Chapitre 7 : Mémoire de Stelca : La Promesse d'une Plume

Notes de l’auteur : Réécrit le 25/11/2024

Le meilleur pour la fin, avec la virevoltante Stelca, dernière protagoniste de l'histoire.

"Si les parents ne fermaient pas toutes les portes, peut-être que leurs enfants n'ouvriraient pas certaines d'entre elles."

"La présence et l'entente des parents conditionnent probablement l'épanouissement et le bonheur de l'enfant."

— Alors c’est ça, une corne de Rinokon ? Elle est balèze ! S’exclama l’un de mes amis, les yeux brillants.

— Ton père est trop fort, Stelca. Il va sûrement devenir le meilleur chasseur de la cité, ajouta un autre.

J’étais dans la cour de récréation, entourée de mes camarades de classe, lorsque je leur montrai une photo où je me tenais debout à côté de mon père. Sur celle-ci, nous sourions en faisant le signe de la victoire, juste devant une corne gigantesque qui semblait irréelle.

Leur admiration pour lui faisait gonfler ma poitrine de fierté.

— Il va chasser quoi, la prochaine fois ? Demanda Elmin, le plus curieux du groupe.

— Des Gavions.

— C’est quoi ça ?

— Des reptiles géant possédant la plus longue mâchoire du monde !

— Faut nous inviter chez toi, pour qu'on admire la collection de ton père en vrai plutôt qu'en photo.

Grâce à mon paternel, j'étais fier d'avoir constamment quelque chose à raconter à mes copains de classe. Voir leurs têtes fascinées pour certains et effrayées pour d’autres lorsque je leurs racontait les aventures de mon père me donnait l’envi d’être à sa place pour ressentir ce qu’il vivait à travers ses missions.

— C’est bientôt ton anniversaire Stelca, non ?

— Oui, je vais avoir douze ans, le 12 février. Dis-je incapable de cacher mon enthousiasme.

Je tenais particulièrement à ce nombre. Mon père m’avait appris qu’il symbolisait énormément de choses. Comme le nombre de mois contenus dans une année, les signes du zodiaque, ou encore les heures divisant une journée. Il donnait également autant d’importance à l’individualité qu’à l’union car il était composé du chiffre un et deux.

Et cela me correspondait parfaitement, aimant à la fois les moments où je suis accompagnée mais aussi les instants où je me retrouve seule.

Quand l’école se termina, je courus rapidement jusqu’à la navette qui me déposait non loin de la maison, espérant voir mon père avant son départ pour sa nouvelle mission.

— Papa ! Papa ! Criai-je dès l’entrée. J’ai encore eu un 18 sur 20 au contrôle de savoir-vivre !

C’était une matière à la fois ennuyeuse et divertissante. À l'intérieur de l'école, nous apprenions à faire nos lits, coudre, plier du linge, cuisiner, ranger et nettoyer. Mais à l'extérieur, en pleine nature, nous étions amenés à allumer un feu, construire un abri, puiser de l’eau, récolter de la nourriture, pêcher et tout un tas d’autres choses intéressantes.

Alors que j’attendais une réponse de mon père, c’était la voix agacée de ma mère qui m’accueillit depuis le salon.

— Ton père est déjà parti. En ne faisant rien comme à son habitude. Je commence à en avoir vraiment marre de lui.

Je m’arrêtai net, déçue de ne pas l’avoir croisé.

— Ses missions sont fatigantes, maman. Il a besoin de repos, tentai-je pour le défendre.

— Du repos ? Tu crois que je n’en ai pas besoin, moi ? Je travaille aussi, Stelca, en plus de m’occuper de cette maison. Viens plutôt m’aider à faire le ménage au lieu de défendre ton papounet chéri.

Ma mère s'aigrissait de jour en jour et je ne comprenais pas pourquoi elle travaillait alors que papa ramenait beaucoup d’argent grâce à ses missions. J’avais notamment vu le prix de la récompense, sur l’affiche de chasse, pour exterminer une colonie de Gavions. 58 000 Pencos, l’équivalent d’un bon salaire annuel de cadre.

Mon père mit deux semaines pour en revenir. Il fit empailler l'immense et redoutable gueule du reptile, avec toutes ses dents, sauf une qu’il me donna. Puis nous prîmes avec son trophée notre photo habituelle, mais l’atmosphère était différente. Le visage silencieux derrière l’appareil exprimait un mécontentement plus que visible.

— Hey chérie, ça ne va pas ? Tu veux être sur la photo aussi ? Demanda innocemment mon père ne réalisant même pas à quel point ses absences pesaient sur ma mère.

— Je n’en ai rien à faire. Et j’imagine que tu vas une nouvelle fois sortir ce soir ?

— Ne t’énerve pas Flora, tu sais bien que je paie un coup à mon équipe à chaque retour de chasse.

— Ah ça oui, j’avais parfaitement remarqué, mais ta femme dans l’histoire, tu t’en fous ?

— Bien évidemment que non, mais en tant que chef d’équipe, je suis tenu de récompenser les efforts de mes équipiers.

— C'est donc ça, je ne fais pas assez d'efforts.

— Mais comment tu peux interpréter cela comme ça ?

— Papa, papa ? Avant que je n'aille au lit, tu me raconteras comment tu as battu les Gavions ? Intervins-je pour changer le sujet.

J’admets que parler de la mission de mon père pour dévier la conversation n’était pas très judicieux.

— Bien sûr, ma puce, je ne manquerais ça pour rien au monde.

— Et une fois que tu l’auras endormi avec tes histoires, direction le bar, pour boire avec tes précieux collègues.

— Qu’est-ce qu’il t’arrive mon cœur ? Pourquoi tu es en colère comme ça ? Ça ne te dérange pas d’habitude.

— Car je me retiens à chaque fois devant la petite, mais là j’en ai marre. Je suis obligé d’aller bosser, et de m’occuper de tout dans cette maison, parce que tu dilapides tout ton argent.

— Mais ce n'était pas pour te changer les esprits que tu avais besoin de travailler ?

— Bah oui ! Ce n’est pas une vie de rester cloîtré dans une maison pendant que tu pars zigouiller des créatures, durant des semaines, je ne sais où ! Dès que tu rentres, tu passes ton temps dehors à faire des emplettes, et à te bourrer la gueule le soir au Drinkaveler. Quand j’entends de la bouche de certaines étrangères, que Kein, c’est le plus beau et le meilleur des chasseurs. Je me demande ce que tu leur fais, pendant que tu nous laisses ici !

— Ne raconte pas n’importe quoi devant la petite ! Je ne dépense pas l’argent dans l’alcool, c’est occasionnel, pour fêter des événements. Mes dépenses servent pour mener à bien mes missions. Je suis obligé de m’acheter de l’équipement et si je vais fréquemment au Drinkaveler, c’est pour choper des informations sur mes proies, qui coûtent d’ailleurs pas mal de pognon. Ce n’est certainement pas pour aller voir des filles. Pour qui tu me fais passer devant Stelca !

C’était bien la première fois que je voyais mon père s’énerver de la sorte. Les paroles de ma mère qui en avait beaucoup sur le cœur dépassa sans doute ses pensées. Mais à ce moment-là, mon père tout comme moi étions blessé. Lui d’avoir été traité ainsi par sa femme et moi qui ne pouvais tolérer qu’on dénigre mon idole avec de tel propos, même s’il venait de ma propre mère.

— Arrêtez de crier !

Je pouvais être fier de l’intervention de la jeune adolescente que j’étais. Elle calma les ardeurs de mes parents, plongeant cependant le repas du soir dans un silence pesant. Après avoir fini, je montai dans ma chambre pour aller dormir.

Mon père me rejoignit pour me raconter comme à son habitude, son aventure.

Il parlait avec passion de la colonie de Gavion qu’il avait traquée et de leur caractéristique. L’atout de cette bête n’était pas uniquement son immense mâchoire capable de broyer des os en un seul coup. Elle possédait également des écailles, recouvrant le dessus de son corps, si dures qu’aucune arme ne pouvait les trancher.

 Il m'expliquait que ces reptiles s’étaient reproduits en nombre au niveau de la rivière de Balcham, compliquant la pêche pour les villageois de Tanboun. D’un côté, car la quantité de poissons diminuait fortement à cause des Gavions qui s’en nourrissaient. Et d’autre part parce qu’ils étaient dangereux pour les Tanbounais.

Ses yeux s’illuminaient lorsqu’il me décrivit comment grâce à sa magie de la terre, il avait retourné les monstres pour révéler leurs points faibles, permettant à ses coéquipiers de les empaler avec leurs lances et leurs épées.

Pourtant, malgré son récit captivant, une partie de moi restait sur la dispute qui avait eue lieu. Je n’arrivai pas à comprendre ma mère. Pour moi, les chasses de mon père étaient synonymes d’entendre une autre de ses fabuleuses aventures à son retour. Mais pour elle c’était simplement une longue absence. 

Alors que mon père continuait le récit de son histoire, je m’étais endormi. Je me réveillai dans la nuit, en entendant pour la première fois les ronflements de mon chasseur préféré, qui s’était assoupi au pied de mon lit.

L'aube se leva et je fis de même, reniflant une savoureuse odeur de pancake, tout en descendant les marches de l’escalier. Arrivée à la cuisine, je fus agréablement surprise de le voir en train de préparer le petit-déjeuner.

— Ça va ma puce ? Papa a une bonne nouvelle, il reste un mois à la maison. On va pouvoir faire les magasins ensemble avec maman. Dit-il d’un sourire éclatant.

— Génial !

Deux semaines plus tard, il m’emmena visiter la guide des chasseurs, car sa mission des Gavions lui permit d’être promu au rang « Héroïque ».

— Ici, c’est le coin des affiches, elles sont réparties par rang, m'expliqua-t-il du même ton que mon professeur de Technologie.

Les missions, les créatures et les chasseurs étaient classé par grade. Du plus bas niveau au plus haut cela donnait la chose suivante : Initiatique < Apprenti < Confirmé < Héroïque < Élite < Légendaire.   

— Tu as fait comment pour être un chasseur héroïque ?

— On doit accomplir cinq missions d’un même rang pour prétendre à une promotion équivalente, mais on n’a pas le droit de choisir une mission de deux grades supérieurs aux nôtres en tant que capitaine. C’est pourquoi le chasseur « Confirmé » que j’étais, n’a pas pu choisir de mission « Élite ».

Mon père ne me l’avait pas précisé à ce moment-là, mais le capitaine devait être le plus gradé de l’équipe. Il se chargeait du recrutement, et ne pouvait choisir uniquement des membres d’un grade équivalent ou inférieur au sien.

— Ensuite, on passe des tests d’aptitudes physiques et magiques pour évaluer notre niveau. Un de mes chasseur « Apprenti », qui a fait les cinq missions « Héroïques », que j’ai accompli, a pu passer en même temps que moi les tests pour devenir Héroïque. Il aurait donc pu sauter un grade, mais il a échoué aux épreuves physiques.

— Je n’ai pas trop compris, mais on peut sauter des grades c’est ça ?

— Oui et non. Car même si on réussit les tests, ce qui avait été mon cas quand j’étais « Apprenti », des officiers de la guilde sont chargés de valider ou non la promotion, en s’appuyant normalement sur les rapports des missions. Mais ils refusent systématiquement qu’on saute un grade, c’est pour cela que personne n’a jamais réalisé cet exploit.

— Tu m’as fait mal à la tête, papa. Sinon, il y a quoi à l’étage au-dessus ?

— Ce sont les missions du rang « Légendaire », elles sont spéciales et réservées exclusivement au chasseur « Élite » ou « Légendaire ».

— On peut monter ?

— Bien sûr.

Des affiches plus ou moins ancienne ornèrent les tableaux encadrés par une solide vitre. L’une d’entre elle attira mon attention.

— C’est un oiseau de feu ça ?

— Exactement, c’est le légendaire Phénix, la créature immortelle capable de ressentir les émotions et les intentions d’autrui. Il vient en aide à ceux qui sont en danger et guérit avec ses larmes les pires blessures et maladies.

— Il n’est pas dangereux alors. Pourquoi, c’est une affiche « Légendaire » ?

— Le niveau de difficulté n’indique pas forcément une mission dangereuse. Si le Phénix est une mission « Légendaire », c’est parce qu’il en existerait qu’un seul, et que personne n’a vraiment réussi à mettre la main dessus. C’est la créature la plus rare qui puisse exister. Certains la considèrent même comme un dieu.

— Ses plumes sont trop belles.

— Effectivement. Et tu sais quoi, un jour, je partirai à sa recherche pour t'en ramener une.

— C’est vrai ? Promis ?

— Promis. Une fois que j’atteindrai le grade « Élite », ce sera la première mission « Légendaire » que je choisirais.

— En fait papa, j’ai décidé de devenir chasseuse, comme ça tu pourras me recruter dans ton équipe et je te donnerais moi aussi une plume du Phénix.

Il rit nerveusement, mais je vis l’ombre de l’inquiétude dans ses yeux.

— Tu ne dis pas ça sérieusement quand même ?

— Bien sûr que si.

— Quoi ?! Mais il en est hors de question, ma puce, c’est bien trop dangereux.

— Trop tard, j’ai déjà pris mes cours de magie plus au sérieux à l’école et je pourrai bientôt utiliser le sort de base Vento.

— Tu vraiment sérieuse en plus. Dit-il en se prenant sa tête dans des mains. Ne raconte surtout pas cela à ta mère, elle va tout de suite s'imaginer que c’est à cause de moi. Poursuivit-il inquiet.

— Mais j’aime les histoires que tu me racontes, ça me donne envie de les vivre. Et en plus, je serai plus souvent avec toi comme ça.

— Mais c’est vraiment de ma faute. Stelca, il faut que tu te retires ça de la tête. Surtout que lorsque tu deviendras adulte, je serai certainement un chasseur « Élite ». Tu ne pourras pas être en mesure de m’accompagner.

— Je ferai les efforts et je deviendrai super forte. Et je n’en parlerai pas à maman. Ça sera notre secret, papa.

— Je suis foutu, soupira-t-il résigné.

Le lendemain matin, alors que j’allais aux toilettes pour soulager ma vessie, une conversation entre mon père et ma mère atteignit mes oreilles.

— Non, je ne peux pas arrêter la chasse, je t’avais déjà prévenu que ce travail est trop important à mes yeux.

— Tu peux trouver un autre boulot dans la cité et rester bien plus souvent avec nous. Ça ne t'a pas rendu heureux, ces moments qu'on a passés loin de ton travail ?

— Bien sûr que oui. Mais cesser d'être chasseur, c’est comme enlever une partie de moi. Et même si tu ne l'aimes pas, je considère mon équipe comme ma seconde famille.

— Pas besoin de me le dire, je l'avais parfaitement bien remarqué.

— Désolé de t’avoir blessé en passant plus de temps avec eux. Je n’avais pas réalisé que tu le vivais si mal. C'est pourquoi j’ai pris la décision de faire une pause d’un mois, après chaque mission, pour rester bien plus souvent auprès de vous.

— Tu as intérêt à tenir parole.

D’un coup, la sonnerie de l’entrée de la maison fit sursauter mes parents. Ma mère agacée par le petit bond qu’elle venait de faire ouvrit fermement la porte et devant elle se tenait Carl, l’ami de chasse de mon père qui était déjà venu quelques fois à la maison.

Je me tenais légèrement en retrait intrigué par cette visite matinale inopinée.

— Bonjour Flora, navré de vous dérangez si tôt. Kein est là ?

Son visage, d’habitude jovial, était grave.

— Il habite effectivement ici, donc où pourrait-il être à cette heure-ci ? Demanda ma mère, avec un ton empreint de sarcasme.

— Entre Carl. Tu veux un café ? Intervient mon père pour lui sauver la mise.

— Non, ça ira. Je passe en coup de vent malheureusement pour t’annoncer une mauvaise nouvelle. Le jeune Sisto est malheureusement… décédé lors de la chasse du Kodiakon. On est tous peinés, il était particulièrement talentueux et prometteur.

Cette créature de classe « Élite », était un ursidé mesurant apparemment quatre mètres de haut lorsqu’il se tenait sur ses puissantes pattes arrière. Cela ferait 100 ans qu’il vit auprès du Permaflor, un arbre millénaire, dont la légende raconte que ses fruits poussent et murissent en permanence, peu importe les saisons.

— Mais vous étiez censé capturer des couples de Lemurions et m’attendre pour chasser le Kodiakon ! S’exclama mon père, la voix remplie de colère.

Un gestionnaire de la faune avait commandité la guilde des chasseurs pour capturer des Lemurions, des primates nocturnes en voix d’extinctions. Très agiles et capable de manipuler la magie de l’air, en plus de disposer un pelage noir le rendant presque invisible la nuit, cette créature était classée « Héroique ».

— Désolé, répondit Carl en baissant les yeux.   

— D’ailleurs comment vous avez pu choisir une mission « Élite » sans moi ? 

— Vico s’est joint à nous, et comme il avait déjà accompli une mission de ce rang, nous pensions que ça allait le faire, mais on a sous-estimé le Kodiakon.

— Sous-estimé ? Sisto avait à peine 18 ans, bon sang !

Mon père était dégoûté d’avoir perdu un jeune membre de son équipe.

— Je sais, Kein. Et crois-moi que je m’en veux, je suis le principal fautif d’avoir suivi Vico en entraînant notre équipe.

Il marqua un temps d’arrêt, son visage exprimant clairement des regrets qu’il gardera surement jusqu’à la fin de sa vie, avant de reprendre :

— On organise une quête pour les obsèques. Je récolterai l’argent demain, si jamais tu souhaites participer.

Mon père hocha la tête, les traits tirés, puis Carl fit un signe de tête et s’éclipsa, refermant doucement la porte derrière lui.

Je n’osai pas bouger, ne sachant pas vraiment où me mettre ou même quoi dire, lorsque la voix de ma mère brisa le silence.

— Tu vois, c’est également pour ça que j'ai envie que tu cesses la chasse. Vous prenez des missions de plus en plus périlleuses. Et je ne préfère même pas m’imaginer le jour où Carl viendra se pointer chez moi en m’annonçant ta mort !

— C’est moi qui choisis les missions en temps normal, et je prépare tout pour que mon équipe ne risque rien. C’est pour cette raison qu'on m'apprécie, car tous ceux qui m'accompagnent reviennent sains et saufs à Jase. Là, ils ont choisi une mission trop dure pour eux, alors que je n'étais pas présent. Et résultat, un jeune garçon plein d’avenir est mort.

— Tu veux dire quoi par-là ? Que c’est ma faute si tu n’y es pas allé et que ce garçon est mort ?

— Mais je n’ai, en aucun cas, dit ça !

— Tu sais quoi, fais ce que tu veux, ne te sens pas obligé de prendre des pauses pour rester ici avec nous. On se démerde sans toi de toute manière, depuis quelques années. Va à l’enterrement, paie-lui de grandes obsèques, montre-leur à quel point tu es généreux avec ta seconde famille…

— Maman, t’es méchante !

Mon irruption jeta un froid dans la conversation.

— C’est bien, même ta fille est de ton côté. Dépêche-toi d’aller chasser pour lui raconter une fabuleuse histoire. Dit-elle sous le coup de la colère.

Mon père ne voulant probablement pas s’énerver devant moi partit. C’était la première fois que je l’avais vu regarder ma mère avec un visage mêlant colère et dégout.

Quant à elle, je pus apercevoir du regret dans ses yeux. La frustration accumulée durant tout ce temps était sortie, avec des paroles qui avaient certainement dû dépasser ses pensées.

Pour ma part je ne pouvais plus rester dans cette atmosphère oppressante, et n’ayant pas supportée cette scène je montai avec les larmes aux yeux dans ma chambre.

Le lendemain tout était rentré plus ou moins dans l’ordre. Nous avions été ensemble à l’enterrement, et ma mère s’excusa auprès de mon père.

Cinq ans plus tard, mon père rentra de sa quatrième mission classée « Élite ». J’étais assise à table très mal à l’aise. Car je savais pertinemment que ça allait chauffer entre mes parents.

— Bonjour, mes petites femmes adorées. Désolé d’avoir mis près d’un mois à faire cette mission, mais encore une fois, ce fut un succès pour mon équipe.

— On parlera de ça après. Il y a plus urgent, je te prie donc de t’asseoir.

Mon père s’assit silencieusement, me regardant et comprenant de quoi il allait s’agir.

— Étais-tu au courant que ta fille souhaite devenir chasseuse ?

— Oui, mais je lui ai dit que cela sera impossible, car c’est bien trop dangereux.

— Et tu as jugé bon de ne pas m'en parler ?

— Maman, c’est moi qui ai demandé à papa de…

— Je m'adresse à ton père !

Ma mère me coupa net la parole et son intonation de voix me fit froid dans le dos.

— Je ne désirais pas créer de tension en évoquant ce sujet, alors que tout redevenait bien entre nous. Et j'ai pensé que Stelca changerait d’avis en grandissant, surtout après lui avoir indiqué que je ne la prendrais jamais dans mon équipe.

— Et pourtant ta fille compte arrêter ses études l’année prochaine quand elle sera majeure, pour devenir une chasseuse comme son père chéri.

— J’ai promis à papa de lui donner une plume de Phénix, et il m’a juré de m’en ramener une également. Je compte bien tenir parole, même s'il ne m'intègre pas dans son équipe.

J’étais déterminée, j’avais foi en mes compétences et j’étais persuadée que je pourrais sauter des grades une fois que je commencerais ma carrière.

— Une plume de phénix ? C'est quoi encore ces sornettes ? Regarde ce que tu lui mets dans le crâne avec tes histoires.

— Il n’est pas fautif, maman. J’ai envie de partir à l'aventure et vous n’avez aucun droit de m’en empêcher.

J’en avais marre qu’on décide à chaque fois pour moi avec les fameuses phrases qui m’étaient constamment adressées : « tu ne feras pas si, tu feras cela, c’est ce qui est mieux pour toi. » Mais visiblement, mes envies étaient la source de problèmes conjugaux entre mes parents.

— Je n’en peux plus, Kein. Déjà que tout ce qui est lié à la chasse me sort par les trous de yeux, ma fille à moi va devenir chasseuse ?! Non, c’est bon, j’ai assez subi. Maintenant, vous allez faire un choix, c’est moi ou la chasse ?

Je ne m'attendais pas à un tel ultimatum et je ne répondis rien à cette question, car j'étais énervé qu'on ne me laisse encore une fois aucun choix.

— Tu n'es pas sérieuse ? Sourit nerveusement, mon père.

— Incroyable. Vous êtes incapable de me choisir sans réfléchir ?

— Mais tu ne peux pas me demander une chose pareille ! S’écria mon père.  

— Pas besoin de t’énerver, je savais à quoi m’en tenir. Vous avez toujours agi comme cela vous chante, sans tenir compte de ce que je pouvais ressentir. J’ai pourtant tout fait pour maintenir l’union dans cette famille, en prenant constamment sur moi, mais je ne peux plus. Et ma vie auprès de vous est définitivement terminée.

Je m'étais résolu à ne pas écouter mes parents jusqu'au bout concernant mon avenir. Mais je ne m’attendais pas à ce que mon entêtement cause leur séparation.

Notre famille était désormais détruite, et c’était de ma faute.

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Raza
Posté le 13/09/2024
Hello!
Alors voici donc un nouveau personnage! La partie famille qui se déchire est intéressante, avec le poids qui pèse sur l'héroïne. Petit bémol cependant, je trouve que la mère me paraît très (trop?) peu dans le dialogue, et donc on a envie de se dire que en fait, le problème c'est elle. Un conflit plus mesuré éviterait cet écueil, à mon avis.
Il y a un truc qui me dérangeait dans ton univers et je crois que j'ai compris quoi: il y a des technologies, comme des photos des robots, mais le reste est à l'état presque préhistorique. C'est étonnant, parce que dans ce cas, qui fabrique les robots? Si on a des photos, il faut des appareils photos, des usines pétrochimiques ou d'assemblage de semi-conducteurs, bref, une industrie très avancée. Or les gens sont chasseurs, et avec des équipements comme des lances. S'il y a des robots, il devrait y avoir mieux que des lances, non?
Dernière critique que j'espère constructivr, parce que ça me sort du récit quand tu le fais, les commentaires entre parenthèses sur les animaux me paraissent très "documentaire".
Allez, merci pour le partage et ne relâche pas tes efforts, à bientôt!
Nakama93
Posté le 13/09/2024
Bonsoir !

Je ne peux pas trop répondre à vos questions sans spoil. Il faudra patienter jusqu'au moment où j'aborderai plus en détail la cité de Jase. ^^'

Pour les parenthèses, à la base, je préférerais m'en passer. Je les utilise seulement parce que je ne peux pas faire comme dans certains romans, en mettant un petit Astérix pour qu'on regarde en bas de page à quoi ça correspond.

Merci pour votre commentaire, et bon week-end à vous !
Solamades
Posté le 13/09/2024
C’est le tour de Stelca. Alors… je n’arrive pas à savoir s’il s’agit d’un garçon ou d’une fille. Je sais que ce n’est pas important, mais ça me perturbe. Tous les adjectifs caractérisant le personnage sont masculins «j'étais fier» «je m’étais résolu» «j’étais énervé»… etc… mais son père l’appelle "ma puce"… et il me semble que tu avais précisé dans un commentaire que ce serait un personnage féminin, non ?

Le déchirement de la famille fait mal au cœur. Dès les premières lignes, on se demande pourquoi cette femme reste avec cet homme. Il vit sa vie, il vit ses rêves, et elle… qu’est-ce qu’elle a ? Elle passe pour la méchante en permanence, elle déteste la vie qu’elle mène… je ne comprends juste pas qu’elle ne soit pas partie avant.

Petite question bête. Le chasseur préféré assoupi au pied de son lit, c’est son père ?

Sinon… soit je m’habitue à ton style, soit tu t’es vraiment amélioré. C’était fluide, c’était agréable, j’ai passé un très bon moment. Cette impression de distance s’est complètement effacée. Il faut que je relise le début pour voir.

Bonne continuation !
Nakama93
Posté le 13/09/2024
Oula my Bad 😵‍💫 bien vu, c'est bien une fille, je corrige ça de suite.

En fait, la mère était admirative de Kein le chasseur, mais pas de Kein le mari.
Elle a été attirée par ce bel homme à la fois doux et viril.
Le bémol, c'est qu'elle n'avait pas imaginé qu'il serait aussi peu présent pour elle. À la longue, ça a pesé sur leur relation. Et la goutte d'eau qui a fait déborder le vase, c'est le fait d'apprendre que sa fille compte devenir une chasseuse elle aussi.

Oui, le chasseur préféré, c'est bien le père de Stelca.

Alors là, je ne sais pas du tout, peut-être que je suis plus doué pour raconter le ressenti de Stelca que les deux autres garçons ^^'. Lol.

Mais merci beaucoup en tout cas, je suis ravi que tu aies pu passer un bon moment.

J'essaierai de poster la suite lundi ou mardi prochain :)
Nakama93
Posté le 13/09/2024
Bon week-end !
Solamades
Posté le 13/09/2024
Concernant la mère… qu’elle était attirée par l’homme doux et viril mais qu’aujourd’hui elle souffre de solitude, je ne l’ai pas du tout compris à la lecture. C’est sans cesse négatif à son égard et on dirait que c’est juste son caractère… genre un mariage d’intérêt et qu’ils sont mal assortis. (et je me suis même demandé à un moment si elle n’avait pas raison sur les infidélités de son mari ) Quelques mots plus concrets pour parler de ses désirs, de ses désillusions changerait la donne.
Bon, après, ce n’est pas une priorité… et il faut que je cesse de me faire l’avocate des persos féminin XD
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