Chapitre 5 : Un fameux trio

La vie s’organisa alors en deux parties : les moments où il avançait en compagnie de Chiara, et ceux où il restait seul dans sa cage. Elle venait à peu près une fois tous les deux jours et passait quelques heures à le balader dans le camp et ses alentours. Il observait le terrain en vue d’une évasion, du moins le tentait-il car les cheveux lisses et pâles de la guerrière attiraient tout le temps son regard. Elle lui expliquait tout de sa vie, de la Communauté. Il se fichait éperdument de sa tribu de cinglés mais il aimait entendre sa voix - nasillarde et désagréable - conter avec passion ce qu’elle aimait. Il la suivait comme un gentil toutou, commençant doucement à connaître les chemins et les habitants utopiques qui les créaient. Chiara s’était adoucie depuis leur première rencontre, mais elle n’en avait pas oublié sa langue acerbe pour autant, qui restait bien pendue sur ses lèvres fines. Le Baroudeur avait plusieurs fois été tenté de s’enfuir - elle lui laissait de plus en plus d’ouvertures - mais il ne l’avait pas fait. Il savait qu’il s’évaderait mieux en faisant semblant de les rejoindre. Oui, c’était ça. Il s’en tenait à son plan.

Du reste, la majorité du temps, il était assis contre le bois dur de sa prison. Kotla venait lui rendre visite fréquemment, et discutait avec lui d’une voix enjoué. Il était mignon, naïf et doux quand il parlait de la Communauté. Il répétait beaucoup de ce que Chiara disait, mais il mettait plus l’accent sur l’extraordinaire union de deux peuples et sur la bonté de chacun, là où sa sœur parlait de lutte et d’alliance. Kotla était beaucoup trop gentil pour ce monde-là.

Entre les barreaux de sa cage, le Baroudeur goûtait du regard à la liberté. Il détaillait le paysage pour en tirer l’air frais, la mélodie des rires et la vision de silhouettes qui couraient. Il connaissait par cœur l’écume du torrent qui courait près de lui et dont les eaux devenaient de plus en plus blanches alors que son cour de rétrécissait et bondissait dans la forêt. Il connaissait par cœur le près  en face de lui, où Chiara et Kotla aimaient jouer, ses bosses, ses fleurs vivaces et les petites têtes brunes des chiens de prairie qui émergeaient parfois de ce manteau verdoyant. Il connaissait par cœur les tentes à sa gauche, tous leurs habitants, tous les objets abandonnés sur le sol ou suspendus à des proéminences. Il pouvait décrire sans mal les arabesques que les différentes peaux cousues dessinaient sur leur flanc. Il avait compté les arbres de la forêt, et s’amusait à repérer les animaux les plus discrets et petits qui s’y cachaient, ainsi qu’à contempler leur ballet débridé une fois la nuit venue.

Oui, il connaissait ce paysage par cœur, bien mieux que tous ceux qu’il avait traversés. Et c’était ça qu’il détestait. À force d’observer, de détailler, de disséquer son environnement il ne décelait plus de surprise, de nouveauté. Tout était connu, prévisible. Ce paysage, aussi beau était-il, était devenu fade à ses yeux. Chaque journée, chaque nuit passée dans cette cage faisait enfler son envie de liberté. Il voulait de la découverte, il voulait courir sans retenue et chevaucher à bride abattue vers le soleil couchant, comme pour le toucher.

Il aimait quand Chiara venait le chercher avec son air malicieux, il aimait quand les sols et les visions se succédaient. Mais aussi agréable cette vie était-elle, sa liberté incomplète laissait au Baroudeur un goût amer coincé en travers de la gorge.

 

***

 

- Hey Bichou ! lança Chiara en venant un matin à l’aube.

Les menottes à sa ceinture s’entrechoquaient à chacun de ses pas. Elle balançait nonchalamment  ses hanches étroites, paraissant plus gaie que d’habitude.

- Qu’est-ce qu’il y a ? Tu as trouvé une nouvelle méthode de torture pour moi ?

- Hmmm, ç’aurait été appréciable, mais non. Au contraire, je pense même que ça va te plaire.

- J’ai peur.

Elle rit.

- Allons, sois un peu moins froussard. Tends ton poignets mon toutou.

Il eut un rictus agacé quand le métal froid se referma sur sa peau.

- Comme tu l’as sans doute remarqué, fit Chiara, il est tôt.

- Oui, c’est vrai, je ne savais pas que tu étais capable de ne pas faire la grasse mat’…

- Et ce n’est pas pour rien.

- Que tu ne sois pas capable de faire la grasse mat’ ?

- Que je suis venue te chercher si tôt.

- Ah.

- Vois-tu, j’ai convaincu Kotla de te faire prendre un peu l’air, tu commençais sérieusement à puer le renfermé. Et la déprime.

- Je puerais moins le renfermé si on me laissait libre.

- Patience, Bichounet, patience. Si tu es sage, peut-être qu’on te libérera.

- Je n’aime pas le « peut-être » dans cette phrase.

- Ah bon ? Je pensais que le « sage » te dérangerait plus. Il faut croire que je t’ai bien dressé.

- Ne t’inquiète pas, d’ici peu je serai dressé pour t’en mettre une.

- Tatata, il faut croire que le toutou a oublié que ses couilles étaient prises en otage.

- J…

- Vous avez fini de vous chamailler ?

Kotla s’avança, accompagné de trois chevaux. Il arborait un sourire mi-amusé mi-agacé.

- On va où ? s’enquit le Baroudeur.

- En patrouille de reconnaissance, pour repérer les mouvements des Automates. Ça va bien nous prendre quatre jours.

Le Baroudeur eut du mal à retenir son enthousiasme.

- Oh, regardez-le, on verrait presque une queue qui s’agite dans son dos, minauda Chiara. C’est si mignon.

Elle jeta un regard aux chevaux.

- Je prends Liberté ! s’exclama-t-elle.

- Ah non ! cria son prisonnier en se précipitant vers sa jument.

La jeune femme éclata de rire devant son visage.

- C’était une blague ! Ah mais c’te tête ! Il court, c’est fou, il va plus vite qu’un cheval.

- Peuh.

- Tu es sûre que tu ne veux pas monter avec lui ? demanda Kotla en ignorant leur bêtise. Montures séparées alors que vous êtes menottés…

- T’inquiète, j’ai pris une chaîne plus longue.

Elle monta son étalon noir, Orage, et considéra le Baroudeur de toute sa hauteur gagnée.

- Bon, tu montes ou tu dors ?

Il se jucha sur Liberté - qui semblait étrangement déçue - un œil méfiant posé sur la jeune femme. Kotla, lui, montait une jument baie nommée Louli.

- C’est parti ! s’exclama-t-il. Mais je vous préviens, pas de chamailleries ! Vous risquez de compromettre la mission.

- Tu l’as entendu, Bichou ? Sois sage, compléta Chiara.

Son frère se passa une main sur le visage.

- Je commence à me dire que c’était une mauvaise idée.

- C’est elle qui a commencé ! s’indigna le Baroudeur.

L’intéressée lui tira la langue et Kotla se frotta les yeux.

- Dépêchons-nous d’y aller avant que je ne change d’avis.

- Yahou ! cria Chiara en talonnant sa monture.

Elle fut vite suivie par Liberté, lancée au galop par son cavalier qui ne voulait pas se faire distancer. Une course s’engagea sous le regard déjà fatigué de Kotla.

 

***

 

Une journée à cheval et trois courses plus tard, ils étaient arrivés à la limité sud du territoire de la Communauté, entre le Désert Fourvien et la plaine Teppiante. Cette limite était matérialisée par un énorme rocher brun en forme de griffe, bien visible au-dessus du sable ocre.

- Lorsqu’on vous a libérés, indiqua Chiara. Les Automates faisaient route vers le nord à deux jours de cheval dans cette direction.

Elle pointa l’immensité rougeâtre mouchetée de buissons et de petits rochers.

- L’équipe de Kelô assure qu’ils ne se sont pas approchés de la frontière depuis, ils sont donc soit allés à l’est, soit à l’ouest, soit ils ont rebroussé leur chemin. On est chargé d’établir ça.

- Ça promet d’être long. Plus que quatre jours en tout cas, remarqua le Baroudeur.

- Sauf qu’on sait déjà qu’ils n’ont pas rejoint la Teppiante, à l’est. Ils doivent encore être dans le désert.

- Ok. Qu’est-ce qu’on attend, alors ?

- Il y a actuellement une tempête de sable au sud, on devrait commencer par l’ouest. De toutes façons, il y a peu de chance qu’ils aient rebroussé chemin. Ils doivent chercher à contourner territoire.

- Comment tu sais ça, la tempête ?

- Je t’ai dit que l’Esprit de l’Orage m’avait transmis une partie de Ses pouvoirs, non ?

- Et je n’y crois toujours pas.

- Tant pis pour toi, on pique à l’ouest.

- Avançons encore un peu en profitant du crépuscule, fit Kotla. On fera une pause au milieu de la nuit, quand on sera au plus froid.

Le Baroudeur renifla en contemplant le chemin qui les attendait.

- Je n’aime pas ce coin.

Kotla sourit.

- Ne t’en fais pas, il ne t’arrivera rien. Tu n’es plus prisonnier de la Compagnie.

- Non, je suis prisonnier de vous. Je ne sais pas ce qui est mieux.

- Tu insultes notre hospitalité ?! fit mine de s’indigner Chiara.

- Arrêtez de vous chamailler, pitié, supplia son frère.

Ils daignèrent se taire pendant le reste du trajet.

Le soleil rougeoyant baignait le paysage d’une lumière écarlate renvoyée au centuple par le sable, ils avaient l’impression d’avancer dans une mer de sang. C’était à la fois magnifique et glaçant.

L’astre souverain disparut bientôt au profit d’une nuit sans lune qui permit aux voyageurs de contempler le firmament pailleté. Le désert avait pris une couleur violacée étrange.

Les chevaux étaient épuisés quand ils s’arrêtèrent enfin. Ils n’avaient repéré aucune trace de la Compagnie.

- Je prends le premier quart, annonça Chiara en fixant l’horizon d’un air sombre.

Kotla s’approcha doucement d’elle.

- On est tout près ? s’enquit-il.

Elle hocha la tête.

- À trois cents mètres à peu près.

- J’aurais dû m’en souvenir, je suis désolé.

- Ne t’inquiète pas, j’ai appris à vivre avec.

- Mais de quoi vous parlez ? demanda le Baroudeur qui n’aimait pas quand il ne comprenait pas la conversation.

Les yeux bleu-gris de la jeune femme pivotèrent vers lui et semblèrent le disséquer. À peine discernables sur sa peau, ses sourcils blonds étaient froncés.

- Tu es curieux, dit-elle d’une voix au timbre étrange.

- Surtout quand tu fais cette tête.

- Ne sois pas indiscret, fit Kotla d’un air inquiet.

- C’est bon, Kou, je vais lui dire.

Elle s’approcha du Baroudeur qui, assis, dut lever la tête pour la regarder dans les yeux. Il vit l’orage dans ses iris d’acier.

- Nous nous trouvons près de l’endroit où mes parents ont été tués sous mes yeux, il y a une vingtaine d’années. Devine qui les a assassinés.

Le Baroudeur se pinça la lèvre.

- La Compagnie.

- Oui. Du moins la troupe de Poursuiveurs qu’était la Compagnie à cette époque.

Un silence s’agglutina entre eux, il dut résister à l’envie se baisser les yeux. Elle finit par reprendre, portant peu à peu son regard une scène qu’elle seule pouvait voir.

- J’avais huit ans. Cela faisait deux ans que mes parents avaient fui la République et franchit la Frontière. Ils étaient allés plus loin que n’importe qui à cette époque. Mais ce n’était pas pour rien. Mes parents étaient les derniers leaders de l’Opposition, un véritable symbole vivant pour tous les « terroristes » et autre fous que notre Guide condamnait. Alors Il n’allait certainement pas les laisser fuir. Ils m’ont emmenée avec eux dans ce nouveau monde, ils avaient trop peur que je sois prise en otage.

Elle marqua une pause, considérant l’horizon d’un air accusateur.

- Ils ont réussi à échapper aux Poursuiveurs pendant deux ans. Mais les trois derniers mois, ils les savaient proches. C’est pour ça qu’ils se sont aventurés dans le Désert, pensant qu’on n’oserait pas les suivre jusque là. Ils avaient torts. La lueur de notre foyer a attiré les limiers jusqu’à nous.

Elle déglutit.

- Mes parents ont été exécutés sans autre forme de procès. Mais moi, on ne m’a rien fait. Aucun ordre ne les obligeait à me supprimer et je n’avais plus aucune valeur en tant qu’otage. Ils ont été lâches, ils n’ont pas eut le courage d’abattre une fillette. Alors ils m’ont abandonnée dans le désert, me condamnant à une mort lente et douloureuse.

Elle inspira et tourna la tête vers Kotla qu’il lui souriait d’un air triste.

- Kotla et son père qui chassaient m’ont trouvée, assoiffée, affamée et traumatisée. J’étais sans doute la première Estienne qu’ils voyaient.

- Tu l’étais, affirma-t-il. J’ai pensé au début que tu étais malade à cause de ta couleur de peau.

Chiara eut un sourire tendre.

- Malgré ça, tu le vois, ils m’ont adoptée. La tribu n’a pas vraiment apprécié au début, mais ils s’en fichaient.

- C’est elle qui a eu l’idée d’une tribu rassemblant nos deux peuples. Elle s’est battue pour ça et elle a réussi.

La fierté brillait dans le regard du Pokla.

- Elle nous a prouvés qu’on pouvait vivre avec les Estiens et défendre nos terres, elle nous a prouvés qu’une femme pouvait tout à fait être une guerrière redoutable. Elle est à l’origine de la Communauté.

Un doux rose teinta les joues de Chiara.

- N’exagère pas, voyons.

Le Baroudeur fixait la direction que la jeune femme lui avait désigné.

- Le père de Kotla est revenu sur les lieux pour enterrer les corps, indiqua la guerrière.

- Ah. Mais, au fait, je ne l’ai jamais croisé, ce père.

Kotla se passa une main derrière la nuque, le visage assombri.

- Il est mort, lâcha-t-il.

- Il s’est fait tué par la Compagnie ?

- Non, il est mort d’une épidémie qui a ravagé la tribu, la ganriole.

- La ganriole ? Mais personne ne meurt de la ganriole, c’est une maladie bénine !

Chiara lui jeta un regard assassin et posa une main sur l’épaule de son frère.

- La ganriole est mortelle pour les Rouges-peau. Les premiers Estiens que j’avais invité dans la tribu l’ont apportée.

Elle planta ses yeux dans ceux de Kotla.

- Je suis tellement désolée, souffla-t-elle.

Il lui sourit et ses fossettes apparurent.

- Allons, tu sais bien que je t’ai pardonnée depuis longtemps.

Elle hocha la tête, le regard triste. Ses iris criaient qu’elle, elle ne s’était pas pardonnée.

Le Baroudeur les observa en silence, presque touché. Il ne se risqua pas à demander où était la mère de Kotla.

- Allez, fit soudain ce dernier. Au dodo, Barou !

- Barou ?

- Le Baroudeur, c’est nul comme nom, je vais t’appeler Barou. À moins que tu ne préfères Bichou.

- C’est très beau comme nom d’abord, et ne t’avise pas de m’appeler Bichou sinon je…

- Barou, alors !

- Mais…

- Au dodo le prisonnier !

Le Baroudeur grinça des dents mais ravala sa réplique, il déplia sa couche, matelas de bois tressé et couverture, et s’enfouit dedans. Il sentit Kotla faire de même non loin de lui. Chiara alluma un feu et se mit à le fixer. Il s’endormit en regardant les flammes danser dans ses iris bleu glacé.

 

***

 

Ils se réveillèrent peu avant l’aube et profitèrent de la fraîcheur matinale pour avancer. Malgré tout, un cagnar bien trop familier s’installa alors que le soleil approchait de son zénith. Ils cherchèrent l’ombre d’un rocher clément et finirent par se coller derrière une colonie abandonnée de termite qui avaient dressé un édifice colossal de dix-huit pieds de haut. Ils en profitèrent pour tenter de s’endormir, chose difficile quand ils étaient baignés d’une chaleur étouffante. Ils repartirent quand le soleil commença décliner et avancèrent jusqu’à ce que ce que le froid de la nuit les rattrape. C’est à ce moment qu’ils arrivèrent sur les lieux de l’évasion qui s’était tenue deux semaines plus tôt.

- On va dormir ici, annonça Chiara.

- Où en est la tempête, au sud ? s’enquit Kotla.

- Elle s’est apaisée, et je n’en ai repéré aucune dans notre direction.

- Pfff, fit le Baroudeur. Et vous y croyez, en plus.

- Tu feras attention pendant ton quart, dit Kotla en l’ignorant, j’ai aperçu des traces de rodin.

- Compte sur moi.

Le prisonnier balaya les alentours du regard. Les rodins étaient des fauves courts sur pattes qui arpentaient le désert en cette saison. Ils étaient très dangereux.

La Baroudeur se coucha et s’endormit bien vite, épuisé par le voyage, au son doux du crépitement du feu.

Il fut réveillé en sursaut par un rugissement. Il bondit sur ses pieds et fouilla ses vêtements mais évidemment, il n’avait pas d’arme. Il sentit sa chaîne se tendre et vit, à quelques mètres du foyer, un énorme monstre à la peau écailleuse se battre contre Chiara, couchée sur le dos. Elle tentait d’écarter le plus possible une mâchoire garnie de crocs jaunis de sa tête.

Kotla aussi s’était levé et il saisit une arme pour abattre un déluge de feu sur l’animal. Mais son cuire épais le protégea de graves blessures et ne fit que l’énerver encore plus. La jeune femme femme coincée sous lui eut un petit cri quand il faillit la décapiter de ses énormes griffes. Son frère, paniqué, saisit un couteau et fonça sur le fauve avec un cri de fureur et de peur mêlées.

- Arrête ! hurla le Baroudeur avant de lui arracher son pistol des mains.

Il visa précautionneusement la masse de chaire qui se tortillait à quelques mètres et tira deux fois. Ils atteignit le rodin dans ses deux yeux, et l’animal se cabra de douleur. Chiara en profita pour s’extraire de son emprise et trancha d’un geste vif la partie inférieure de sa gorge, son point faible. Le fauve rua tandis qu’un flot de sang se répandait sur le sol et finit par s’écrouler. Il n’avait pas cessé ses convulsions que la jeune femme courait déjà dans le désert.

- Qu’est-ce que tu fais ?! cria le Baroudeur qui était entraîné.

- Je vais chercher les chevaux, ils se sont enfuis ! Orage est blessé !

- Mais n’y va pas toute seule enfin ! s’exclama Kotla.

- Ils courent un grand danger ! répondit une voix déjà lointaine.

Après s’être munis de torches ses deux compagnons la rejoignirent. Ils retrouvèrent vite Orage qui, la tête basse, arborait de profondes traces de griffure sur le flanc. Liberté et Louli répondirent à leurs appels et revinrent, la crinière ébouriffée.

- Merci, dit Chiara de mauvaise grâce quand ils retournèrent au campement. De m’avoir aidée.

Elle semblait vivre son sauvetage comme un affront, sans doute une blessure d’orgueil.

- Oui, merci, approuva Kotla. J’étais complètement dépassé.

- Sans vouloir te vexer, avança le Baroudeur, je trouve que tu es très… hésitant pour un chasseur pokla.

L’intéressé sourit d’un air gêné.

- J’ai arrêté de chasser depuis longtemps.

- Ah bon, pourquoi ?

- Depuis la Cérémonie, j’ai reçu la bénédiction de Makou, l’Esprit de l’Harmonie. J’ai acquis la capacité de communiquer avec les animaux alors j’ai du mal à les tuer…

Le Baroudeur haussa un sourcil.

- Mouais.

- Bon, les gars, vous m’aidez à vider ce monstre ? lança Chiara.

- Tu veux bouffer ça ? fit le prisonnier.

- Oui, il y a plein de parties utiles et comestibles, alors on va pas gaspiller.

Il ne put retenir une grimace, il sentait déjà l’odeur nauséabonde de l’abdomen que la jeune femme venait d’ouvrir.

- Allez, je croyais que tu étais un aventurier.

- J’arrive…

 

***

 

Il n’eut pas le temps de dormir, ils repartirent bien vite en suivant les traces de la Compagnie. Comme prévu, elle s’était dirigée vers l’ouest. Chiara montait désormais Liberté avec le Baroudeur afin de reposer Orage ce qui rendait le voyage d’autant plus pénible. Ils suivirent les empreintes de pas régulières des Automates et les trous faits par leurs piquets pendant trois longs jours. Ils arrivèrent bientôt sur la partie ouest du plateau du Pageant et son climat plus clément, où ils purent avancer toute la journée. Dans la forêt, le sillage de la Compagnie était aussi visible que celui d’un troupeau de bisons Mais des bisons ordonnés.

Kotla fit soudain signe au groupe de s’arrêter. À quelques mètres, un arbres était marqué de symboles étranges.

- Ils sont sur le territoire des Kaplas, nous ne pouvons pas aller plus loin.

- Pourquoi ils sont allés ici ? s’enquit Chiara.

- Ils doivent chercher à contourner nos terres.

- Et s’enfoncer dans celles d’une tribu aussi puissante que la nôtre ?

- Ils sont en bordure, ils peuvent très bien longer leur frontière er remonter ensuite vers le nord.

- Je ne suis pas sûr qu’ils savent qu’ils sont sur une frontière, lança le Baroudeur. Vous sur-estimez leur connaissance de votre peuple.

Kotla hocha la tête.

- Dans tous les cas, ils ne viennent pas vers nous, nous sommes tranquilles. On enverra un émissaire aux Kaplas pour les prévenir mais normalement c’est bon. Allez, il est temps de rentrer.

C’est presque avec regret que le prisonnier tourna les rênes de Liberté vers le nord-est. Le voyage de retour fut plus agréable grâce au climat, et aussi moins mouvementé. Ils ne croisèrent pas d’autres rodins ou fauves de quelque genre et continuèrent tranquillement leur route. Cela aurait été une vraie croisière si a voix nasillarde de Chiara ne lançait pas ses oreilles d’incessantes piques. Lorsqu’ils arrivèrent en vue du camp, à peine quatre jours plus tard, il était à deux doigts de l’étriper.

Il ne put néanmoins pas s’empêcher d’avoir un mouvement de recul au moment d’entrer dans sa cage. Il jeta un regard à la jeune femme, qui pour une fois ne fit aucun commentaire acerbe.

- Allez, entre, souffla-t-elle presque avec douceur.

Le fer de ses menottes le quitta au profit des barreaux de sa prison. Il jeta un regard lourd à Kotla et Chiara qui s’éloignaient, libres.

 

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Guimauv_royale
Posté le 11/04/2020
Coquilles

- que son cour de (se) rétrécissait et bondissait en cascade dans la forêt.
- Tends ton poignets (sans « s ») mon toutou.
- peut-être qu’on te libéreras. (libérera)
- ils étaient arrivés à la limité (limite) sud
- il ne t’arriveras (arrivera) rien
- portant peu à peu son regard (vers ?) une scène qu’elle seule pouvait voir.
- Cela faisait deux ans qui (que) mes parents avaient fui
- et autre (s ?) fous que notre Guide condamnait.
- La jeune femme femme coincée sous lui eut un petit cris (sans « s »)
- un arbres (sans « s ») était marqué
- qui lançait dans son oreilles (sans  « s »)


Remarque

- N’exagère pas, voyons. (Je trouve que le « voyons » ne va pas bien là, ça fait un peu « je te gronde ». Je pense que ce serait mieux si soit tu le remplaces par exemple par «  non plus » soit tu l’enlèves)
- Ils n’étaient pas censé partir seulement 4 jours ? Parce que là ils sont partis beaucoup plus longtemps
AudreyLys
Posté le 11/04/2020
Merchi !
Sorryf
Posté le 15/07/2019
J'adore l'histoire de Chiara, et comment les deux peuples se sont alliés ! 
Quand le baroudeur dit : "personne meure de cette maladie enfin" ça m'a serré le coeur. Très bon passage, et super histoire tout ce petit "fllashback"
Je préfères Bichou a Barou perso ! je vais continuer a l'appeler Bichou ! 
Bichou+Chiara=love4ever FAITES VOUS UN BISOU PUTAIN !
Très bon chap, encore une fois. J'aime bcp que Kolta ne puisse plus tuer les animaux.
Je trouve que l'emprisonnement c'est bon, là, Bichou ne va plus s'enfuir si ? A mon avis ça fait longtemps qu'il est intégré dans le clan, je pensais que les chaines et la cage c'était plutôt un genre de jeu de Chiara, mais ça a l'air de bien peser à ce pauvre Barou, donc je pense qu'il faut que Chiara arrête !
Bien sur, si Bichou se barre des qu'il est libéré je ferais pas la maligne ! Donc... c'est entre tes mains ! Tant que j'ai la suite tout me va o/ 
AudreyLys
Posté le 15/07/2019
Ah, contente que les origines te plaisent ^^
Appelle le Bichou ça lui va bien XD mais c’est pas le genre de Kolta de l’appeler comme ça XD
Je croyais que tu étais team KoltaxBichou XDD
L’emprisonnement à la base c’est l’idée de Kolta mais Chiara en joue bien. Quand à Bichou... lui il se persuade qu’il va filer dès qu’il en aura l’occasion
Ah, ça, tu le découvriras dans le prochain chapitre ! Merci pour ta lecture et ton commentaire ! 
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