Solène ne parle plus, alors je suppose que ça y est, elle a dû retourner dans son corps. Je suis déçu pour elle, mais là, elle n’avait pas vraiment le choix, c’était une question de vie ou de mort pour sa hérissonne.
C’est un peu triste, tout ce silence, surtout que ce soir, on était particulièrement bavards télépathiquement, vu qu’on a été séparés tout de suite.
Quant à mon hérisson, il continue de se promener tout en mangeant tout ce qu’il trouve à sa portée.
— Aïe !
Mon hérisson se fige tellement je suis surpris d’entendre encore la voix de Solène dans ma tête.
— Solène ? Tu es toujours là ?
— Bah oui.
— Mais je croyais que tu étais retournée dans ton corps ! Tu ne peux pas laisser ta hérissonne coincée comme ça, elle risque de mourir !
— T’arrêtes un peu de paniquer ? Tonton est là, il est en train d’essayer d’enlever le filet qui me bloque.
— Tonton Marty ?
— Bah oui ! Évidemment que je ne parle pas de tonton Fernand qui a 98 ans et plus toutes ses dents hein ?
— Tu aurais pu me le dire qu’il était arrivé, je ne t’entendais plus alors je croyais que tu étais partie. Au fait, il s’en sort ? Pourquoi tu as dit « aïe », tu t’es fait mal ?
— Oui, j’ai mal au museau, je crois que je suis blessée. Oh attend, chut ! tonton me parle.
Au tour de Solène de me dire chut alors je parle même pas. J’ai envie de râler pour le principe, mais elle reprend la « parole » :
— Bon, tonton dit qu’il va soigner ma hérissonne- Oups !
— Qu’est-ce qu’il y a cette fois ?
— Tonton nous a attrapés et ma hérissonne s’est mise en boule… sur son doigt. Heureusement que je savais que les hérissons peuvent tomber de haut sans se faire mal, parce qu’il nous a carrément lâchés !
Tiens, je n’ai rien lu à ce sujet, on peut se coincer le doigt quand un hérisson se met en boule ? C’est toujours bon à savoir !
Par contre, c’est assez angoissant de ne pas voir ce qu’il se passe. C’est comme avec les bébés, je suis obligé de poser des questions si je veux satisfaire ma curiosité.
— Il a mis des gants avant de vous attraper pour pas se faire piquer ?
— Non. Il n’a peut-être pas eu le temps. Ou alors il voulait que ma hérissonne reconnaisse son odeur pour ne pas avoir peur ? Mais bon, elle a peur quand même, il faut dire que se retrouver coincée dans un filet, c’est assez éprouvant.
— Et ?
— Et on rentre dans la maison, il y a plein d’odeurs que je ne connais pas, ils ont un bon flair les hérissons ! Je suis toujours en boule.
— Et ?
— Pff… et il essaye de dérouler ma hérissonne pour pouvoir voir son museau et la soigner. Mais il n’y arrive pas. Je pourrais l’aider, mais on a dit qu’on n’intervenait pas… du coup, je me déroule ou pas ?
— Je suppose que non… mais bon, d’un autre côté, tu es blessée, ce serait mieux qu’il puisse te soigner.
— Je vais attendre un peu, il est en train de râler, c’est marrant.
Je rigole en imaginant tonton essayer de dérouler le hérisson. Tant pis pour lui, il n’avait qu’à se renseigner comme nous, alors il saurait comment faire !
— Alors ? Il y arrive ?
— Oui, je n’ai pas eu besoin de l’aider au final.
— Et maintenant ?
— Tu ne veux pas arrêter de me harceler ? Je te raconterais plus tard !
Oh ! Elle exagère ! Pour la peine, peut-être que je ne lui dirais pas ce qu’il se passe avec mon hérisson !
Enfin, si jamais le mien fait autre chose que se promener et manger… Il arrive plein de choses à Solène, mais à moi, rien du tout, c’est vraiment nul.
Évidemment, c’est à ce moment-là que je réalise que j’ai parlé trop vite et que j’aurais mieux fait de me concentrer sur mon hérisson au lieu de ma conversation mentale avec ma sœur.
*** Informations documentaires ***
Il est fortement conseillé de prendre des gants pour attraper un hérisson. Pas seulement parce que (ouille !) il a des piquants bien durs s’il se met en boule, mais surtout pour éviter les maladies (gale, salmonellose) et les parasites (puces, tiques) dont ils sont parfois porteurs.
Quant aux bébés qui n’ont pas encore leurs piquants bruns, interdiction formelle de les toucher, sauf urgence, car leur mère pourrait les rejeter.