Chapitre Six : Un étrange assassinat
- Oh !
- Putain !
- Val’, viens voir ça !
- On dirait que la pêche a été bonne pour les Stup’s !
Un petit groupe de flics était entassé devant une fenêtre ouverte du troisième étage. Valentin s’approcha pour voir ce qui attirait l’attention de ses collègues. Il les poussa et pencha la tête par l’ouverture. Dans la cour du quai des Orfèvres, une voiture noire était stationnée, entourée par d’autres véhicules de la police. Le coffre était ouvert et plusieurs flics de la Brigade des Stupéfiants étaient penchés sur la cargaison.
- Il doit y avoir je ne sais pas combien de kilos de drogue dedans !
- Au moins vingt !
- C’est Martine qui va être contente.
Effectivement, sur le palier, les bras croisés sur la poitrine, Madame le Directeur regardait s’affairer les policiers autour de la voiture et de son propriétaire. Elle avait l’air très satisfaite de leur trouvaille. Valentin observa attentivement la cour. Il aperçut Gabrielle sortir de l’Identité judiciaire en courant, et il devina qu’elle avait des informations croustillantes sur l’identité de l’Homme ténébreux et invisible de l’Armoire (comme il l’avait renommé avec Anthony) grâce au cheveu qu’il avait laissé derrière lui.
- Val’ ? appela un flic, qui venait d’arriver.
- Ouais ?
- Tu le connais ? demanda-t-il en désignant un homme qu’il tenait par les menottes.
- Hum…sa bouille me dit quelque chose…
- Tant mieux.
- Pourquoi ?
Le policier ne répondit pas à Valentin et se contenta de fixer l’homme interpellé.
- Vas-y, lui incita-t-il, répète-lui ce que tu m’as dit tout à l’heure…Qu’est-ce que t’attends ?
Mais l’homme restait muet et se contentait de le fixer durement.
- Dis-lui, continua le flic, dis-lui que c’est toi qui as mis le feu à son appartement, et que tu as mis en danger plusieurs vies innocentes !
- C’était toi ? répéta Valentin, qui sentait la colère venir. Oh putain, alors là…
Il entraîna son collègue et l’homme dans son bureau, et il hurla si fort que les autres flics entendaient distinctement ce qu’il disait à l’autre bout du couloir. Ils conclurent très vite que celui qui avait mis le feu à l’appartement de Valentin devait passer un très mauvais quart d’heure.
Peu après, Gabrielle vint chercher son coéquipier pour l’accompagner chez le commissaire divisionnaire. Il lui avait juré (et il avait même craché par la fenêtre pour lui montrer sa bonne volonté) qu’il l’aiderait à obtenir une augmentation. Malheureusement pour elle, son argument le plus convaincant était : « donnez-lui cette foutue augmentation, comme ça, elle me foutra la paix ! ». Leur supérieur avait sèchement refusé et la jeune femme s’était promis de ne pas en rester là avec son salaire.
Après avoir giflé Valentin pour sa misérable prestation devant le commissaire, Gabrielle lui avait montré les résultats de l’analyse ADN. Ils trouvèrent rapidement où se cachait l’Homme ténébreux et invisible de l’Armoire et prirent ensemble la décision de lui rendre une petite visite amicale. La visite fut tellement placée sous le signe de l’amitié que Valentin et Gabrielle avaient été obligés de le menacer avec leurs Manurhins 357 magnum/38 spécial pour le convaincre de les suivre. Après cela, ils avaient passé plus de trois heures à l’interroger jusqu’à ce qu’il avoue « avoir balancé l’autre naze par la fenêtre ». Enfin, pour fêter leur victoire, ils s’offrirent un café à la machine et trinquèrent ensemble à « l’affaire enfin classée ».
Pourtant, des enquêtes toutes aussi fatigantes les unes que les autres finirent par arriver. Un jour, le bureau de Gabrielle et Valentin était silencieux, pour la simple raison que les deux officiers faisaient travailler leurs méninges. C’était ce qu’ils faisaient le plus souvent. Ils étaient des chasseurs d’énigmes. Cependant, la tranquillité de la pièce s’évanouit lorsque le téléphone sonna.
- C’est moi qui prends l’appel ! réagit Gabrielle.
- Nan, c’est moi !
Valentin, plus rapide que l’éclair, avait sauté sur le téléphone. La jeune femme laissa échapper un grognement.
- Oui, allô ? fit l’officier d’une voix satisfaite. Oui…oui…ah…
Il perdit aussitôt son sourire et fit signe à Gabrielle de lui donner une feuille de papier.
- Alors, attendez, je note…C’est dans le cinquième ? Okay. Mais dîtes-moi…c’est peut-être une attaque cardiaque. Pourquoi nous appeler dans ce cas ?… Certes, mais si c’est pas un assassinat, j’aurais perdu mon temps… Et comment en êtes-vous certaine ?… Bon, nous arrivons… Oui… Et je vous demanderai de bien vouloir quitter les lieux et de ne toucher à rien. Merci, à tout de suite.
Gabrielle jeta à son collègue un regard interrogateur. Celui-ci hocha la tête, visiblement surpassé par les évènements.
- En fait, résuma-t-il, en rentrant chez elle, une femme a découvert son mari mort dans son salon. Rien ne dit que c’est un crime. Mais elle a un « doute » et nous demande de venir.
- Pour avoir un doute, c’est qu’elle sait quelque chose, conclut sa partenaire, qui ne perdait pas de temps pour recourir à sa logique.
- Bah, on lui demandera. Allez, en voiture !
Lorsqu’ils arrivèrent sur les lieux du prétendu crime, Valentin, Gabrielle et Anthony eurent l’impression de pénétrer dans une maison parfaite, d’une famille parfaite, avec une vie…parfaite.
- Bonjour ! claironna Valentin, à un homme assis sur le canapé du salon.
L’homme ne répondit pas.
- Bonjour ! répéta Anthony.
Comme il n’y avait toujours pas de réponse, Gabrielle s’approcha de l’homme et se baissa vers lui.
- Il est mort.
Valentin et Anthony se regardèrent, stupéfaits. La maîtresse de maison venait d’arriver derrière eux, les yeux humides.
- Vous savez Madame, c’est la première fois que je vois un mort assis sur un canapé.
- Je vais vous laisser travailler, répondit la dame, ignorant la remarque de Valentin.
- Vous restez à notre disposition ?
- Bien sûr.
- C’est vachement sympa de m’avoir amené sur le terrain ! s’exclama Anthony, une fois la femme éloignée.
- Rassure-toi, c’est exceptionnel. Et puis, n’oublie pas que tu nous as saoulés pour venir !
L’élève poussa un grognement et ils enfilèrent tous les deux leurs gants en latex avant de rejoindre Gabrielle. La jeune femme était agenouillée face au cadavre, et apparemment, elle semblait perdue.
- Je ne comprends pas, fit-elle. Pas de sang, pas de coups, pas d’entailles. Ce n’est pas un crime. Cette femme s’est trompée. Il est mort sur le coup, sûrement d’un arrêt cardiaque ! On n’a rien à faire ici.
- Et pourquoi elle dit qu’il a été tué alors ? demanda Anthony.
- Si elle en est persuadée, elle n’a qu’à nous expliquer ! On n’appelle pas les flics si on n’est pas certain que c’est un crime ! Non, il est mort…naturellement ! Regardez-le, il est assis ! S’il avait été attaqué, on ne l’aurait pas trouvé dans cette position !
- Moi, si j’avais un arrêt cardiaque, j’aurais bougé, déclara Valentin. Mes mains ne seraient pas restées sur mes genoux. J’aurais réagi, même si je devais mourir juste la seconde d’après.
Gabrielle resta perplexe et Anthony regarda instinctivement autour de lui.
- Y’a un truc qui cloche, continua le jeune homme. Regardez-bien, y a vraiment quelque chose qui cloche.
- Arrête Val’, tu me fous le stress ! siffla l’élève.
Le trio chercha pendant vingt minutes ce que Valentin pressentait. Puis, alors qu’il observait le salon pour la centième fois, Anthony eut une idée de génie.
- Hey Val’…
- Quoi ?
- À l’école, on m’a appris qu’il y’a plusieurs moyens de tuer quelqu’un sans laisser de traces.
- Comme ?
- Le poison, par exemple. Et que pensez-vous d’un poison qui agit lentement ?
Il saisit un verre posé sur la table basse, à côté du canapé. Gabrielle et Valentin, eux, ne revenaient toujours pas de « l’intelligence provisoire » de leur élève. Eux-mêmes n’avaient pas pensé à cette éventualité.
- Mais ça ne sent rien…soupira-t-il, après avoir reniflé l’intérieur du verre.
- Il existe des poisons inodores, expliqua Gabrielle. Mais nous aurons la preuve qu’il a été empoisonné seulement lorsqu’une autopsie aura été réalisée.
- J’appelle les techniciens et les scientifiques tout de suite, ajouta Valentin, en sortant son téléphone portable de sa poche. Anthony, va fouiller la cuisine, et trouve-moi tous les produits toxiques.
L’élève s’exécuta, et Gabrielle commença à relever les empreintes. Elle sortit un pinceau et la poudre de la trousse qu’ils avaient emportée, et saupoudra la surface floue du verre. Valentin la rejoignit après avoir raccroché.
- Ils vont arriver.
Une heure plus tard, les techniciens et les scientifiques n’étaient toujours pas là, l’enquête avançait très peu, le cadavre pourrissait et Valentin était dans une colère noire.
- Putain mais qu’est-ce qu’ils font encore ?! On les appelle en urgence et ils ne sont même pas capables de se bouger le cul ! Une heure qu’on les attend ! Et dire qu’en plus, ils ont la grosse tête et qu’ils n’arrêtent pas de se vanter ! Tu vas voir, ils vont bientôt de se vanter de mon poing gauche !
- Y a rien dans la cuisine, coupa Anthony. À part des produits ménagers qui puent…
- Mais c’est pas ça qui est la priorité en ce moment ! Ce qui passe avant, c’est le boulot que doivent faire ces connards de techniciens et scientifiques de merde, pour que nous, on puisse avancer ! Et comme tu vois, ils ne sont pas là ! Et ça fait une heure que je les ai appelés ! Tu crois que c’est mon job de relever des empreintes ?
- Calmez-vous un peu…supplia Gabrielle.
- Ah, ils arrivent enfin ! Y a leurs voitures qui viennent de se garer dans la rue ! prévint Anthony, après avoir jeté un coup d’œil par la fenêtre.
- Ohlala, je peux te dire qu’ils vont m’entendre…s’énerva Valentin, en remontant ses manches.
Il se leva, laissant Gabrielle accroupie devant la table basse. Lorsque les techniciens entrèrent dans le salon, le jeune homme les toisait, mains sur les hanches.
- Hey, ça, ce n’est pas à vous de le faire ! reprocha un scientifique à Gabrielle qui relevait le fond du contenu du verre avec une pipette.
- Non, riposta Valentin, ce n’est pas à nous, mais on est obligé de le faire à votre place, parce que vous avez une heure de retard ! Rassurez-moi, vous avez une montre ? Oui ! Et vous avez vu l’heure ?! Putain, mais c’est pas croyable ça ! On est dans une situation d’urgence, le mec sur le canapé, il est en train de moisir comme un roquefort, et vous, tranquilles et pas pressés ! Alors, mettez-vous au boulot tout de suite, si vous ne voulez pas que je rapporte tout à Martine Monteil ! Allez ! Qu’est-ce que vous attendez là ? Que je danse la Macarena ?
Tout le monde savait que Valentin ne s’était jamais vraiment entendu avec les scientifiques (il les disait trop narcissiques, et eux l’accusaient d’être trop sûr de lui), mais dès ce jour, ils se vouèrent une haine incroyable.
- La Troisième guerre mondiale est déclarée…soupira Anthony, tandis que les techniciens daignaient enfin à s’activer sur les lieux du crime.
Gabrielle confia sa pipette aux scientifiques, et se dirigea vers Valentin et son élève.
- Il nous faut parler à cette femme.
- Attendez, pria Valentin, avant, on réfléchit. S’il y’avait du poison dans ce verre, qui l’a versé ?
- Je note, précisa Anthony en sortant son stylo et son petit calepin neuf.
- Donc, il y avait quelqu’un, avant, pendant et après le meurtre, conclut Gabrielle. Quelqu’un qui tenait compagnie à la victime, puisqu’il y’a des biscuits pour apéritif sur la table. C’est ce quelqu’un qui l’a tué. Mais ça devait être sûrement une personne en qui il avait une entière confiance et dont il ne doutait rien. Pas de trace de lutte, et même le cadavre semble paisible.
- Je sens une maîtresse à plein nez, surtout si l’épouse n’était pas là, affirma le jeune homme.
- Peut-être pas ! défendit-elle. Si ça se trouve, cet homme était bisexuel et c’était un homme qui se trouvait avec lui ! On ne sait pas !
- Pourquoi on doit faire des suppositions débiles comme ça pour faire avancer une enquête ? demanda naïvement Anthony.
- Parce que, justement, on ne sait rien du tout, et que tout peut être envisageable, répondit Valentin. Ce qui est certain, c’est qu’il n’était pas seul.
- Sauf s’il a fait exprès de boire du poison, et dans ce cas-là, c’est un suicide…ajouta la jeune femme.
- Sauf s’il y avait plusieurs personnes ici…continua Anthony, ravi d’utiliser son imagination débordante.
- Possible, acquiesça Gabrielle. Enfin, pour le moment, il faut questionner l’épouse.
Ils coincèrent donc la maîtresse de maison dans sa chambre. Gabrielle fut chargée de lui poser les questions parce que « sa condition de femme » l’avantageait.
- Où étiez-vous lors du meurtre ?
- Je travaillais.
- Des gens peuvent témoigner ? s’informa Valentin.
- Oui.
- Et vous avez découvert votre mari dans cet état en rentrant chez vous ?
- Oui.
- Mais comment avez-vous su qu’il avait été tué ? Rien ne l’indiquait.
- Euh…je…j’avais un doute…
- Qu’est-ce qui vous faisiez douter ?
- Mais je ne sais pas moi ! s’énerva la dame.
- Oh si, vous savez ! rugit Valentin, dont l’humeur ne s’était pas améliorée. Il n’est pas encore question de porter une accusation, mais si vous avez quelque chose à dire qui puisse nous faire avancer, c’est maintenant qu’il faut en parler !
Elle parut réfléchir quelques instants. Gabrielle en profita pour apaiser son collègue de travail.
- J’ai reçu une lettre il y’a quelques jours. Anonyme. Elle disait que je pouvais perdre mon mari si je ne faisais pas attention…
- Attention à quoi ? demanda doucement Gabrielle.
- Je ne sais pas…sanglota la veuve.
- Vous aviez des problèmes dans votre famille ? Vos relations avec votre mari étaient beau fixe ?
- Tout allait bien. Nous avions une bonne situation. La petite amie de mon fils unique me posait quelques soucis, c’est vrai, mais sinon mon mari et moi-même vivions heureux… Jamais je n’aurai pu penser que…
Un sanglot la coupa dans sa phrase. Anthony, voulant imiter au mieux un vrai gardien de la paix, prit la parole, mais au lieu de la réconforter, il remua involontairement le couteau dans la plaie.
- Votre mari avait-il une maîtresse ? demanda-t-il, avide de savoir.
- Anthony ! s’énerva Valentin.
- Un peu de tact voyons ! gronda Gabrielle.
Effectivement, la veuve semblait comme traumatisée à l’idée que son mari aurait pu avoir une amante. Pour elle, sa vie de couple, comme tout le reste, avait été parfaite.
- Enfin, nous pensions seulement que votre mari ne se trouvait pas seul lorsqu’il est mort. Vous avait-t-il prévenu qu’il inviterait quelqu’un ?
- Non, il ne m’a rien dit. Il ne m’a pas prévenu qu’il attendait une personne.
- Vous nous aviez dit que vous avez quelques ennuis avec la petite amie de votre fils…
- Oui, je ne l’aime pas trop, parce qu’elle est assez spéciale…Mais elle le sait. Et elle ne m’aime pas non plus, donc à chaque fois qu’elle venait ici, ça se passait très mal…
- Juste une question. Que fait votre fils dans la vie ? demanda Valentin.
- Photographe.
Jessica tourna au coin de la rue. Elle rasait les murs. Un frisson d’excitation lui parcourut le long du corps. Deux jours avaient passé depuis cet étrange assassinat. Valentin et Gabrielle lui avaient confié une mission concernant le fils de la veuve, un certain Olivier, photographe de son état, et elle y mettait toute son énergie. Voilà près d’une demi-heure qu’elle le suivait, voulant en savoir un peu plus sur sa vie. Olivier travaillait pour une entreprise concurrente de celle de Jessica, il ne la connaissait donc pas et elle pouvait le suivre sans trop de problème. La jeune femme aurait pu être paparazzi, reporter en Irak, photographe de mode ; elle s’adaptait à toutes les situations.
Voilà que le dénommé Olivier venait d’entrer dans un bar. Jessica attendit quelques secondes avant d’y pénétrer à son tour avec son sourire ravageur. Elle s’accouda au comptoir sans quitter le jeune homme des yeux.
- Salut ma p’tite poulette ! claironna le barman. Qu’est-ce que je te sers ?
- Jus de pomme mon grand !
Olivier venait de s’asseoir à une table déjà occupée par une jeune femme extravertie. Voilà qu’ils s’embrassaient.
« La fameuse petite amie… » pensa Jessica.
- Hey, qu’est-ce que tu regardes ? demanda le serveur.
- Il n’est pas canon ce type là-bas ? Celui qui est en train de rouler une pelle à sa copine.
- J’ai pas l’habitude de donner mon avis sur ce genre de truc.
- Mais je suis mieux qu’elle, tu ne crois pas ? s’informa la photographe.
- Oui, c’est vrai… Je pourrais t’en dire des vertes et des pas mûres à son sujet, mais je fais toujours attention à ne pas critiquer la clientèle fidèle.
- Oh, elle vient souvent ici ?
- Ouais, et son copain aussi.
- Régulièrement ?
- Tous les mardis, vendredis et dimanches. Y a déjà eu des exceptions mais bon…
- Mardi, ils étaient là alors. Vers 15h00 de l’aprèm aussi ?
- Avant-hier ? Lui, il était là, mais pas elle. Je pense qu’il l’attendait, mais elle n’était pas venue. Pourquoi toutes ces questions ma belle ?
- Hum…fit Jessica, en lâchant quelques pièces de monnaie sur le comptoir. Je file mon grand. Tchao, tchao !
Elle sortit du bar en vitesse et atteignit le trottoir d’en face discrètement. La jeune femme sortit son téléphone de sa sacoche et composa le numéro de Gabrielle.
- Ouais Gab’ ? Ce n’est pas lui. Il était au bar mardi à l’heure du crime. Le barman peut témoigner. Par contre, sa p’tite amie n’y était pas et il semblait l’attendre. Tu crois qu’elle a un truc à voir dans cette affaire ? Oh attends, j’te rappelle !
Olivier et sa petite amie venaient de sortir à leur tour du bar, main dans la main. Jessica raccrocha au nez de sa meilleure amie et saisit son appareil-photo.
- Hop ! Dans la boîte !
Le lendemain matin, au Quai des Orfèvres…
- Non, ça ne peut pas être elle ! s’indigna Valentin en regardant les photos. T’es bien sûre que c’est un zoom ?
- Puisque je te dis que c’est elle ! répéta Jessica.
- Mais…continua le jeune homme, on a rencontré la même femme et elle nous a dit qu’elle avait une liaison avec le père !
- Oh putain ! C’est une salope, alors ! Elle se tape le père et le fils !
- C’est pas elle…
- Mais si Valentin ! intervint Gabrielle. Vous voyez bien qu’elle a exactement le même visage que la femme dont on est allés rendre visite hier ! Rendez-vous à l’évidence, elle…
- Elle couche avec le père et le fils, quelle horreur !
- Je sais, mais c’est comme ça…
- Et en plus, elle n’était pas au bar à l’heure du crime, ajouta Anthony.
L’entrée de Berthier dans le bureau interrompit le débat.
- Excusez-moi de vous déranger, annonça-t-il à Valentin, mais ils ont terminé l’autopsie et le médecin légiste aimerait te voir, toi et Gabrielle.
- Et moi ? demanda Anthony.
- Toi, tu restes ici !
- Mais euh…C’est pas juste !
- Bon, moi, je vais y aller de toute façon ! J’ai du boulot ! prévint Jessica. La prochaine fois qu’il vous faut une espionne, pensez à moi hein ! Ah ah, je savais bien que j’aurais dû faire flic, moi aussi !
Après ces derniers mots, elle s’échappa du bureau, sans attendre la réaction de sa meilleure amie.
Comme à leur habitude, Valentin et Gabrielle se présentèrent en retard à la morgue. Ce fut le chirurgien qui avait pratiqué l’autopsie qui les accompagna dans une pièce glaciale, grise et blanche. Après avoir cherché le casier où se trouvait le corps de la victime, il entreprit un résumé de la situation.
- Alors, comme vous avez certainement dû le voir, cet homme n’a subi aucune violence. Et…
- Attendez…coupa Valentin. Qu’est-ce qu’il a au cou ?
Ils se penchèrent tous les trois sur le cadavre, curieux.
- On dirait une grosse tâche, hésita Gabrielle.
- C’est un suçon, affirma son collègue de travail. J’en suis certain. Un énorme suçon tout récent. Mais comme le sang ne circule plus…
- Dans ce cas, ça explique pourquoi il est encore là…justifia le chirurgien. Mais ce dont je voulais vous apprendre, c’est qu’il a bel et bien été empoisonné. J’avoue que je ne m’y connais pas beaucoup en photographie, mais il s’agit d’un liquide incolore et inodore utilisé pour développer les photos…J’en ai retrouvé une très forte dose dans son sang, ce qui explique forcément qu’il est mort « tranquillement »…
- L’acide acétique ? proposa Jessica. Mais on en trouve dans la vinaigrette et ça ne nous tue pas !
- C’est bien toi la photographe, non ? s’énerva Valentin. Tu dois bien savoir quels produits tu utilises pour développer tes photos !
- Bien entendu que je le sais ! Mais si tu me parlais de l’acide acétique, tu te trompes vachement, parce que même si c’est incolore, ça a une odeur terrible ! Non, pour développer une photo, nous utilisons le procédé au collodion humide.
- C’est quoi ? s’informa Gabrielle.
- Je ne sais pas comment t’expliquer… Disons que le collodion est un nitrate de cellulose dissous dans un mélange d'alcool et d'éther que l'on étend sur une plaque de verre. On utilise plein de produits chimiques pour développer les photos. Y’a aussi l’acide gallique, le sulfate de fer ammoniacal, le thiosulfate de soude, le cyanure de potassium…
- Écoute Jessica, c’est bien intéressant ce que tu dis, mais nous, on veut simplement savoir quel produit est incolore, inodore, utilisé pour les développements et qui puisse tuer un homme de quarante ans !
- Fallait le dire plus tôt Valentin ! Comme je te disais y’a deux secondes, c’est le collodion !
- Et c’est maintenant que tu le dis !
- Merci de ton aide Jessica, fit Gabrielle. Nous devons aller chez ce fameux Olivier. Il n’y a que chez lui où nous pouvons trouver ça.
- Si ça se trouve, supposa le jeune homme, sa copine y sera aussi.
Ils quittèrent la boutique de photos où travaillait Jessica et se rendirent chez le fils de la victime. Ils avaient acquis un mandat de perquisition et Gabrielle avait bien l’intention de fouiller l’appartement. Comme l’avait prédit Valentin, la petite amie d’Olivier se trouvait chez lui. C’est elle qui leur avait ouvert.
- Bonjour, Brigade Criminelle ! claironna Gabrielle en montrant sa carte. Nous pouvons entrer ?
- Encore ?! Pourquoi ? s’étonna-t-elle.
- Parce que, rétorqua Valentin.
Il la poussa un peu pour que Gabrielle puisse pénétrer à l’intérieur de l’appartement. Pendant qu’elle cherchait le collodion, son collègue de travail posait des questions à la jeune femme (qui s’appelait en réalité Mélanie).
- Vous habitez ici ?
- Non.
- Et votre petit ami est là ?
- Non plus. Je suis seule, si ça vous intéresse…
Valentin écarquilla les yeux. Le père et le fils ne lui suffisaient pas, il fallait aussi un flic à Mélanie… Effectivement, elle semblait très attirée par le jeune homme et le lui faisait savoir, tout en profitant de l’absence de Gabrielle.
- Non merci.
- Z’êtes sûr ? minauda-t-elle.
- Quoique maintenant que vous me le dîtes…j’aimerai bien que fassiez quelque chose pour moi.
Les yeux de Mélanie se mirent soudainement à briller. Elle s’imaginait déjà Valentin nu comme un ver dans son lit.
Un peu plus tard, lorsque Gabrielle revint dans le salon, elle souriait bizarrement. Valentin ne le remarqua pas, trop occupé à se masser le cou, sous le regard pétillant de Mélanie.
- Je peux vous parler ? lui demanda-t-elle.
- Bien entendu, répondit le jeune homme.
Ils sortirent de l’appartement et se mirent à discuter doucement.
- Valentin, qu’avez-vous à cacher votre cou ?
- Regardez…
Il ôta sa main, et Gabrielle vit une énorme tâche foncée sur la peau.
- Je lui ai demandé de me faire un suçon, pour pouvoir comparer avec celui de son beau-père.
- Vous croyez que ça se compare ? En tout cas, c’est le même !
- Exactement, c’était elle qui était avec le mec mardi après-midi. Et c’est elle qui l’a tué, j’en suis certain. Putain, maintenant, j’ai mal au cou, mais ça en valait la peine non ?
- Pas du tout, fit Gabrielle. Vous n’aviez pas besoin de vous faire mordre pour l’accuser, j’ai le nécessaire.
Elle sortit de sa poche un flacon et le tendit à Valentin.
- C’est le collodion. Olivier a une chambre noire dans son appartement. Il s’en sert rarement pour développer ses photos, mais il dispose de tous les produits chimiques qu’il lui faut. J’ai trouvé un manuel sur la photographie qui explique les compositions de ces produits. Et j’ai trouvé le collodion. Regardez-bien, cette bouteille est presque vide, alors que le fils s’en sert peu souvent. Le chirurgien nous a dit qu’il y’avait une forte dose de ce produit dans le sang de la victime, et il ne reste presque plus rien dans le flacon ! Il était au bar à l’heure du crime, mais elle, elle n’y était pas. Elle couchait avec le père pour se venger de la mère. Et…
- Et pour la lettre anonyme ?
- Elle voulait peut-être lui faire peur.
- Et elle l’a tué pour quelle raison ?
- Et bien, soupira Gabrielle, nous lui demanderons une fois que nous l’aurons arrêté.
D’un commun accord, ils retournèrent dans l’appartement où Mélanie les attendait. Mais pour son plus grand malheur, ce n’était pas pour prendre l’apéritif, c’était simplement pour lui passer les menottes autour des poignets et pour l’amener au quai des Orfèvres.
Anthony était heureux d’avoir pris place au bureau de Valentin, d’autant plus que le fauteuil sur lequel il était assis était en cuir noir et bien confortable. Il s’imaginait déjà commissaire. Seulement, l’entrée du jeune homme dans la pièce le fit retomber sur Terre. Il n’était qu’un élève, en formation de gardien de la paix, et il était donc bien loin d’être commissaire, lieutenant, capitaine, directeur ou préfet.
- Je peux savoir ce que tu fais assis à mon bureau ? s’énerva Valentin.
- Rien du tout, je cherchais sur ton ordinateur si Mélanie était connue de la police.
- Elle ne l’est pas.
- Elle l’est, contredit Anthony, fier comme un pape. Chez les Stup’s. Elle consommait de la drogue, et elle s’était faite prendre.
- Ah bon ?
- Ouais ! Où est Gabrielle ?
- Elle est avec Mélanie. Elle va revenir. On est un peu embêté, parce qu’elle a demandé à avoir un avocat.
- Mais elle a le droit non ?
- Ouais, mais ça risque de compliquer les choses, surtout si elle ne reconnaît pas d’être l’auteur des faits. Puis tu connais les avocats, y a pas plus chiant…
Au bout d’une heure, Valentin et Gabrielle rencontrèrent effectivement des problèmes avec l’avocat de Mélanie. L’interrogatoire avait même été interrompu.
- Ma cliente m’a dit que vous lui avez fait des propositions pour coucher avec elle !
- Pardon ?! éclata Valentin.
- Vous l’avez même menacée !
- Non mais vous déconnez ou quoi ?!
- Et elle va porter plainte !
- Ah bon ?! C’est comme ça ?! Très bien ! J’appelle mon avocat à moi et vous allez voir comme ça va saigner !
Il était tellement énervé qu’il tremblait lorsqu’il sortit son téléphone portable de sa poche. Il sortit de la salle et se réfugia dans son bureau, suivi de Gabrielle.
- Allô Joël ? Ouais, c’est moi. Viens vite ici, je suis dans la merde. M’en fiche, laisse la petite sur sa chaise haute et amène-toi !
Quant le jeune homme raccrocha, Gabrielle vit qu’il était angoissé.
- Pouh, je suis dans une merde pas possible…
- Ne vous inquiétez, je suis sûre que lorsque nous prouverons qu’elle est coupable, tout s’arrangera pour vous. Ce qui est dommage, c’est que je ne puisse pas témoigner, puisque je n’étais pas là lorsque ça s’est passé.
- C’est pas grave. Y a juste Joël qui peut régler ça. C’est un excellent avocat.
L’excellent avocat en question arriva une demi-heure plus tard, dans une colère noire. Jamais Gabrielle n’avait vu un avocat aussi jeune et séduisant. Il ne portait même pas de costume. Il était simplement vêtu d’un jean et d’un T-shirt délavé.
- Val’, tu fais chier ! J’espère que c’est grave parce que sinon j’aurai laissé ma fille chez ses grands-parents pour rien !
Mais devant la mine désespérée de son ami, sa colère retomba aussitôt.
- Bah qu’est-ce qui t’arrive ? Au fait, bonjour Mademoiselle.
- Bonjour, fit la jeune femme, étonnée.
- Je suis foutu, s’exaspéra Valentin.
- Fort probable. Mais pourquoi ?
- Regarde.
Il lui montra le suçon que lui avait fait Mélanie.
- Ouah ! Elle ne t’a pas raté la nana qui t’a fait ça !
- Merci Joël. La nana qui m’a fait ça, je l’ai arrêtée, et maintenant, elle m’accuse pour « abus de puissance », comme quoi je l’ai obligée à faire des choses pas très catholiques…
- Tu t’embrouilles là, tu me parles de plusieurs choses en même temps ! Raconte vraiment ce qui s’est passé !
- Je lui ai demandé de me faire un suçon, sans lui dire que c’était pour le comparer à celui qui était sur un cadavre qu’on a trouvé.
- Et donc, elle profite de ça pour retourner la situation et t’accuser.
- Voilà. Bravo Joël, tu m’impressionnes !
- Ta gueule ! Bon, laisse-moi régler ce petit litige de rien du tout. Papa Jojo va te régler ça en moins de deux ! Cette charmante demoiselle a-t-elle un avocat ?
- Ouais, un connard de service. On dirait ton frère jumeau.
- Fais gaffe à ce que tu dis ! Je pourrais bien vite changer de côté ! Bon, je vais discuter avec lui.
- Il est dans la pièce au fond du couloir.
- Okay, fit l’avocat avec un air machiavélique. Ça va saigner…
Il sortit du bureau, laissant Valentin et Gabrielle seuls.
- Je le crois pas…C’est sa femme qui déteint sur lui…
- Mais…c’est votre ami ? demanda la jeune femme.
- Ouais…si on veut.
Valentin et Joël se considéraient effectivement comme de bons amis, mais le seul problème, c’est qu’ils étaient comme chien et chat. Ils ne pouvaient pas passer plus d’une minute dans la même pièce sans se moquer l’un de l’autre ou se frapper.
- Mais c’est bien d’avoir un pote qui est avocat, continua le jeune homme. Au moins, je n’ai pas besoin de le payer pour qu’il me défende. Ne soyez pas choquée voyons, il faut rejoindre l’agréable à l’utile ! Et il faut bien que je me venge après tout ! Il ne m’a pas nommé parrain de sa fille !
- Pitié Valentin, arrêtez un peu…
Ils attendirent près d’une heure le retour de Joël. Lorsqu’il revint, il était suivi de Mélanie et de son avocat. Le jeune homme semblait dans tous ses états.
- Mais c’est son boulot d’arrêter les pétasses comme votre cliente ! Et puis, je le connais ! Il a peut-être couché avec la p’tite demoiselle là, mais il est sérieux quand même ! En plus, les filles dont la peau est recouverte de piercings, ça ne l’intéresse pas ! Il est peut-être con, mais il est raisonnable !
Gabrielle foudroya du regard Valentin. Elle lui en voulait d’avoir raconté leur petite aventure à son ami. Celui-ci haussa les épaules. Il savait que l’avocat n’en faisait qu’à sa tête.
- Val’, passe-moi la preuve que la miss a tué son beau-père.
Il y avait un dossier complet et des pièces à conviction qui montraient clairement que Mélanie avait bel et bien tué son beau-père en l’empoisonnant avec du collodion. L’avocat de la jeune femme en perdit tout son latin. Il ne savait plus quoi dire.
- Ça peut aller très loin ça…Vous voulez toujours porter plainte ? s’informa Joël, avec un sourire mauvais.
Mélanie et son avocat se regardèrent, blancs comme feuille, et Gabrielle comprit qu’ils baissaient les bras. Valentin soupira, entièrement soulagé.
- Votre carte d’identité s’il vous plaît, réclama la jeune femme en tendant la main.
- Putain Joël, t’es trop fort !
- Je sais, je sais. C’est 150 euros la consultation.
Le sourire de Valentin retomba aussitôt.
- Mais…mais…tu sais bien que je dois économiser pour mon prochain appartement…
- Tu crois que je vais te croire ? C’est l’État qui te le paye, ton appart’ !
- Mais, et le loyer de ma mère ?
- C’est pas mon problème. Moi, j’ai un vieux chien qu’il faut sortir trois fois par jour, mon poisson crève tous les six mois et il faut que je rachète à chaque fois le même ; j’ai une fille en pleine croissance (à qui il faut acheter tous les deux mois de nouvelles chaussures, et crois-moi, ce n’est pas donné) ; et une femme fatiguée qui ne fait rien de ses journées ! Il faut bien que je nourrisse ma famille, non ?
- Camille est vraiment fatiguée ? s’inquiéta Valentin, pour changer de conversation.
- Vraiment, reprit sérieusement Joël. Elle ne fait que dormir. Elle est devenue méconnaissable. Je m’inquiète pour elle…
- Mais c’est survenu après la grossesse ?
- Non. Bien avant. Tu te souviens quand elle…
- Ah oui…je me souviens.
Gabrielle, pensant qu’elle était de trop dans le bureau, décida d’aller trouver Anthony pour lui donner du travail (comme quoi, l’élève pouvait être utile dans toutes les situations).
- J’y vais.
- Okay, fit simplement Valentin.
- Au revoir Mademoiselle ! claironna Joël, beaucoup plus galant.
Lorsqu’elle sortit de la pièce, il se retourna vivement vers son ami.
- Putain, cette femme, elle a été faite au pinceau ! T’as vu comment elle est roulée ?!
- Hey ! T’as déjà une femme, j’te rappelle ! Donc, chacun la sienne, si tu ne veux pas recevoir mon poing dans la gueule !
- Mais je ne compte pas délaisser la mienne, rassura Joël. N’empêche, ce n’est pas ta femme. Tu ne sors même pas avec !
- Je sais…grogna Valentin.
- T’as l’air de faire comme si !
- Et toi, ça a l’air de t’amuser.
- Bah ouais…M’enfin, si tu veux l’avis de l’avocat qui t’a sauvé de la prison, ta nana, elle te cache quelque chose. On ne décide pas comme ça d’être flic avec un si joli minois. Et c’est dommage qu’elle soit si distante avec les hommes, non ?
Valentin resta silencieux. Il savait que Joël avait des capacités psychologiques perfectionnées et, avec ça, un sens précis de l’analyse.
- T’as peut-être raison. Je ne lui ai jamais demandé pourquoi elle était flic. Peut-être par vocation…
- Ou peut-être pas, ajouta l’avocat. M’enfin, je dis ça pour toi Val’, mais réfléchis. Elle fait un métier d’homme alors qu’elle ne s’entend pas avec eux. Fais le lien entre ces deux éléments. Ta copine, c’est comme une équation. Faut être bon en maths pour pouvoir la résoudre. Bon, je vais y aller. Je dois récupérer Loreleï chez ses grands-parents.
- Okay, à bientôt. Au fait Joël ?
- Ouais ?
- T’as une grosse tâche jaune sur ton T-shirt…
- Je sais. C’est la petite qui a régurgité son repas de midi.
- Oh…charmant tout ça.
- Tu te moqueras moins lorsque t’auras un gosse.
- J’aimerais que tu dises vrai.
Joël le regarda longtemps.
- Ça viendra avec le temps.
- Génial…fit Valentin, ironique.
- C’est moi à la salle de bain !
- Nan, c’est moi !
Pour ne pas changer les habitudes, Gabrielle et Valentin se disputaient. La journée avait été longue, ils étaient debout depuis six heures du matin, ils étaient fatigués, et ils avaient envie de prendre une bonne douche bien chaude. Le seul problème, c’est qu’il n’y avait qu’une salle de bain et il fallait se battre pour être le premier à y accéder.
- Je suis la propriétaire de ces lieux ! C’est moi qui y vais la première !
- Si vous faites ça, vous cuisinerez et vous laverez la vaisselle toute seule !
- Essayez un peu, et je vous vire !
- Ou alors, vous mangerez mes salades niçoises pour le restant de votre vie !
- C’est déjà le cas alors je ne vois pas le grand changement !
Sur ces paroles, elle s’enferma dans la salle de bain.
- Hey ! s’énerva Valentin, en tambourinant à la porte. Ouvrez-moi ! C’est un ordre ! Les hommes d’abord, ça prend moins de temps que les femmes !
- Allez vous faire foutre !
- Puisque c’est comme ça…je vais aux toilettes !
- C’est ça ! approuva la voix de la jeune femme. Et noyez-vous dans le trou !
- C’est pas gentil-gentil ça !
Valentin s’enferma dans les toilettes, et colla son oreille contre le mur. Lorsqu’il entendit l’eau couler, il sortit discrètement de sa cachette et ouvrit la porte de l’appartement. Il appuya sur la sonnette et un son strident se fit entendre. Tout en pouffant de rire, il referma la porte derrière lui et retourna dans les toilettes.
- Je ne peux pas aller ouvrir ! hurla-t-il.
Il entendit Gabrielle râler et arrêter l’eau.
- Dépêchez-vous ! Votre visiteur va perdre patience !
Le jeune homme entrouvrit la porte des toilettes et attendit qu’elle sorte de la salle de bain. C’est une jeune femme enroulée dans une petite serviette de bain qui fila jusqu’à la porte d’entrée. Elle l’ouvrit, pendant que Valentin en profitait pour s’éclipser discrètement vers la salle de bain.
- Hey ! Y a personne ? s’étonna-t-elle, en tournant la tête à droite et à gauche.
- J’adore vos jambes ! hurla le jeune homme depuis l’intérieur de la pièce.
- Oh le salaud ! réalisa Gabrielle, en claquant la porte.
Valentin rouvrit la porte, mais lui barra le passage.
- Vous êtes méchant avec moi ! gémit la jeune femme.
- Mais non, je vous aime bien, vous savez.
- Vous ne me le montrez pas !
- Bon, comme vous avez fini de prendre votre douche, je vais prendre la mienne.
- Mais…balbutia Gabrielle en montrant sa serviette, vous voyez bien que je suis encore trempée, et que j’ai encore du savon…
- Ah, dommage pour vous… Bon, je suis gentil. Je vous laisse entrer.
Il s’écarta pour la laisser passer. Elle se planta devant la baignoire, puis se retourna vers Valentin.
- C’est bon, vous pouvez partir maintenant.
- Ah bon ? Je n’ai pas dit que je sortirais de la salle de bain.
- Mais…
- On n’était pas censé prendre la douche à deux ? fit le jeune homme, avec un air coquin.
Gabrielle lui décocha un regard noir et pointa la porte du doigt.
- Dehors ! ordonna-t-elle. Et plus vite que ça !
- Okay ! Une prochaine fois alors !
Valentin sortit de la salle de bain, en prenant bien soin de refermer la porte derrière lui. Joël avait raison. Gabrielle était une équation impossible à résoudre. Tout le monde savait qu’elle était flic et que ses relations avec les hommes étaient exécrables (même si elles semblaient s’améliorer avec lui). Restait à savoir le lien entre les deux, qui expliquait en outre le comportement de la jeune femme. En s’écroulant sur le canapé, Valentin soupira. Il aurait aimé être meilleur en maths pour pouvoir comprendre Gabrielle.
Donc oui, effectivement, ce chapitre est bien plus "policier" que les précédents, avec meurtres, suspects et tout ce qui va avec. J'ai trouvé chouette le personnage de Joël, un peu décalé et entretenant une amitié plutôt explosive avec Valentin.
Mais finalement, j'ai réussi à mettre le doigt sur ce petit quelque chose qui me fascinait dans ta plume. C'est cette faculté à retranscrire le quotidien, sans tomber ni dans le pathos ni dans l'ennuyeux ni dans le too much. Ces petites enquêtes se suivent, se ressemblent, ou pas, et les personnages évoluent doucement à leur gré.
Que dire d'autre à part "bravo" ?
J'alterne un peu les deux genres : un chapitre très policier, un autre beaucoup moins...avec un peu de quotidien, parce que je pense qu'une histoire a besoin de quotidien pour se "calquer" sur la réalité. (O_o je viens de dire un truc philosophique là ? O_O roh je me surpasse xD).
Et donc, tu as fait la connaissance de Joël. ^^ En fait, il n'a pas de véritable place ici, c'est juste un clin d'oeil à une de mes histoires qui s'appelle Polichinelle (avant que je la remanie *tousse*). Comme Valentin intervient dans cette histoire-là, j'avais bien aimé insérer Joël, puis Camille, en retour. Tout ce que tu peux lire à leur sujet ici, c'est du spoiler pur et dur. XD
Bref. Encore merci à toi pour de me lire, j'espère que la suite te plaira. ^^ Bien des bisous.
^o^ C'est intéressant de le voir se disputer avec Gabrielle...
Un bon chapitre, encore une fois. ;)
BiZzZ
Reponse de l'auteur: Non, il est pas chanceux...mais en même temps, il n'aurait pas dit non ! xD Gros bichoux et merci à toi ! Mouaaks !