Chapitre 8 | des armes et des pouvoirs

Notes de l’auteur : TW —  armes blanches, violence, confrontation physique

I’ll be your soul shaker
I’ll be your rainmaker
So tell me are you ready
For the fire.

I’ll be your storm chaser
I’ll be your human nature
So tell me are you ready
For the fire

Valley of wolves, Ready for the fire.

 

Le soir venu, alors que la majorité des Gardiens se détendait ou étudiait, Soline prit le chemin de l’Arena. Elle arriva la première devant la salle de simulation, mais ne resta pas seule bien longtemps. Aloïs, Félix, Jivan, Vangelis et Yun la rejoignirent quelques minutes plus tard, tous vêtus de leur uniforme d’entraînement et prêts à se plonger dans une séance de groupe, malgré l’appréhension et les récentes tensions. Gagnés par la hâte, ils décidèrent de ne pas attendre les deux retardataires pour entrer dans l’amphithéâtre ovoïde. Ils furent, à leur grande surprise, accueillis par Mereg et Orion. Les deux Gardiens avaient du mal à tenir en place en bas des gradins ; l’enthousiasme et l’impatience se lisaient clairement sur leurs visages.

— Ah bah enfin ! On a cru que vous n’arriveriez jamais ! s’exclama Orion. On a un petit cadeau à vous montrer, vous venez ?

Il reçut des regards intrigués en réponse, mais n’en tint pas compte et se dirigea sans tarder vers l’armurerie, à l’arrière de la salle, près des vestiaires et des douches. Mereg incita ses camarades à la suivre d’un signe de tête rassurant. Une fois dans l’arsenal, l’Atalante se regroupa autour d’une longue table couverte d’un drap. Mereg en attrapa un morceau et demanda, d’un air espiègle :

— Alors ? Prêts ?

L’engouement happait le reste de l’unité. Orion ne fit pas durer le suspense plus que de raison et dévoila ce que cachait le tissu, en tirant dessus d’un coup sec.

— Tada ! s’écria-t-il.

Un large éventail d’armement de pointe était exposé sur le plan de travail, sous les yeux ébahis des soldats. Mereg déverrouilla la vitrine pour qu’ils puissent passer en revue les pistolets, couteaux de combat, grenades, épées, arcs et autres bijoux du Génie Militaire. Aloïs attrapa une lance et l’analysa avec intérêt, puis réclama des explications :

— Où avez-vous trouvé tout ça ?
— Les Généraux nous ont accordé un accès aux meilleures armes que la base possède. Ce sont les mêmes que celles des équipes d’élite. Nous avons fait une sélection des équipements les plus adaptés aux missions furtives qui nous attendent.

Orion lança un regard complice à Mereg, ce qui était assez surprenant, au vu de la fin de leur discussion à la bibliothèque, le matin même. Elle compléta ses propos.

— Nous avons choisi ces armes en fonction de leur discrétion, de leur précision et de leur efficacité. Elles sont dotées des dernières inventions de la division scientifique. Et puisqu’on ne savait pas ce qui vous irait le mieux, on a pris de tout.

Les doigts de Félix se baladèrent entre les lames, sur le métal, les gravures et les lanières. Son appartenance à l’Artillerie lui permettait de constater la haute qualité du matériel, rien qu’au toucher. Il imaginait déjà leurs capacités en situation de combat.

— Impressionnant. Ce matériel est bien au-dessus de ce que nous avions avant ! On va devenir redoutables !

Habituellement stoïque et glacial, Vangelis se laissa emporter par l’excitation générale. Les traits de son visage s’étiraient, semblables à ceux d’un petit garçon devant un étalage de sucrerie. Son regard pétillait d’avidité. Il ne savait pas pour quoi opter.

— On peut en tester plusieurs ? Ou doit-on en choisir une et s’y tenir ? s’enquît-il.
— On est là pour ça, Vangelis ! Fais-toi plaisir ! assura Mereg.

Les Gardiens ne se firent pas prier pour se lancer dans leur découverte de l’attirail qui leur était offert. Ils sortirent les armes de leurs étuis respectifs et enchaînèrent quelques mouvements pour expérimenter leur prise en main. Des exclamations satisfaites raisonnèrent, à chaque nouvelle constatation ; une chaleureuse cacophonie s’éleva dans l’armurerie.
Contrairement à ses subalternes, Soline gardait une certaine retenue et se contentait d’observer de loin. Les yeux pénétrants d’Orion remarquèrent sa réserve ; il décida de s’approcher d’elle pour en percer le mystère.

— Ça ne te plait pas ? Tu trouves qu’on en a trop fait ?

Soline secoua vivement la tête.

— Non, non, pas du tout ! C’est incroyable, vraiment… Merci.
— Ne nous remercie pas avant d’avoir vu l’arme que je t’ai choisie…

La malice illumina le visage d’Orion, tandis que celui de Soline fût gagné par la surprise.

— Tu… tu m’as choisi une arme ? Elle est piégée ? balbutia-t-elle.

Elle était bien trop habituée à leur rivalité pour imaginer qu’Orion lui donne quelque chose sans arrière-pensée. Une adolescence remplie de coups bas, de mesquineries et de provocations ne s’effaçait pas en un claquement de doigts, même si elle trouvait tout ceci ridicule, comparé à ce qu’elle avait vécu ces six derniers mois.

— Non, ne t’inquiète pas, je ne suis pas aussi vicieux que tu le crois. Je préfère te battre loyalement. C’est ce qu’on a convenu, non ? Prends ça comme… un traité de paix, ou comme une preuve de ma bonne foi.

Soline haussa son sourcil gauche, feignant son scepticisme.

— Qui êtes-vous et qu’avez-vous fait de la prétention légendaire d’Orion Sullivan ?

Orion leva les yeux au ciel et laissa échapper un rire gêné.

— Arrête, je ne suis pas prétentieux. Pas à ce point.
— Je dois te rappeler ton laïus de ce matin ?

Un léger malaise s’installa de nouveau entre eux. Orion perdit son sourire, fixa le sol, puis bredouilla :

— Je suis désolé, Barnes. C’était vraiment odieux de ma part, et insultant, surtout. Les opinions de ma famille ne devraient pas m’influencer, surtout quand ça concerne mes co-équipiers.
— Moi aussi, je te demande pardon. Je n’aurais pas dû m’emporter… Je suis à fleur de peau, depuis mon retour à la Garde. J’ai du mal à trouver ma place.

La gêne persista malgré leurs excuses. Soline décida de ne pas laisser le silence devenir oppressant. Ils n’étaient pas là pour se rendre des comptes. L’entraînement primait sur le reste.

— Bon… Tu me le montres ce traité de paix ?

Ravi de retrouver le fil initial de leur conversation, Orion attrapa la main de Soline et l’amena dans un coin discret de l’armurerie. Il y avait dissimulé un paquet, duquel il extirpa deux poignards. Deux véritables œuvres d’art ; une fusion parfaite entre beauté et efficacité. Fabriqués avec une technologie de pointe, ils exhalaient une aura de sophistication meurtrière. Les lames en acier étincelaient avec une perfection glaçante, polies à outrance. Elles donnaient l’air de pouvoir transpercer n’importe quoi… Ou n’importe qui. Leurs manches étaient un ravissement pour les yeux : élégants, ornés de soleils, dont les rayons dorés semblaient danser sur le métal noir. Soline fut émerveillée par ce cadeau, qu’elle fit tourner entre ses doigts. Elle gratifia Orion d’une œillade admirative.

— Oh, wouah ! Sullivan ! Ils sont… magnifiques !
— Et ils réagissent à la lumière.

En guise de démonstration, Orion posa ses mains sur celles de Soline, afin d’incliner les poignards vers les faisceaux lumineux projetés par les plafonniers. Aussitôt, ils commencèrent à luire et à se charger de chaleur, contre les paumes de la jeune femme, qui observa le phénomène avec fascination. Elle constata que ces armes étaient parfaitement adaptées à ses compétences. L’instant suivant, elle réalisa que ce n’était pas un hasard : elles ne pouvaient pas être offertes par le Haut Commandement.

— Ils ne faisaient pas partie du lot d’équipement, n’est-ce pas ?

Pris au dépourvu, Orion rougit légèrement et hocha la tête.

— Non… Je les ai fabriqués pour toi, il y a quelques jours. Tes prouesses avec Flash, lors du petit déjeuner de rentrée, m’ont inspiré. Je voulais que tu te sentes un peu mieux… Un peu plus « toi-même », comme avant. Je ne savais pas que tu t’en servirais aussi tôt, cela dit.

Cet aveu inattendu toucha Soline. Elle ne s’était pas doutée une seule seconde qu’Orion puisse être du genre à avoir des attentions particulières pour autrui. Encore moins pour elle. Peut-être l’avait-elle jugé trop vite ? Peut-être devrait-elle apprendre à le connaître un peu plus ? Lui et les autres membres d’Atalante ? Elle se mordilla la lèvre inférieure, en cherchant les mots appropriés pour exprimer sa gratitude.

— Je ne sais pas quoi dire ou faire pour te remercier…
— Utilise-les sur le terrain, ça suffira.
— T’en fais pas pour ça : ces merveilles vont devenir mes meilleures alliées au combat.
— N’oublie pas qu’une équipe se trouve derrière toi. C’est mieux que des poignards, lorsqu’on a besoin d’alliés.
— J’essayerai d’y penser au moment où l’on devra se battre contre les Prométhéens… Ou lorsqu’on s’entraînera.

Soline marqua une pause, avant de scruter son interlocuteur et de l’interroger :

— Et toi, alors ? Tu as choisi une arme ?

Orion secoua la tête, en signe de négation.

— Pas encore, je t’avoue qu’il y a trop de possibilités, je ne sais pas vraiment vers quoi me diriger… Elles me paraissent toutes très efficaces. Je pense que je devrais en manipuler plusieurs pour trouver celle qui me conviendra le mieux.

Une lueur d’excitation s’agita dans la pupille de Soline, qui s’enthousiasmait déjà à l’idée de pouvoir surprendre Orion.

— Laisse-moi choisir pour toi, dans ce cas ! suggéra-t-elle.

Ils retournèrent près de la table. D’un seul coup d’œil, Soline sut ce qui correspondrait à Orion. Elle lui tendit un arc noir mat, épuré et futuriste. Les flèches qui l’accompagnaient étaient dotées de pointes acérées et possédaient plusieurs facultés d’offensive, déterminées par leurs couleurs. Les blanches envoyaient des décharges électriques, les rouges explosaient à l’impact, les violettes dégageaient des gaz aveuglants et les grises pouvaient poursuivre les cibles mouvantes. Le carquois en cuir, divisé en quatre compartiments, était conçu pour faciliter l’accès à toutes ces flèches. Orion passa la bandoulière sur son épaule gauche.

— Tu n’as pas hésité. Qu’est-ce qui te fait croire qu’il fera l’affaire ?
— Je te l’ai dit ce matin : tu agis dans les ténèbres, c’est ta marque de fabrique, même lorsque tu te bats. Ce n’est pas forcément une mauvaise chose ! Être un archer te permettra de rester en retrait, tout en ayant une vue d’ensemble sur l’unité. Et… je t’ai déjà regardé tirer à l’arc une bonne centaine de fois, j’imagine que c’est la seule discipline où tu pourrais me dominer les yeux bandés.

Orion croisa ses bras sur son torse, la mine boudeuse.

— Comme si tu me surpassais dans toutes les autres…
— Bien sûr que je te surpasse ! Voilà pourquoi tu me jalouses depuis cinq ans et tu triches pour me mettre à terre, au corps-à-corps.

Les sourcils d’Orion se froncèrent, mais son sourire, mesquin, s’agrandit lorsqu’il protesta :

— Je ne suis pas jaloux !
— Admiratif, alors ?

Orion entrouvrit les lèvres, mais Félix interrompit leur concours d’ego. Le jeune métis s’appuya contre l’encadrement de la porte, les bras croisés sur son torse, et les rappela à l’ordre :

— Bon ! Les tourtereaux ? Vous avez fini de vous chamailler ou on doit reporter l’entraînement ?

Les joues de Soline s’empourprèrent en réponse au surnom que Félix venait de leur octroyer, à elle et à Orion. Il était vrai que, de l’extérieur, ils avaient l’air de flirter et s’étaient, un instant, enfermés dans une bulle.

— Oui, oui, c’est bon : on arrive ! rétorqua-t-elle, à la hâte.

Les deux hommes échangèrent un regard complice, après la réaction de Soline. Ils se détournèrent ensuite de l’arsenal pour se diriger vers l’Arena, où leurs équipiers avaient déjà débuté leur échauffement.

Chacun avait choisi son arme, révélant ainsi un panel de compétences et de préférences. Aloïs se tenait fièrement aux côtés de sa lance à doubles têtes. Yun soupesait sa naginata, tandis que Vangelis testait la précision de son boomerang en le laissant tournoyer au-dessus de ses camarades. Félix, lui, avait opté pour un lasso rétractable. Il s’amusait à le claquer sur le sol, au plus grand désarroi de Mereg qui tentait, tant bien que mal, de se concentrer. Elle essayait de recharger avec sa brume les grenades et les autres dispositifs explosifs qu’elle avait à la ceinture. Un peu plus loin, Jivan faisait tourbillonner autour de lui deux chakrams afin de vérifier sa propre agilité.

Soline se pencha sur l’immense ordinateur de contrôle et sélectionna un mode de simulation. Autour des Gardiens, l’intelligence artificielle s’activa, puis commença à projeter un environnement de combat. En moins d’une minute, la salle se mua en un paysage urbain en ruine. L’Atalante faisait maintenant face à un amas d’immeubles détruits, de carcasses de voitures et de débris.

— Je vous propose une session en mode coopératif, déclara la Caporale-cheffe. Nous allons devoir travailler ensemble pour atteindre notre objectif et réduire nos ennemis en pixels.
— Oui, la coopération, c’est une bonne idée, approuva Orion, en soutien. Je crois qu’on s’est assez confronté les uns aux autres aujourd’hui, on doit créer des liens et tester nos affinités, au lieu de se tirer dans les pattes.

Les membres de l’Atalante acquiescèrent. Soline se retourna vers l’ordinateur pour ajuster les paramètres de la simulation. Une poignée d’adversaires se matérialisèrent au loin, dans les décombres. Des créatures humanoïdes, mi-organiques, mi-mécaniques, dont le rugissement annonça le début des hostilités. Soline resserra sa queue de cheval, puis prit sa responsabilité de leader. Elle suggéra un angle d’attaque ainsi que la division de l’unité en trois petits groupes. Elle forma une section d’assaut frontal, au centre, avec Aloïs et Yun. Mereg et Vangelis ouvrirent la voie en tant qu’éclaireurs, décimant les premiers ennemis, à distance. Les Gardiens restants — Orion, Félix et Jivan — se placèrent en renfort, à l’arrière, au cas où une menace les contournerait.

Dans cet environnement virtuel, l’entraînement prenait une toute nouvelle dimension. Les humanoïdes créés par l’intelligence artificielle semblaient pouvoir imiter la puissance et les agissements d’un escadron guerrier, comme s’ils étaient dotés d’une conscience. Ils se précipitèrent vers les soldats avec une fureur presque effrayante, après avoir perdu leur première ligne à cause des bombes parsemées par Mereg et activées par le boomerang de Vangelis. Le véritable combat, en face-à-face, ne tarda pas à débuter et les premières failles de l’Atalante commencèrent à se révéler. L’unité n’arrivait pas à trouver son rythme et une cohésion suffisante pour repousser les créatures. Des tensions émergèrent quand les Gardiens essayèrent de coordonner leurs mouvements, sans vraiment y parvenir.

Les flèches d’Orion manquèrent de peu l’épaule de Yun, qui se jeta dans la poussière pour ne pas être blessée. Elle n’eut pas le temps de se redresser que le groupe se dispersa avec précipitation : Mereg, trop pressée, venait de déclencher une de ses grenades, sans prendre en compte la proximité de ses co-équipiers. La communication était également chaotique. Les ordres se superposaient, et par moments, personne ne semblait écouter. Aloïs critiqua bruyamment une décision de Soline, qui se vexa et débuta une dispute en pleine lutte. La situation s’aggrava lorsque l’un des ennemis profita de leur querelle pour désarmer Aloïs.

La dynamique de l’unité changea radicalement face à l’urgence. Même si le danger n’était pas réel — la salle de simulation permettait aux Gardiens d’exercer leurs compétences et de perfectionner leurs tactiques sans craindre pour leurs vies — ils prirent les choses un peu plus au sérieux et se ressaisirent. Leur entraînement ne servirait à rien, s’ils agissaient en solitaire. Chacun sut ce qu’il avait à faire, où il devait être. L’unité se souda enfin, guidée par un élan de détermination.

L’un des chakrams fendit l’air afin de couvrir Aloïs et repousser son assaillant pendant qu’elle se relevait. Yun attrapa la main de la rousse et la tira vers elle. Dos à dos, elles entreprirent de désintégrer les créatures qui s’amassaient autour d’elles. Yun les désorientait en formant de puissantes nuisances sonores grâce à ses pouvoirs. Aloïs brisait leurs plastrons et coupait leurs respirations de par sa force surhumaine. Ensemble, elles réussirent à vaincre une dizaine de monstres, puis se frayèrent un chemin jusque dans une ruelle moins dangereuse.

Plus le temps passait, plus les adversaires et le décor devenaient hostiles. C’était toujours ainsi dans l’Arena. De nouveaux débris tombaient des derniers bâtiments encore debout. Le sol, couvert de poussière et de gravats, était instable, voire impraticable. Les humanoïdes poussaient comme des fleurs vénéneuses et leur horde ne connaissait ni la fatigue ni la peur. C’était le désavantage des entraînements simulés : les ennemis ne mourraient que lorsque la partie était finie, et cette partie ne se terminait qu’au moment où le drapeau rouge, caché quelque part dans l’amphithéâtre, était arraché. Les soldats s’essoufflaient malgré le regain de détermination et l’amélioration de leur organisation.

L’un d’eux devait trouver le fanion écarlate.

Mereg fut naturellement désignée par Soline pour cette tâche ardue. Elle était vive, de corps et d’esprit. À l’affut, elle se faufilait partout telle une pie à la recherche d’un trésor. Les autres devaient simplement capter l’attention de leurs adversaires, pendant qu’elle bondissait de décombres en décombres. Soline, à elle seule, régla ce détail. Elle produisit suffisamment de lumière et de chaleur pour attirer les ennemis au beau milieu de l’Arena, là où ils ne verraient pas les mouvements de Mereg. De son côté, Vangelis se dupliquait à outrance autour d’eux, ce qui donnait l’illusion qu’ils étaient encerclés. Félix les paralysait tantôt par son lasso, tantôt par sa télékinésie ; Yun et Aloïs les achevaient en les transperçant de leurs lames respectives. À l’écart, Orion et Jivan abattaient les rescapés, les solitaires ou les déserteurs. La coordination de l’unité, combinée à l’efficacité de leurs nouvelles armes et de leurs magies, commençait à porter ses fruits.

Les yeux de Mereg se posèrent finalement sur une tache rouge, plantée entre deux vitres brisées. Elle escalada avec prudence l’immeuble, manqua de tomber deux fois, mais s’agrippa si fort à la pierre qu’elle réussit à atteindre le cinquième étage. Elle bondit à travers l’encadrement de la fenêtre et s’empara du drapeau. Aussitôt, les créatures se désintégrèrent et l’environnement virtuel s’évanouit. Les membres de l’Atalante, essoufflés et encrassés, retrouvèrent brutalement la réalité. Orion, le visage marqué par l’effort et la satisfaction, perturba le récent silence de la salle de simulation en premier :

— C’était un bon début ! Nous devons encore faire des ajustements, mais je suis convaincu que nous pouvons devenir une équipe prodigieuse !

Un rire sincère sortit d’entre les lèvres de Soline, qui s’était laissée tomber au sol, d’épuisement. Elle essuya la sueur de son front, dénoua ses longs cheveux noirs et déclara :

— Prodigieuse ? Tu y vas un peu fort, je crois ! Mais je suis d’accord, si nous continuons de renforcer notre cohésion et nos compétences, notre unité pourra fonctionner.
— Oh, c’est sûr qu’on a du boulot, ajouta Yun, la session d’aujourd’hui a bien failli déraper une bonne dizaine de fois…

Jivan vint s’installer aux côtés de Soline.

— Nos erreurs et nos désaccords font partie du processus d’apprentissage, la Commande Klaus nous l’a assez rabâché durant nos premières années ici…
— On n’est plus en première année, Kapoor. On part en mission dans deux semaines, il va falloir qu’on s’entraîne tous les jours, si l’on veut revenir en un seul morceau.
— Je t’ai connu plus optimiste, Félix, reprit Orion. Nous avons encore du chemin à parcourir, mais nous avons fait un grand pas en avant.
— D’ici notre départ, nous devons nous assurer que notre cohésion soit inébranlable. Si nous réussissons à combattre ensemble dans les simulations, nous réussirons sur le terrain.

L’équipe hocha la tête, signe d’approbation collective. La fatigue s’intensifia et plus personne ne souhaita débattre. Le groupe se leva et quitta la salle. Côte à côte, ils arpentèrent les profondeurs silencieuses de l’académie, aux abords de minuit, en direction de leurs chambres. L’obscurité avait enveloppé l’île et une tranquillité presque surprenante régnait tout autour d’eux. La tension accumulée pendant leur dure journée s’était peu à peu dissipée au fil des heures, et ils ressentaient désormais un sentiment d’accomplissement. Leurs visages, éclairés par la lune, reflétaient une intense satisfaction même s’ils étaient exténués. Une nouvelle force les liait les uns aux autres.

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