Chapitre 55

Le chantier du clos de l'ancienne prison touchait à sa fin : on s'affairait à couvrir d'ardoises la galerie qui longeait le mur attenant à la Grand'Place, et le préau qui l'élargissait, serti dans le coin le moins venteux. Les détenus s'attribuaient de nouvelles tâches au fur à mesure de l'avancée des travaux, s'assurant par eux-mêmes de ne pas se trouver désœuvrés. Hormis quelques uns, qui attendaient patiemment leur libération prochaine, ils ne souhaitaient pas plus réintégrer leur cellule que se retrouver à la rue, sans toit, sans amis parfois, sans travail. Chacun y allait de sa méthode pour se rendre indispensable. Un des mendiants, qui avait eu la main verte dans sa jeunesse, se mit en tête de débarrasser le clos de l'envahissant liseré-des-prés, et de bêcher un nouveau carré d'herbe au pied du figuier, aidé par le tonnelier qui envisagea d'y planter des ratices, du chou-rave et des pommiers, afin de nourrir le petit monde du dispensaire. S'ils ne coûtaient rien en nourriture, il serait plus difficile de les déloger, expliqua-t-il à ses comparses, ce qui incita aussitôt l'une des prostituée à réclamer des poules et une chèvre. Elle en construisait l'enclos, convaincue qu'on ne saurait les lui refuser, et que plus jamais elle ne vendrait son corps à ces cochons d'hommes. L'ébéniste et l'un des marchands nettoyaient les cellules avec plus de soin que ne l'aurait jamais une femme de chambre aguerrie, tandis qu'un autre des escroqueurs s'occupait des literies et veillait sur les malades : celui-ci avait nombre d'ennemis dehors, et ne souhaitait pas à avoir les affronter. La nourrice s'était définitivement installée aux cuisines, et fit preuve d'un sens de l'organisation remarquable, soumettant à ses directives la danseuse et le coutelier devenus inséparables, ainsi que l'étudiant, qui avait tant souhaité être libéré de la tâche des latrines qu'il devint un commis fort efficace, et cessa de geindre à tout bout de champ. Olga leur confiait parfois la confection des pommades et teintures les plus courantes, réservant le laboratoire aux manipulations plus délicates. Ainsi prenait vie le dispensaire, où les détenus se gardait bien d'évoquer les libérations que l'on avait négociées pour eux. Les geôliers eux-mêmes relâchèrent leur surveillance, et, parfois, jouaient aux cartes avec les prisonniers qui n'en avaient plus que le nom.

Olga avait désormais le temps de se consacrer entièrement à ses patients, et soignait sans relâche, tandis que Follet s'occupait des arrivants. Ses envolées de mots et ses pas de danse divertissaient la foule qui s'amassait sous le préau, les petits enfants surtout. Pour peu, il aurait gratté les cordes de son instrument. Il s'était inventé un classement de maux et de patients prioritaires incroyable de complexité, mais qui fonctionnait assez bien. Les blessures graves et grandes douleurs étaient traitées en premier, dans la salle où officiait Olga. Aux grippés, fiévreux et fronts blancs, Follet distribuait une décoction dont Olga avait confié la fabrication à la nourrice. Quand aux sang-bleus, on les réunissait dans une grande pièce qui fut jadis la salle de repos des geôliers, désormais couverte de litières de paille et de drap. Une douzaine d'entre eux, que l'on avait alités pour quelques nuits, la laissait expérimenter sur eux différents remèdes, dociles. Olga alla jusqu'à faire garder leurs enfants pour permettre aux veuves de se laisser soigner, ce qui fit sortir la seconde belle-de-nuit de son mutisme et de sa cellule : agressive et entêtée, elle rayonnait de bonheur dés qu'on lui confiait un tout-petit, et Olga lui en sut gré.

« Un monstre, Olga ! Un monstre ! »

Follet venait de faire irruption dans sa salle de soins, cheveux en bataille autant que cela fut possible tant ils étaient raides comme la paille. Le malade, un vieillard fort laid qui souffrait d'une méchante grippe sèche, crut que l'adolescent se riait de lui et en vibra de colère. Mais Follet était si blanc que le doute n'était pas permis : sa trouille était véritable. Olga le renvoya d'un geste agacé, mais cela ne fut pas suffisant.

« Olga, il y a un monstre dans le château ! Oh cet endroit est maudit ! L'archiviste est un sorcier, j'en suis sûr, il règne sur une horde d'esprits malfaisants pour nous... nous... Oh, j'ignore pourquoi, mais il cache des monstres dans sa tour, je te le jure ! »

Dommage que Lotte fut encore aux Bains, pensa Olga, elle aurait probablement bien ri.

« Et regarde ! Ton jardin est couvert de pousses, alors qu'hier ça n'était qu'un coin de terre retournée ! N'est-ce pas que c'était inquiétant, dis, tu as remarqué toi aussi ?! Oh, c'est ce monstre affreux qui en est la cause, assurément. »

La bouche d'Olga s'étira dans un sourire sous son nez long. Les pousses de pavot étaient en effet sorties de terre, ainsi que celles de colchique bleue, et de freyle. Si un tel monstre voulait ainsi entretenir son jardin chaque nuit, celui-ci serait bien aimable.

« Calme-toi Follet, qu'as-tu vu ?

– Un être démoniaque ! Les yeux percés de deux trous minuscules, vidés de leur couleur ! Des cheveux longs, longs, blancs comme le lait. Elle marche sans un bruit, elle ne dit rien, elle ne voit rien, on dirait pourtant qu'elle voit et qu'elle entend tout, oh, c'était répugnant ! »

La fillette aux yeux blancs, bien sûr. Ce n'était donc pas une apparition, elle existait bel et bien. Un geôlier ricana :

« M'est avis que notre ami bavard a rencontré la Muette !

– Eh, te moque point trop vite, t'as pas fait le fier, toi non plus, la première fois !

– Parce que toi si peut-être ?! Me fais pas rire. En tout cas, l'épervier à lunettes-là, ch'ais pas comment il fait pour pas hurler tous les matins... Une gamine pareille, c'est pas d'veine faut dire... Mais t'inquiète pas gamin, poursuivit l'homme en s'adressant à Follet, c'est qu'une fillette, bien née d'une bonne femme, pas d'une chimère ! L'est pas bien jolie, on te l'accorde...

– Pas bien jolie ?! s'exclama Follet, que la frayeur mettait hors de lui, PAS BIEN JOLIE ?! L'avez-vous vue, de vos yeux vue ? Mais elle est odieuse, elle est abjecte, infecte, repoussante, hideuse, atroce, ignoble, en un mot : monstrueuse ! Et mauvaise avec cela, j'en mettrais ma main au feu ! »

L'effroi de Follet était tellement authentique qu'Olga hésitait à intervenir. Elle-même avait été saisie de terreur, à la vue de sa silhouette pâle, presque incandescente. Mais on ne pouvait pourtant le laisser ainsi parler d'une fillette a priori inoffensive, et frappée de malchance...

« Allons, Follet, que vas-tu inventer ?

– Olga, je t'assure, elle dégage quelque chose de pas net... Et puis, le jardin, n'est-ce pas effrayant, cela aussi ?

– C'est moi qui ai planté, hier soir, voilà tout... »

Follet la regarda, l'air bête, bouche ouverte.

« Olga... Je sais bien qu'on dit que tu parles aux plantes mais... En une nuit ? Elles pousseraient en une nuit, tes herbes ?

– On n'a plus le temps pour ces bêtises-là, il y a du monde qui attend. Et si tu as du temps, va donc aider ces deux là-bas à planter leur semis... M'est avis que tu ne pourras pas être moins doué qu'eux. » 

* * *

Ilse regrettait d'avoir dû quitter Kaalun si rapidement, mais la venue de Devlin la consolait. Bien qu'elle aimât beaucoup sa vieille gouvernante, la compagnie d'un jeune prince aux joues rosissantes, éclatant de vigueur, était autrement plus excitante. Elle aimait regarder ses mains, qu'il avait fort belles : solides, nerveuses, imberbes. Rien à voir avec les mains des bûcherons, ni avec celles des scribes, non, c'était indéniablement des mains de prince, qui savaient manier la lame comme cueillir la clématite.

La forêt les protégeait du vent, bien que ses frondaisons soient déjà clairsemées sous ses assauts. Ilse n'avait jamais évolué au milieu de tant de feuillus, et leurs coupoles rousses, dorées, parfois écarlates. Le sol et les airs des Cimes ne toléraient que les sapineux, et leur vert immuable en toute saison. Elle voyait bien, à chaque saison des Nuées, des collines des Millesources se parer de couleurs chaleureuses, mais les plus proches se couvraient de mousses et de fougères, qui n'oscillaient qu'entre le vert et le brun à la morne saison. Elle ne connaissait pas les tapis de feuilles craquantes, qui égayaient même les sols et protégeaient mille minuscules vies sous leur couverture. Le soleil blanc tombait en tâches mouvantes sur leur dos, et marbrait la robe de leurs montures. Les bois fredonnaient la chanson des grands froids qui arrivent, quand les oiseaux se font discrets, et que la terre se prépare au sommeil des Glaces.

« Connaissez-vous bien ces lieux, Messire Devlin ? » demanda Ilse. Elle avait plus tôt essayé de l'appeler prince, mais l'effet en avait été trop étrange.

« Je les connaissais bien auparavant. Mon père y chassait, et je l'accompagnais. Les bois sont giboyeux par ici. Voyez, si la route est bien dégagée, la forêt en revanche est profonde, et les hameaux peu nombreux. Les chevreuils y prolifèrent. J'y ai même croisé quelques sabots-blancs, pendant les Glaces je crois. J'espère d'ailleurs débusquer quelque gibier que nous pourrons offrir à nos hôtes ce soir, à Bahrö... »

Bahrö était un village construit sur des sources chaudes, idée délicieuse aux oreilles d'Ilse. Cette particularité avait donné au hameau sa spécialité dans la teinture : on brassait les étoffes dans les cuvettes naturellement bouillonnantes des sources afin de fixer la couleur. Presque toute l'activité du village tournait autour de cet artisanat : il y avait les teinturiers, bien sûr, mais aussi les cultivateurs de chanvre, les fileurs et les tisseurs, sans compter les cultivateurs de couleur, orcanette et garance pour les roses, aigremoine pour le vert, et bois de campêche pour le bleu. Ilse avait aussi entendu dire que la région se nourrissait en grande partie de ragoûts de viande coriace qui mijotaient des heures dans la chaleur de l'eau soufrée. Avec le temps, Bahrö était devenu un creuset de populations qui témoignait de la grande variété des peuples des Terres-Mêlées. On disait même que certaines familles étaient descendantes des tribus barbares de l'est, et des nomades des terres centrales d'Otti-Jukka. Ilse hésitait néanmoins à aborder le sujet. Elle avait senti Devlin démuni devant son érudition, la veille, et ne voulait plus vexer son bel ami.

Surgissant de nulle part, une huitaine d'hommes leur barra la route, et avant qu'elle n'eut le temps de se retourner, il y en avait tout autant dans leur dos. Beaucoup avaient le teint verdâtre des amateurs de liqueur de freyle, et tous étaient lourdement armés. Ilse se sentit raidir de terreur devant les mines cupides et les sourires en coin. Des dents de métal y étincelaient. Des cotereaux de grand chemin, des sans-lois, puants, les doigts et les clavicules brillants de bijoux.

Ils étaient quinze en tout. Même avec Le Rocheu auprès d'elle, le rapport de force était déséquilibré. Elle le regarda, espérant lire dans ses traits quelque expression qui l'eut rassurée. Mais il ne cilla pas, se contentant d'observer les bandits en silence, avec moins d'expressivité encore que s'ils avaient été de vils billots de bois obstruant la route. Imperceptiblement, l'archer, Devlin et la vieille encadrèrent Ilse et sa monture. Ruth lui murmura d'une voix sourde et pourtant parfaitement audible de couvrir les oreilles de sa monture avec son capuchon de nuit alors qu'elle en faisait de même, ainsi que Le Rocheu. La vieille gouvernante semblait extrêmement concentrée. Des veines violacées pulsaient sous ses tempes. Et, alors qu'elle lui tournait le dos, elle s'adressa de nouveau à sa pupille, sans qu'aucun bandit apparemment n'en saisisse une bribe :

« Ce ne sont que des pendards avides, demoiselle, ils ne savent pas qui nous sommes ».

Cela avait-il pour but de la rassurer ? La jeune fille tourna la tête vers le prince, qui toisait le groupe, son deux-lames à la main. Son corps était entièrement bandé, prêt à l'affrontement. Son air timoré avait fondu face au danger, ce qui n'était pas le cas du jeune archer : les hommes étaient trop près, son arc ne lui serait d'aucune utilité, une fois la première flèche décochée.

Une voix saisissante de puissance emplit l'air. Quand Le Rocheu parlait, même la forêt se taisait.

« Que voulez-vous, mercenaires ? Il n'y a là que deux étudiants et leur escorte, rien qui ne vaille une bataille... »

S'avança alors celui qu'Ilse trouvait le plus effrayant de tous, un borgne à l’œil bandé, tout fait d'os et de touffes de poils hirsutes, qui leur adressa un sourire de dents taillées en pointe. Avec sa peau collée au squelette et ses membres longs, il lui évoqua un phasme, le seul insecte qui la répugnait depuis toujours. Et sa répugnance n'en fut que renforcée quand elle constata que c'était elle qu'il fixait de son œil unique, elle et nul autre. Ses compagnons, eux, lorgnaient sur Le Rocheu. A plusieurs, ils en viendraient peut-être à bout, mais ce n'était pas sans danger. En réponse à ces regards, le Rocheu descendit de sa monture, qui était tout sauf un destrier de guerre, s'empara d'une lourde masse ferrée d'une main, et d'un serpe-cœur monumental de l'autre.

Le borgne répliqua, d'une voix aigrelette. Ilse croyait pouvoir sentir son haleine malgré la distance qui les séparait, acide et faisandée...

« Des étudiants ? Ils sont bien escortés ma foi... T'es un sacré morceau, le géant, je dois dire. On doit se battre pour t'avoir. T'aurais pas cette tête de chien fidèle, j'essaierais bien de t'embaucher, mais je sens que c'est peine perdue... »

Un des cotereaux illustra les propos de son chef par un jappement fort réaliste, et les dents argentées se dévoilèrent complètement dans de grands éclats de rire, sans que les poignes ne mollissent sur les armes.

« Enfin, voici mon offre, vous tous. Videz les étriers, et balancez-moi bourses et frusques – sauf toi la vieille, reste habillée, j'ai pas envie de dégobiller – et si vous êtes bien sages, on vous laissera un dada pour rentrer. M'est avis que celui-ci doit pas galoper bien vite », ajouta-il en désignant le lourd percheron du menton, devant ses hommes hilares. Une brume glacée couvrit la nuque et le dos d'Ilse.

« Eh quoi, grinça Le Rocheu, tu veux enfiler la robe de la demoiselle ? Pour sûr, tu rentres dedans... »

Les deux secondes de silence parurent sans fin à Ilse, durant lesquelles elle vit les armes reprendre leur axe et les dos s'arrondir légèrement. Fin des sourires. Un cri, et l'assaut débuta dans un fracas de métal. Le Rocheu assomma trois hommes d'un jet, mais au corps à corps, sa masse ne lui fut plus d'aucune utilité et il s'en délesta. Le jeune archer transperça un unique combattant avant que sa poitrine n'accueille une lame, pendant que Devlin se défendait férocement. Sa capacité à anticiper les coups lui permettait de déjouer plusieurs lames à la fois, mais cette parade mobilisait toutes ses forces, et il ne toucha pas un seul de ses assaillants. Sous les yeux d'Ilse paniquée, le Rocheu fendait l'air de son arme immense, sans pouvoir frôler le chef des bandits qui se mouvait avec une agilité toute animale.

Acculés à combattre contre plusieurs, Delvin et le Rocheu ne purent empêcher que Ruth et Ilse ne soient saisies, poignets tordus pour calmer toute velléité de rébellion. L'agresseur d'Ilse combattait Devlin tout en la maintenant si fortement que son bras qui fut à deux doigts de se briser. Entre les larmes, elle vit Ruth, calme toujours, prenant une inspiration démesurée, si puissante que l'air changea de direction pour s'engouffrer dans ses narines dilatées. La vieille gouvernante ouvrit alors une bouche minuscule et grimaçante, et en fit sortir une longue note, suraiguë, stridente. Les yeux lui sortaient des orbites, et Ilse ne pouvait détacher son regard de sa vieille amie, métamorphosée, effrayante. Fascinée par cette vision, elle sentit à peine l'étreinte se défaire autour de ses poignets. Les chevaux de l'archer et de Devlin se cabrèrent violemment, alors que les cotereaux tombaient à terre, hurlant de douleur, les avant-bras plaqués sur le crâne. L'un d'eux se fourrait de la terre à pleines poignées dans les oreilles, et un autre s'enfuit à toutes jambes. L'archer inanimé tomba de son cheval qui détala en forêt, et Devlin avait toutes les peines du monde à contenir le sien. Ruth hurlait toujours, cramoisie, et les quelques hommes restants se roulaient à terre. Ilse réalisa alors qu'aucun de ses compagnons ne réagissait comme les hors-la-loi, qui subissaient une réelle torture. Le Rocheu y paraissait, lui, carrément insensible. Il se jeta sur sa monture, et lui fit signe de déguerpir, mais Ilse fut soudainement tirée vers l'arrière et vida les étriers. Un trait glacé immobilisa sa gorge, et Ruth arrêta net son chant.

La lame caressait le pâle cou d'Ilse, qui tressaillait sous l'effroi, les poignets de nouveau maintenus dans le dos, et, contre sa tempe, une mâchoire rugueuse, nauséabonde. Elle ne voyait pas l'arme mais devinait un fil tranchant, voué à égorger. Le Borgne se redressa avec difficulté, et grimaça un sourire entre ses lèvres inexistantes. Son nez et une des oreilles saignaient, mais il l'ignora.

« Bien essayé la vieille, je vois qu'on a quelque talent, ricana-t-il. Mais celui-là est sourd comme un pot, tu le mettras pas à terre avec tes cris de harpie. Et maintenant, garde ton bec cloué, sinon je donne pas cher de la peau de la pucelle. » Son œil unique eut un éclair de lubricité.

Devlin roulait des yeux affolés. Il n'avait pas su protéger la jeune fille, et son archer venait de rendre l'âme, les commissures maculées de bave rose. Il se tenait là, impuissant, alors que la gorge d'Ilse palpitait comme un moineau terrifié dans le creux d'une main.

« Tu as gagné le Borgne, déclara Ruth, nous te laissons nos bourses et quelques montures. Voici la mienne. Libère-la, maintenant. »

Le cri l'avait-il rendu sourd lui aussi ? Il ignora la vieille, et contemplait l'héritière des Cimes dont les yeux bleus-gris étaient écarquillés par la peur.

« Mm, j'ai changé d'avis. Je prendrai la fille aussi. Ça manque cruellement de jeunes beautés par ici », dégoisa-t-il, puis, s'adressant directement à Ilse « Tu vois ma belle, plein de gentils copains pour toi toute seule... »

Le bruit d'un homme sautant à terre lui fit faire volte-face. C'était Devlin, qui jeta ostensiblement ses armes, et se dirigea droit vers lui.

« Libérez-la et prenez-moi.

– Toi ? Et pourquoi ? Tu penses que ton petit cul est plus soyeux que son con ?

– Non, mais la rançon sera autrement plus intéressante. Je suis Devlin Tyr, fils et héritier de Saul Tyr, et futur roi des Terres-Mêlées. »

 

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Fannie
Posté le 13/02/2020
C’est vrai que la mystérieuse fillette n’a rien fait jusque-là qui puisse démontrer qu’elle est méchante ; a priori, ce n’est que son apparence qui est effrayante. Olga réagit avec prudence ; je crois qu’elle est bien avisée, quoiqu’on découvre par la suite. Il ne faudrait pas qu’elle ait l’air de pousser les gens à l’émeute. À part ça, tous ces anciens détenus qui se mettent au travail avec ardeur rendent l’ambiance sympathique. Mais pourra-t-on les garder ? Et si Evan meurt, le dispensaire subsistera-t-il ?
Les cotereaux sont des méchants bien répugnants sous tout rapport. J’espère que « les renforts » qui seront certainement appelés plus tard vont les massacrer comme il faut. Habituellement, je n’aime pas qu’on fasse du mal aux personnages, mais là, je n’ai aucune pitié. Ce que fait Devlin est chevaleresque.
Me voilà arrivée à la fin de ce tome. Tu nous as présenté la situation générale, les différents lieux, les personnages et les familles ou les groupes auxquels ils appartiennent, les alliances et les antagonismes, tu nous as montré leur quotidien, mais à part le fait qu’Olga a obtenu son dispensaire, j’ai l’impression que tu as surtout placé tes pions en nous donnant quelques indices, sans qu’on soit encore entré dans le cœur de l’histoire, là où les personnages doivent lutter pour les différents enjeux. Je ne me suis pas du tout ennuyée, mais je n’ai pas l’impression d’avoir lu un premier tome complet, une histoire qui pourrait se suffire à elle-même tout en ouvrant des portes sur une suite. En plus, tu nous laisses en plein suspens, avec un goût d’inachevé. En effet, dans le cas d’une publication, s’il te fallait des mois, voire une année ou deux, pour livrer la suite à tes lecteurs, je ne suis pas sûre que ce soit une bonne idée de les laisser attendre à ce point-là de l’histoire.
Il y aura encore du travail de réécriture, mais ton roman a du potentiel et tu as du talent.
Coquilles et remarques :
— au fur à mesure de l'avancée des travaux [au fur et à mesure]
— Hormis quelques uns, qui attendaient patiemment [quelques-uns]
— se mit en tête de débarrasser le clos de l'envahissant liseré-des-prés, et de bêcher [pas de virgule avant « et »]
— ce qui incita aussitôt l'une des prostituée à réclamer [des prostituées]
— avec plus de soin que ne l'aurait jamais une femme de chambre aguerrie [que n’en aurait]
— tandis qu'un autre des escroqueurs s'occupait des literies [escrocs]
— celui-ci avait nombre d'ennemis dehors, et ne souhaitait pas à avoir les affronter [pas de virgule avant « et » / ne souhaitait pas avoir à les affronter]
— La nourrice s'était définitivement installée aux cuisines, et fit preuve d'un sens de l'organisation remarquable, (...) qu'il devint un commis fort efficace, et cessa de geindre à tout bout de champ. [Je propose : Définitivement installée aux cuisines, la nourrice fit preuve d'un sens de l'organisation remarquable, (…) / pas de virgule avant « et »]
— où les détenus se gardait bien d'évoquer les libérations [se gardaient]
— Les geôliers eux-mêmes relâchèrent leur surveillance, et, parfois, jouaient aux cartes avec les prisonniers [pas de virgule avant « et » / je propose : ils jouaient même aux cartes]
— Olga avait désormais le temps de se consacrer entièrement à ses patients, et soignait sans relâche [pas de virgule avant « et »]
— un classement de maux et de patients prioritaires incroyable de complexité [« d’une incroyable complexité » ou « étonnant de complexité »]
— Quand aux sang-bleus, on les réunissait [Quant aux]
— elle rayonnait de bonheur dés qu'on lui confiait un tout-petit [dès]
— Follet venait de faire irruption dans sa salle de soins, cheveux en bataille autant que cela fut possible [les cheveux en bataille / Autant que cela fût possible (subjonctif imparfait)]
— Dommage que Lotte fut encore aux Bains [fût (subjonctif imparfait) ou soit (subjonctif présent), qui est préférable ici]
— Ton jardin est couvert de pousses, alors qu'hier ça n'était qu'un coin de terre [J’enlèverais la virgule avant « alors » pour la mettre après « hier ».]
— ainsi que celles de colchique bleue, et de freyle [bleu ; colchique est masculin / pas de virgule avant « et »]
— Une gamine pareille, c'est pas d'veine faut dire... Mais t'inquiète pas gamin, poursuivit l'homme en s'adressant à Follet, c'est qu'une fillette [virgule avant « faut dire » et avant « gamin » / point après « Follet »]
— Elle-même avait été saisie de terreur, à la vue de sa silhouette pâle [pas de virgule avant « à la vue »]
— parler d'une fillette a priori inoffensive, et frappée de malchance… [pas de virgule avant « et »]
— M'est avis que tu ne pourras pas être moins doué qu'eux [que tu ne peux pas ; on est doué ou on ne l’est pas : c’est du domaine de l’inné]
.
— bien que ses frondaisons soient déjà clairsemées [ou fussent (subjonctif imparfait)]
— Ilse n'avait jamais évolué au milieu de tant de feuillus, et leurs coupoles rousses [Je propose « au milieu de tant de feuillus, sous leurs coupoles rousses » ou « au milieu de tant de feuillus aux coupoles rousses ».]
— Le sol et les airs des Cimes ne toléraient que les sapineux [« sapineux » n’existe pas en tant que famille d’arbres ; il y a les résineux, les conifères, mais certains perdent leurs épines en hiver ; les pinacées, peut-être ?]
— Elle voyait bien, à chaque saison des Nuées, des collines des Millesources se parer de couleurs chaleureuses, mais les plus proches se couvraient de mousses et de fougères [Je dirais « certaines collines ».]
— Le soleil blanc tombait en tâches mouvantes sur leur dos, et marbrait la robe [en taches (sans accent circonflexe) / pas de virgule avant « et »]
— Mon père y chassait, et je l'accompagnais / la forêt en revanche est profonde, et les hameaux peu nombreux [pas de virgule avant « et », les deux fois ; tu peux en mettre une avant « peu nombreux » pour indiquer l’ellipse du verbe]
— J'y ai même croisé quelques sabots-blancs, pendant les Glaces je crois. [J’enlèverais la virgule après « sabots-blancs » pour la mettre avant « je crois ».]
— On disait même que certaines familles étaient descendantes des tribus barbares de l'est, et des nomades [pourquoi pas simplement « descendaient des tribus » ? / de l’Est (ici c’est une région) / pas de virgule avant « et »]
— et avant qu'elle n'eut le temps de se retourner [qu’elle n’eût ; subjonctif imparfait]
— Beaucoup avaient le teint verdâtre des amateurs de liqueur de freyle, et tous étaient lourdement armés. [Pas de virgule avant « et »]
— espérant lire dans ses traits quelque expression qui l'eut rassurée [l’eût rassurée ; mais « qui la rassurât » est plus correct]
— sans qu'aucun bandit apparemment n'en saisisse une bribe [ou n’en saisît (subjonctif imparfait)]
— Ses compagnons, eux, lorgnaient sur Le Rocheu. A plusieurs, ils en viendraient peut-être à bout [lorgnaient Le Rocheu ; on lorgne qqn et pas sur qqn / À plusieurs]
— s'empara d'une lourde masse ferrée d'une main, et d'un serpe-cœur monumental de l'autre [pas de virgule avant « et »]
— Le borgne répliqua, d'une voix aigrelette [pas de virgule avant « d’une voix »]
— Videz les étriers, et balancez-moi bourses et frusques [pas de virgule avant « et »]
— mais cette parade mobilisait toutes ses forces, et il ne toucha pas [pas de virgule avant « et »]
— qui se mouvait avec une agilité toute animale [tout animale ; ici, « tout » a valeur d’adverbe]
— en la maintenant si fortement que son bras qui fut à deux doigts de se briser [que son bras fut]
— L'un d'eux se fourrait de la terre à pleines poignées dans les oreilles, et un autre s'enfuit à toutes jambes. L'archer inanimé tomba de son cheval qui détala en forêt, et Devlin avait toutes les peines [pas de virgule avant « et », les deux fois / mais je propose « qui détala en forêt alors que Devlin »]
— Ilse réalisa alors qu'aucun de ses compagnons [s’aperçut alors (pour éviter l’anglicisme « réalisa »)]
— Il se jeta sur sa monture, et lui fit signe de déguerpir / Un trait glacé immobilisa sa gorge, et Ruth arrêta net son chant [pas de virgule avant « et », les deux fois]
— Bien essayé la vieille, je vois qu'on a quelque talent, ricana-t-il [virgule avant et point après « la vieille » / ricaner n’est pas un verbe de parole, ni un verbe auquel se substitue naturellement l’idée de parole : fit-il (constata-t-il, observa-t-il) en ricanant]
— Il n'avait pas su protéger la jeune fille, et son archer venait de rendre l'âme [pas de virgule avant « et »]
— Tu as gagné le Borgne, déclara Ruth, nous te laissons nos bourses [virgule avant « le borgne » (minuscule) / point après « déclara Ruth »]
— Il ignora la vieille, et contemplait l'héritière des Cimes dont les yeux bleus-gris étaient écarquillés [pas de virgule avant « et » / « et contempla » ou « , contemplant » / bleu gris ; les adjectifs composés de couleur sont invariables]
— « Mm, j'ai changé d'avis. Je prendrai la fille aussi. Ça manque cruellement de jeunes beautés par ici », dégoisa-t-il, puis, s'adressant directement à Ilse « Tu vois ma belle, plein de gentils copains pour toi toute seule... » [virgule avant « par ici » / point après « dégoisa-t-il » / deux points après « à Ilse »]
— qui jeta ostensiblement ses armes, et se dirigea droit vers lui [pas de virgule avant « et »]
— Je suis Devlin Tyr, fils et héritier de Saul Tyr, et futur roi des Terres-Mêlées [pas de virgule avant « et » ; pour éviter d’avoir deux fois « et », tu peux enlever celui qui précède « futur roi »]
Il me semble que mes relevés des derniers chapitres sont particulièrement longs ; tu as probablement écrit un peu vite.
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