. Tantôt idylliques et animés, ils étaient à présent mystérieux et calmes.
Au loin, dans l'une des allées ombragées, une silhouette émergea du brouillard naissant. L'homme avançait d'un pas rapide, presque pressé, son long manteau de cuir marron battant légèrement contre ses bottes assorties. Il devait avoir une petite quarantaine d'années, bien bâti, avec une carrure qui imposait le respect. Sa barbe épaisse, soigneusement taillée, renforçait la dureté de son visage anguleux, marqué par quelques rides d'expression, témoins d'un homme habitué aux décisions fermes.
À sa ceinture, plusieurs balluchons de tissu beige oscillaient au rythme de ses mouvements, émettant un léger bruissement. Leur contenu restait un mystère, mais leur présence suffisait à intriguer. Son bras droit était tendu, serrant fermement un long bâton de bois sinueux, aux reflets sombres et lisses, comme poli par le temps. Ce n'était pas une simple canne de marche. Il semblait vivant, sculpté par la nature elle-même, et portait une aura étrange, presque menaçante.
Les élèves, dispersés en petits groupes, cessèrent peu à peu leurs bavardages. Un silence se fit, troublé seulement par le bruit des pas et un vent léger qui fit frissonner les feuillages au-dessus d'eux. Certains échangèrent des regards inquiets, d'autres, fascinés, ne quittèrent pas l'homme des yeux.
-Il se fait tard et j'en suis désolé, annonça-t-il en se plaçant devant les élèves. La cérémonie d'accointance ayant pris du retard, la dernière épreuve se passera au crépuscule. La nuit n'est pas favorable aux élémentalistes toutefois, nous ferons avec. Je suis Jack Ameur votre professeur de magie élémentaire comme vous l'aurez compris. Que ceux qui n'ont pas encore de magie attribuée lèvent la main.
Une bonne dizaine de personnes répondirent. Il était vrai que l'épreuve de magie constructrice avait "éliminée" un bon nombre de personnes.
-Très bien, j'espère que vous allez réussir alors, s'amusa-t-il.
-Et si aucune magie ne nous est attribuée ?, s'inquiéta un élève.
-Pas de panique, ça n'est jamais arrivé. Les examinateurs que vous avez rencontré avant de rentrer à l'école ne se trompent jamais.
Il reprit sa voix forte et autoritaire.
-Bien, en place jeunes gens. L'épreuve sera simple, je vais vous demander de faire pousser quelque chose sur cette magnifique pelouse, n'importe quoi. Pour cela, rien de plus simple, il faut passer un accord avec la terre.
-Rien de plus simple..., chuchota Emrys à Lya avec beaucoup d'ironie.
-Le mieux est de s'asseoir à même le sol et d'écouter les vibrations sous vous. Allez-y, je vous laisse une dizaine de minutes.
À la différence des autres épreuves, les élèves s'installèrent où ils veulent. La plupart des trios s'étaient isolés. Était-ce grâce ou à cause de la fatigue générale, en tout cas l'ambiance paraissait plus détendue que pour les autres épreuves.
-Coucou !
-Lya, sursauta Archi qui s'était volontairement écarté du reste du groupe. Qu'est-ce que tu fais là ?
-Je voulais te voir à l'œuvre !
-Pourquoi tu me crois, les probabilités pour que je sois un double mage sont quasiment de zéros...
-Je ne vois pas pourquoi tu aurais menti, répliqua-t-elle avec une mine amusée.
Archi esquissa l'un de ses premiers sourires sincères.
-Et toi, tu n'essaies pas ?
-C'est impossible que j'aie trois dons voyons !
-Tu devrais tester quand même, au pire, tu auras fait un peu de méditation. Viens, je vais te montrer.
Il la fit s'asseoir à un mètre en face de lui.
-Le but est de passer un accord avec la terre.
-Comment fait-on ça ?
-Le plus efficace est de se mettre en tailleur et de te décontracter complétement. Ensuite, tu vas commencer à te connecter avec ce qu'il y a sous toi. Sens l'herbe sur ta peau, la rosée qui commence à s'y déposer. Puis va plus profondément, sens la terre, les racines, l'eau qui s'infiltre doucement. Ressens les fluctuations de températures, le mouvement des insectes. Et quand tu penses être en phase, tu demandes à la terre de te rendre un service en ayant bien en tête ce que tu veux. Comme pour la chaise du cours de magie constructrice. Allez, on essaie ensemble.
Ils prirent une grande respiration, remplissant leurs poumons d'air comme pour mieux absorber l'instant. Leurs regards s'accrochèrent, un lien invisible se tissant entre eux. Le silence se fit plus dense, comme si le monde retenait son souffle avec eux. Puis, lentement, presque imperceptiblement au début, quelque chose se mit en mouvement.
Le sol frémit sous leurs pieds. L'air sembla vibrer d'une énergie nouvelle. Puis, soudain, dans un froissement puissant, un arbre jaillit du sol entre eux, ses racines s'enfonçant profondément tandis que son tronc s'élançait vers le ciel avec une vigueur irréelle. En un instant, des branches épaisses se déployèrent, chargées de feuilles encore frémissantes, comme si elles hésitaient à croire à leur propre existence.
— Tu vois, Lya ! Je ne mentais p...
Archi s'interrompit brutalement. Pris d'un élan d'excitation, il s'était levé pour contourner ce qu'il voyait déjà comme son chef-d'œuvre. Mais en atteignant l'autre côté, son souffle se coupa.
Là, entremêlé au sien, un deuxième arbre avait poussé.
Le feuillage de l'un s'entremêlait à l'autre, leurs branches semblant s'embrasser, comme si leurs essences mêmes refusaient d'être séparées. L'écorce portait des teintes légèrement différentes, l'une plus sombre, l'autre plus claire, mais elles semblaient s'accorder dans une harmonie parfaite. Les racines, elles aussi, se cherchaient sous la terre, inséparables.
Archi sentit son cœur cogner dans sa poitrine tandis que son regard se posait sur Lya.
Elle était restée figée, pétrifiée. Sa bouche grande ouverte trahissait un mélange de stupeur et d'incompréhension. Ses yeux, écarquillés, allaient de l'un des arbres à l'autre, cherchant une explication qu'elle ne semblait pas prête à accepter.
Un frisson parcourut l'échine d'Archi. Était-ce...?
Il n'osa pas terminer sa pensée.
-C'est-c'est toi n'est-ce pas ?, demanda-t-elle pour se rassurer.
-Non... je... j'ai fait pousser un arbre, mais celui de ton côté ce n'est pas le mien !
-Ça ne peut pas être mien, c'est impossible !
-Tiens, tiens, quelle belle technique combinée nous avons là, les félicita le professeur.
-Monsieur, c'est incroyable !, s'extasia le blondinet. C'est le troisième don de Lya !
-Comment ?
Monsieur Ameur plissa les yeux, les lèvres légèrement pincées, scrutant les élèves avec une lueur de scepticisme dans le regard. Son silence parlait pour lui : il n'était pas convaincu. Il observa tour à tour leurs visages, cherchant peut-être un signe de nervosité, une hésitation qui trahirait un mensonge. Mais rien.
Il prit une inspiration, prêt à répliquer, à exiger une explication plus plausible, quand une voix retentit derrière lui.
-Professeur Ameur ?
Il se figea, interrompu dans son élan. Son expression changea à peine, mais un léger froncement de sourcils trahit son agacement. Il tourna lentement la tête en direction de la voix.
C'était le directeur Talford qui s'approchait à grands pas, se dirigeant vers leur petite cachette, à l'écart des autres élèves.
-Ah vous êtes là, et avec mademoiselle Lya. J'avais besoin de vous l'emprunter.
-Ça tombe très bien que vous soyez là monsieur, il fallait que je vous voie vous aussi.
-Qu'y a-t-il ?
-Cette jeune fille ici présente vient de confirmer son troisième don ! N'est-ce pas fantastique ?
Le directeur blêmit instantanément. Son sourire cordial, presque bienveillant, s'effaça en une fraction de seconde, comme balayé par une bourrasque glaciale. Ses traits se figèrent, sa mâchoire se crispa, et son regard, auparavant pétillant de curiosité, se voila d'un trouble profond.
Que pouvait-il bien se passer dans sa tête ? Qu'avait-il compris que les autres ignoraient encore ?
-C'est... c'est impossible... murmura-t-il, la voix tremblante, comme si prononcer ces mots les rendait encore plus réels.
Son souffle s'accéléra imperceptiblement. Une ombre passa dans ses yeux, une peur sourde, quelque chose de plus ancien que la simple surprise.
Face à lui, Monsieur Ameur, pourtant sûr de lui un instant plus tôt, sentit son assurance vaciller. Il n'était pas homme à douter de son jugement, et pourtant, l'expression du directeur lui fit l'effet d'un coup de semonce¹. Pourquoi cette réaction ? Qu'y avait-il de si grave ?
-Je ne sais pas pour les autres épreuves, mais en ce qui concerne la mienne, elle vient de la réussir. J'en suis formel, affirma-t-il, tentant de dissiper l'incompréhension qui s'était installée.
Le silence qui suivit était lourd, comme si les murs eux-mêmes attendaient une réponse.
-Elle a également bien réussi à faire la chaise de madame Betch, et j'étais là quand elle a soigné le bras de Matthew ! Demandez au professeur New !, s'exclama Archi, insistant avec une conviction presque fébrile.
Le directeur sembla vaciller. Ses doigts se crispèrent, cherchant un appui. Ses jambes fléchirent légèrement, et il dut se rattraper au bâton de Jack pour ne pas perdre l'équilibre. Par chance pour lui, nul ne les apercevait.
-Monsieur ? Vous allez bien, s'inquiéta le professeur.
-Lya !
Le directeur ne réfléchit pas une seconde de plus. Dans un geste brusque, presque désespéré, il saisit fermement les épaules de la jeune femme, son étreinte plus forte qu'elle ne l'aurait cru.
-Tu dois me suivre, tout de suite !
Sa voix, d'ordinaire posée et maîtrisée, était brisée par une urgence incontrôlable. Ses doigts se crispèrent légèrement sur le tissu des vêtements de Lya, comme s'il craignait qu'elle lui échappe à l'instant même.
Lya, pétrifiée, leva les yeux vers lui et sentit un frisson glacé lui parcourir l'échine. L'homme qui se tenait devant elle n'avait plus rien du directeur qu'elle connaissait. Son visage était blême, tendu, comme marqué par une peur profonde et indicible. Mais c'était son regard qui la terrifia le plus : ses pupilles dilatées reflétaient une émotion brute, à mi-chemin entre l'effroi et la folie. Un regard d'homme acculé, un regard d'homme qui venait de comprendre quelque chose d'inacceptable.
Pourquoi cette panique ? Pourquoi n'était-il pas fier d'elle ? Avait-elle fait quelque chose de mal ?
Son cœur battait à tout rompre. L'espace d'un instant, elle eut la sensation d'être en danger, comme si le sol sous ses pieds venait de basculer dans une autre réalité.
Mais avant qu'elle ne puisse réagir, une main ferme, mais posée, intervint.
Le professeur Ameur s'interposa, posant une poigne apaisante sur l'avant-bras du directeur. D'un geste maîtrisé, il sépara doucement Lya de son emprise.
-Monsieur, si je peux me permettre, il est déjà tard. Le couvre-feu a été dépassé depuis une bonne heure. Ne vaudrait-il pas mieux laisser cette jeune élève aller se reposer. La journée a été longue avec toutes ces épreuves. N'est-ce pas ?
-Peut-être... peut-être que vous avez raison... J'ai besoin de réfléchir, dit-il comme s'il était seul.
-Très bien, alors vous pouvez aller rejoindre vos dortoirs et ne traînez pas, ordonna le professeur.
Le duo s'inclina et était sur le point de partir, quand on les interpella une nouvelle fois.
-Mademoiselle, je vous attends demain à 5h du matin vers l'arène. Et j'aimerais également que tous les trois, vous restiez discret sur les résultats de cette quatrième épreuve. Pouvez-vous faire cela pour moi s'il vous plaît ?
Bien que ne comprenant pas vraiment pourquoi, les trois acquiérèrent.
*****
Archi et Lya marchaient d’un pas rapide à travers le terrain légèrement embrumé, rejoignant enfin leur équipe. Plus loin, appuyé contre un arbre, Matthew les attendait, bras croisés et sourcils froncés.
— Vous en avez mis, du temps !, râla-t-il en les voyant arriver. On a failli partir sans vous !
Son ton était faussement sévère, mais une lueur d’inquiétude brillait dans son regard.
— Ça va, vous deux ?
Amanda, qui observait le duo, perçut immédiatement leur trouble. Quelque chose clochait.
— O-oui..., commença Lya, encore légèrement sous le choc.
Mais elle n’eut pas le temps de finir que Matthew, fidèle à lui-même, éclata de rire en se tournant vers Archi.
— C’est quoi cette tête, Archi ? T’as raté ta tentative de faire pousser une fougère ou quoi ?
— La ferme, Matthew !, répliqua Archi avec un soupçon d’agacement. Je te signale que j’ai passé l’épreuve.
Un silence s’installa, vite rompu par les applaudissements enthousiastes de Nata.
— Wouah ! Alors toi aussi, tu es un double mage !
Amanda écarquilla les yeux, stupéfaite.
— C’est absolument inouï… Je n’ai jamais entendu parler d’un tel cas dans toute l’histoire de l’ESSM.
L’attention générale se concentra sur Archi, qui resta impassible sous leurs regards admiratifs et perplexes. Mais avant qu’ils ne puissent poser davantage de questions, Emrys intervint :
— Je ne veux pas vous brusquer, mais on pourrait continuer cette conversation à l’intérieur ? Il commence à faire frisquet, non ?
— Bonne idée, acquiesça Amanda en reprenant contenance.
— Suivez-nous, on est dans le même dortoir !
Sans attendre, Nata attrapa Archi par le bras et l’entraîna vers les bâtiments. Lya, Matthew et les autres leur emboîtèrent le pas, échangeant des regards remplis d’excitation et de questions en suspens.
Après avoir longuement déambulé dans le dédale des couloirs, ils débouchèrent sur un cloître baigné d'une lumière tamisée. Les hautes arcades de pierre projetaient des ombres mouvantes sur le sol pavé, tandis qu'une brise légère semblait chuchoter contre les murs anciens. Tout autour d'eux, une multitude de portes en bois massif, dépourvues de poignées, se dressaient dans un alignement mystérieux.
Sans perdre de temps, ils se faufilèrent dans un large couloir et s'arrêtèrent devant la porte du dortoir numéro 10. Amanda, d'un geste assuré, posa la main sur le morceau de bois sombre. Une lueur douce parcourut brièvement la surface, et, dans un léger frémissement, un pommeau apparut sous sa paume. Elle s'en empara et fit pivoter la porte, qui s'ouvrit dans un murmure feutré.
L'intérieur était plus chaleureux qu'ils ne l'avaient imaginé. Emrys prit les devants et entama la visite des lieux pour l'équipe 3.
La pièce principale était entièrement ronde, donnant une impression d'harmonie et de cocon protecteur. Juste à droite de l'entrée, une immense cheminée de pierre grimpait le long du mur incurvé, projetant une lumière dansante sur les murs. Le feu, déjà allumé, crépitait doucement, diffusant une chaleur réconfortante.
Face à la cheminée, comme une invitation à la détente, un large canapé aux coussins moelleux trônait, entouré de fauteuils dépareillés qui semblaient avoir une histoire à raconter. Sous leurs pieds s'étalait un grand tapis aux motifs complexes, aux teintes riches et légèrement fanées par le temps. Une table basse en bois massif, marquée par l'usure et le passage des générations, reposait au centre de ce petit espace convivial.
Derrière cet îlot de confort, une table ronde entourée d'une dizaine de chaises occupait le centre de la pièce. Un bouquet de fleurs séchées trônait élégamment en son centre, apportant une touche de délicatesse au décor.
Tout le long des murs courbés, neuf bureaux étaient alignés, suivant la forme arrondie de la salle. Lya mit du temps à remarquer un détail troublant : il n'y avait aucune fenêtre. Pourtant, l'espace n'avait rien d'étouffant. Au contraire, une douce lumière diffuse semblait émaner des murs eux-mêmes, et une sensation apaisante de sécurité enveloppait les lieux.
Au fond de la pièce principale, trois portes se dessinaient. Emrys les désigna d'un geste.
-Celle de gauche mène à la chambre des filles.
Lya s'en approcha et poussa la porte. Comme le reste du dortoir, la pièce était circulaire, renforçant encore cette impression de havre de paix. Cinq lits de bois sculpté étaient disposés tout autour d'un petit salon central, composé de quelques fauteuils rembourrés et d'une table basse aux coins arrondis.
Chaque couchage possédait une armoire et un miroir délicatement encadré de gravures. Poussée par une curiosité soudaine, Lya ouvrit son placard et resta figée un instant. Ses affaires étaient déjà là, parfaitement pliées et rangées, comme si elles l'attendaient depuis toujours.
Elle fronça légèrement les sourcils en y découvrant des habits inconnus au côté des siennes.
-Cadeau de l'école, souligna Amanda. Tout le monde a les mêmes habits à disposition, comme ça pas de différence.
Le dortoir des garçons tout à droite, était sensiblement le même avec un lit en moins.
Enfin, la porte du milieu n'était autre que la salle de bain avec une grande douche, un toilette et deux belles vasques.
-Vous êtes déjà là ?
Des voix féminines résonnèrent dans la pièce principale, ce qui fit sortir l'équipe 3 de la salle d'eau. Ils rencontrèrent leurs trois dernières colocataires. Il s'agissait d'un trio cent pour cent féminin.
-Venez dire bonsoir à l'équipe 16, les invita Nata.
Une des jeunes filles s'approcha et tendit la main à Lya. Elle avait un grand sourire qui faisait remonter ses joues charnues. Elle n'était pas bien grande et tout en rondeur.
-Je suis Nathalie ! À ma droite, c'est Emilie et à gauche Anita.
Anita avait la peau ébène et une merveilleuse chevelure noire bouclée. Lya l'avait remarqué cette après-midi, car la jeune fille était d'une beauté incommensurable. Amanda aussi était très belle, pourtant ce n'était pas la même chose, elle était plus froide et inaccessible. Mais Anita, elle, paraissait plus chaleureuse et abordable.
Emilie était toute l'opposée. Sa peau était presque translucide au point où l'on pouvait voir ses veines. Elle avait de grands cheveux blonds très fins et son corps était si frêle qu'on avait peur de la casser rien qu'en lui serrant la main.
-J'espère qu'on pourra être amie, dit Anita en prenant les mains de Lya.
La seule fille de l'équipe 3 acquiesça, c'était également son souhait.
*****
On leur avait livré leur repas directement dans leur chambre et tout le monde avait dévoré son plat sans rechigner. Après un passage salvateur sous la douche, ils se retrouvèrent dans les fauteuils devant la cheminée qui crépitait toujours.
-Sacrée journée !, lança Nata.
-C'est clair, répondit Nathalie. Vous savez que trente-six personnes sont parties rien qu'entre hier soir et aujourd'hui.
-Tant mieux, lança froidement Amanda. Cela voulait dire qu'ils n'étaient pas à la hauteur, autant qu'ils rentrent chez eux.
La chétive blonde se mit à calculer sur ses doigts avec une grande concentration.
-Si je calcule bien, nous ne sommes plus que cinquante-sept, donc dix-neuf groupes, compta Émilie. Il y a trente mages constructeurs, treize élémentalistes, treize mages de soin et cinq mages de combat.
-Euh les comptes ne sont pas bons là..., s'interrogea Matthew.
-C'est à cause de vous et d'Amanda que les comptes ne sont pas bons !, répliqua Anita. Avec vos doubles dons là !
Le petit groupe s'amusa de son attitude désinvolte.
-Amanda ?
Lya se tourna vers son amie.
-Tu es aussi élémentaliste ? C'est génial !
-Et vous d'ailleurs, quels sont vos dons ?, demanda Emrys à l'équipe 16.
Nathalie se redressa pour prendre la parole sans hésiter.
-Anita est une mage de soin, expliqua-telle. Émilie et moi sommes des mages de construction, rien de comparable à vous tous...
-N'importe quoi, s'insurgea Nata. Toutes les magies sont puissantes, il faut juste les utiliser à bon escient.
Tout le monde semblait d'accord sur ce point, redonnant le sourire à Nathalie.
-Au fait Archi, l'interpella Matthew. Comment pouvais-tu savoir à l'avance que tu étais un mage de soin et des éléments ?
-Toi, tu avais bien deviné que tu serais un mage de combat non ?
-Non, moi j'avais l'intuition d'en être un, mais je ne le savais pas. La preuve, je n'étais pas au courant que je pouvais également utiliser la magie constructrice. Toi en revanche, tu savais exactement quel don tu avais. C'est impossible de le savoir avant d'être passé devant la prêtresse ...
Un silence s'installa. Archi resta muet un certain temps, puis chercha Amanda du regard, mais celle-ci détourna sa tête.
-C'est quelque chose que je ne suis pas censée dire.
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¹ L'expression "un coup de semonce", signifie un tir d'artillerie réalisé en vue d'intimider un adversaire sans lui porter de dégâts physiques. C'est un avertissement.