Ysalis observait les étoiles. Peu étaient visibles dans ce ciel tourmenté. Elle avait pris le risque, malgré la pluie à venir, de se rendre sur la corniche, espérant un miracle.
- Tu ne verras pas grand-chose, dit la voix du garçon.
Ysalis sentit son cœur bondir dans sa poitrine tandis que l’aile noire lui montrait son poignet droit. Deux griffes l’ornaient, début d’un tatouage qui promettait d’être magnifique. Il était revenu ! Il lui montrait !
Cette fois, il était entièrement vêtu de noir, tenue bien plus dissimulatrice. Sa première victoire lui avait octroyé le droit de la porter. Il avait ainsi dû retirer son gant et relever sa manche pour qu’elle put voir. Il se rhabilla avant de prendre place à côté d’elle. La corniche n’offrait que peu de place si bien que leurs épaules se touchaient.
- Je m’appelle Othander, indiqua le garçon.
- Tu dois obtenir quoi, comme information, Othander ?
- Le nom de l’amant de Rouge-Vanya.
Ysalis explosa de rire.
- Qu’est-ce qu’il y a de drôle ?
- Vanya n’a pas d’amant ! Elle délaisse Rayane, son mari, pour un perroquet nommé Totu. Elle tente de le dresser depuis des lunes, sans succès. Son mari la croit infidèle et s’en plaint. Tous ses amis pouffent de rire dans son dos car tous connaissent la vérité mais la lui cache car Vanya veut offrir le perroquet à Rayane pour son anniversaire. Ils lui ont promis de garder le secret alors ils le font.
- Comment peux-tu le savoir ? demanda Othander, les yeux ronds.
Ysalis devint rouge comme une tomate. Elle tritura les manches de sa tunique. Que répondre à cela ? Elle parlait décidément trop. Comment se sortir de cette mauvaise passe ?
Réponds-lui : J’ai des yeux pour voir et des oreilles pour entendre.
- J’ai des yeux pour voir et des oreilles pour entendre.
Othander sourit en hochant la tête.
- D’accord. Un perroquet nommé Totu.
- Tu peux me faire confiance. C’est le nom de l’amant dont tu as besoin.
- Soit, dit Othander. Tu crois que mon mentor le sait ?
- Sans aucun doute, répondit Ysalis. Dis, tu pourrais faire quelque chose pour moi ?
- Quoi donc ?
- J’ai besoin de calmédia et de gentymin. Tu crois que tu pourrais t’en procurer ?
- T’as besoin de ça quand ?
- Au plus vite.
- Attends. Je reviens…
Othander sauta dans le vide. Ysalis regarda le ciel avec appréhension. La luminosité baissait dangereusement. La gamine le sentait dans ses os : la pluie ne tarderait plus. Ysalis ne put empêcher sa main droite de trembler. Elle jeta des regards à droite, à gauche, serrant les dents, grimaçant. S’il ne revenait pas rapidement, elle ne pourrait plus l’attendre.
Enfin, une forme sombre jaillit devant elle.
- Tiens, lui dit Othander en lui tendant deux pots en argile. Ce sont des poisons, tu sais ? Tu veux tuer quelqu’un ?
- Pas du tout, assura Ysalis. À faible dose, ce sont des médicaments.
- Tu es malade ?
Ysalis hocha la tête.
- Dose bien alors !
- Merci beaucoup, Othander. Je vais devoir y aller. Il ne va pas tarder à pleuvoir or le trajet est impraticable s’il pleut.
- Je te proposerais bien de te ramener mais c’est ma vie que je risque si on me voit.
- Tant mieux ! Je déteste voler.
- Ah bon ? D’habitude, les humains adorent être transportés dans les airs.
- Je déteste voler, marmonna Ysalis entre ses dents, se retenant de gronder « C’est peut-être parce que je ne suis pas humaine ».
- On se revoit demain ? proposa Othander.
- Avec grand plaisir !
Ils se séparèrent d’un geste de la main. Les premières gouttes se mirent à tomber. Ysalis se dépêcha de rejoindre la plateforme puis se rendit à la cuisine. Elle ouvrit le pot d’onguent fourni par le médecin puis les deux apportés par Othander. Les deux poudres, de couleurs différentes, étaient facilement identifiables. Ysalis attrapa une cuillère dans un tiroir, plaça l’exacte bonne quantité, mélangea, nettoya les ustensiles avec attention puis se rendit dans la salle de bain. Elle retira les bandages sales, nettoya les plaies en grimaçant puis déposa l’onguent en soupirant d’aise. Cela brûlait, preuve que le produit faisait effet. Elle remercia mentalement Lyzandro pour ses bons conseils puis se coucha. Éreintée, elle s’endormit dans le dortoir malgré la douleur.
Le lendemain, après qu’Ysalis eut terminé d’écrire sous la dictée d’Yvan, celui-ci demanda :
- Comment va ta blessure ?
- Bien mieux, je vous remercie, superviseur. L’onguent du médecin aide beaucoup. L’infection recule.
- C’est une excellente nouvelle. Tu es précieuse. Je n’ai jamais trop compris pourquoi. À leur place, cela fait longtemps que j’aurais éteint ta lignée mais bon, c’est leur choix et je le respecte.
Ysalis frissonna. Sans Églantine, Yvan l’aurait déjà poussée du bout de la plateforme depuis longtemps. La gamine sortit sans un mot.
Ils ne me tueront jamais. Ils n’oseraient pas ! Je suis…
- Ta gueule, gronda Ysalis avant de se retourner, soupirant d’aise en constatant qu’elle se trouvait seule sur la plateforme.
Elle détestait Bramamm, sa supériorité, son ton hautain, sa prétention. Pour qui se prenait-elle ?
Pour celle qui a réussi la mission sacrée. Et toi ? À part ramper et vomir, tu fais quoi ?
Ysalis serra les dents de rage.
Putain, j’en ai marre de cette vie de merde. Tu ne voudrais pas faire un truc intéressant, pour une fois, Ysalis ?
Elle a volé la broche de Mathias. C’était drôle.
- Merci, Afonso, lança Ysalis.
J’admets. Enfin un peu d’action. Dommage que ça ne soit qu’une fois.
Ysalis soupira puis attrapa le linge sale et l’amena au lavoir. Bramamm s’éloigna, peu désireuse de partager ce moment-là. Ysalis savoura sa solitude. Le soir, elle retrouva Othander sur la corniche.
- Ça va mieux ? demanda-t-il.
- Bien mieux. L’infection a disparu. Merci beaucoup, Othander.
- De rien, Ysalis. Ton superviseur n’avait pas fait appeler un médecin pour toi ? C’est vrai que nous en sommes en bas. Vous n’avez que peu de valeur.
Ysalis ne démentit pas. Il valait mieux qu’il croit ce qu’il voulait.
- J’aimerais trouver par moi-même cette fois alors s’il te plaît, ne me donne pas la réponse, même si tu la connais.
- D’accord, promit la fillette.
- Je dois savoir qui va remplacer Rouge-Mathias au poste de professeur de politique à l’université centrale.
Ysalis ignorait que le propriétaire des lieux allait quitter son poste.
- Tu devrais commencer par te rendre à la taverne Breckman. Tous les étudiants s’y rendent après les cours. Tu capteras sûrement beaucoup d’informations là-bas.
- Je le ferai, promit Othander. Merci du conseil.
- De rien.
Ils se virent ainsi tous les soirs, goûtant la simple présence de l’autre, appréciant ces moments secrets, ce calme, cette tranquillité apaisante.
###########################
- Ysalis ! appela Yvan.
La jeune fille en avala sa salive de travers.
- Avance-toi ! gronda Yvan.
- Tu suces si bien que ça pour que Rouge-Mathias te réclame ? ricana Églantine à sa gauche.
Ysalis lui envoya un regard noir tout en s’avançant. Yvan n’était pas censé appeler l’une d’elle pour les réceptions. Ysalis s’était portée volontaire une fois, certes, mais juste pour qu’Othander ait son bibelot. Elle n’avait aucune envie de recommencer.
Toutes les désignées – d’office ou volontaires – partirent vers les salles de préparation. Yvan se plaça devant Ysalis qui était restée figée, paralysée de stupeur.
- La prochaine fois, tu t’avanceras sans que j’ai besoin d’insister, gronda le superviseur.
- Oui, superviseur. Pardonnez-moi. J’ai été surprise, c’est tout. C’est tellement inattendu !
- Rouge-Mathias t’a réclamée nommément.
- Pourquoi ? s’étonna la fillette.
- Il a trouvé très agréable de ne pas avoir à remplir son verre lui-même tout au long de la soirée. Au début, il m’a dit ne pas comprendre pourquoi je persistais à prendre des esclaves moches.
Ysalis grimaça. Elle l’entendait pourtant souvent mais ça restait toujours particulièrement désagréable.
- Puis, Rouge-Mathias m’a félicité de ma clairvoyance. Amener une travailleuse moche en réception était une excellente idée, m’a-t-il dit. Ainsi, les invités la laissent travailler en paix. Il m’a encouragé à poursuivre.
La gorge d’Ysalis se serra. Elle comprit qu’elle allait devoir servir à toutes les réceptions. Cela ne la mettait pas du tout en joie.
- Il a précisé qu’il t’avait trouvée très discrète, très professionnelle aussi. Il a admiré ta capacité à servir sans un défaut malgré les circonstances. Du coup, tu es de nouveau de service ce soir.
Ysalis grimaça. Elle aurait préféré ne pas avoir cet honneur.
- En revanche, pas de tunique bleue pour toi. Rouge-Mathias tient à bien marquer la différence histoire qu’aucun invité ne soit troublé. Tu porteras donc une tunique crème. Par contre, tu te laves et tu en mets une propre. Compris ?
- Oui, superviseur, répondit poliment Ysalis.
- Bien, parfait. Va te préparer, alors !
Se laver et se changer furent une formalité. Se retrouver face au harnais en revanche… Ysalis en eut les larmes aux yeux à la simple idée de devoir de nouveau voler. Elle se retrouva avec un autre transporteur, une femme cette fois. Le vol fut aussi horrible. Visiblement, ça ne dépendait pas de la personne. Ysalis avait juste le mal de l’air. Elle ne vomit cependant pas à son arrivée et put servir sans attendre.
Les travailleuses du sexe furent rapidement occupées et les grognements et cris de plaisir fusèrent. Ysalis en fit abstraction, ne prêtant attention qu’aux verres et aux plateaux de nourriture. Elle remplissait de liquide et réarrangeait les bouchées, s’assurant que tout le monde ait bien toujours à manger, à boire et que cela ressemble à quelque chose. Elle pensa aux musiciennes dont les ailes bleues se dessinaient sous leurs hauts presque translucides les faisant ressembler à des fées.
Ysalis les trouvait très douées. Elles méritaient leur réputation. Elle n’y avait guère prêté attention la dernière fois. Cette fois, elle prit le temps de les écouter et trouva cela très agréable. Il n’y avait jamais de musique à l’étage des travailleuses mais Ysalis en avait en mémoire. L’écouter en vrai changeait radicalement.
Elle n’en oublia cependant pas son service et continua à débarrasser, remplir, retirer des vides, ramener des pleins.
Pour information, le verre de Mathias est empoisonné.
Ysalis se tourna vers le propriétaire des lieux. Une coupe transparente dans la main, il baragouinait des mots inintelligibles à la travailleuse qui allait et venait sur son sexe dur. Il ne touchait pour le moment pas à son verre mais nul doute que cela ne tarderait pas. Le contenu proposait quelques bulles, ce qui n’aurait pas dû être et une légère opacité indiquait clairement la présence d’ovomalt, un poison violent et rapide.
Ysalis se souvint de la recherche d’Othander. Qui allait remplacer Mathias à son poste ? Ysalis l’avait imaginé le quittant volontairement pour mieux, pas que quelqu’un allait se débarrasser de lui. L’assassin se trouvait forcément dans la pièce mais qui cela pouvait-il bien être ?
Ysalis parcourut la salle des yeux. Un invité ne quittait pas Mathias des yeux, frémissant à chaque fois que le verre bougeait dans la main du propriétaire des lieux. Ysalis passa de l’un à l’autre, se demandant quoi faire.
Devait-elle sauver le propriétaire de cette maison ? S’il mourait, que se passerait-il ? Un autre prendrait sa place, voilà tout. Les travailleuses ne bougeraient pas. Si elle le sauvait, alors quoi ? Ça ne changerait rien non plus. Sauf que Elydriel ne jurait que par la non violence.
Ce n’est pas vrai. Il interdit de tuer. La violence est totalement permise. Tu devrais réécouter ses paroles. Et puis, tu sais, il est parti. Il s’en fout.
Si Ysalis ne faisait rien, Mathias mourrait. Son inaction revenait à lui ôter la vie. Elle décida de suivre les préceptes d’Elydriel. Avec grâce, elle parvint jusqu’à Mathias, lui retira le verre des mains, le remplaça par un autre plein puis sortit de la salle de réception. Une fois arrivée au bord de la plateforme, elle se pencha pour vérifier qu’il n’y avait rien d’autre en-dessous que des rochers et lança le verre. Puis, elle retourna faire son service.
L’assassin s’amusait avec sa travailleuse. Il ne semblait pas gêné plus que ça. Il ne braquait pas un regard noir sur Ysalis. La fillette en conclut qu’il n’était pas le commanditaire mais juste la main qui venait de perdre une occasion, rien de plus. Il recommencerait plus tard, à n’en pas douter.
Yvan mit de nouveau fin à la soirée. Ysalis retrouva ses quartiers. De nouveau, nul ne lui avait gardé de nourriture mais elle s’en doutait. Elle rejoignit Othander.
- Tu as trouvé qui aura le poste de Mathias ? demanda Ysalis.
- Oui. Rouge-Géraldine est sur toutes les bouches.
L’invité qu’Ysalis soupçonnait d’être l’assassin était son époux. Le mari offrant à sa femme le poste tant désiré. Cela se tenait.
- Tu arrives bien tard aujourd’hui. J’ai failli ne pas t’attendre !
- J’ai servi à une réception, précisa Ysalis.
- Ah bon ? dit-il en la déshabillant des yeux.
- Je ne sers pas de cette façon. Je distribue la nourriture et les boissons.
- J’ignorais que ce genre de service existait lors des réceptions.
- C’est nouveau. J’inaugure le concept. Apparemment, ils n’y avaient jamais songé avant.
- À mettre des vraies travailleuses en plus de celles proposant du sexe ? Ils sont idiots ?
Ysalis et lui explosèrent de rire. La nuit étant déjà bien avancée, ils se séparèrent à ces mots. Ysalis dormit très bien malgré son ventre criant famine.
La fillette venait à peine d’avaler son petit-déjeuner qu’Églantine vint la trouver.
- Un transporteur t’attend. Apparemment, Rouge-Mathias veut te voir. Tes fellations sont tellement bonnes qu’il en réclame en dehors des fêtes maintenant ?
Ysalis grimaça. Aller voir Mathias, cela signifiait voler et donc, vomir. Elle venait à peine de manger ! Elle soupira de désespoir. Elle se rendit en salle de préparation, s’harnacha puis rejoignit le transporteur masculin, celui qu’elle n’aimait pas. Il fut aussi brutal que d’habitude.
Son petit-déjeuner sur l’herbe, Ysalis rejoignit le bureau de Mathias. Grand et très haut de plafond, il proposait un bazar innommable. Des livres partout, des cahiers, des feuilles, le tout répandu dans le plus grand désordre. Le mobilier était beau et fonctionnel mais les livres semblaient préférer s’empiler au risque de s’effondrer plutôt que de s’aligner dans la bibliothèque à moitié vide.
- À genoux, ordonna Mathias.
Ysalis se tourna vers le propriétaire des lieux. Installé derrière son bureau, il la transperçait de ses yeux bleus.
- Mets-toi à genoux ! répéta Mathias d’un ton glacial.
Ce disant, il bougea, faisant remuer le liquide dans le verre qu’il tenait dans sa main gauche. Malgré l’heure matinale, il buvait déjà.
J’en ai marre de subir des coups de fouet. Agenouille-toi, Ysalis !
Ysalis ouvrit la bouche mais se retint juste à temps de lancer un « Ta gueule » qui lui aurait sûrement coûté la vie. Avec un rictus de haine, elle se mit dans la position requise.
- Je ne comprends pas pourquoi Yvan s’embarrasse de travailleuses indociles. Ce serait moi, ton corps serait déjà en morceaux dans la vallée.
Ysalis frémit sous la menace.
- Je n’ai qu’un vague souvenir de la soirée d’hier, poursuivit-il.
« Tu m’étonnes, pensa Ysalis. Avec autant d’alcool dans le sang, pas étonnant qu’il ne se souvienne de rien. »
- J’ai cependant le net souvenir de m’être fait prendre mon verre.
La gorge d’Ysalis se serra. Elle était prête à nier. Après tout, le propriétaire lui-même disait n’avoir que des souvenirs flous.
- J’ai interrogé Yvan. Il me confirme t’avoir vue sortir de la salle de réception, avoir jeté un verre dans le vide avant de revenir. Puisque ton service a été impeccable en dehors de ça, il a choisi d’attendre aujourd’hui pour te demander des explications. Je préfère m’en charger.
Ysalis grimaça. Impossible de nier. Il allait falloir changer de portage.
- Je ne vais pas tourner autour du pot, Ysalis. Y avait-il du poison dans mon verre ?
Ysalis ne s’attendait pas à une question aussi brutale. Mathias poursuivit sans lui laisser le temps de répondre.
- C’est la seule raison qui puisse expliquer ton geste. Tu as vu un invité verser quelque chose dans mon verre et tu as choisi de ne prendre aucun risque. Je n’ignore pas que mon poste est très prisé et que mon statut de fin de ligne fait grincer des dents quant à ma nomination. En revanche, je ne pensais pas que quiconque irait aussi loin. Qui as-tu vu verser un produit dans mon verre ?
Ysalis ne pouvait pas répondre à cette question. Elle n’avait pas vu de ses yeux Rouge-André verser le poison. Il ne s’agissait que de suppositions, d’informations concomitantes.
- Ysalis, penses-tu que mon verre contenait du poison ?
- Oui, répondit Ysalis, toujours à genoux.
- Oui, maître, la corrigea le propriétaire.
- Oui, maître, répéta docilement Ysalis, consciente qu’il ne valait mieux pas le mettre en colère.
Mathias fit rouler son verre entre ses doigts puis l’avala cul sec. Il resta un moment sans rien dire avant de dire d’une voix rauque :
- Sers-moi un autre verre.
Ysalis sentait bien qu’il ne fallait pas, que ça n’était pas bon pour le maître des lieux.
- Par Ham’y’yel, sers-moi un putain d’autre verre ! hurla Mathias.
Terrifiée, Ysalis se leva, prit la carafe et remplit le contenant.
- Retourne te mettre à genoux, murmura-t-il en contemplant son verre plein.
Ysalis s’y rendit et reprit la position, le ventre noué et les épaules contractées.
- Qui ? Qui a versé le poison, Ysalis ?
- André, Maître, répondit Ysalis d’une voix tremblante.
Et si elle se trompait ? Si elle avait tort ?
Tous les indices le ciblent. Et puis, si Mathias porte plainte, il y aura une enquête. Ils ne vont pas le tuer sans preuve.
Il n’y a aucune preuve. Mathias ne va pas s’embarrasser de justice. Il va s’occuper du cas de Géraldine et ça risque de ne pas être beau.
Ysalis en eut la nausée. La suite des événements serait de sa faute.
- Je vais à l’université, annonça Mathias. Occupe-toi de mes appartements. Je vérifierai ton travail ce soir, à mon retour.
Il se leva, vacilla un instant puis sortit le pied sûr. Il devait boire souvent pour être capable de marcher – et voler – après avoir autant ingurgité d’alcool fort. Ysalis attendit un peu puis se releva. Elle sortit pour se découvrir totalement seule sur la plus haute plateforme du Domaine.