Chapitre 8 : Pardonne-lui

Notes de l’auteur : Bonn lecture !

 

Playlist Romy :

I Wouldn’t Mind – He Is We

 

 

***

 

 

Après avoir passé la matinée à faire des croquis pour le nouveau spectacle à thème de Gloriana qui se déroulerait le mois prochain, je pris la direction des Jardins d’Iris où j’étais censée m’occuper des ornements pendant que Nick ferait les comptes.

J’étais de plutôt belle humeur. Le casque sur les oreilles, j’écoutais Campus de Vampire Weekend et me mis même à chantonner vers le milieu de la chanson.

Then I see you, you’re walking ‘cross the campus

Cruel professor, studying romances

How am I supposed to pretend

I never want to see you again ?

How am I supposed to pretend

I never want to see you again ?

Je m’autorisai même quelques petits pas de danse. Comment résister ? Il faisait un temps radieux et pour une fois, une brise agréable soufflait sur toute la ville. Comble du bonheur, Bellamy était quasiment déserte. Par un temps pareil, tout le monde s’était précipité à la plage. Rien ne semblait pouvoir assombrir mon humeur.

Enfin presque.

Lorsque j’entrai dans la boutique, je me figeai tout net. Derrière moi la porte se referma dans un bruit de carillon mais ni moi ni la chose étendue sur le comptoir n’y prêta attention.

— Wow, lâchai-je en faisant glisser mon casque sur mes épaules.

Si je m’étais attendue à ça !

Devant moi se tenait mon frère. Enfin, ce qui devait être mon frère. En vérité, je le reconnaissais à peine. Nick avait l’allure d’un mort-vivant. Son teint était pâle, ses yeux cernés. Je peinais même à croire qu’il s’agissait de la même personne que j’avais croisé la veille et qui me souriait avec son regard rieur habituel.

Lui qui ne cessait de nous faire la morale sur le fait de rester droit était à présent avachi comme un vulgaire sac de pommes de terre sur le comptoir et tirait une gueule à vous faire frissonner. Jamais je ne lui avais vu une expression aussi lugubre, même lors des funérailles de Pelote, le vieux chat de Mme Anne, il y a cinq ans. Nick adorait ce chat.

J’en restai bouche bée quelques interminables secondes. Même coincé au fond de son lit avec la pire angine qu’il n’ait jamais contracté Nick n’avait jamais paru si misérable. Ce qui était des plus alarmants.

J’approchai prudemment de lui et m’apprêtais à prendre sa température lorsque je remarquai ses yeux rougis. Nick avait pleuré. Mais Nick ne pleure jamais ! m’affolai-je intérieurement. Enfin, sauf devant Bambi, mais ça c’était une autre histoire.

— Nick ?

Mon frère sursauta, comme brusquement ramené à la réalité. Il se redressa paresseusement et se frotta les yeux.

— Ah, c’est toi Charl’s… grommela-t-il en se détournant. Je ne t’avais pas entendu.

— Est-ce que ça va ? ne pus-je m’empêcher de demander en laissant glisser mon sac à dos jusqu’au sol.

— À merveille, grogna-t-il sans me regarder.

Son ton avait été si brusque que j’en restai pétrifiée. En découvrant mon expression ahurie, Nick pinça les lèvres et se massa les tempes.

— Excuse-moi Charl’s, soupira-t-il sombrement sans oser me regarder dans les yeux. Je suis épuisé, je n’ai presque pas dormi la nuit dernière.

— Pourtant je ne suis pas rentrée très tard, dis-je avec prudence. Je n’ai même pas eu une minute de retard.

— Je sais, souffla-t-il, je sais… Ne t’inquiète pas, ce n’est rien, ajouta-t-il après un silence.

— Rien ? m’exclamai-je atterrée. Tu t’es vu dans un miroir ? Tu ressembles à un mort-vivant !

— À ce point ? marmonna-t-il avec surprise en se massant distraitement la joue.

Il tourna la tête vers une vitrine de la boutique qui lui renvoya une image peu flatteuse. En la découvrant, il grimaça.

— Tu as raison, dit-il sans me regarder, j’ai l’air au bout de ma vie.

— Qu’est-ce qui t’arrive ? m’inquiétai-je. Hier encore tu dansais avec moi dans la boutique et aujourd’hui tu sembles… complètement déprimé. Tu as l’air si lugubre que je m’attends presque à voir un nuage de pluie se former au-dessus de ta tête !

Nick poussa un long soupir avant de se laisser mollement retomber sur son siège. Lorsqu’il se frotta les yeux, il me sembla voir un petit garçon complètement perdu. Je me mordillai les lèvres. Ça n’était pas dans les habitudes de Nick d’être aussi sinistre. Que lui était-il donc arrivé ?

Puis ça me revint. La dispute avec Livio.

— Est-ce que… hésitai-je. Est-ce que tu as parlé à Livio récemment ?

Pour toute réponse, Nick m’offrit un faible sourire. Ses yeux brillaient de nouvelles larmes qu’il semblait lutter pour retenir.

— Pourquoi dois-tu toujours être si perspicace ?

— Parce que je suis ta sœur, répondis-je la gorge nouée.

Je passais derrière le comptoir et l’enlaçai. Nick mit un moment à me rendre mon étreinte. Et lorsque ce fut le cas, il me serra si fort qu’on aurait pu croire qu’il allait se noyer. Je l’entendis renifler dans mon cou. Je lui caressai le dos pour le consoler, comme maman le faisait.

— Là, là… murmurai-je tristement.

— Je ne sais plus quoi faire Charl’s…

— Et si tu commençais par me raconter ? proposais-je en m’écartant suffisamment pour croiser son regard.

Il était baigné de larmes. Mon Dieu, mon Dieu… soupirai-je intérieurement en essuyant ses joues. Nick prit une inspiration fébrile avant de lâcher :

— J’ai essayé… de parler à Livio.

Je fis la moue. À tous les coups, ça s’était encore terminé en dispute. Et à voir ses cernes, Nick n’avait pas dû en dormir de la nuit.

Je m’en voulais un peu. En rentrant hier soir, je n’avais même pas pensé à venir lui dire bonne nuit. J’étais tellement sûre qu’il dormait… Et ce matin lorsque je m’étais réveillée, il était déjà parti à la boutique.

— Nick, dis-je doucement, pourquoi vous êtes-vous disputé cette fois ?

Mon frère pinça les lèvres, le regard fuyant. Voilà qui était encore plus étrange. Nick n’était pourtant pas le genre à se replier ainsi sur lui-même. Qu’avaient-ils pu se dire pour en arriver là ?

J’hésitai. Je brûlais d’envie de savoir, mais je ne voulais pas le brusquer. Maman disait souvent qu’il fallait être patient. Lorsque nous avions un souci, elle nous laissait toujours le temps de rassembler nos idées, de trouver les bons mots. Alors je fis comme elle et j’attendis que Nick s’ouvre à moi.

Cinq longues minutes s’écoulèrent avant que Nick ouvre enfin la bouche. Avant de la refermer. Une minute encore avant qu’il ne parle enfin.

— Livio m’a proposé de vivre avec lui, lâcha-t-il enfin.

J’en restai coite.

C’était ça la raison de leur dispute ? Si n’importe qui m’avait regardé à cet instant, il m’aurait trouvé l’air d’un poisson qu’on aurait sorti de l’eau tant j’ouvrais et refermai la bouche sans mot dire. Et qu’étais-je censée répondre à ça ? En fait, je ne comprenais pas.

— Mais Nick, dis-je prudemment, n’est-ce pas une bonne nouvelle ? Livio et toi vous aimez tant, il est normal que vous finissiez par vivre ensemble, tu ne crois pas ?

Mon frère serra tant les lèvres qu’elles pâlirent.

— Nick…

— J’ai peur, lâcha-t-il enfin.

Je battis des cils, abasourdie.

— Peur ? De quoi ?

— Peur que ça ne dure pas, m’avoua-t-il en relevant des yeux larmoyants vers moi. J’ai peur que si nous vivons ensemble, on perde ce qu’on a, qu’on finisse par se marcher dessus et qu’on finisse par se détester.

Je dus prendre sur moi pour retenir un soupir. Oh Nick… me désolai-je intérieurement. Sans un mot, je passai les bras autour de ses épaules et le serrai contre moi. Nick me rendit mon étreinte. Lorsqu’il se mit à trembler dans mes bras, je réalisai qu’il pleurait.

— Je l’aime, reniflait-il dans mon cou, je ne sais pas ce que je ferais sans lui… je ne veux pas le perdre mais je suis terrifié à l’idée qu’il finisse par me haïr…

Je ne dis rien, me contentant de le serrer un peu plus fort contre moi. Son chagrin me faisait monter les larmes aux yeux. Jamais je n’aurais imaginé que mon frère, ce grand gaillard solaire et si sûr de lui était en fait rongé par les insécurités.

— Nick, je t’ai déjà dit que dans un couple, il fallait communiquer, dis-je avec douceur. Si tu n’expliques pas à Livio pourquoi tu refuses de vivre avec lui, si tu ne lui expliques pas ce qui t’inquiète il ne peut pas comprendre.

Je m’écartai un peu et pris son visage en coupe dans mes mains. J’éloignai ses dernières larmes du pouce. Il avait l’air si malheureux… Le regard qu’il posa sur moi me serra le cœur.

— Laisse-lui une chance, lui dis-je. S’il ne comprend pas, alors c’est que ce n’était pas le bon et tu pourras compter sur moi pour te soutenir et même lui casser quelques dents si ça peut se soulager. Ou nous rendre malade en dévorant l’un de ces énormes pots de glace au chocolat, c’est comme tu préfères.

Nick eut un rire tremblant. J’osai sourire.

— Et s’il te comprend, dis-je en m’éloignant, s’il prend en compte ce que tu ressens, alors fais en sorte que ça marche, n’ai pas peur de lui dire ce que tu ressens vraiment et écoute-le en retour. Ne fais pas que recevoir, donne aussi.

Nick médita mes paroles quelques instants avant de relever des yeux brillants de gratitude sur moi. Il essuya quelques restes de larmes avant de sourire faiblement.

— Tu as raison, renifla-t-il et son sourire se fit plus malicieux. Qu’est-ce que je ferais sans toi, mon adorable petite sœur ?

Il leva une main un peu molle et l’abattis sur ma tête dans un simulacre de taquinerie. Je fus tentée de faire un trait d’humour mais n’en eu pas la force. À la place, je pris sa main dans la mienne et lui souris.

— Sûrement plein de bêtises, un peu comme moi si tu n’étais pas là.

Un nouveau rire. Je fus soulagée.

— Allez viens, grand malheureux, fis-je en le tirant de son siège. Tu dois encore faire les comptes et me donner des instructions.

— Où est passé la gamine qui ronchonnait à travailler ? me railla mon frère alors que je récupérais mon sac abandonné dans l’entrée.

— Elle est partie quelques heures en congé le temps de remettre son tyran d’employeur d’aplomb.

Cette fois-ci, Nick rit de bon cœur et je sus que c’était gagné.

— Très bien Miss Toujours-en-retard, allons travailler.

— Je n’étais pas en retard cette fois ! m’indignai-je en le suivant dans l’arrière-boutique. Si on est en retard aujourd’hui c’est ta faute !

— Oui, oui, j’ai compris, me sourit mon frère. Mettons-nous au travail maintenant.

 

Les heures qui suivirent, nous les passâmes à rattraper le temps perdu. Nick faisait les comptes dans son bureau à l’arrière alors que je m’occupais des rares clients qui préféraient visiter la ville que de bronzer à la plage. L’après-midi fut plutôt calme si bien que je me permis même de dessiner quelques croquis pour mes futurs pulls de Noël en fredonnant.

Je remettais en place un bouquet de lavandes et de lys lorsque la cloche de l’entrée tinta. Je me tournai aussitôt avec mon meilleur sourire de commerçante.

— Bonjour ! Bienvenue aux Jardins d’Iris ! Que puis-je faire pour…

Et me figeai aussi sec.

À l’entrée se trouvait un jeune homme que je reconnus tout de suite.

— Oh, fis-je faute de savoir quoi dire.

Il n’était pas difficile de reconnaître Livio. Le petit-ami de mon frère passait difficilement inaperçu et ça n’était pas à cause d’un quelconque style un peu excentrique comme le mien. En fait, il avait plutôt l’air d’un fils de bonne famille avec son pantalon droit beige et sa chemise parfaitement rentrée dedans. Seule preuve qu’il devait mourir de chaud par cette chaleur ? Il ne portait ni sa veste parfaitement taillée ni le gilet de laine qu’il arborait en temps normal. À la place, il avait même relevé ses manches, dévoilant ainsi l’élégante montre que Nick lui avait offert l’an dernier.

Non, ce qui attirait l’œil chez lui, c’était surtout son beau visage. C’était presque criminel qu’il ne soit pas devenu mannequin, mais Livio préférait de loin la poésie et le théâtre aux feux des projecteurs. Grand, athlétique, il arborait une peau halée et des yeux d’un marron chocolat à croquer. Ses cheveux noirs lui tombaient sur les épaules dans un fouillis de boucles rebelles aux jolis reflets dorés tandis qu’à son oreille on pouvait deviner les restes d’anciens piercings.

Livio me dévisagea, visiblement mal à l’aise. Dans ses mains se trouvait un bouquet. Un énorme bouquet dont la fabrication – j’en aurais donné ma main à couper – ne venait d’aucune boutique de la région.

— Est-ce que… commença-t-il d’une petite voix, mais je levais aussitôt une main pour l’arrêter.

— Une minute, le coupai-je avec un sourire. Je vais le chercher.

Et sans lui laisser le temps de protester, je me précipitai dans l’arrière-boutique où j’attrapai mon frère par le col et le traînai sans vergogne derrière moi.

— Charlie ! s’exclama-t-il, stupéfait. Mais enfin qu’est-ce que tu…

Parvenue dans la boutique, je le lâchai et le poussai devant moi. Nick s’immobilisa tout à fait face à Livio que je vis se raidir dans l’entrée. L’ambiance qui flottait entre eux était si lourde d’embarras qu’il me semblait presque en voir le nuage se former au plafond.

— Je sais que c’est un peu ridicule d’offrir des fleurs à un fleuriste, avança courageusement Livio, mais c’est pour toi.

Il tendit son bouquet à bout de bras, les yeux résolument braqués sur ses chaussures.

Ne sachant trop quoi dire, Nick réceptionna prudemment le bouquet qu’il étudia avec attention. Il s’agissait d’un assortiment tout à fait étonnant mais pas dénué de charme. Les bleuets se mariaient à merveille avec les angéliques, les anémones et les fleurs de guimauve. Quant au ruban qui les nouaient ensemble, jamais je n’en avais vu d’aussi soigneusement noué. Même Nick n’aurait pas fait mieux !

— Je l’ai confectionné, nous apprit Livio en essuyant nerveusement ses mains sur son pantalon, comme tu me l’avais montré. Je pensais… Je voulais…

Nick le fixait avec attention. De là où j’étais, je voyais les larmes qui abondaient à ses yeux.

— Je suis désolé, lâcha enfin Livio. Je sais que je n’aurais pas dû insister autant mais…

Un long silence s’ensuivit. Exaspérée, je pris les choses en mains. Littéralement.

— Bien ! m’exclamai-je soudain en claquant des mains – ce qui fit sursauter nos deux tourtereaux qui tournèrent leur attention vers moi. Il me semble que vous avez beaucoup de choses à vous dire tous les deux, je vais donc vous laisser.

Mon frère me fusilla du regard. Je l’ignorai et lui lançai un clin d’œil.

— Charlie... gronda-t-il tout bas, mais je continuais de reculer vers l’arrière-boutique.

— Je crois me souvenir que tu voulais que j’aille vérifier les stocks, c’est ça ? souris-je malicieusement.

— Charlie, grogna mon frère.

— Oui tu as tout à fait raison, l’inventaire ne se feras pas tout seul, j’y vais donc de ce pas.

— Charlie ! aboya Nick en se retournant tout à fait.

— Bonne chance ! lançai-je avant de disparaître dans l’arrière-boutique. Oh, une dernière petite chose, ajoutai-je en sortant la tête par l’entrebâillement.

Je pointai le bouquet du doigt.

— Très joli le bouquet, tu es sûr que tu ne voudrais pas travailler avec nous à la boutique ?

Je vis Nick faire mine de s’approcher et lui offris un large sourire juste avant de lui claquer la porte au nez.

 

***

 

Faire l’inventaire me prit deux bonnes heures et me grilla certainement quelques neurones au passage. Les chiffres n’avaient jamais été mes meilleurs amis, aussi pris-je tout mon temps pour faire mon travail. Après tout ce temps, Nick et Livio devraient avoir fini de discuter, non ?

Une pensée soudaine me vint : Nick avait-il fermé la boutique le temps de leur discussion ? Mon Dieu, j’espérais bien que oui ! Il ne manquerait plus qu’ils se mettent à minauder et batifoler devant de potentiels clients ! Ils étaient tellement mordus l’un de l’autre qu’ils n’auraient même pas entendu la clochette de la porte même si on l’avait secouée sous leur nez.

Lorsque je retournai dans la boutique avec la liste de l’inventaire un peu plus tard, j’y découvris un Nick changé. Son teint était toujours un peu pâle et les cernes pendaient toujours à ses yeux, mais il rayonnait. En fait, son sourire était si grand et son regard si béat qu’il faisait presque peur. Visiblement, sa discussion avec Livio s’était bien passée. Le bouquet de ce dernier trônait d’ailleurs fièrement sur le comptoir.

Lorsqu’il me vit arriver, Nick me sauta dessus – littéralement – pour me serrer dans ses bras. Il était si heureux qu’il alla même jusqu’à me faire tournoyer dans les airs. Incapable de résister plus longtemps, j’éclatai de rire avec lui.

— Vraiment, dit-il en me reposant avant de m’embrasser sur la joue, tu es la petite sœur la plus merveilleuse de tout l’univers !

— Est-ce que ça veut dire que je pourrai faire la fête à l’Adonis jusqu’à l’aube ?

— Non, répondit-il d’un ton sans appel et sans se départir de son sourire.

Aïe

— Mais tu peux prendre ta journée demain.

Bon, ça n’était pas exactement ce que j’aurais voulu, mais ne crachons pas dessus ! Un jour de congé était toujours mieux que rien du tout et j’avais dans l’idée de me rendre à la mercerie pour chercher de nouveaux tissus. Dans le fond, je gagnais tout de même au change.

Mon frère s’éloigna, toujours aussi guilleret et se mit à arroser amoureusement ses plantes. Je le regardai faire avec fascination, accoudée au comptoir. Il avait l’air de flotter sur un petit nuage. Remarque, avec tous ces nuages qu’il m’avait semblé voir flotter autour de lui ces dernières heures, mieux valait qu’il flotte dessus qu’il ne se noie dedans.

— Oh fait, je voulais te demander, lança soudain Nick en me ramenant à la réalité. Ça te dérangerait si Livio passait à la maison ce soir ? Ça fait un moment qu’on ne s’est pas vu et…

Un sourire de chat étira très lentement mes lèvres, sourire qui fit taire progressivement mon frère car il le reconnut. Nick fronça presque aussitôt les sourcils, l’air inquiet.

— Ça ne me pose aucun problème mais… tu ne préférerais pas que je m’arrange pour aller passer la nuit chez Romy ou les jumeaux ? Histoire d’avoir, ajoutai-je en agitant les sourcils de manière suggestive, un peu de temps pour vous.

Mon frère s’empourpra. Non, en fait, il vira carrément écarlate. Le voir si gêné me fit éclater de rire. Il se renfrogna, les joues brûlantes.

— Très drôle, ronchonna-t-il.

Je ris tellement que j’en eus mal aux joues. Il me fallut un moment avant de me calmer.

— Plus sérieusement Nick, repris-je en m’essuyant le coin des yeux, je vois à ta tête que ça s’est arrangé, tu ne veux pas m’en dire davantage ?

Mon frère fit la moue quelques instants.

— Tu as juste envie de m’entendre dire que tu avais raison une nouvelle fois, je me trompe ?

— Il y a un peu de ça, confessai-je avec un sourire mutin. C’est toujours agréable de s’entendre dire qu’on a raison, tu en conviendras. Mais je suis aussi curieuse de savoir ce qu’il s’est dit. Vu ton air ravi, Livio a dû t’écouter et se montrer compréhensif.

— C’est vrai, concéda Nick l’air rêveur. Et il m’a également avoué avoir eu les mêmes craintes. Tu sais comme il a été malheureux en amour avant nous, il craint que ça ne se reproduise.

Je souris.

— Alors vous allez emménager ensemble ?

— On va commencer doucement, m’avoua mon frère avec un sourire timide. Passer quelques jours chez l’un et chez l’autre, y laisser des affaires. Quand il deviendra évident que ça marche on fera le grand saut.

— Ah ha ! m’écriai-je en me redressant d’un bond.

Nick sursauta et manqua renverser le contenu de son arrosoir sur ses pieds.

— Tu as dit « quand » et pas « si » ! m’exclamai-je.

— C’est vrai, confessa-t-il humblement.

L’embarras lui colorait toujours les joues, mais un sourire magnifique étirait ses lèvres.

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