Chapitre 8 : Enora

Par Maric
Notes de l’auteur : chapitre remanié

J’ai passé une nuit plongée dans un songe chatoyant ça m'a fait un bien fou. J’aime me retrouver au milieu de ces fils multicolores. Ils me transmettent une énergie positive qui me poursuit au réveil.

Comme d’hab, je ne cherche pas à comprendre, je me contente d’apprécier. Je suis une petite souris qui s’effraye de tout et je l’ai toujours été. C’est à Laure que je dois cette comparaison quand elle essayait de me rassurer. Ce n’était pas péjoratif pour elle, mais ça ne veut pas dire pour autant que je le prenais bien. La peur est toujours là, en arrière-plan, mais j’arrive à la maintenir à l’écart.

Je n’ai pas revu Yaël du reste de la journée hier et cela me touche plus que ne le voudrais. Roland semble comprendre ce que je ressens mieux que moi et loin de l’homme froid qu’il m’a montré au début, je découvre une personne sensible et attentionnée.

Je me prépare à partir. Laure vient me rejoindre à la demande des deux hommes qui ne voulaient pas que je conduise. Roland est parti la chercher à la gare.

J’aurais aimé que l’un des deux « Yaël » me ramène chez moi du coup je suis un peu déçue. Je ne peux m’empêcher de penser qu’ils sont pressés de se débarrasser de moi.

Je devrais être heureuse de rentrer à la maison, mais ce qui m’est arrivé et ce nouveau rêve qui semble être né d’ici me laisse déjà mélancolique. Peut-on être nostalgique d’un endroit que l’on découvre seulement ? Je me pose tant de questions sur ces deux hommes et leur meute étonnante. L’attachement de Yaël et Roland à leurs loups est profond. Ils donnent l’impression de les traiter comme des amis, à égalité. C’est très surprenant, mais cela me touche.

Je soupire et décide de laisser ces cogitations pour plus tard. « Réjouis-toi, Laure va arriver ».

Je musarde au soleil sur le perron du manoir, face au terre-plein en gravier derrière lequel s’étale une pelouse où scintille miroir d’eau. Des arbustes s’épanouissent çà et là et quelques arbres imposants donneront de l’ombre en été.

De ce que j’ai pu en voir, le manoir est implanté au milieu d’un immense terrain clôturé par un mur de ronces impressionnant. Derrière l’édifice se trouve le terrain d’entraînement des loups et des hommes. Je les ai vu en pleine action pas plus tard qu’hier, c’était d’ailleurs un beau spectacle. Je soupire à ce souvenir.

Un grand talus assez large borde ce terrain et le roncier moins haut sur cette partie. Derrière se trouve un bois qui semble assez étendu.

La question est par où entre-t-on ? Cela m’intrigue car je n’ai pas vu de portail. Je hausse les épaules, je verrai bien quand je sortirai.

Les loups s’approchent de moi en jouant entre eux, j’ai compté trois femelles et trois mâles. Ils ne sont plus menaçants mais ne se laissent pas approcher pour autant.

Je regarde ses masses de muscles puissants et gracieux se poursuivre, se tourner autour en une danse sauvage. Un sourire admiratif étire mes lèvres.

Un déplacement d’air m’indique la présence de quelqu’un près de moi, je lève les yeux sur Yaël et ce foutu cœur manque un battement. Il m’exaspère la plupart du temps, voire toujours, mais peut-être est-ce sa capacité à me voir… je veux dire vraiment me voir, pas seulement me regarder, qui m’attire en lui.

  • Je peux ?
     
  • Bien entendu.

Mes pommettes rosissent légèrement tandis qu’il s’assied si près de moi que je sens sa chaleur. Pour cacher mon émoi, je l’interroge sur les loups.

  • Equité parfaite, entre les deux sexes, c’est super, trois couples, dis-je d’une voix amusée.

Il hoche la tête. Il les regarde avec une telle affection que je sens une pointe de jalousie me pénétrer et ça me déboussole un peu. Je ne connais que son côté arrogant à mon endroit et je me rend compte qu’il n’est pas seulement ça, évidemment !

  • Ils sont magnifiques, je n’ai jamais vu de chien-loup de cette race et surtout de cette taille. Si vous les accouplez…

Je m’interromps car Yaël s’est tourné brusquement vers moi et me fixe d’un air choqué, puis soudainement un fou-rire le plie en deux. Je le regarde les yeux ronds, la bouche ouverte d’étonnement. Mon regard ne peut quitter son visage qui s’est transformé, des larmes font briller ses yeux qui luisent dans le soleil, et sa bouche ouverte sur son rire lui donne un air juvénile qui me retourne.

  • Vous avez entendu mes amis, hoquette-t-il, si on vous accouplait ?

Il s’adresse à la meute qui s’est rapprochée, les mâles d’un côté, les femelles de l’autre en se regardant d’un air mauvais et retroussant les babines.

Ils tournent leurs museaux vers Yaël toujours mort de rire alors que vexée, j’ai le sentiment d’avoir proféré une énormité.

La meute se précipite sur lui et le mordille, le bouscule, un des loups a les deux pattes sur ses épaules, deux autres lui lèchent le visage à grands coups de langue, On dirait qu’ils dégustent une glace.

  • D’accord ! vous avez gagné ! dit-il après s’être calmé tout en les repoussant et en se redressant.

La meute s’écarte sur un dernier grognement avant de s’éloigner.

Il passe une main dans ses cheveux ébouriffés, s’essuie le visage avec une grimace écœurée, se rajuste et plante ses yeux noirs encore brillants de rire dans les miens.

  • Vous avez votre réponse, pas d’accouplement, pouffe-t-il.

Il se moque de moi là, je n’apprécie pas du tout. S’il voulait faire de l’humour, c’est raté.

  • Vous me prenez vraiment pour une pauvre fille crédule ! Vous imaginez que je ne connais rien au dressage des chiens. Je sais parfaitement qu’ils sont capables d’obéir à un geste ou à une posture.

Je suis furieuse et blessée, j’ai la gorge serrée par la déception et je reprends plus calmement :

  • Vous avez éclaté de rire, c’était un signe de jeux pour eux, ils se sont jetés sur vous pour jouer eux aussi.

Les yeux noirs de Yaël me fixent un peu surpris mais son visage d’habitude impassible, reflète une certaine frustration que je ne comprends pas. Je me suis levée pendant ma tirade et je lui tourne le dos pour rentrer.

  • Enora !

Yaël me retient par le bras que je lui arrache, d’un geste rageur.

  • Je ne me moquais pas de vous.

Je le regarde suspicieuse, parce que c’est l’impression qui persiste en moi. Il ajoute le visage grave :

  • Je ne voulais pas vous blesser, jamais je ne me moquerai de vous.

Je doute fortement qu’il s’en prive si je lui en donne l’occasion mais je lis la sincérité dans ses yeux et également une lueur d’espoir qui me surprend. Il est planté devant moi les bras le long du corps et ses poings sont fermés. Il semble désappointé, mais j’ignore pourquoi.

  • Alors… pourquoi m’avoir sorti ça ? ça n’a pas de sens.

Il soupire et détourne le regard. Ça me retourne l’estomac et me serre le cœur.

  • C’était une blague… douteuse je le reconnais, n’y pensez plus.

Je suis stupéfaite. Je le regarde s’éloigner pour rejoindre la meute qui semble l’attendre. Je suis perplexe car j’ai entendu autre chose dans ses paroles comme une attente que j’aurais déçue et ça me bouleverse. Les muscles de son dos sont crispés alors qu’il rejoint les loups. Je continue à le fixer assis au milieu des loups. J’ai déjà vu la scène la veille à la fin de leur entraînement. Un frisson descend le long de mon échine. Son regard me happe à nouveau et se détourne vers un des loups. Quelque chose m’interpelle dans le groupe qu’ils forment, sans que je puisse mettre le doigt dessus. J’aspire l’air entre mes dents, les larmes perlent au coin de mes yeux. Je les observe encore, concentrée, c’est au coin de mon esprit… j’y suis presque !

Un klaxon chasse cette impression, j’oublie tout car Roland est de retour avec Laure.

Vous devez être connecté pour laisser un commentaire.
Edouard PArle
Posté le 30/05/2023
Coucou Maric !
Je repasse sur ton histoire, pour découvrir la suite des (més)aventures d'Enora. Toujours beaucoup de mystères, le passage sur l'accouplement est assez perturbant, on a du mal à voir ce qui relève de l'humour et du réél. On découvre mieux les personnages de Yaël et Roland même s'il reste encore beaucoup à découvrir.
Curieux d'en apprendre plus sur Laura...
Mes remarques :
"dans un songe chatoyant ça me fait un bien fou." -> ça m'a fait un bien fou ?
"Comme d’hab, je ne cherche pas à comprendre," c'est assumé de ne pas mettre "habitude" ?
"Un klaxonne chasse cette impression," -> klaxon ?
Un plaisir,
A bientôt !
Maric
Posté le 11/06/2023
Bonjour Edouard,
Mes excuses pour le retard et merci d'être venu retrouver Enora. Pour des raisons de santé je suis moins présente sur PA mais je suis trys touchée d'être encore lue et surtout dans ton cas commentée.
Merci pour les corrections.
Pour l'accouplement, il y a effectivement les deux humour et vérité. Enora ignore encore bien des choses sur son hôte.
J'assume le langage familier (pour l'instant) je verrai à la réécriture si je conserve.
Amicalement
A bientôt
Edouard PArle
Posté le 11/06/2023
Bon courage pour ta santé !
Maric
Posté le 02/07/2023
Merci Edouard
Laure Imésio
Posté le 17/07/2022
Toujours très réussie cette alternance de points de vue. Que de frustrations et de non -dits ! La relation que tu installes entre Enora et Yaël est très bien menée. Vivement qu'on en sache plus grâce à la cousine !
je me rend -) rends
A bientôt !
Maric
Posté le 18/07/2022
Coucou Laure
Oui certains éléments vont être dévoilés bientôt.
Merci pour tes corrections
J'espère que la suite te plaira autant
A bientôt
Akiria
Posté le 14/07/2022
Elle est trop succeptible notre Enora, faut qu'elle se détende mdrrr
Je sens qu'on va en apprendre davantage avec l'arrivée de Laure, en tout cas je l'espère.
Maric
Posté le 15/07/2022
Hello,
Je confirme, faut qu'elle se calme... ou qu'elle comprenne :)
Et oui la cousine peut être un déclencheur.
Merci pour ta lecture
A bientôt
Maud14
Posté le 04/04/2022
Ahhh t'en fait pas Enora, tu vas t'en souvenir! On touche quelque chose, mine de rien ça avance. Ils doivent être si beaux ces "chiens" ! Je continue :)
Maric
Posté le 04/04/2022
Oui ça va venir elle est têtue parfois haha
J'aime beaucoup la meute
Merci à toi
Vous lisez