Debout face au lac scintillant, Shekil passait sa frustration en faisant des ricochets. Le soleil, haut dans le ciel, l’avait incité à retirer sa chemise, offrant son torse amaigris et trop pâle aux rayons chaud de l’astre qui entamait tout juste sa descente vers l’horizon. Loin d’être anodine, cette occupation lui permettait d’apaiser ses nerfs tout en lui permettant de récupérer en force et en dextérité. Les premiers essais, qu’ils soient fait de la main droite ou de la main gauche, avaient été proprement désastreux, lui permettant de mesurer à quel point il avait perdu en précision et en force. Tout comme ses premières tentatives de fuite l’avaient renseignées sur l’état déplorable du reste de son corps.
L’intrusion d’Armand dans sa tête l’avait obligé à garder la station allongée près d’une semaine, le moindre essai de station assise lui donnant des migraines à tourner de l’oeil.
Seul point positif, le Vampire ne l’avait plus touché après ça. Ou du moins, pas quand il était conscient. Il se doutait bien que ses vêtements ne s’étaient pas changés seuls. Quant au reste de ses fonctions… cela faisait plusieurs mois qu’il ne ressentait plus la sensation de faim, déréglé comme il l’avait été par les tortures et le rythme improbable de sa vie avec Armand, alors si l’autre avait oublié de le nourrir (encore), il n’avait probablement pas produit grand-chose durant sa convalescence.
Qu’il soit encore en vie tenait du miracle.
Du miracle agaçant.
Car il souhaitait mourir, et tout semblait conspirer pour l’en empêcher.
A commencer par cette agaçante interdiction de suicide, implanté dans son esprit par Armand. Ou la brusque distance qu’entretenait le Vampire avec lui depuis quelques temps. Qu’importait ses attaques ou tentatives pour le faire sortir de ses gonds, l’Ancien se contentait de s’éloigner, un léger sourire aux lèvres.
Et pour ne rien arranger, la vallée au sein de laquelle ils avaient trouvé refuge était trop grande pour qu’il en atteigne l’entrée avant que la nuit ne tombe. La première fois qu’il avait tenté l’expérience, Armand s’était contenté d’apparaître devant lui au crépuscule et de le charger sans ménagement sur son épaule pour le ramener. Bien sûr, l’Aria avait tempêté, s’était débattu, mais le bras du Vampire était verrouillé autour de lui comme un étaux. Rentré au chalet, l’Ancien l’avait balancé sans ménagement sur le divan mais en était resté là, s’éloignant silencieusement dans la nuit noire.
Ce qui était presque plus effrayant que sa situation précédente.
La douleur, les tortures, il connaissait. Il pouvait les gérer.
Mais l’indifférence ? Le silence ? La soudaine abondance de nourriture, de vêtements propres et de moyen de se distraire ? Ça, il ne comprenait pas.
Et ça lui mettait les nerfs à vif.
D’autant qu’il commençait à souffrir des symptômes du manque.
Il l’avait identifié sans peine trois jours plus tôt, pour avoir déjà vu des victimes en souffrir avant qu’un membre de son clan ne mette fin à leurs jours. De longs frissons glacés le long de son échine, la recherche inconsciente du Vampire dans la pièce, la tendance à effleurer, encore et encore, l’endroit habituel de la morsure, et le besoin, presque douloureux, de se rapprocher d’Armand. De sentir ses mains sur sa peau, le contact de son nez dans son cou…
Alors il fuyait.
Dans la remise en forme, dans de longues marches dans la forêt, dans des ricochets sur le lac. Et avait momentanément renoncé à ses plans pour gagner l’entrée de la vallée, redoutant trop ce que pourrait provoquer une soudaine proximité entre lui et Armand. Il ne se sentait pas encore assez fort pour tenir tête à aux pulsions que le venin vampirique faisait courir dans ses veines.
La colère et un début d’érection lui firent rater son mouvement et le galet atterrit dans l’eau avec un pitoyable petit ploc. Vaincu, il se laissa tomber sur le sol rocailleux, remontant ses jambes contre son ventre pour les entourer de ses bras, ses doigts de nouveau droits jouant distraitement avec un caillou pointu.
Il était encore dans cette position lorsque la nuit tomba, le faisant frissonner de par sa fraîcheur. La tête lourde d’avoir réfléchit en vain, il se leva sans énergie pour ramasser sa chemise… qui se trouvait à présent dans les mains d’Armand.
A moitié dissimulé par les ombres naissantes, le Vampire l’observait fixement, les marques noires le défigurant traçant des reliefs étranges sur son visage. Sans quitter sa proie immobile des yeux, il porta la pièce de tissu à son nez, inspirant profondément l’odeur si particulière de Shekil avec un air de pur plaisir qui fit affluer le sang dans une partie intime de l’Aria. Ce dernier recula d’un pas mal assuré, ses pieds nus effleurant l’onde derrière lui.
- Tu ne viens pas récupérer ta chemise ?
- Non.
Le Vampire avança d’un pas, souriant, et le jeune homme dû se faire violence pour ne pas reculer encore. Armand ne devait pas savoir… oh, il aurait probablement des doutes, le venin vampirique agissant de la même façon sur toutes les proies humaines mais… avec un peu de chance… s’il parvenait à maintenir l’illusion… l’Ancien penserait que son appartenance au clan Aria le protégeait des effets. Et il le laisserait tranquille. Oui. Il ne fallait pas qu’Armand se rende compte d’à quel point il mourrait d’envie de venir se lover contre lui, de sentir ses doigts dans son dos, sur ses fesses, sa bouche sur…
Stop.
Ne pas penser.
- Je t’ai connu plus téméraire.
- Et plus en forme aussi. Je ne suis pas idiot Armand.
L’autre eut un sourire amusé.
- C’est vrai que dans ton état, je n’aurais pas grand mal à te faire ce dont j’ai envie. Mais ce n’est qu’un bête bout de tissu, pas un piège.
- Dans ce cas tu ne verras pas d’inconvénients à la laisser sur le sol et à t’éloigner ?
- Quel manque de confiance !
- …
- Tu as conscience que je pourrais t’attraper là, maintenant, sans efforts ? Ta défiance est juste blessante…
Avec un gros effort de volonté, Shekil se détourna des hypnotisant yeux rouges et, ignorant l’un des préceptes fondamentaux de son clan (ne jamais lâcher des yeux un ennemi. Ni lui tourner le dos) entrepris de remonter la berge parsemée de bois flotté en direction du chalet. Le lac, paisible, s’étirait à sa gauche, son eau limpide s’assombrissant à mesure que le soleil disparaissait de l’autre côté de la planète.
Il avait parfaitement conscience d’être impuissant face au Vampire… un an de torture et de privations diverses avaient eu raison de sa musculature, de sa force, et même de sa dextérité. Il n’était même pas sûr de pouvoir tenir tête à un humain, alors à un surnaturel… mais il ne pouvait pas s’en empêcher. Au delà de sa lassitude, au-delà de la douleur… son endoctrinement lui dictait de s’opposer à Armand. De ne rien lui céder. Et il en serait ainsi jusqu’à ce qu’il meurt ou que son esprit se brise.
Il espérait simplement que ça ne prendrait pas trop longtemps.
Le contact doux d’un tissus sur ses épaules le fit sursauter, de même que les bras froids qui se refermèrent brusquement autour de lui, emprisonnant ses bras dans leur étreinte. Collé à son dos, Armand nicha son nez au creux de son cou, lui faisant oublier de respirer.
- Tu es cruel Shekil.
Le jeune homme força un rire à sortir de sa gorge, essayant d’ignorer l’afflux de sang qui rugissait à ses oreilles.
- Moi ?
- Mh.
Les bras verrouillés du Vampire l’empêchaient de bouger. De fuir. Et les dents pointues mordillaient son cou sans pour autant le blesser.
- Je fais des efforts, et toi tu me fuis.
- Tu es complètement cramé…
- Peut-être.
Une langue froide passa sur sa peau, et cette fois son corps le trahit : il frissonna.
- Mais je pensais qu’il fallait moins de temps pour briser l’esprit d’un humain. J’ai vu des guerriers plus expérimentés que toi se traîner en adoration devant leur propriétaires au bout de quelques mois à peine.
La main d’Armand se referma sur le menton de Shekil, l’obligeant à renverser la tête en arrière. Les yeux rouges se plongèrent dans les yeux bleus.
- Mais pas toi.
- …
- Pourquoi ?
- …
Ses doigts quittèrent le visage du chasseurs pour se refermer doucement sur sa gorge, griffes sorties.
- Est-ce que c’est à cause de ton entraînement d’Aria ? Ce même entraînement qui t’empêche de reconnaître que tu crèves d’envie que je continue de te toucher ? (il sourit en voyant les yeux bleus ciller sous le coup de la surprise) Tu pensais vraiment que je ne le verrai pas ? Enfin Shekil… j’entends tout ce qui se passe à l’intérieur de ton corps.
Sa seconde mains parti se balader sur l’entre-jambe gonflée du jeune homme. Ce contact sembla électriser le chasseur dont le corps se remis en mouvement. Vive, l’une de ses mains se verrouilla sur le poignet du Vampire pour l’écarter, tandis que l’autre venait planter un caillou pointu directement dans l’oeil de l’Ancien.
Armand lâcha Shekil en jurant, la main plaquée sur son orbite crevée, son sang épais et noir maculant son visage tordu par la colère. Un formidable revers assené avec une branche de bois flotté ne lui laissa pas le temps de se reprendre et il sentit distinctement les os de sa mâchoire se déboîter. La seconde d’après, le bout pointu de la branche appuyait sur sa poitrine sans pouvoir s’y enfoncer, faisant hurler de rage le chasseur.
Il n’y arrivait pas.
Tout son corps forçait, tendu comme un arc sur le point de se rompre. Le coup était parfait, presque élégant, Armand aurait dû mourir !
Mais il n’y arrivait pas.
Dès l’instant où la pointe était entrée en contact avec la poitrine du Vampire, chacun des muscles de Shekil s’étaient bloqués, l’empêchant d’aller plus loin, de réduire son adversaire en poussière de cendres. Et il avait beau bander toute sa volonté, il ne parvenait pas à aller plus loin.
En face de lui, Armand aurait sourit s’il n’avait pas eu la mâchoire disloquée.
Nonchalamment, il se la remit en place avant d’empoigner la branche et de la réduire en miette d’une seul pression de son poing.
- Bien tenté.
L’Aria recula de deux pas, les poings montés en garde, le corps parfaitement placé pour encaisser une attaque.
- Mais ça ne marchera pas Shekil.
Les poings se baissèrent légèrement.
- Ça ne marchera plus jamais.
- Non…
- Je t’ai retiré le droit de mourir. Et maintenant ça aussi je te l’enlève. Tu ne pourras plus jamais tuer l’un d’entre nous.
- NON !
Et l’Aria se jeta sur lui.
°
Magnifique dans sa robe grenat, un masque de dentelle noire voilant la partie balafrée de son visage, Akasha évoluait avec aisance parmi les Vampires et les humains présents à la réception. Son verre plein d’un excellent A+ bien sombre lui donnait une contenance de façade qu’elle était loin d’éprouver : la disparition d’Armand, deux mois auparavant, continuait de faire jaser.
Oh bien sûr, on était habitué aux frasques du vieux Vampire, à sa tendance à s’absenter quelques mois, décennies, voir demi siècles, mais jamais encore il n’avait manqué un conseil. Surtout un conseil aussi important que celui qui s’était tenu cette nuit là : la guerre contre les lycans allait reprendre, la société vampirique était en ébullition, on avait besoin des meilleurs chasseurs, des plus fins stratèges… et Armand manquait à l’appel.
De plus, les Aria recommençaient à poser problème.
De récents rapports avaient rapportés des mouvements inquiétants du côté du clan de chasseur : des Nouveaux Nés avaient disparus avant d’avoir pu être présentés à la communauté, des cimetières s’étaient vus être entièrement purgés de leurs ghoules, il y avait un véritable génocide du côté des fantômes et des sorcières, et quelque chose lui disait que les loup-garoux devaient eux aussi souffrir des exactions des Aria.
Bien sûr, le fait que la signature de Shekil Aria n’ai été relevé nul part sur ces champs de batailles avait fait beaucoup de bruit. On s’interrogeait, à juste titre, sur la disparition de l’Aria – tout en s’en félicitant. Peut-être était-il enfin mort. Ou alors quelque chose de terrible était en préparation, et expliquait son absence…
S’ils savaient…
Portant le verre à ses lèvres, elle se laissa aller contre le mur derrière elle, ses yeux bleus sombre balayant l’assemblée réunie devant elle tandis qu’elle organisait ses pensées. Avec la crise actuelle, quelqu’un serait probablement envoyé à la crypte d’Armand pour essayer de le rencontrer. Heureusement, elle y avait déjà fait le ménage, effaçant au mieux la moindre trace de l’Aria. Elle avait ramené chez elle et brûlé les vêtements de l’humain, discrètement fait disparaître les objets récoltés par le Vampire dans le repère Aria, avait fait nettoyer la salle de torture et la chambre de l’Ancien avant d’éliminer les servants chargés du ménage, avait soigneusement réuni les notes décryptées par Armand et le carnet de l’Aria avant de les dissimuler dans un endroit sûr (à savoir, son corset), puis avait rangé la crypte comme si on l’avait abandonnée pour un long voyage.
Quant aux membres de sa maisonnée…
Elle poussa un petit soupir satisfait en savourant sa gorgée de sang.
Lorsqu’elle avait ordonné à Armand de préparer Shekil pour leur voyage, elle ne s’était pas contentée de changer de robe. Appelant son intendante, elle lui avait donné des ordres clairs : toute personnes présente sur la liste des « non fiables », qu’elles mettaient régulièrement à jour ensemble, devait être mise en bouteille. C’était une pratique courante chez ceux de son espèce, cela permettait de ses débarrasser des encombrants, des indésirables, de renouveler le personnel… et les stocks de sang. A regrets, elle avait aussi fait éliminer le médecin s’étant occupé de l’Aria. Un praticien capable, précis et curieux, mais trop récemment arrivé à son service pour qu’elle soit sûre de sa loyauté.
Sa conversation lui manquerait…
Il lui fallait maintenant trouver un moyen de partager les connaissances accumulées d’Armand et du carnet sur les Aria au reste de la communauté sans pour autant dévoiler leur secret…
- Akasha, très chère !
La jeune femme quitta la foule des yeux pour se recentrer vers celui qui l’apostrophait de la sorte. Exceptionnel dans son complet vert sapin, Lord Syphax s’approchait d’elle, un large sourire aux lèvres. Elle se prêta au jeu de la bise et de l’accolade avec un réel plaisir, non sans s’amuser de la mine bougonne de la compagne du Lord. Grande femme à la peau noire de nuit et aux cheveux soigneusement tressés, Béatrice avait délaissé son habituelle tenue militaire au profit d’un pantalon taille haute et d’un chemisier dont le plis était quelque peu gâché par le baudrier dont elle ne se séparait jamais. Dans son dos, une belle hache en argent scintillait à la lumière des bougies.
- Lord Syphax, c’est un plaisir, comme toujours !
Le sourire du Vampire s’accentua et il lui prit les mains avec une affection sincère.
- Ma belle Akasha, ça fait une éternité que nous nous sommes pas vus !
- A peine deux ans, marmonna Béatrice dans son dos, ce qui fit rire la Vampire.
- Allons Béatrice… ne soyez pas jalouse !
La guerrière lui jeta un regard peu amène, mais Akasha nota que les coins de sa bouche s’incurvaient légèrement vers le haut. Elle décida de pousser son avantage.
- Et puis… en ce moment, vous savez bien que de vous deux, c’est plus vers vous que mes appétits se tournent.
- T-t-t-t-t… Dites donc Akasha ! Je ne vous permet pas de faire du charme à ma calice !
L’interpellée pris un air faussement choquée.
- Moi ? Faire du ch… enfin je n’oserai pas !
- Bien. Parce que je ne veux pas avoir d’images parasites dans mon esprit ce soir !
Les deux Vampires se sourirent et Béatrice sentit ses joues s’assombrir sous le coup de la gêne. Mal à l’aise, elle marmonna quelque chose avant de s’éloigner un peu, les bras croisés sous la poitrine, visiblement contrariée.
Les deux amis échangèrent un coup d’oeil complice, puis Syphax s’adossa au mur à côté d’Akasha.
- J’ai été étonné de ne pas voir Armand.
- Moi aussi.
L’homme hocha pensivement la tête, ses yeux bruns balayant distraitement l’assistance du regard.
- J’espère qu’il ne lui est rien arrivé…
Surprise, la Vampire tourna la tête vers lui.
- Comment ça ?
Il eut un geste vague.
- Tu sais… avec son obsession pour les Aria…
- Un Aria.
- Oui, un Aria (Syphax esquissa un sourire) et sa tendance à se mettre dans des situations impossibles pour mieux se sentir vivant… avec ce qu’il se passe en ce moment, j’avoue craindre un peu pour la vie de ceux que j’apprécie.
- C’est donc si grave que ça ?…
- Bien plus que ne le dit le conseil. Il y a à peine trois semaines, Béatrice et moi avons été attaqués dans ma résidence secondaire.
- Celle des montagnes ?!
- Celle là même. Je ne sais pas comment ils ont fait pour la localiser, ni pour passer mes sortilèges de repousse. Mais ils sont entrés. Nous avons sauvé nos vies de justesse, mais deux de mes Nouveaux Nés sont morts. Ainsi qu’une bonne partie de mes servants.
- Oh Syphax…
Dans un élan de sympathie, la Vampire s’empara de la main du Lord pour la presser avec affection tandis que l’inquiétude lui tordait les entrailles. Avec Armand et deux autres qu’elle connaissait à peine, Syphax faisait partie des plus vieux Vampires encore en activité. Qu’on parvienne à percer ses défenses et ses sortilèges était quelque chose de grave… et d’affreusement inquiétant.
Il eut de nouveau ce geste vague qui chez lui voulait tout et rien dire.
- Il fallait bien que ça arrive… avec l’âge, je me retrouve dépassé par les nouvelles générations… et leurs nouvelles méthodes. (il soupira) Et cette guerre avec les lycans ne m’arrange pas du tout.
Les yeux bruns croisèrent les yeux bleus, et Akasha prononça à voix haute ce qui la tarabustait depuis le début de la soirée :
- Tu ne trouves pas qu’elle tombe vraiment à pic ?…
- Ah. Pour toi aussi, la coïncidence est troublante ?
- Une recrudescence d’attaques Aria, la disparition soudaine d’Armand, les lycans qui nous déclarent la guerre, ta résidence secondaire attaquée sans peine… ça fait beaucoup pour de simples coïncidences…
- Béatrice est du même avis que toi. Elle ne cesse de me harceler sur le sujet. Je pense provoquer une Assemblée sous peu. Tu viendras ?
- Évidement.
- Merci. Si jamais tu vois Armand avant moi…
- Je lui en toucherait deux mots, c’est promis.
Autour d’eux, la salle se vidait progressivement de ses membres surnaturels.
- Bien. (il lui présenta son bras) Me laisseras-tu t’accompagner à la salle d’Offrande ?
Elle sourit.
- Avec plaisir. C’est rare de t’y voir depuis que tu as Béatrice.
- C’est parce que la proie de ce soir est spéciale. J’aimerai la voir avant sa mort.
La jeune femme haussa un sourcil, mais ni Syphax, ni son calice, ne lui donnèrent d’explications. Piquée par la curiosité, la Vampire s’empressa de suivre le mouvement pour gagner la pièce adjacente à celle de réception. Insonorisée, réservée aux seuls Surnaturels, elle était agencée de façon à ce que le sol s’incurve progressivement jusqu’au centre. Là, on avait dressé un pilier de pierre du sommet duquel pendait une paire de menottes matelassées. Aux pieds du pilier, de minces rainures couraient dans le marbre vers de petits récipients en verre, permettant au sang de la victime sacrifiée d’être récupéré, puis bu, avec élégance.
Remarquant que Lord Wendel, l’organisateur de la soirée, semblait sur le point de trépigner d’impatience devant la lenteur des derniers invités à prendre place, Akasha se pencha vers son compagnon pour murmurer :
- Vous ne souhaitez vraiment pas me dire ce que cette proie a de spécial ?
Le Lord esquissa un sourire.
- Eh bien… Wendel a essayé de garder le secret mais… il se serait vanté auprès d’un contact de Béatrice d’avoir capturé un Aria deux semaines après l’attaque de ma demeure. Et pas n’importe lequel.
La jeune femme arqua élégamment le seul de ses sourcils visible.
- Vraiment ?
- Eh bien… comme nous l’évoquions, il semblerait que Shekil Aria ne soit plus en service depuis un certain temps…
Akasha afficha un air blasé, mais intérieurement, un doute l’avait saisie : elle avait quitté le chalet depuis presqu’un mois maintenant. Et si ?…
- Enfin, je pense qu’il se vante juste.
- Oh ?
- Nous verrons bien, mais je doute qu’un jeune comme lui ai pu mettre la main sur un Aria, quel qu’il soit.
- Nous allons vite être fixés. Ils ouvrent la porte.
De l’autre côté de la pièce, deux servants venaient d’ouvrir en grands les battants de la porte menant aux « réserves », où les humains vivants et le sang prélevé étaient d’ordinaires stockés. La victime fut amenée alors, lourdement enchaînée et à demi portée par deux gardes tant ses jambes, brisées en plusieurs endroits, étaient incapable de le supporter.
Si Akasha avait encore eu un coeur palpitant, il aurait probablement loupé un battement.
Le jeune homme amené ainsi était brun. Elle ne pouvait pas voir son visage, puisque sa tête pendait lamentablement sur son torse nu, mais la couleur de la peau et la corpulence correspondait. De même que l’odeur doucereuse de son sang parfumé à l’hellebore. Faisant bien attention à ne rien montrer de sa surprise ni de son inquiétude, elle lâcha :
- Pas très impressionnant pour un Aria.
- Ils ne le sont jamais beaucoup dans cet état.
- C’est vrai.
Au centre de la pièce, on redressait la proie pour glisser ses mains déformée dans les menottes matelassées et Lors Wendel s’en approchait avec orgueil et gourmandise.
- Mes Dames. Mes Sieurs. Ce soir, c’est une proie de choix que je propose en offrande à la communauté. Vous connaissez tous le nom de ces chasseurs qui empoisonnent nos nuits depuis quelques siècles déjà. Nombreux sont les nôtres a être tombés sous leurs coups… aujourd’hui, je vous propose une revanche. Et pas n’importe laquelle. (il grimpa sur la pierre soutenant le pilier pour empoigner les cheveux bruns) Mes chers amis. Je vous présente notre offrande de ce soir ! Shekil Aria !
D’un geste théâtrale, il redressa la tête du prisonnier qui leur présenta un visage défiguré au milieu duquel une paire d’yeux les toisait.
Bruns. Les yeux.
Akasha sentit quelque chose se détendre en elle.
Et puis le mur derrière l’Aria explosa.
Pendant un instant je me suis demandée si j'avais loupé une marche en me demandant comment c'était possible que Shekil ai été capturé... et puis : "brun les yeux" (OUF).
C'est avec grand plaisir que je découvre l'univers de l'histoire de façon plus étendue, tu amènes des détails au fur et à mesure avec légèreté. :)
Une réplique que je n'ai pas bien comprise :
Ils ne le sont jamais beaucoup dans cet état.
Je soupçonne une petite coquille :)
J'aime toujours autant et là on sent qu'il y a des enjeux qui dépassent les deux personnages principaux et ça tient en haleine :D
Je suis contente que le piège ai fonctionné sur le fait de savoir si c'était vraiment Shekil ou non.
Ah ! Pour la partie signalée, c'est peut-être que je me suis mal exprimée >.>
"- Pas très impressionnant pour un Aria.
- Ils ne le sont jamais beaucoup dans cet état." -> l'idée étant de lier les deux répliques "Il n'est pas très impressionnant pour un Aria / ils le sont rarement dans cet état (aka on est rarement impressionnant quand on s'est fait éclater la tronche par un vampire =D).
Je poste la suite ce soir ^w^/
Encore merci de suivre avec autant d'attention leurs aventures !!