Aelia :
Le vieux mage les guidait vers le sommet de la tour du Cercle de Baltan. Vers la vérité.
Derrière elle, Sairen n’avait pas prononcé un mot depuis le début de l’ascension. Il semblait perturbé, perdu dans ses pensées. Le mage, lui, se contentait de répéter que le temps leur était compté. Mais que voulait-il dire exactement ?
Aelia n’osa poser la question. Elle craignait qu’un mot de trop ne déclenche encore quelque phénomène étrange.
Presque arrivés au sommet, elle jeta un regard vers le vide. Il n’y avait rien sous la rambarde. L’escalier en colimaçon flottait au milieu d’un gouffre infini, cerné de flammes dansantes. Des flammes sans chaleur, irréelles, suspendues dans l’air.
Elle déglutit et posa les yeux sur le mage, qui marchait sans s'arrêter.
Que m’arrive-t-il ?
— Nous y voilà. Mes pairs nous attendent, annonça le vieil homme.
Aelia et Sairen accélérèrent le pas. Ils arrivèrent devant une porte, gravée de cercles entrelacés. Sur chacun d’eux, des visages, des armes, des symboles. Le regard d’Aelia s’arrêta sur une petite créature ailée, un oiseau au plumage bleuté.
Un frisson la parcourut.
— Vous avez peur ? Je le comprends. Mais je pense que vous devriez me suivre. Votre mère aurait voulu que cela se passe ainsi, dit le mage en la fixant.
— Ma mère ?
Il ne répondit pas. Il ouvrit la porte et disparut dans l’obscurité de l’embrasure.
— Où est-il passé ? murmura Sairen, soudain plus alerte.
— Je… je ne sais pas. Tu crois qu’on doit entrer ?
— Avons-nous le choix ? Tu veux connaître la vérité sur qui tu es. Et moi, comprendre ma tâche.
Aelia le regarda longuement. Il paraissait toujours inquiet, mais déterminé.
— Il t’a appelé le Protecteur de l’Hirondelle. Tu crois que c’est…
— Oui. Dès qu’il l’a dit, j’ai su que c’était moi. Et je l’accepte. Mais il reste tant de questions.
— Alors allons-y.
Ils échangèrent un regard. Sairen hocha la tête et s’engouffra dans la pénombre.
— Sairen ?
Aucune réponse.
Elle inspira profondément.
— Quand il faut y aller…
Et elle le suivit.
Aelia s’attendait à ressentir une sensation étrange, comme lorsqu’elle avait été projetée à Krieg. Mais rien. Le silence absolu. Le néant.
Puis la lumière jaillit. À ses côtés, Sairen se tenait droit, face à cinq silhouettes encapuchonnées.
Cinq ?
Elle tourna la tête vers le garçon. Il tremblait.
— Voici l’Hirondelle, annonça le vieil homme en retirant sa capuche.
Les autres l’imitèrent. Tous arboraient des visages ridés, marqués par le temps. Tous sauf un : le comte Selvhar.
Aelia sentit son souffle se bloquer.
Pourquoi est-il ici ? Ne devrait-il pas être aux côtés de Père ?
— Jeune comtesse de Vaelan, dit Selvhar. Je vous présente nos excuses pour cet accueil peu conventionnel. Mais le temps presse. Nous ne pouvions attendre plus longtemps que vous vous décidiez à nous rejoindre.
C’est le moins qu’on puisse dire…
— Des forces liées à un dieu déchu se préparent à frapper. Ils ont besoin de vous, et pourtant… ils ne vous ont pas encore trouvée. Ce qui est, avouons-le, déroutant.
— Malkar, murmura Aelia.
— Exact. L’ennemi est partout, même dans ces murs. Désormais, où que vous alliez, ne faites confiance à personne.
— Et le Loup ?
Un silence pesant. Un des anciens se leva lentement.
— Vous devez le trouver. Et l’aider dans sa quête. Ensemble, vous pourrez vaincre Malkar. Mais un autre ennemi, bien plus dangereux, se terre encore. Vous devrez protéger le Loup… et le guider vers ses réponses.
— Où le trouver ? Krieg ?
— Krieg est tombée. Ne l’avez-vous pas vu ?
Les paroles du vieil homme lui parurent délirantes.
— Comment pourrais-je voir ce qu’il se passe ailleurs ? Je ne sais même pas ce qui se passe dans mon propre royaume.
Sairen se rapprocha d’un pas. Alors que tous les autres visages la dévisageaient.
— Vous êtes une mage, jeune comtesse. Ces dons devraient être innés chez vous.
Aelia voulut nier. Mais tout ce qu’elle avait vécu… comment prétendre que rien n’était réel.
— Votre mère était une mage au service de Malkar, jadis. Elle a tourné le dos à ses semblables après la chute du demi dieu. Votre père pourra vous en dire davantage.
Père…
Mais une seule pensée la hanta.
— Est-elle en vie ? Je l’ai vue… dans un rêve.
— Elle l’est. Prisonnière à Drazyl, répondit le vieux mage qui les avait accueillis.
Aelia chancela. Chaque souvenir, chaque larme versée devant une tombe vide, prenait une saveur amère.
Pourquoi lui avait-on menti ?
Père…
Ses rêves, sans réponses, avaient toujours été réels. Elle avait revu sa mère.
Elle inspira, tenta de se redresser.
— Que dois-je faire ?
— Trouver le Loup. Et ouvrir la porte vers Malkar grâce au collier d’Elira. Ensuite ce sera au Loup de détruire ce qui détient le demi dieu.
— Le collier… mon collier ?
— Celui qu’a apporté votre père, confirma Selvhar.
Il posa une boîte devant elle. Aelia l’ouvrit. Le collier reposait là.
— Vous devez partir pour le royaume de Balar. Un mage vous accompagnera pour apprendre à maîtriser vos dons.
Mes pouvoirs… Partir ?
— Mais…
— Vous n’êtes pas en sécurité ici. Votre père le sait. Des gardes de Vaelan vous escorteront. Mais pas d’armée. Le pacte de la Forêt Sans Morts n’est pas rompu. Il faut agir avant que la Terre de Talharr ne se consume.
— Mon père… il est d’accord ? Je veux lui parler.
Silence.
— Ils approchent, annonça le vieux mage, qui était toujours debout.
— Qui ça ?
— Les serviteurs de Malkar.
Sairen se rapprocha d’Aelia, les traits tendus, prêt à tout.
— Vous devez fuir. Nous les retiendrons. Si vous échouez, les royaumes brûleront.
Le comte de Baltan lui lança le collier. Elle le rattrapa au vol.
— Ah et dans ces conditions le mariage est annulé.
Aelia sentit de la joie en elle pendant que Sairen semblait lui aussi avoir un poids en moins.
Le vieux mage, aux habits de couleurs, posa la main sur le mur nu. Une porte apparut.
— Ils ne franchiront pas ce seuil, déclara Selvhar, en entendant les pas se rapprocher.
— Et mon père ?
— Il vous attend au point de rendez-vous. Maintenant, partez !
Aelia, cette fois, obéit. Elle rejoignit le mage.
Sairen, lui, était resté immobile.
— Tu viens ? demanda-t-elle.
— J’arrive. Ne t’en fais pas, répondit-il, les yeux fixés sur son père.
Elle jeta un dernier regard vers les mages, prêts à défendre leur tour.
Elle hocha la tête en direction du garçon puis franchit la porte.
Le noir l’enveloppa. Le silence absolu. Pas un souffle, pas un écho.
Un battement. Puis une lumière. Une porte. Elle la franchit.
Et se retrouva dans une prairie.
Derrière elle, la porte brillait encore, enveloppée de brume.
— Aelia !
Elle reconnut la voix. Arlietta courait vers elle.
Son père se tenait non loin, entouré de gardes. Lordan aussi était là.
Son destin venait de basculer. Sa vie de future comtesse mariée s’effondrait.
Mais peut-être, au bout du compte, serait-elle enfin libre.
N’était-ce pas ce qu’elle avait toujours rêvé ?
sacré chapitre, la quete est enfin révélée à Aelia qui a tout juste le temps de comprendre ce qui se passe avant de devoir partir. J'imagine qu'une discussion avec le paternel sera de mise pour expliquer pourquoi lui avoir caché la mort de sa mère.
La suite promet d'etre intéréssante.
Un tout petit point sur la forme :
- Presque au sommet, (presque arrivés au sommet).
A plus,
Scrib
Eh oui ça y est, tout se met en place :)
Ah il y a encore beaucoup d'informations qui arrive aha
je pense que ça devrait être intéressant :)
Merci pour la suggestion je modifie :)
A plus !