Tout la troupe s’était tassée contre les murs du refuge, fixant d’un air anxieux la pénombre du tunnel de neige. Lucy, pour une fois confiante, tendit la main vers la bête dans l’ombre avec un grand sourire et l’invita à venir. Oka dut se tortiller pour passer la petite porte, mais finit par pénétrer dans le refuge, aux côtés d’Ajaruk, qui observait de son oeil aiguisé le moindre geste des aventuriers. La tension était palpable. Non loin de Lucy, Curtis transpirait à grosses gouttes.
Une main apaisante sur l’épaule, Ajaruk guida Oka jusqu’à la porte principal. Celle-ci avait été ouverte et un torrent de neige s’était répandu à l’intérieur, sans qu’on ne puisse voir la lumière du soleil. La lourde patte d’Oka se posa sur la neige, alors le calme se transforma en furie.
L’ourse se mit à retourner la neige pour se creuser un passage, soulevant des vagues glacées qui volaient en tous sens et atterrissaient sur les membres de l’expédition. Lucy émit un petit cri en se protégeant le visage, le feu crépita sous l’assaut de l’eau gelée. Pendant un instant le monde devint un tourbillon de neige.
Enfin, avec un grognement de satisfaction, Oka se glissa au dehors. Ils entendirent ses pattes fourrager le manteau blanc à l’extérieur et, presque timidement, s’avancèrent à sa suite.
Lorsque Lucy aperçut le ciel, elle eut comme un vertige. L’immensité profonde d’un bleu intense semblait l’appeler, tandis que le soleil magnifique la drapait de ses rayons dorés qui déversaient sur elle une douce rivière de chaleur. Happée par l’air pur, elle se précipita dans le large trou qu’avait creusé Oka. La première chose qu’elle vit de l’extérieur fut les montagnes majestueuses vêtues de leur robes blanches, au-dessus d’une forêt de silhouettes enneigées. Le toit du refuge se distinguait à peine du sol blanc, au milieu d’une clairière nacrée dont les éclats soudain piquaient les yeux. La lande et les bois qui entouraient l’abris se confondaient sous le drap immaculé. À l’est cependant, Lucy crut apercevoir une bande d’un bleu plus sombre encore. Le coeur de la jeune fille battait joyeusement dans sa poitrine, elle se sentait soudain légère, libérée, et goûta le vent frais sur son visage, les bras écartés, un sourire lumineux aux lèvres.
Wolfheim sortit juste après elle, il la considérait d’un air étrange.
- Qu’est-ce qu’il y a ? demanda-t-elle.
- Rien… je… je te trouvais juste très belle.
Le visage déjà rougi par le froid de Lucy s’empourpra davantage, tout comme celui du jeune homme qui baissa les yeux. Un rugissement le fit cependant relever la tête. Un peu plus loin, Oka courait en soulevant de grands tas de neige, poursuivie par Ajaruk. Le rire de l’indien retentit, il se déplaçait aisément sur la poudreuse, sans jamais s’y enfoncer. Oka se roula sur le sol avec un grognement de plaisir, Ajaruk lui bondit dessus avec un cri de victoire.
- Je t’ai eue !
L’ourse lui lança un regard espiègle et se cabra soudain pour l’envoyer valser dans la neige. Son rire sec résonna de nouveau, tandis que l’animal faisait mine de le mordre.
- Ils ont l’air de bien s’amuser, fit Lucy. J’aimerais bien les rejoindre.
Wolfheim esquissa un sourire.
- Ce n’est pas une bonne idée, Oka pourrait te blesser accidentellement. Et puis regarde, ils partent chasser. Nous, en revanche, nous pouvons jouer.
- Comm…
Avant qu’elle n’ait pu finir son mot, elle reçut une boule de neige dans le visage. Wolfheim eut un grand sourire malicieux en voyant son air ahuri. La surprise passée, elle se rua sur lui avec une fausse grimace de colère. Ils se lancèrent des boules gelées, tentant de courir dans la neige qui leur arrivait jusqu’aux cuisses. Lucy voulut faire une arme plus grosse que les autres, mais elle trébucha et tomba sur Wolfheim. Ils se retrouvèrent l’un en face de l’autre, soudain muets. Un instant passa, chacun s’était noyé dans le regard de l’autre. Les nuage pâles de leurs souffles s’entremêlaient.
- Tes cheveux… , finit par murmurer le jeune homme, ils sont vraiment blancs… comme la neige…
- Ah oui… ?
Elle se leva tant bien que mal, les joues cramoisies. Wolfheim se redressa lui aussi. Il sembla vouloir dire quelque chose, mais se ravisa. Son regard fut attiré vers le refuge et se durcit instantanément.
- Ils partent, dit-il.
Lucy se retourna pour voir Klein, Marc, Frank, Angus et Rickon lourdement chargés sortirent de l’abris. Le chef de l’expédition jeta un regard lourd à son fils, accompagné d’un bref hochement de tête en direction de Lucy. Les cinq hommes tiraient des traîneaux qui leur permettaient de ne pas avoir à tout porter. Ils avançaient cependant très difficilement dans la poudreuse et mirent une éternité à disparaître à l’horizon, sous les yeux silencieux de Lucy et Wolfheim.
- Avec toute cette neige, ils en ont pour trois jours. Bon débarras, fit ce dernier.
La jeune fille baissa les yeux, peinée.
- Tu… le déteste, ton père ?
Les yeux gris du jeune homme étaient comme des lames d’acier.
- Je le hais. Je le hais pour ce qu’il a fait à Kat’, je le hais pour être lui.
Lucy considéra avec tristesse l’ampleur de cette haine qu’elle ne faisait que toucher du doigt. Un nom avait cependant retenu son attention.
- Kat ? Qui est-ce ?
Avant qu’il n’ait pu lui répondre, ils entendirent la voix de Martha les appeler. Ils se dirigèrent vers la frêle femme rendue toute ronde par ses épais vêtements.
- Pourriez-vous chercher du bois ? Nous en avons très peu, quelques jours de plus et nous ne pouvions plus alimenter le feu.
- Bien sûr.
Elle leur confia une hache à chacun et un traineau pour transporter le bois. Ils gagnèrent la lisière de la forêt à une centaine de mètres de là.
Ramasser du bois fut un vrai calvaire. Les branches des sapins étaient enfouies sous la neige et les bouger pour les couper tenait de l’exploit. Malgré leur travail d’équipe, ils avançaient peu et le soleil déclinait vite. Au crépuscule, frigorifiés et épuisés, ils décidèrent de rentrer malgré leur maigre récolte.
Alors qu’ils émergeaient de la forêt, Wolfheim stoppa net.
- Qu’est-ce qu’il y a ? demanda Lucy.
Les yeux métalliques de son compagnon semblaient disséquer l’ombre des sapins, l’anxiété affleurant ses iris.
- Qu’est-ce qu’il y a ? répéta la jeune fille soudain inquiète.
Un mouvement attira alors son attention, elle tourna la tête et se figea de terreur.
Perché sur une bute à quelques mètres de là, un loup les fixait intensément. Un autre apparût à leur droite, puis encore un autre à leur gauche. Ils se retrouvèrent bientôt encerclés par six loups dans un silence oppressant. Les prédateurs ne grognaient pas, ils ne paraissaient même pas menaçants, pourtant leurs yeux jaune vif étaient avides.
Un instant muet s’écoula ainsi, d’une lenteur effrayée.
Puis, l’alpha perché sur le rocher enneigé, sans un bruit, banda ses muscles.
- COURS ! hurla Wolfheim.
Lucy sursauta comme si on lui avait donné un violent coup, elle fit volte-face et se mit à courir, son compagnon à sa suite.
Mais malgré le fait qu’elle marchait dans ses propres traces, elle avait la plus grande difficulté à se déplacer dans la poudreuse épaisse. À peine était-elle sortie du couvert des arbres qu’elle se faisait rattraper par deux loups.
L’un se plaça face à elle, l’empêchant de s’approcher du refuge. Il dévoila ses crocs jaunies et se mit grogner. Malgré son pelage épais et ses muscles saillants, ses côtés maigres étaient bien visibles. Lucy s’était arrêtée, saisie de terreur.
Il se rapprocha d’elle, elle put bientôt sentir son haleine nauséabonde. Les larmes lui vinrent aux yeux, mais la peur la tenait immobile. Alors qu’elle se croyait perdue, le loup se mit à fixer un point derrière elle, et se précipita vers la forêt.
Lucy se retourna au moment où Wolfheim hurla.
Elle poussa un cri horrifié. Un fauve lui avait bondit dessus et le plaquait à terre, un autre avait entrepris de déchirer ses habits. À moitié enfoncé dans la neige, il leva la tête vers elle, les yeux emplis de détresse. Pourtant, il n’appela pas à l’aide.
- Fuis ! cria-t-il.
- Wolfheim !
Il poussa un nouveau hurlement, le loup qui l’écrasait s’était enlevé et le tirait vers l’intérieur du bois, aidé par sa meute.
- Wolfheim ! hurla Lucy en voulant le rejoindre.
Au lieu de ça, elle tomba pathétiquement dans la neige. Le jeune homme tenta de s’accrocher, mais il était irrémédiablement attiré en arrière, traîné par les pieds comme un sac rempli de gourmandises. Gourmandises que les loups avaient hâte de goûter une fois tranquilles.
- Wolfheim !
Lucy s’était jetée en avant au moment où il disparaissait derrière les sapins. Les larmes jaillirent de ses yeux, se transformant rapidement en glace, et lui cisaillèrent les joues.
- Wolfheim ?! appela-t-elle.
Un cri de douleur et des jappements lui répondirent. Lucy tenta de se lever pour aller le rejoindre, mais son corps semblait soudain lourd comme du plomb.
- Wolfheim ?!
Un silence de mort lui parvint. Plus aucun bruit ne sortait de la forêt.
- WOLFHEIM !!!!
Un chant, longue note modulée, se fit entendre, et fut rejoint d’un second, puis d’un troisième. Magnifique et mélancolique, tels étaient les hurlements de victoire des loups.
Lucy poussa un cri de rage et d’horreur. Elle aperçut du coin de l’oeil Curtis, Philip et Craig accourir, suivis de Martha. Lorsque le regard de la mère rencontra celui de Lucy, elle comprit, et son visage se convulsa.
Ah oui ? Ça m'intéresse^^c'est un film d'animation du coup ?
Tu connais le théorème : si on voit pas le cadavre c'est qu'il est encore vivant. Wolfheim va tenir le coup jusqu'au minimum le prochain chapitre è.é
J'avais des trucs à dire mais la fin m'a tout fait oublier, bravo!
AH SI ! AJARUK ! je le kiffe trop, quand il joue dans la neige avec Oka c'est trop adorable ! je shippe Lucy avec Ajaruk a fond ! (ce qui n'est pas trop mal parti vu que la concurence est en passe d'audreylisation).
le "je t'ai eue", ça aurait été cool qu'il soit dans la langue natale d'Ajaruk je trouve ! (c'est ptêtre pas évident, aussi)
on connait maintenant les noms de toute la bande, je crois !
la suite au prochain chapitre... allez quoi rends nous wolfheim ! c'est trop triste qu'avec un nom comme ça il se fasse tuer par des loups :-( puis faut qu'il raconte a Lucy l'histoire de Kat !
Nan mais le coup de "si on voit pas le cadavre découpé en morceau et/ou brûlé c'est qu'il va revenir" ça marche quand même mieux avec les méchants...
Argh, LucyxAjaruk, tu sais au moins qu'il a le double de son âge ?
C'est une bonne idée, en vrai, mais c'est vrai que du coup Wolfheim et Lucy vont pas comprendre. Mmmmmh.... (trop de dilemne)
Oui, les sept mecs sont Curtis, Philip, Frank, Angus, Craig, Rickon et Marc. Oui, j'ai bien dit Craig...
Ah oui le nom c'est fait exprès XD (j'avoue c'est ultra sadique). Et pour le chapitre suivant (rdv mercredi prochain)... JEDISRIEN. Mais y a toujours Ajaruk pour raconter l'histoire de Katharina.
(il faudrait que je te passe le questionnaire aussi...)