CHAPITRE VI – Douce brise.
« En faisant claquer ses talons sur le bitume, Lily-Rose s'amusa à penser à ses dernières semaines. Janvier touchait bientôt à sa fin. Pour autant, le premier mois de cette nouvelle année avait suivit son cours, calme mais bien remplit. Elle avait essayé de se recentrer davantage sur elle même, sur sa vie, sur son monde. Elle avait joué le rôle de la gentille et tranquille petite Lily, voyant régulièrement ses amis, rendant ses chapitres à l'avance, et avait même fait une agréable rencontre.
Baptiste.
Ils s'étaient revus quelques fois, avaient partagé de bons moments autour de plusieurs verres, et elle s’apprêtait à le rejoindre à l'instant même. Le garçon gentil qu'il était l'apaisait, et elle avait apprit à apprécier sa compagnie. Essentiellement parce qu'il l'empêchait de penser à quoi que ce soit. Ou plutôt à qui que ce soit. Mais elle avait décidé de ranger Adam dans une partie bien fermée de son cerveau. Penser à lui lui faisait bien plus de mal que de bien.
Et la fragilité de Baptiste lui plaisait, réellement. La conversation était simple, leurs entrevues également. Elle le désirait, mais pas avec la même ferveur dont elle pouvait ressentir avec le bel Adam. Baptiste, c'était un peu le courant calme et doux d'été, coulant dans une petite rivière le long d'un champs verdoyant de campagne. Elle s'était décidé de ne plus le voir comme une proie, mais comme une personne.
Parce que cette personne lui faisait un bien fou.
Et que Lily-Rose savait accepter ce que la vie lui offrait. Et pour une fois, il s'agissait d'un terrain sec et non boueux.
En apercevant le jeune homme assit à la terrasse d'un café, elle ne put empêcher un sourire attendrit envahir son visage. Une bière entre les paumes, il fouillait sur son téléphone d'un air absent. Vêtu d'un épais manteau camel, d'un pantalon brun chaud, et de chaussures de villes assorties, il semblait irradier, sous le soleil hivernal. Ses cheveux voletaient doucement sous la brise, et sa légère barbe lui donnait un côté bien plus affirmé que le rasage de près qu'elle avait pu remarquer le soir du Nouvel An.
En la voyant, un sourire éclatant le traversa. Il semblait réellement ravi de la voir. Ce qui toucha encore davantage la grande brune.
_ Désolée pour le retard, s'excusa Lily-Rose en lui embrassant la joue.
_ Aucun soucis. Je t'ai commandé un Chardonnay, ça te vas ? Je me suis rappelé que tu aimais ce vin.
_ C'est parfait, sourit la jeune femme en s'asseyant.
Il lui répondit en une moue craquante, puis bu une gorgée de sa bière lorsque le verre de vin fut servis.
_ Je voulais savoir Lily, comment ça se fait que tu aies décidé de me revoir, après la soirée ? Non pas que ça m'ait déplu, bien au contraire, et j'adore ta compagnie, mais ça m'a étonné. Je ne pensais pas que tu étais le genre de fille à rappeler.
_ Peut-être tout simplement que j'en avais envie, répondit-elle avant de poser ses lèvres sur le bord de son verre.
_ Oui, mais ça ne me dis pas vraiment pourquoi. Je sais pas, au premier abord, tu sembles la fille intouchable, qui n'est pas sujet à revoir.
Lily-Rose reposa son vin, puis sonda les yeux de son interlocuteur. Son océan semblait légèrement perdu, peut-être. Mais quelque peu malicieux. Les dernières fois où ils s'étaient revus, ils n'avaient pas flirté une seule fois. Peut-être lui tendait-il une perche. Lily-Rose connaissait mal les codes voués à la simplicité d'une relation. Elle se contenta alors de répondre avec franchise, se disant que, dans tous les cas, c'était bien la seule chose pouvant ne pas lui être nuisible.
_ Tu m'as intriguée. Et tu m'as plu. T'avais l'air d'un chouette type, en réalité. Et, je l'ignore, je crois que j'ai laissé agir mon instinct. Je dois dire que je ne le regrette absolument pas, j'apprécie vraiment les moments qu'on a passé ensemble.
Baptiste paru satisfait de sa réponse, en vue de l'éclat de bonheur dont son être irradiait.
Non, Baptiste n'était pas une proie.
Baptiste, c'était un mec bien. Un bon bougre.
Contrairement à Lily-Rose.
L'après-midi fut agréable. Baptiste et Lily-Rose s'amusèrent à se raconter des commérages de leur vie respective, à parler du temps exceptionnellement doux, et de leur monde. Comme si ils cherchaient tous deux à partager le plus possible avec l'autre, de rattraper une sorte de temps perdu qui n'avait pas réellement lieu d'être. Baptiste parla à Lily-Rose de sa petite sœur de dix-sept ans, de ses parents vivant en Normandie, de ses derniers dessins, de ses amis. Le jeune homme, du haut de ses vingt-sept ans, avait vécu une vie paisible, avec des parents le poussant à vivre de sa passion, et jouissait d'un cadre plus que bénéfique ici, à Paris. Il avait beaucoup voyagé dans sa vie, et préparait un nouveau périple au Sénégal d'ici quelques mois. Il lui expliqua le bleu de la mer à Majorque, le froid grisant de Moscou, et la pauvreté de l'Inde. Lily-Rose buvait ses paroles, la jeune femme s'étant contenté du Royaume-Uni et de la France comme uniques destinations. Quand à elle, elle lui narra sa rencontre avec Grégoire et Noa, son arrivée en France, son adoration pour ce pays, et son amour envers les livres et la peinture.
Ce fut, en pleine discussion sur la fantastique Aloïse Corbaz, artiste brut du dix-neuvième siècle, alors que la journée touchait à sa fin, que Lily-Rose décida de faire le premier pas.
_ Il commence légèrement à faire froid. Que dirais-tu de finir cette discussion chez moi ? J'habite pas loin, tenta-t-elle en serrant davantage sa veste contre elle. Son excuse n'était pas vraiment bidon. Elle ressentait réellement l'air frais faire frissonner sa peau. À moins que ce ne soit de l'anticipation.
_ Pourquoi pas. Je règle l'addition et on y va, répondit Baptiste, avec son éternel air bienveillant.
Pendant qu'ils marchaient côtes à côtes, le bras de Baptiste vînt frôler à plusieurs reprises celui de Lily-Rose. Elle ne put que s'en réjouir. Le trajet fut marqué par le bruit des talons de la jeune femme sur les dalles des petites ruelles, et de la douce voix de Baptiste. Il expliquait son rêve de finir dans l'animation à Lily-Rose, qui l'écoutait d'une oreille attentive. Le côté rêveur du blond la rendait quelque peu nostalgique, se rendant compte que, elle même, n'en possédait pas. Elle avait toujours voulu traduire, mais cela était davantage dû à sa passion pour les mots et son expertise anglaise que par un quelconque rêve. Elle aussi, souhaitait découvrir le monde, mais cela ne la pressait pas tant que ça. Lily-Rose avait toujours vécu au jour le jour, et, pour elle, penser à un quelconque but était inconcevable. Elle savait ce qu'elle voulait, ce qui l'enrichissait, mais penser à quelque chose au bout de son chemin la terrorisait. Elle préférait nettement ne rien savoir, et continuer à avancer dans le brouillard. En réalité, la quête perpétuelle de Lily-Rose n'était autre que le bonheur. Ce qu'elle souhaitait plus que tout, c'était se retrouver, un jour, quelque part, et se dire « Là est ma place ».
Pour Lily-Rose, le temps ne pressait pas. Elle avait encore largement l'occasion de vivre ce moment à un point donné, et c'était juste qu'il n'était pas encore arrivé. Sa vie lui plaisait, et c'était amplement suffisant.
_ On est arrivé, murmura-t-elle en s'arrêtant en bas de son immeuble.
En gravissant les escaliers, le silence planait. C'était bien la première fois que Baptiste se terrait dans son mutisme.
Lily-Rose n'en fit pour autant aucune formalité. Elle se contenta d'atteindre son palier, d'ouvrir la porte, et de l'inviter à entrer dans son antre.
Baptiste semblait tout enregistrer. La petite cuisine américaine, le gros canapé entouré de deux sièges en contre-bas face à la télévision, le lit en face, la grande bibliothèque, l'ordinateur sur la table basse, et le cendrier accompagné d'un verre de vin vide sur le rebord de la fenêtre. En s'y asseyant la dernière fois, Lily-Rose avait oublié de le ranger.
Il se débarrassa de son manteau sur une des chaises, puis pointa la fenêtre légèrement ouverte.
_ Tu as pas peur d'avoir froid ? S'amusa-t-il.
_ C'est pour mon chat, j'ai pas de chatière, alors en contrepartie je laisse ouvert. Et paie deux fois plus le chauffage. Tu veux un verre ?
_ Avec joie. La même chose que toi.
La jeune femme sortit deux bières de son frigo, puis lui en tendit une. Elle se dirigea à ses côtés, et s'assit sur le canapé.
_ Je pensais que tu allais nous servir du vin, en voyant ton adoration envers le Chardonnay, fit-il remarquer en s'asseyant à côté d'elle.
_ Je n'aime pas que le Chardonnay, se contenta-t-elle de répondre.
Baptiste posa sa bouteille sur la table basse, puis en fit de même avec celle de Lily-Rose. Elle n'en comprit pas immédiatement la raison, mais ça lui sauta à l'évidence lorsque ses yeux rencontrèrent ceux de son compagnon.
L'océan était mouvant. Dilaté. Et l'engloutissait. Baptiste approcha lentement ses lèvres vers les siennes. Puis, dans un doux murmure, l'embrassa avec délicatesse, vénération, en une valse sensuelle et langoureuse. Lily-Rose dû faire appel à toute sa retenue pour ne pas chercher à prendre les commandes, à aller plus vite, plus fort, à être la prédatrice qu'elle était.
Aujourd'hui, elle était avec un homme. Non une proie. Et ce n'était pas pour lui déplaire.
Elle crocheta ses mains derrière sa nuque, se collant davantage à lui, approfondissant leur baiser. Baptiste laissa échapper un grognement rauque de sa gorge, puis attrapa les hanches de la jeune femme. Il les fit basculer, de sorte à ce que Lily-Rose soit à califourchon sur ses jambes. Ses mains passèrent sous son pull, caressèrent délicatement sa peau en une délectable et lente torture. Ses doigts la frôlaient à peine, mais tout son corps frissonnait à leurs contacts. Lily-Rose gémit. Elle perdait de sa contenance, et entreprit de déboutonner la chemise de Baptiste de ses doigts adroits et sûrs, néanmoins tremblants sous l'effet de l'excitation.
La grande brune, elle la sentait, son excitation à lui, d'ailleurs. La bosse de son pantalon appuyait douloureusement contre son humidité.
Elle fit courir ses mains sur le torse bien dessiné du garçon, titillant du bout des pouces son nombril, ondulant du bassin en même temps. Ses lèvres quittèrent sa bouche, puis vinrent mordiller le lobe de son oreille.
Baptiste la bascula à nouveau, avec davantage d'impatience. Il fit tomber sa chemise, puis souleva le pull de Lily-Rose, la découvrant ainsi à moitié. Il empoigna un de ses sein d'une main, le malaxant à travers son soutien-gorge, puis descendit l'autre plus bas. Bien plus bas. Il déboutonna son jean, puis le fit glisser le long de ses jambes. Lily-Rose débattit des pieds pour s'en débarrasser. Elle était désormais en sous-vêtements devant lui.
_ C'est injuste, souffla-t-elle à son amant, en agrippant sa ceinture.
Il lui offrit un regard de braise, puis se laissa dévêtir. Lily-Rose fit descendre son pantalon et son caleçon en même temps, dévoilant ainsi la nudité de son partenaire. Et sa virilité, fièrement dressée pour elle.
_ Maintenant, c'est toi qui es injuste, murmura-t-il en passant une main dans son dos, dégrafant ainsi son soutien-gorge, et dévoilant sa poitrine ferme et généreuse.
Son autre main enleva sa culotte en dentelle. Il fit promener son regard le long du corps de la jeune femme, l'embrassant de l'azur de ses prunelles.
_ Tu es si belle.
Lily-Rose se contenta de lui sourire, puis de l'embrasser passionnément. Les mots doux, très peu pour elle.
Elle empoigna son sexe d'une main, entamant un mouvement de va et vient rythmé sur leur respiration saccadée. Lui, descendit ses doigts sur sa fente humide. Il tourna son pouce autour de son clitoris, sans jamais le toucher. Elle était dans l'attente. Et ça en devenait insoutenable.
_ Prends-moi, Baptiste, suffoqua-t-elle en ancrant ses yeux aux siens.
Sans plus de cérémonie, il la pénétra. Avec délicatesse. Presque trop. Lily-Rose avait l'impression qu'il agissait avec elle comme si il s'agissait d'une jeune vierge. Elle planta ses mains dans son dos, enroula ses jambes autour de ses hanches, puis le poussa à aller plus loin, plus fort.
Ce qu'il sembla comprendre. Il resserra sa prise autour de la jeune femme, puis s'enfonça de plus en plus profondément en elle. Lily-Rose accompagnait ses mouvements, ondulait des hanches, soufflait bruyamment. Elle mordillait son épaule, pendant que lui, titillait son cou de sa langue.
C'était sacrément bon.
La valse prit fin pour laisser la place à un tango torride. Les deux corps se mouvaient avec grâce, simultanément, mêlant force et passion.
Pourtant, lorsque Baptiste jouit cette nuit là, s'endormant rapidement contre le sein de Lily-Rose, la jeune femme resta sur sa faim.
Lily-Rose se retrouvait grandement frustrée.
La prédatrice n'avait pas eu d'orgasme.
*
« Hey Lily, c'est Baptiste, c'était pour prendre quelques nouvelles. Merci encore pour hier, c'était... Dingue. Rappelles-moi. »
*
« Ouais, Lily, c'est encore moi. Est-ce que ça te dirai d'aller manger un bout ensemble ce soir ? J'offre le restau'. Tiens-moi au courant. »
*
« Bon, j'imagine que pas de nouvelles bonnes nouvelles. Si j'ai fais quelque chose de mal, dis-le moi, plutôt que de te terrer dans l'oubli ! »
*
« Lily ? Sincèrement, je commence à m'inquiéter. Je te le répète, si j'ai quoi que ce soit t'ayant blessé, j'en suis désolé. Appelles-moi quand tu as le temps. »
*
« Bon. Voilà deux semaines que je te harcèle. Tiens moi au jus quand tu reprends vie. Bonne journée. »
Lily-Rose lu d'un air absent le message qu'elle vînt de recevoir. Puis, verrouilla son téléphone, sans y prêter davantage attention.
_ Alors comme ça, ce Baptiste, c'est le mec avec qui tu étais à la soirée de Grégoire ? Demanda Noa avant de prendre une fourchette de sa salade.
_ Exactement. On s'est revu, on a couché ensemble, fin de l'histoire. Et depuis, il n'arrête pas de m'envoyer des messages. Mais bon. Je ne peux pas lui en vouloir, répondit Lily-Rose en buvant une gorgée de vin.
_ Mais c'était si nul que ça, pour que tu ne lui répondes pas ?
_ Non, c'était même très bien. Mais, après coup, je me suis rendue compte que je n'avais pas envie de recommencer, ou de commencer, quoi que ce soit.
_ Je vois. Une simple histoire de cul, alors.
_ Une simple histoire de cul, affirma la jeune femme.
Noa laissa échapper un rire, puis posa ses couverts dans son assiette vide. Pour ce samedi quatorze février, les deux jeunes célibataires avaient décidé de déjeuner ensemble, dans leur petit restaurant italien favoris. Assises en terrasse, profitant des rayons du soleil et de l'air de plus en plus doux, elles finissaient tout juste leur repas.
_ Des nouvelles, par rapport à ce soir ? Questionna la jeune blonde.
_ Oui, on retrouve Greg au Rockwood à vingt-et-une heure. D'après lui, on ne sera pas nombreux, qu'une petite dizaine. Ça ne te fais pas bizarre d'ailleurs, de fêter la Saint Valentin avec lui, sans pour autant sortir avec ?
_ Si. Affreusement. Mais bon, on ne peut pas forcer les choses. Et, qui sait, il me demandera peut-être en mariage ce soir, s'amusa Noa, avant de continuer, plus sérieuse : Tu sais Lily-Rose, moi, Grégoire, je l'attends. Il viendra à moi quand il le souhaitera. Je sais être patiente. Mais bon, j'espère que ce jeu de fausse amitié cessera assez vite, je commence à m’essouffler.
_ Tu es vraiment une bonne actrice. Je ne connaîtrais pas l'histoire, je pense que je ne remarquerai même pas que tu te forces à ses côtés, avoua Lily-Rose.
_ Je ne me force pas vraiment. J'ai plaisir à être avec lui. Mais pas en tant qu'amie. Ça, ça me tue.
Lily-Rose hocha simplement la tête, compréhensive. Les deux jeunes femmes quittèrent le restaurant sur les coups de quinze heures, puis rejoignirent le studio de Lily-Rose, afin de passer un peu le temps avant de se préparer.
Affalées sur le lit, un verre de vin à la main et la bouteille pas loin, une cigarette à la main, elles semblaient avoir été faites pour se retrouver ici.
Lily-Rose se sentait en sécurité. Elle se sentait bien, avec Noa. Tellement bien qu'elle ne désirait qu'une chose : se confier.
_ Tu sais Noa, ces dernières années, j'ai pas réellement eu de « relation », démarra-t-elle.
_ Je sais bien. J'ai même pensé un jour que tu étais devenue asexuée, rit la blonde en tirant une latte sur sa cigarette.
_ Certainement pas, s'offusqua Lily-Rose, même si la remarque était, en soi, assez ironique. Non, j'ai pas eu de relation à long terme. Mais par contre, on peut dire qu'à court terme, j'en ai eu vraiment... vraiment beaucoup.
_ C'est à dire ?
_ C'est assez gênant à avouer. Disons que j'ai eu, et j'ai encore, pas mal d'hommes d'une nuit. Et j'aime ça. Enfin, je ne sais pas, j'aime le sexe, tout simplement. Et que ce soit avec Jean, Paul, ou Jacques, peu m'importe.
Lily-Rose n'eut pas autant de difficulté à avouer cette partie de sa vie à son amie qu'elle l'aurait cru. Peut-être parce que cela la taraudait. Qu'elle ressentait enfin le besoin de le partager. Quoi qu'il en soit, Noa la regarda avec bienveillance, ce qui la poussa à apprécier encore davantage la jeune femme.
_ Pourquoi tu ne m'en as jamais parlé ? Je vois pas en quoi c'est honteux. Que tu en ais tous les ans ou toutes les nuits, qu'importe ? C'est ta vie. Et tu assumes pleinement ton statut de femme. De plus, qui n'aime pas le sexe ? Répondit-elle en gloussant.
_ Tu n'as pas faux. Quoi que, depuis quelques temps, je sors beaucoup moins qu'avant. Je ressens moins le besoin de combler un vide, de séduire, et j'ignore pourquoi.
_ J'ai peut-être ma petite idée. Cela n'aurait-il pas un rapport avec un jeune homme prénommé Adam, par hasard ?
_ N'importe quoi. Je ne suis pas comme ça, grinça Lily-Rose, catégorique.
_ À d'autres. On est toutes des romantiques dans l'âme. Et depuis que tu m'as parlé de lui, je te sens... Je sais pas, différente.
La grande brune ne pipa mot. Les mots de Noa la perturbèrent. Par leur véracité. Son amie venait de toucher un point sensible.
_ Enfin bon. Qui suis-je pour te conseiller ? On est toutes les deux dans l'attente d'un mec qui en a certainement rien à faire. On est dans le même bateau, ma grande.
_ Tu as peut-être raison. Enfin bon. Préparons-nous pour cette merveilleuse soirée, ironisa-t-elle.
_ Allons célébrer la fête des amoureux sans amoureux.
Les deux jeunes femmes se levèrent, puis commencèrent à se préparer. Noa enfila une robe épaisse en laine brune, des collants et des bottes à talon du même coloris. Elle remonta ses cheveux en une queue de cheval haute, puis commença à se maquiller. Lily-Rose, quand à elle, s'était munie d'un pantalon bordeaux taille haute, d'un chemisier noir rentré, de sa veste de blaser et d'escarpins noirs vertigineux. Elle laissa ses cheveux cascader librement jusqu'au creux de son dos, puis s'appliqua le strict minimum sur le visage.
Lorsque les carillons de l'église voisine sonnèrent les vingt-et-une heure, Noa et Lily-Rose étaient prêtes. Elles agrippèrent leur sac à main, leur manteau, puis descendirent les escaliers de l'immeuble, en route vers le pub.
_ Dis-moi Lily-Rose, ça se passe comment si il a invité Lisa ? Demanda Noa, grimaçant de dégoût.
_ Je lui ai déjà demandé, et il ne l'a pas fait, soupira-t-elle avec soulagement.
_ Tant mieux. Je tiens à ma robe.
Lily-Rose rit de bon cœur en poussant la porte de l'habitacle. L'atmosphère entre elle et Noa était légère, agréable, et ce fut dans un état d'esprit simple et bienheureux qu'elle rejoignit Grégoire, accoudé au bar, entouré de quelques personnes qu'elle salua brièvement.
_ Lily ! Noa ! Votre ponctualité m'étonne ! S'exclama-t-il en enlaçant longuement les deux jeunes filles.
_ Tout arrive, il faut juste garder espoir, répondit Noa, en appuyant son regard.
Grégoire garda son bras autour des épaules de Lily-Rose, souriant à Noa, tenant sa main dans la sienne.
_ Ma chère Noa, je te sens taquine. Je vous offre un verre les filles ?
_ Avec grand plaisir, fit Noa en s'asseyant sur un des tabourets.
Lily-Rose ne répondit pas, puisque le jeune serveur lui apporta naturellement son verre de vin habituel, un clin d’œil en supplément.
_ Il faudrait que je me fasse pousser des seins, un jour, ronchonna Grégoire, en voyant le cadeau de la maison.
_ Ou juste venir plus souvent, intervint Antoine en prenant sa commande.
Le jeune garçon haussa des épaules, puis se tourna vers les deux jeunes filles. Il leva son verre, en un geste théâtral adressé au petit groupe.
_ Les amis, je vous souhaite une joyeuse Saint Valentin. Picolons à foison !
Tous lancèrent un petit cri enthousiaste, puis les discussions s’enchaînèrent de plus belle. Lily-Rose dialogua avec quelques personnes présentes, souhaitant laisser un peu d'intimité entre ses deux amis. Mais l'ennui commençait à se faire sentir. Si elle n'avait aucune difficulté à parler avec Grégoire et Noa, il n'en était pas le cas avec de simples connaissances. Les discussions de travail l'ennuyaient terriblement, et son égoïsme ne forçait pas à l'intérêt. Écouter des personnes pleurer quand à leurs impôts, leurs relations désastreuses, ou leur chat ayant uriné dans leur salon, c'était très peu pour elle. Tant que cela n'avait pas affaire à ses proches, la vie des autres, Lily-Rose, elle n'en avait rien à faire. Sauf si c'était pour les mettre dans son lit par la suite.
Mais là n'était pas la question.
Elle offrit alors un sourire contrit à la dénommée Marie qui lui racontait l'horreur que de travailler dans une banque, s'excusant de son départ, montrant son paquet de cigarette du bout de l'index. Elle ne sembla pas s'en formaliser, puis se tourna vers un jeune homme à ses côtés.
L'humanité était bien étrange.
Lily-Rose se dirigea vers l'extérieur, la clope au bec. Elle tira de longues bouffées de nicotine, laissant la fumée malsaine pénétrer ses poumons.
Son regard se porta vers la lune. Elle était presque pleine, et illuminait le ciel sombre d'une lueur fantomatique. Lily-Rose se sentait désespérément seule. Et c'était bien la première fois depuis de nombreuses années qu'elle avait ce sentiment. Celui de la solitude. Elle l'avait voulu, pendant longtemps. Et comblait ses manques à sa manière. Mais, aujourd'hui, en cette nuit de Saint Valentin, ce ressenti la bouffait comme jamais. Elle ne regrettait pas Baptiste. Elle ne regrettait rien. Sauf peut-être d'être partie ce jour là de l'appartement d'Adam. On est toutes des romantiques dans l'âme. La phrase de Noa retentit en son esprit sans crier gare.
_ Serais-je une romantique, moi aussi ? Murmura Lily-Rose à elle-même.
Mais Lily-Rose, elle n'avait jamais été romantique. Lily-Rose, elle avait toujours été le genre à prendre ce qui venait. Lily-Rose, elle avait déjà été amoureuse. Mais, même à ce moment là, la belle Lily-Rose, elle n'avait jamais demandé de romantisme.
Juste d'être aimée en retour.
La grande brune écrasa sa cigarette au sol, puis retourna dans le bar, les yeux plantés vers le sol. La mélancolie lançait en son cœur, et elle n'aimait pas ça.
_ Lily ! Viens par là, j'ai commandé un mètre ! Lui lança la voix familière de Grégoire.
En relevant son regard vers son ami, son souffle fut coupé. Des prunelles bleues translucide, longtemps oubliées, la fixaient, un sempiternel sourire en coin planté sur le visage.
Adam était là.
Avec Grégoire.
Et ils riaient ensemble.
Lily-Rose cru défaillir, et elle ne savait pas si ce qui battait dans son cœur était du bonheur ou de la peur.
Peut-être un peu des deux.
Avec un soupçon d'anticipation et d'intimidation, il fallait bien se l'avouer.
La grande brune, elle était intimidée. »
Bon il faut que j'arrête avec le narcissisme, ça va bien un moment. Mais le revoilà enfin ! Du coup j'ai hâte d'être au prochain chapitre. Par contre, ses yeux, ils sont bleus ou gris, du coup ? Gris/bleu peut-être ? X)
Bon... J'ai conscience que mes commentaires ne sont pas très constructifs, mais je trouve ton histoire parfaite telle qu'elle est, à deux trois problèmes de grammaire près. Les liens se tissent, s'approfondissent, se dénouent. La gestion du temps est bonne, les scènes s'enchainent sans s'étouffer (juste le passage chez les parents tellement court qu'on se demande presque ce qu'il fait là), la tension est présente... J'envie le côté adulte de ton texte. Pas l'aspect 18+, hein... Non, plutôt le ton adulte, les personnags adulte, le context, même le style est adulte. Voilà. Du coup je savoure, tout simplement. :)
Quel plaisir de te lire à nouveau ! Déjà, avant tout, merci beaucoup de suivre mon histoire comme tu le fais, ça me fait chaud au coeur et me motive à fond.
Ensuite pour les yeux il s'agissait d'une erreur de ma part, j'avais terminé le chapitre la tête un peu dans les fesses, mais c'est rectifié, merci beaucoup de me l'avoir fait remarquer !
Et, au contraire, je trouve tes commentaires très constructifs. Parce qu'en plus de me dire ce qu'il te plait (et je t'en remercie beaucoup, ça fait toujours du bien !) tu notes ce qui ne va pas, ce qui du coup, m'aide beaucoup. On est jamais parfaits, et c'est agréable de connaitre nos erreurs ! Donc merci ! (La visite chez les parents est courte, mais c'est voulu. Elle est essentiellement là pour présenter un peu cet aspect de vie de Lily, qui n'est lui-même pas bien important pour elle)
D'ailleurs, faut pas oublier Baptiste, il n'a pas fait son apparition pour rien ;)
Enfin bref, je suis heureuse que ça te plaise encore, et de te compter parmis mes lecteurs, tout ça. Merci beaucoup beaucoup beaucoup !
Je te dis à bientôt, cher Sad/Adam !