Chapitre Huit : Prise d’otage
Gabrielle transpirait. Était-ce la chaleur du mois de juin qui agissait sur elle ? Non, il n’y avait pas encore une chaleur caniculaire à cette époque de l’année. C’était tout simplement un cauchemar. Un horrible cauchemar. Elle avait chaud. Un homme la poursuivait. Elle avait repoussé les draps avec ses pieds, mais il la traquait toujours. La température augmentait. Elle sentit une main remonter le long de son bras et passer sous sa nuque. Elle poussa un cri…et elle se réveilla. Valentin était penché au-dessus d’elle, l’air inquiet. Il ne portait qu’un bas de pyjama mais elle n’avait pas envie d’admirer son torse.
- Gabrielle…ne t’inquiète pas…c’était juste un cauchemar…
- Non…ce n’en était pas un…murmura-t-elle, en reprenant son souffle.
- Mais si.
- Reste-là.
Les moments où ils se tutoyaient étaient rarissimes. Même si cela les rapprochait davantage, le vouvoiement était, pour eux, un signe de respect, de politesse et de douceur.
- Tu as de la fièvre. Attends-moi, je vais te préparer un cachet.
Valentin disparut dans la salle de bain, puis revint, un verre à la main. Il aida la jeune femme à s’asseoir sur le lit et la fit boire doucement. Une fois sa tâche terminée, il retourna poser le verre dans l’évier. Quand il retourna près d’elle, elle transpirait encore. Sa gorge était humide.
- Allons, c’est fini. Vous allez vous rendormir. Il est trois heures du matin.
Gabrielle secoua la tête.
- Non. Si je m’endors, ça va recommencer.
- Mais non…
- Si ! Dormez avec moi !
- Euh…certes…fit Valentin, assez surpris.
Il se coucha près de la jeune femme, rabattit le drap sur lui (il avait froid) et éteignit la lumière.
- Ne vous inquiétez pas. Je veille sur vos rêves.
Peu de temps avant qu’elle ouvre les yeux, Gabrielle sentit que son bras était suspendu dans le vide. Elle en déduit qu’elle était au bord du lit, et elle put confirmer sa thèse lorsqu’elle se réveilla complètement. Elle tourna la tête. Valentin était là, endormi, au beau milieu du lit. L’un ses bras était glissé sous l’oreiller, et l’autre enlaçait la taille de la jeune femme.
- Quel culot…soupira-t-elle, en essayant de le pousser sur l’autre bord du lit.
- Je vous ai entendu…répondit-il, en lui adressant son éternel sourire de chat.
Gabrielle arqua un sourcil, surprise. Valentin ouvrit les yeux.
- Comment était votre fin de nuit ? s’informa-t-il.
- Bien mieux, merci.
- Parfait.
- Poussez-vous un peu, vous prenez toute la place !
- Vous trouvez ?
- Oui !
- Bah tant pis…moi, je suis très bien au milieu…
- Bon, puisque vous ne voulez pas vous pousser…je vais employer la méthode forte.
La jeune femme saisit son oreiller et cogna plusieurs fois Valentin avec. Il poussa un petit cri étouffé. Elle allait continuer lorsqu’il l’attira de force vers elle. Collée à lui, elle se tut soudainement.
- Comme ça, vous êtes au milieu, et moi aussi, et tout le monde est content !
Deux heures plus tard, au Quai des Orfèvres…
- J’en ai marre de monter les escaliers ! Y’a trop de marches ! Pourquoi y’a pas d’ascenseur ?
- Ta gueule !
Anthony et une jeune fille blonde, d’environ treize ans, gravissaient les escaliers menant à la Brigade Criminelle. Rachel était la petite sœur de l’élève. Il ne pouvait pas la supporter plus de deux minutes, et elle le savait.
- Ouah ! La vue qu’on a d’ici ! s’extasia-t-elle, en tournant la tête vers le rez-de-chaussée.
- Putain, mais tu ne peux pas la fermer ?!
- Bah Anthony ? s’étonna la voix de Berthier. C’est toi qui fais tout ce boucan ?
Le gardien de la paix avait accouru sur le palier du troisième étage, alerté par le bruit.
- Non, c’est la mistonne !
- C’est ta sœur ?
- Malheureusement.
- T’as vu ?! s’exclama la jeune fille. Il est méchant avec moi !
- Ta gueule !
- Mais qu’est-ce qu’elle fait ici ? demanda Berthier, en prenant à part Anthony.
- Y’a grève au collège, et donc, elle n’a pas cours. Les parents m’ont forcé à la prendre avec moi, pour pas qu’elle reste toute seule à la maison.
- T’as pas de veine !
- Clair !
Pendant qu’ils discutaient, Rachel s’était éloignée. Elle marchait doucement dans le couloir, en inspectant les vieux murs. Elle s’arrêta devant un cadre où était enfermé un dessin. Il représentait un homme d’une autre époque.
- Ouah ! C’est qui ce gros vieux avec sa grosse perruque brune ?!
- Gabriel Nicolas de La Reynie, répondit fièrement une voix. Le premier lieutenant général de police de la France sous le règne de Louis XIV. C’est lui qui a inventé l’éclairage public, pour que le taux de criminalité dans les rues diminue. Il est aussi connu pour avoir résolu l’Affaire des Poisons. Mais on lui doit aussi plein d’autres choses.
Rachel se retourna, surprise, et tomba nez à nez avec Gabrielle.
- Que faites-vous ici, jeune fille ? continua-t-elle, légèrement plus sévère.
- Bah…
- Putain Rachel ! s’exclama Anthony, qui arrivait en courant. Tu ne peux pas rester tranquille deux minutes, merde ?!
- Oh Anthony ! Pourquoi tu t’énerves ? s’informa Valentin, qui approchait à son tour. Oh, c’est ta sœur ?
- Ouais…grommela l’élève.
- Je me disais bien qu’il y avait un p’tit air de ressemblance !
- La ferme ! C’est pas drôle !
- Cool Raoul ! rassura la petite sœur. Je demandais simplement à la dame qui c’était le bonhomme sur le dessin !
- Ah bon ?! C’est qui alors ? Je me le suis toujours demandé.
- Gabriel Nicole de La Peniche.
Valentin et Gabrielle restèrent sonnés, non pas parce que la jeune fille avait déformé le nom du personnage, mais parce qu’Anthony ne le connaissait pas.
- J’ai toujours dit qu’il ferait un mauvais flic, fit Valentin en se tournant vers sa collègue.
- Hélas, j’ai bien peur que vous ayez raison…S’il ne sait pas qui est La Reynie, alors nous ne pourrons plus rien faire pour lui…
- Oh ça va…rumina l’élève. Tu vois Rachel, à cause de toi, je me fais mal voir !
Anthony prit à part sa petite sœur dans le bureau qu’il partageait avec Berthier et d’autres gardiens de la paix.
- Écoute moi-bien, petit rat. Ici, tu dois te tenir à carreaux, tu comprends. C’est très sérieux, alors ne dérange personne s’il te plaît !
- Okay, mais je vais faire quoi, moi ?
- Rien, tu t’assois par terre et tu te fais oublier !
- Tu rigoles ?!
- Pas du tout !
- Et je ne peux pas aller voir le beau blond ?
- Alors, là, t’as pas intérêt !
- Je ne pourrais pas lui être utile ?
- Il n’a rien à faire d’une gamine comme toi ! Il s’occupe de choses plus importantes !
- Même pour faire des photocopies ? insista Rachel, avec un sourire diabolique.
Anthony s’arrêta net. Si Valentin et Gabrielle lui demandaient de faire des photocopies, ce serait moins ennuyant pour lui si c’était sa sœur qui allait les faire.
- Bon, seulement pour les photocopies, okay ?
- Okay.
Le téléphone sonna et le jeune homme dut répondre. Rachel en profita pour s’éclipser et chercher Valentin. Elle entra dans une dizaine de bureaux sans frapper à la porte.
- B’jour, il n’est pas là le beau blond ? Ah non, il n’est pas là ! Au revoir !
Puis elle arriva enfin dans le bureau de l’officier, mais elle n’y trouva que Gabrielle.
- B’jour, il n’est pas là le beau blond ? Ah non, il n’est pas là !
- Le beau blond est au rez-de-chaussée.
- Ah bon ? Mais c’est là son bureau ?
- Oui, et c’est aussi le mien !
- Ah… Bon, je vais l’attendre alors.
La jeune femme allait répliquer lorsque Valentin entra dans la pièce. Rachel poussa un petit cri et se rua sur lui pour le serrer fort dans ses petits bras.
- Le beau blond !
- Et là, Gabrielle, vous êtes censée me sauver la vie, fit ce dernier, immobile.
- J’arrive.
Elle se leva et libéra le jeune homme de l’emprise de Rachel.
- Jeune fille, vous n’avez rien à faire ici ! réprimanda-t-elle.
- Mais si, je viens vous aider !
- Ah ouais ? s’exclama Valentin, en éclatant de rire. Pour quoi faire ? Un rapport, une enquête de voisinage ou une arrestation ?
- Non ! Pour faire des photocopies ! Mais je suis disponible pour tout !
- Ça, c’est encore un coup de ton frère.
- Non, non, c’est moi toute seule qui me suis proposée pour la tâche, et il était content que je m’investisse autant, et il a dit « d’accord ! » !
- Ouah…venant de lui, c’est pas étonnant !
- Alors, je peux aller faire des photocopies, hein, hein, dis oui, hein ?!
- Bien entendu !
Gabrielle lui tendit un gros paquet de feuille (ordinairement prévu pour Anthony) et Valentin donna à la jeune fille toutes les recommandations nécessaires pour mener à bien sa mission. Elle quitta la pièce, heureuse, et les deux lieutenants se serrèrent la main, contents de s’en être débarrassés.
Le travail de Rachel se passa plutôt bien. Elle alla jusqu'au bureau de Martine Monteil pour lui demander où se trouvait la photocopieuse. Celle-ci ne lui répondit pas, et la renvoya sèchement. Ensuite, elle fit un détour par la Brigade des Stupéfiants, où les policiers lui montrèrent les différents types de drogues dites illégales. Puis, elle descendit jusqu’au premier étage, et s’amusa avec les outils ultra-performants de la B.R.I.. C’est même elle qui donna l’alerte lorsqu’un centre commercial se fit attaquer. Elle participa aussi à la traditionnelle pause-café.
Après, elle traversa la cour et arriva jusqu’à l’Identité judiciaire, où elle détraqua involontairement les ordinateurs neufs, et donc, faussa les analyses ADN en cours. On la chargea de prendre des photos face-profil d’interpellés ; et elle fouilla aussi dans quelques tiroirs de la salle des archives (appelée aussi « le grand bain ») pour voir si elle connaissait les meurtriers et les fauteurs de troubles répertoriés.
Estimant que deux heures avaient passé et qu’elle n’avait toujours pas fait les photocopies demandées, elle se rendit à l’accueil, où elle se renseigna sur l’emplacement de la photocopieuse. La standardiste lui répondit qu’il y’en avait plusieurs dans chaque brigade, et donc, qu’elle devrait en trouver facilement à la Brigade Criminelle. Rachel remonta donc jusqu’au troisième étage, et tomba nez à nez avec une photocopieuse. Elle la programma, mais aucune feuille n’en sortit. En conséquence, elle brutalisa la machine plusieurs fois, mais cela ne fit qu’empirer son état, et la photocopieuse finit par rendre l’âme.
Berthier, alerté par les cris furieux de Rachel et les plaintes de la machine, accourut dans le couloir. Il appela un technicien pour réparer l’appareil, et amena la jeune fille à une seconde photocopieuse où il lui expliqua patiemment le fonctionnement. Il la surveilla lorsqu’elle fit ses manipulations, et l’applaudit quand les photocopies furent toutes faites.
- Bon, je vais aller donner les photocopies au beau blond.
- Non, non, non ! s’exclama Berthier. Tu viens manger d’abord ! Ton frère m’a laissé un plateau-repas pour toi. Tu rendras tes photocopies après.
- Il n’est pas là mon frérot ?
- Non, il est en patrouille.
- Pourquoi il ne m’a pas amenée ?
- C’est très ennuyant pour les jeunes filles comme toi. Allez, viens manger !
Rachel s’exécuta. Dès qu’elle eut terminé son repas, elle courut jusqu’au bureau de Valentin. Celui-ci était en train d’observer Gabrielle travailler, pensif. Lorsqu’il aperçut la jeune fille, il détourna le regard. Voilà quatre heures qu’il l’avait envoyée faire des photocopies, et cela avait été quatre heures paisibles et tranquilles, rien qu’entre Gabrielle et lui.
- J’ai fait les photocopies !
- Bravo !
- Je ne sais pas pourquoi, mais j’ai le sentiment que je suis vraiment faite pour être flic ! s’exclama Rachel, contente de son aventure matinale.
- Ah ça…répondit Valentin, amusé.
- Tu fais quoi ?
- Un rapport.
- Vous n’avez pas d’ordinateurs ?
- Pas encore. On a été piraté y’a pas longtemps.
- Ah, pas cool, ça.
- Tu l’as dit Bouffie.
Gabrielle se leva et s’avança vers la porte, avant de se retourner vers Valentin.
- Je reviens dans deux minutes. Je dois donner un truc à Berthier.
- Okay.
À peine eut-elle refermé la porte derrière elle que Rachel sauta sur les genoux du jeune homme et le fixa, réjouie.
- Elle te plaît, hein ?
- De quoi ?
- La dame.
- La dame ?
- La dame qui vient de sortir.
- Gabrielle ?
- Ouais.
- Non.
- Menteur !
- Fous-moi la paix ! siffla le jeune homme, énervé.
- Il est amoureux ! Il est amoureux !
- Mais tu vas te taire sale peste !
Rachel se calma et s’appuya sur le torse de Valentin.
- Je peux t’aider si tu veux, fit-elle en scrutant ses ongles.
- Non merci, sans façon ! Je sais me débrouiller tout seul !
- T’as un plan alors ?
Le jeune homme hésita à répondre. Déjà, il n’avait pas de plan, et nullement l’envie de passer à l’attaque. Il décida de mentir pour ne pas que Rachel s’implique davantage dans ses histoires de cœur.
- Alors ? insista la petite sœur d’Anthony.
- Ouais, j’ai un plan, comme tu dis.
- C’est quoi ? C’est quoi ?
- Secret défense !
Rachel allait répliquer lorsque Gabrielle rentra dans le bureau.
- Tu veux que je t’arrange le coup ? murmura-t-elle à l’oreille du jeune homme.
- Tais-toi ! Et enlève-toi de mes genoux !
Valentin poussa la jeune fille, qui le délaissa pour aller regarder par la fenêtre.
- Ça va ? demanda Gabrielle, en voyant sa mine inquiète.
- Ça va, assura-t-il.
- Oh la belle vue qu’on a d’ici ! s’exclama Rachel. Tiens, y’a mon frère en bas !
Elle ouvrit la fenêtre et se pencha pour mieux l’apercevoir.
- Ohé Anthony ! s’écria-t-elle, en faisant de grands signes de la main.
- Qu’est-ce que tu fous là, petit rat ?!
- J’ai fait toutes les photocopies !
- Parfait ! hurla l’élève, trois étages plus bas.
Anthony n’aurait pas pu rêver mieux. Grâce à sa sœur, il ne serait plus de corvée pour la semaine entière. Lorsqu’il entra dans le bureau de Gabrielle et Valentin, c’était pour ramener sa petite sœur chez leurs parents, au grand désespoir de celle-ci.
- Oh non…
- Et si ! ricana l’élève.
- Tu m’amèneras encore, ici ?
- Plutôt crever.
- T’es pas gentil avec moi ! Et tu dors à la maison ce soir ?
- Non. Je vais chez Sophie. Elle est d’une compagnie beaucoup plus agréable que toi !
- Méchant ! J’aimerais être aussi belle qu’elle !
- C’est raté ! se moqua Anthony.
- Et je veux un piercing au nombril comme elle !
- C’est ça…tu veux que je danse la Macarena aussi ?! Allez, dit au revoir à Valentin et Gabrielle, on s’en va !
- Ah, il s’appelle Valentin ?!
- Bah ouais.
Rachel fit la bise à Gabrielle, et lorsque ce fut le tour au jeune homme, elle en profita pour lui glisser un sage conseil à l’oreille.
- Prends-la par surprise !
Anthony la prit par la main et la fit sortir du bureau. Dehors, dans le couloir, la jeune fille hurla à pleins poumons :
- Prends-la par surprise !
- Qu’est-ce qu’elle a dit ? s’informa Gabrielle, étonnée.
- Rien du tout.
Une semaine plus tard, Valentin termina son service plus tôt que d’habitude et tomba nez à nez avec Anthony.
- Tiens, t’as fini le boulot ?
- Ouais.
- Comme moi ! s’exclama l’élève. Que c’est bon d’être en week-end !
- C’est clair ! Je vais à la banque retirer des sous, tu veux m’accompagner ?
- Je veux bien. Mais pourquoi tu veux retirer des sous ?
Valentin vérifia si personne ne les écoutait et se rapprocha du jeune homme.
- J’ai trouvé un nouvel appartement. Et il faut que je remercie Gabrielle de m’avoir hébergé pendant tout ce temps.
- Oh ! Elle est au courant que tu vas aller vivre ailleurs ?
- Non, pas encore. Mais je préfère attendre avant de lui dire.
Ils quittèrent le 36, et se rendirent à la banque où l’officier était client. Il y’avait une petite file d’attente, pas très longue, qui permit aux deux amis de prolonger leur discussion.
- Et tu vas lui offrir quoi comme cadeau ?
- Je ne sais pas. Pour commencer, j’ai envie de l’inviter au restaurant. Elle ne pourra pas me le refuser ! De toute façon, je ne lui laisserai pas le choix !
- Et ton appart’ alors, il est comment ?
- Encore mieux que celui qui a brûlé ! Y’a une salle de bain trop belle, un grand salon, et trois chambres ! Y’a aussi un ascenseur et un parking privé ! Et dans la salle à manger, y’a une grande fenêtre qui couvre tout le long du mur, et ça donne une vue panoramique !
- Putain ! Mais comment tu fais pour trouver des appart’s comme ça ?!
- Ah ah, j’en sais rien ! Mais toi, tu vis encore chez tes parents, non ?
- Ouais. Enfin, je vis moitié-moitié chez mes parents et chez Sophie. Mais je pense sérieusement à vivre avec elle. Comme ça après, on pourra se marier, et comme ça après, on pourra avoir plein d’enfants !
- Hey oh ! Minute papillon ! Je t’interdis de te marier et d’avoir des enfants avant moi, c’est compris ?!
- Roh…mais bouge-toi alors !
- C’est ce que j’essaie de faire, mais c’est hyper compliqué, figure-toi !
Anthony éclata de rire. Pris dans leur conversation, les deux policiers ne remarquèrent l’homme armé qui débarqua dans l’établissement financier.
- Tous à terre ! Que personne ne bouge, ceci est un hold-up ! hurla-t-il, en menaçant les clients de son arme.
- Tiens donc…ironisa Valentin, amusé.
- Il n'a pas l’air de déconner…murmura Anthony, tremblant.
- Mais ne t’inquiètes pas ! Dans chaque banque, y’a des agents de sécurité ! On ne craint rien !
Effectivement, il y’avait un agent de la sécurité, mais son corps inerte tomba rapidement sur le sol sous les cris des âmes sensibles.
- Il déconne toujours ? demanda l’élève en observant le cadavre du vigile.
- Okay, je veux bien admettre qu’on est mal barrés.
- Allez ! Putain, j’ai dit « tous à terre » ! Qu’est-ce que vous attendez, hein ?! Allez ! Et fermez vos gueules ! Coupez tous les portables ! Le premier qui appelle les flics, j’le descends comme ce mec !
- Val’, qu’est-ce qu’on fait ?
- On fait ce qu’il nous demande de faire !
Il saisit les poignets d’Anthony et d’une femme enceinte jusqu’au nez, et les força à s’asseoir derrière un comptoir, cachés. Ils observèrent tous les trois le bandit en train d’obliger les banquiers à lui reverser l’argent des coffres.
- Val’, qu’est-ce qu’on fait ? répéta l’élève, de plus en plus paniqué.
- Rien !
- Mais…on ne peut pas rester là à rien faire ?! insista-t-il, en sortant son petit revolver.
Valentin le regarda fixement, avant de hausser les épaules.
- Et bien, vas-y ! Va te faire descendre Anthony ! Qu’est-ce que t’attends ?!
- Je…
Finalement, le jeune homme renonça et préféra faire confiance à son supérieur, qui avait déjà un plan derrière la tête. L’officier s’approcha de la femme enceinte et lui prit la main.
- Dites-moi, vous êtes à combien de mois là ? lui chuchota-t-il, pour ne pas se faire entendre.
- Huit, répondit-t-elle, un peu stressée.
- Ça vous dérangerait de faire semblant d’avoir des contractions ?
- Je crois que ce ne sera pas nécessaire.
Elle pressa si fort sa main que Valentin crut que son sang ne circulait plus.
- On n’est pas dans la merde…Faites-moi confiance, tous les deux.
Il sortit de sa cachette à quatre pattes et, conscient d’être ridicule, fit un signe de la main au voleur.
- Excusez-moi, mais j’ai un gros problème.
- Qu’est-ce que tu veux, toi ?!
- Ma femme a ses premières contractions. Je peux appeler les urgences ?
Le bandit, très étonné, alla vérifier de lui-même si l’affirmation de l’officier était vraie, et quand il vit la jeune femme, crispée et transpirante, il opina du chef.
- Seulement les urgences ! Tu leur demandes de ne pas prévenir les flics, et de venir seulement pour amener la femme, sinon, j’en descends un parmi vous !
- Mais voyons, si je leur dis de ne pas prévenir les flics, ils vont comprendre qu’on se trouve dans une situation difficile, et ils le feront quand même. Pire même ! Ils pourraient appeler la Brigade Antigang ! Non, écoutez-moi, dès que l’ambulance arrivera, vous aurez déjà le fric, et vous pourrez partir avant qu’ils préviennent les flics ! Faites-moi confiance ! Si je dis une seule parole qui ne vous convient pas, je vous autorise à appuyer sur la détente !
- Okay ! Fais gaffe à ce que tu dis si tu ne veux pas louper la naissance de ton gamin !
- C’est un garçon ! jubila Valentin, en faisant mine d’être heureux.
- Non…c’est…une fille…contredit la future maman, entre deux contractions.
- Mais non, chérie, on s’était mis d’accord pour que ce soit un garçon !
- Bon, t’appelles ta putain d’ambulance, oui ou merde ?!
- Avec plaisir !
Le jeune homme sortit son téléphone portable et composa le numéro du bureau de Gabrielle, sous le regard menaçant du bandit. Elle décrocha dès la première sonnerie.
- Allô ?
- Oui, bonjour Madame…
- Valentin ?
- Je vous appelle parce que ma femme est sur le point d’accoucher, et il faut absolument que vous m’envoyiez une ambulance à la banque Société Générale du seizième arrondissement.
- Mais, à quoi jouez-vous ?! s’étonna Gabrielle.
- Je vous en prie Madame, c’est hyper important, c’est de ma femme que je vous parle ! Je ne peux pas l’amener à l’hôpital !
- Mais je…
- Ah, vous êtes d’accord ?! Merci beaucoup Madame ! N’oubliez pas, une ambulance et une feuille de bristol pour qu’on puisse marquer le nom de mon fils ! Une feuille de bristol, hein ! Pensez-y surtout !
Valentin raccrocha avant qu’elle ne put répondre quoique ce soit. Il soupira puis lança un sourire d’excuse au bandit.
- Et ouais, c’est la tradition dans ma famille d’écrire le nom du gamin sur une feuille de bristol. Ça porte bonheur !
Le jeune homme se rassit derrière le comptoir et reprit la main de la femme enceinte.
- Une feuille de bristol ? s’étonna Anthony.
- Elle est intelligente, elle comprendra.
Cependant, au 36, Gabrielle était loin de comprendre. Elle restait immobile, à fixer le message de Valentin qu’elle avait recopié sur une feuille. Elle n’arrivait pas à comprendre pourquoi il avait fait comme s’ils ne se connaissaient pas, ni pourquoi il fallait qu’elle lui apporte une feuille de bristol de toute urgence. La jeune femme décida donc d’aller consulter le flic le plus logique de la Terre entière : Corentin Berthier.
- Désolée de te déranger, mais Valentin m’a appelée il y’a cinq minutes.
- Ouais, et ?
- Et voilà ce qu’il m’a dit, fit-elle en lui donnant la feuille.
« Oui, bonjour Madame…Je vous appelle parce que ma femme est sur le point d’accoucher, et il faut absolument que vous m’envoyiez une ambulance à la banque Société Générale du seizième arrondissement…Je vous en prie Madame, c’est hyper important. […] Je ne peux pas l’amener à l’hôpital ! […] N’oubliez pas, une ambulance et une feuille de bristol pour qu’on puisse marquer le nom de mon fils ! Une feuille de bristol, hein ! Pensez-y surtout ! »
- C’est vrai que c’est bizarre…affirma Berthier, en prenant un surligneur. Je vais souligner ce qui est étrange, et après, on réfléchira tous les deux.
Une minute plus tard, il remontra la feuille modifiée à Gabrielle.
« Oui, bonjour Madame…Je vous appelle parce que ma femme est sur le point d’accoucher, et il faut absolument que vous m’envoyiez une ambulance à la banque Société Générale du seizième arrondissement…Je vous en prie Madame, c’est hyper important. […] Je ne peux pas l’amener à l’hôpital ! […] N’oubliez pas, une ambulance et une feuille de bristol pour qu’on puisse marquer le nom de mon fils ! Une feuille de bristol, hein ! Pensez-y surtout ! »
Pour méditer tranquillement, ils firent les 146 pas dans les escaliers.
- À quoi cela va-t-il nous avancer ? demanda la jeune femme, en s’écartant pour laisser passer un CRS.
- On peut remarquer qu’il a fait comme s’il ne te connaissait pas. Déjà, ce n’est pas normal. Il s’est inventé une femme enceinte sur le point d’accoucher…
- Peut-être qu’elle existe vraiment…
- Peut-être, mais si c’est le cas, pourquoi il t’a appelée toi, et pas les urgences ?
- Il attendait sûrement de moi que je le fasse. Puisqu’il a dit qu’il « ne pouvait pas l’amener à l’hôpital ».
- Et pourquoi il ne peut pas ? insista Berthier. Il dit lui-même que « c’est hyper important ».
- Je ne sais pas ! Mais il faudrait que j’envoie quand même une ambulance pour vérifier.
- Et pas qu’une ambulance…
- Hein ?
- Il te demande aussi une feuille de bristol.
- Et c’est là que je ne comprends pas…avoua Gabrielle.
- Moi non plus.
- Pourquoi une feuille de bristol ?
- Aucune idée. Le pire, c’est qu’il insiste pour qu’on lui en amène une. J’ai toujours pensé qu’il était bizarre ce mec, et tu vois, je ne m’étais pas beaucoup trompé.
- Il n’est pas bizarre, il est seulement rusé. C’est un message codé. Il ne voulait pas qu’on entende ce qu’il voulait me dire vraiment.
- Et là, le mot secret, c’est « feuille de bristol ».
Gabrielle et Berthier étaient arrivés au bout des 146 marches, sans avoir encore trouvé la solution de l’énigme de Valentin. Ils passèrent devant un tableau qui était accroché sur le mur et dont la jeune femme avait l’habitude de relire à chaque fois qu’elle passait devant. C’était un tableau qui affichait les différentes brigades qui étaient domiciliés au 36, quai des Orfèvres.
« Brigade de Recherche et d’Intervention
Brigade Criminelle
Brigade des Stupéfiants »
- Berthier…murmura Gabrielle, d’une voix blanche.
- Quoi ?
- Regarde le tableau. Feuille de bristol. Bristol. “Bri”. B.R.I.. Brigade de Recherche et d’Intervention.
- Oh putain !
- C’est une prise d’otage !
- Je suis obligé de dire que Gabrielle est conne…soupira Anthony, une demi-heure plus tard. Puisqu’elle n’a pas trouvé ton casse-tête hyper con !
- Ta gueule…
- Je n’en…peux plus…
Valentin soupira et regarda la femme enceinte. Le travail n’allait pas tardé à commencer.
- Vous m’avez dit…l’ambulance…
- J’aimerai vous aider, mais je ne suis pas médecin. Je suis certain que l’ambulance ne va pas tarder.
- Ce n’est pas les urgences que vous avez appelé…
- Non…c’est les flics. Je suis flic.
- Et vous ne faites rien…
- Faites-moi confiance…
- Putain, les flics ! hurla le voleur, alors qu’il se faisait remplir son cinquième sac de billets de banque. Qui a appelé les flics ?! Qui ?! J’le bute !
Effectivement, si les otages pouvaient se lever pour regarder par la fenêtre, ils auraient vu les camions de la B.R.I. et une ambulance garés juste devant la banque. Gabrielle avait donc réussi sa mission, ce qui soulagea Valentin et Anthony. Cependant, le bandit ne semblait pas l’entendre de cette oreille. Il était très agité, et ne savait plus qui il devait menacer de son arme.
- Qui a appelé les flics ?! Mais qui, putain ?!
- La B.R.I. possède de jolis bijoux technologiques qui offrent une surveillance extraordinaire de la ville. Même si je ne les avais pas appelés, ils auraient su à un instant ou à un autre que vous cambrioliez cette banque…expliqua Valentin d’une voix forte.
Le brigand allait réagir, et sûrement descendre l’officier, mais celui-ci avait déjà sorti son revolver. Voilà qu’ils s’affrontaient. Cependant, le bandit eut une seconde idée en tête. Il avait l’intention de faire du chantage à Valentin en menaçant de tuer un homme mais, dès qu’il se tourna, celui-ci visa son épaule droite. Au même moment, les flics de l’Antigang débarquèrent à l’intérieur de la banque.
- Tires pas Val’ ! Tires pas Val’ ! s’écria le capitaine. On s’en occupe !
- Oh ! Vous me gâchez mon plaisir !
- Tires pas Val’ ! répéta-t-il.
- Okay, fit l’officier, en rabaissant son arme.
- Ohé les gars, vous avez sortis tout le matos à ce que je vois, hein ?! s’exclama Anthony, enthousiaste.
Effectivement, les flics de la B.R.I. étaient habillés dans d’épaisses combinaisons noires avec des protéges-tibias. Ils tenaient des grands revolvers et ils portaient tous des cagoules, de façon à garder l’anonymat. Pendant qu’ils neutralisaient le voleur, Valentin évacua les autres otages.
- Comment s’appelle…notre « sauveur »… ? demanda la femme enceinte à Anthony, alors que deux ambulanciers la transportaient sur une couchette roulante.
- Valentin Levesque.
- Bien…je crois bien que j’appellerai ma fille Valentine…
- Et bah, quand il va savoir ça, il sera ravi !
Dès qu’il eut terminé d’évacuer toutes les personnes présentes, ce dernier demanda à un banquier s’il pouvait retirer de l’argent en vitesse. Celui-ci lui répondit d’un air navré de revenir le lendemain, le temps qu’ils puissent remettre de l’ordre dans la banque. Valentin allait répondre lorsqu’il sentit deux bras fins lui enlacer la taille.
- Vous m’avez fait peur ! s’exclama Gabrielle, en enfouissant sa tête entre les omoplates du jeune homme. J’étais comme folle ! J’ai mis tellement de temps à comprendre…Ne me refaites plus jamais ça, petit con !
Il se retourna et lui rendit son étreinte.
- Promis, jura-t-il en lui caressant la nuque.
Mais Gabrielle lâcha vite sa prise pour se ruer sur Anthony, qu’elle enlaça avec joie (mais avec moins de tendresse, comme put le remarquer Valentin, fier comme un pape).
- Oh, c’est Val’ qui a tout fait !
- Arrêtes tes conneries où je t’en colle une !
- T’as vu Gabrielle, comment il traite son élève !
- Mais c’est juste qu’il est timide ! expliqua la jeune femme en pinçant la joue de Valentin.
- Oh ça va, hein ! Arrêtez de vous moquez de moi !
- Mais on ne se moque pas de toi ! fit Anthony.
- C’est ça…
- Bon, les hommes, j’ai bien envie d’une glace au chocolat ! On s’arrête au Palais des Délices ?
- Je veux simplement faire l’amour avec toi…lalalalalala…
C’était dommage que Valentin chantait si faux, parce qu’il perdait toute sa grâce et sa beauté lorsqu’il chantonnait. Surtout au réveil.
- Je veux simplement faire l’amour avec toi…lalalalalala…
- Ça suffit Valentin ! s’exclama Gabrielle, surpassée.
- Oh, j’ai pas le droit de chanter ?!
- Pas chanter comme ça, ni chanter…ça !
- Je veux simplement faire l’amour avec toi…lalalalalala…
De rage, Gabrielle abandonna sa petite vaisselle matinale et saisit un coussin pour le lancer de plein fouet sur le jeune homme. Dès qu’il fut remis de l’attaque surprise, il changea de registre.
- Méfie-toi de cette nana-là…méfie-toi de cette nana-là !
- Y’a rien qui peut vous couper le sifflet ?!
- J’en ai marre de cette nana-là, marre de cette nana-là ! J’étais bien mieux avant, câliné par Maman, tout l’temps, tout l’temps, tout l’temps !
Gabrielle ne répondit pas. Elle replongea ses mains dans l’eau bouillante, en ignorant les petites chansons de Valentin. Justement, celui-ci s’était arrêté de chanter. La jeune femme pensa qu’il avait dû se rendormir, mais elle se trompait fortement. Il s’était levé du lit-nuage et s’était avancé silencieusement jusqu’à elle. Puis, il s’arrêta et caressa l’épaule nue de Gabrielle.
- Ah ! hurla-t-elle, en faisant un bond de deux mètres. Non mais ça ne va pas ?!
- Mais calmez-vous voyons ! fit-il en posant sa tête sur son épaule. Vous finissez à quelle heure ?
- S’il ne se passe rien d’important, à 15 h 30.
- Parfait. Comme je ne travaille pas aujourd’hui, je passerai vous prendre au 36 pour vous amener en ville.
- Pourquoi faire ?
- Vous verrez bien.
L’après-midi, à 15 h 45, devant les locaux de la police judiciaire…
- On avait dit 15 h 30 ! s’exclama Valentin, énervé.
- Excusez-moi, fit Gabrielle en montant dans la voiture, mais c’est Anthony qui m’a retenue !
- Mais il fallait l’envoyer se faire foutre ! À aucun moment, vous ne vous êtes rappelée je poireautais en bas dans ma bagnole ?!
- Mais ça va, je suis là maintenant !
- On a perdu un quart d’heure !
- Pas grand chose en fait, ironisa la jeune femme.
- Ça fait beaucoup de choses, quand il s’agit de faire les magasins avec une femme difficile comme vous !
- Comment ça, je suis difficile ?! Mais attendez…on va faire les magasins ?!
- Ouais. Je vois que ça vous en bouche un coin !
- Mais pourquoi ?
- Parce que je vous invite au restaurant ce soir ! Et qu’il vous faut une robe de soirée potable !
- C’est maintenant que vous me prévenez ! Puis je n’ai pas besoin de robe de soirée !
- Ce qu’il y a dans votre armoire, c’est hyper moche !
- C’est pas vrai d’abord !
- Si, c’est vrai !
- Et d’abord, pourquoi voulez-vous m’inviter au restaurant ?
- Parce que j’ai trouvé un nouvel appartement et j’aimerai vous remercier pour votre hospitalité.
Gabrielle eut l’impression qu’un piano s’écrasait sur sa tête. Ça faisait mal, très mal.
- Quoi ? Vous partez ?
- Il le fallait bien un jour. Je n’allais pas abuser de vous plus longtemps.
- Oh…fit-elle, déçue.
Elle se rendit compte, qu’une fois Valentin parti, elle replongerait dans la solitude. Qui lui ferait son café le matin ? Qui lui préparerait une salade niçoise tous les jours ? Qui ferait la vaisselle du soir ? Qui l’accompagnerait faire les courses ? Qui ouvrirait la porte à la concierge chaque matin et, à l’occasion, se disputerait avec elle ? Qui laisserait en vrac ses affaires dans la salle de bain ? Qui réparerait l’évier lorsqu’il y aurait une fuite ? Qui la consolerait quand elle n’irait pas bien ?
- Profitons tranquillement de notre soirée ! Et puis, vous viendrez de temps en temps chez moi pour manger mon splendide sauté de porc …
- Dont vous n’avez jamais voulu me donner la recette, termina Gabrielle, en sortant de ses pensées.
Valentin gara sa voiture dans un parking payant.
- Allez, venez ! Et n’y pensez plus !
Il lui prit la main et l’entraîna vers la sortie du parking, en slalomant entre les voitures. Les deux officiers entrèrent dans une boutique que ne connaissait pas Gabrielle, mais qu’elle jugea chère dès qu’elle vit les articles en rayon.
- Bon, alors ? demanda Valentin, impatient.
Elle était beaucoup moins enthousiaste que lui et traînait nonchalamment dans les rayons. Les prix des robes ne la motivaient pas pour en acheter une. Quant à Valentin, il fouillait un peu partout à la recherche d’une toilette faite pour elle.
- Hey, et ça, ça ne vous plait pas ? s’écria-t-il, une demi-heure plus tard, en lui montrant une robe couleur saumon.
- Non. Vous avez vu le décolleté ?
- Oui, et alors ?
- Alors, il est hors de question que je dévoile ma poitrine comme ça !
- Vous êtes sûre ? Ça vous irait bien pourtant !
- Hors de ma vue ! Vous et cette robe !
Valentin alla reposer la robe sur son cintre mais ne capitula pas pour autant.
- Val’, on ne peut pas aller ailleurs…?
- Non, attendez, je viens de trouver la perle rare !
Il brandit sous son nez une robe noire si élégante que Gabrielle en eut le souffle coupé.
- Vous avez vu ce décolleté ? s’exclama-t-elle, pour sortir le plus rapidement cette boutique infernale.
- Mais on s’en fout du décolleté ! riposta Valentin, de plus en plus agité. Ce qui m’intéresse, c’est de voir ce que ça donne sur vous !
- Mais…
- Allez, en piste, jeune demoiselle !
Le jeune homme poussa Gabrielle dans une cabine d’essayage, et referma le rideau derrière lui.
- Bon, voyons voir ce que ça donne, répéta-t-il, déterminé. Alors, qu’est-ce que vous attendez pour vous changer ?
- Moi, je veux bien faire un effort et essayer cette robe…mais je ne le ferais seulement lorsque vous serez sorti de cette cabine !
- Hein ? s’étonna Valentin, qui ne semblait pas comprendre.
- Dehors ! hurla Gabrielle, en le poussant brutalement à l’extérieur.
Deux minutes plus tard, le jeune homme attendait toujours devant la cabine.
- Vous savez que vous êtes aussi lente qu’une tortue ? Trois heures pour enfiler un bout de tissu ! Je hais les femmes !
- C’est juste que je suis en train de l’enlever.
- Hein ?! s’écria-t-il, en faisait un bond jusqu’au plafond. Non, non, non, vous me montrez d’abord !
Il se rua dans la cabine, sans savoir si elle était habillée ou non. Surprise, Gabrielle poussa un petit cri et remonta rapidement la robe qu’elle était en train d'ôter.
- Non mais ça ne va pas ?! Pour qui vous prenez-vous ?!
- Laissez-moi prendre la situation en main !
- C’est ça ! Allez vous pendre !
Valentin ne l’écouta pas et remonta la fermeture éclair de la robe le long du dos de la jeune femme. Puis, il la tourna vers le miroir et ils s’observèrent mutuellement.
- Mais elle vous va très bien cette robe, assura-t-il, les yeux perdus dans le décolleté.
- Non, répondit Gabrielle, gênée. Je ne me sens pas bien dedans.
- C’est simplement parce que vous n’avez pas l’habitude.
- Peut-être…de toute façon, je préférais la même en violet, qu’il y avait juste à côté. Vous pouvez aller me la chercher s’il vous plait ?
- Bien entendu.
Valentin fonça quérir la robe demandée, et il mit peu de temps pour la trouver. Dès qu’il la vit, il était certain qu’elle irait mieux à Gabrielle que la noire.
- Voilà ! claironna-t-il en passant la robe à travers le rideau. Et n’oubliez pas de m’appeler dès que vous l’avez mise !
- Oui, oui.
Peu après, elle le rappela et il se rua, fort pressé, dans la cabine d’essayage.
- Hey, attendez ! Je viens de piger un truc ! Vous êtes toute petite !
- Toute petite ? répéta Gabrielle, vexée.
Effectivement, la jeune femme était pieds nus, et c’était étrange de la voir sans ses talons-aiguilles. Sa tête arrivait tout juste au milieu du torse de Valentin.
- Ne faites pas cette tête voyons ! Tout ce qui est petit est mignon, c’est bien connu !
- C’est ça…répondit-elle, agacée.
- M’enfin, à part ça…elle est faite pour vous cette robe ! Non ? Et en plus, elle est assortie à la couleur de vos yeux !
- Mouais…Mais, on ne pourrait pas aller ailleurs ?
- Pourquoi ça ?
- Bah…fit Gabrielle, en regardant le prix de la robe qu’elle portait.
- Okay, on ira ailleurs, assura Valentin, qui venait de comprendre.
Il sortit à nouveau de la cabine, et attendit que la jeune femme lui passe le vêtement à travers le rideau pour se diriger vers la caisse. Pour lui, il n’avait jamais été question que Gabrielle paye une telle robe. Lorsque celle-ci eut terminé de se rhabiller, elle fut très étonnée de voir Valentin l’attendre devant la porte du magasin, un sac à la main.
- Vous n’avez quand même pas fait ça ? s’exclama-t-elle, stupéfaite.
- De quoi ? fit-il innocemment. Ah, vous vous parlez de la robe. Désolé, j’ai pas pu résister. Elle vous allait beaucoup trop bien pour la laisser dans ce magasin. Et bah quoi ? Vous boudez ?
- Oui.
Dès qu’ils sortirent de la boutique, ils décidèrent de se promener un peu dans l’avenue avant de rentrer chez la jeune femme. Alors qu’ils marchaient côte à côte, Gabrielle s’arrêta brutalement, comme piquée par une mouche.
- Oh Seigneur ! s’écria-t-elle, en s’approchant de la vitrine d’un magasin de marque.
- Quoi ? s’inquiéta Valentin.
- Ça fait des mois que j’en cherche des pareils !
- De ?
- Chaussures !
Elle fila dans la boutique, et saisit la paire de talons-aiguilles ciblée pour les montrer au jeune homme.
- J’ai fait tous les magasins de Paris pour les trouver ! Attendez, je les essaye !
Elle s’assit sur un petit pouf et s’empressa d’enfiler la paire de chaussures. Valentin, qui ne comprenait toujours pas comment une femme pouvait être aussi accro aux chaussures, jeta un coup d’œil discret au prix qui était écrit en rouge sur la boîte.
- Et ben…réussit-il à dire, choqué.
- Qu’est-ce qu’il y’a ? demanda Gabrielle, en se remettant debout.
- Rien du tout.
Elle fit quelques pas, tourna sur elle-même, toujours avec élégance.
- Parfait ! Je les prends ! s’exclama-t-elle avec enthousiasme.
- Et ben…répéta Valentin. Ça fait même pas deux minutes que vous avez aperçu ces chaussures, et vous repartez déjà avec !
- Absolument. Et cette fois-ci, c’est moi qui les paye !
- Bien entendu.
La jeune femme remit les chaussures dans leur emballage, et se dirigea jusqu’à la caisse. Elle posa la boîte sur le comptoir et, avant qu’elle n’ait pu sortir sa carte bleue de son sac, celle de Valentin était déjà insérée dans le petit appareil.
- Mais…oh non ! Valentin ! Enlevez votre carte !
- Nan.
Gabrielle avait beau donner des petits coups de poing au jeune homme, mais celui-ci restait impassible. Dès que le prélèvement fut terminé, il retira sa carte, saisit le sachet qui renfermait la boîte à chaussures, et prit la direction de la sortie.
- Je crois vous avoir déjà expliqué pourquoi je faisais tout ça…J’essaie juste vous remercier correctement pour m’avoir hébergé chez vous quand mon appart’ a brûlé.
- Je ne veux pas que…
- Et moi, je veux.
Gabrielle prit alors son courage à deux mains, et déposa un baiser sur la joue du jeune homme.
- Mais merci quand même, chuchota-t-elle.
Les femmes étaient décidément très longues pour se préparer. C’était ce que pensait Valentin, deux heures plus tard, allongé sur le lit de Gabrielle. Celle-ci finit par sortir de la salle de bain, vêtue de sa nouvelle robe, de ses nouvelles chaussures et son éternel chignon.
- Oh non ! Pas ça ! s’exclama le jeune homme, énervé.
- Quoi ?
Il ne répondit pas, se leva, s’approcha d’elle et défit le chignon.
- Je ne supporte plus cette chose. Je préfère quand vos cheveux sont relâchés.
- Si vous le voulez…grogna-t-elle.
En la détaillant de la tête aux pieds (et en passant par le décolleté), Valentin retrouva le sourire.
- Vous êtes vraiment magnifique.
- Si vous le dites…soupira la jeune femme. Bon, on y va ? Je commence à avoir faim !
Le restaurant où il l’amena n’était pas un restaurant ordinaire. Il était sur un bateau et Gabrielle comprit qu’ils mangeraient en faisant un tour sur la Seine.
- Ça va, vous n’avez pas le mal de mer ? demanda Valentin, en l’aidant à monter sur le pont.
- Non, non.
Durant le repas, aucun des deux ne prêtèrent attention à ce qu’il y avait dans leurs assiettes. Soit ils avaient une conversation animée sur un quelconque sujet, soit ils admiraient la vue sur le fleuve et la ville.
- Vous entendez ces Alsaciens qui parlent à côté ? Ils sont très bruyants !
- J’aime pas les Alsaciens…grogna le jeune homme.
- Ah bon ?
- Ouais. Mon père est un Alsacien, et c’est un parfait connard… M’enfin, je n’ai pas envie d’en parler. Vous voulez qu’on aille à l’arrière du bateau ? Comme ça, on ne les entendra pas.
- C’est une bonne idée.
Ils se rendirent jusqu’à la poupe et s’accoudèrent à la rambarde. Le soleil était quasiment couché et le bateau naviguait tranquillement sur l’eau calme. Il y’avait peu de « circulation » si ce n’est qu’une embarcation de la Brigade Fluviale.
- Putain…ça suffit pas de les voir au boulot, mais en plus, faut que je les voie quand je sors le soir ! rumina Valentin. Je suis cerné de flics ! Partout où je vais, y’en a !
- N’exagérez pas quand même. Ils ne vous suivent pas jusqu’à chez vous, c’est déjà ça, non ?
- Et bien si, figurez-vous. J’ai vécu avec un flic pendant quatre mois, c’était chiant dès fois, je vous jure !
- Moi ?!
- Bah oui, vous ! Pas Anthony, quand même ! Cela aurait été cent fois plus insupportable !
- Je confirme ! Mais vous n’êtes pas facile à vivre, vous aussi !
- C’est pas vrai !
- Oh si ! Je vous assure que c’est vrai !
Ils continuèrent de parler jusqu’à ce que le bateau passe devant l’Île de la Cité. Aussitôt, ils se turent.
- Ce genre de chose n’arrive qu’à moi ! Faut que je voie l’endroit où je bosse quand je ne bosse pas ! continua le jeune homme, de plus en plus piqué.
- Je pense que beaucoup de personnes aimeraient travailler dans un endroit aussi beau…murmura Gabrielle.
- Vous croyez ?
- J’en suis certaine.
Effectivement, la nuit, les lampadaires illuminaient la forteresse du quai des Orfèvres. Les toits, les antennes, et la plus grande tour découpaient le ciel étoilé. Les statues fixaient impassiblement le bateau sur lequel étaient Gabrielle et Valentin.
- J’en connais plein qui sont loin d’être week-end…soupira la jeune femme, en scrutant les nombreuses fenêtres éclairées.
- Ouais… Je crois que Berthier travaille ce soir.
- C’est aussi ce qu’il m’a dit.
- C’est chacun son tour ! Y’a deux semaines, c’est bien moi qui suis rentré à quatre heures du matin !
La musique qu’avait mise le restaurateur les interrompit. Il passait une chanson qui plaisait beaucoup à Valentin.
- Vous savez danser ? demanda-t-il à Gabrielle.
- Vous voulez me vexer ?
- C’était pour savoir.
- Oui, je sais danser.
- Et bien, c’est parfait dans ce cas !
En temps normal, elle aurait refusé. Mais là, c’était exceptionnel et elle se sentait bien auprès de lui. Le jeune homme l’attira vers lui et ils commencèrent à danser d’une façon assez désordonnée. D’abord perturbés, ils finirent par éclater de rire.
- Vous n’allez pas dans le bon sens ! s’exclama Gabrielle.
- Non, c’est vous !
- C’est vous qui êtes censé m’entraîner, pas le contraire !
- Vous insinuez que je ne sais pas danser ?
- J’ai pas dit exactement ces mots-là, mais…
- Mais, mais quoi ?! Figurez-vous que ma mère m’apprenait déjà à danser les slows à l’âge de huit ans ! Et le rock aussi ! Donc, le problème, il ne vient pas de moi ! C’est vous l’incompétente !
- C’est vous qui faites tout de travers !
- Non !
- Bon, si on commence à se prendre la tête avec ça, la chanson sera déjà terminée !
- C’est vrai…admit Valentin.
- Alors, on recommence, et appliquez-vous s’il plaît !
Ils se rapprochèrent à nouveau, s’agrippèrent l’un l’autre, et recommencèrent leur slow. Un slow beaucoup plus magique, intime et sensuel.
You want to stay with me in the morning You only hold me when I sleep, I was meant to tread the water Now I've gotten in too deep, For every piece of me that wants you Another piece backs away. 'Cause you give me something That makes me scared, alright, This could be nothing But I'm willing to give it a try, Please give me something 'Cause someday I might know my heart. You already waited up for hours Just to spend a little time alone with me, And I can say I've never bought you flowers I can't work out what the mean, I never thought that I'd love someone, That was someone else's dream. 'Cause you give me something That makes me scared, alright, This could be nothing But I'm willing to give it a try, Please give me something, 'Cause someday I might call you from my heart, But it might me a second too late, And the words I could never say Gonna come out anyway. 'Cause you give me something That makes me scared, alright, This could be nothing But I'm willing to give it a try, Please give me something, 'Cause you give me something That makes me scared, alright, This could be nothing But I'm willing to give it a try, Please give me something 'Cause someday I might know my heart. Know my heart, know my heart, know my heart
Dès que le bateau avait jeté l’ancre à son ponton personnel, Valentin avait voulu montrer à Gabrielle son nouvel appartement.
- Il fait un peu froid dans votre voiture…remarqua la jeune femme, en essayant de réchauffer ses bras nus.
- Ah ouais ? Attendez !
Il attrapa un pull qui lui appartenait et qui avait toujours traîné sur la banquette arrière de sa voiture. Il le noua autour des épaules de Gabrielle et reprit sa route.
- J’espère que ça vous plaira…lui confia-t-il.
- C’est à vous que ça doit plaire, pas à moi…
- Je sais, fit Valentin, mystérieux. Mais votre avis est très important pour moi.
En disant cela, il se gara devant son nouvel appartement. Ils descendirent de la voiture et Gabrielle observa d’un œil critique le bâtiment. De ce qu’elle voyait à l’extérieur, elle était presque certaine que l’intérieur était aussi beau. Ils montèrent jusqu’au deuxième étage et Valentin la fit rentrer dans sa nouvelle habitation.
- Bon, c’est pas beaucoup meublé, parce que je n’ai pas eu le temps de tout acheter…
- Ouah ! C’est immense ! Ça doit faire au moins cinq fois mon studio !
- Et ouais !
- Et votre cuisine, elle est magnifique ! Hyper moderne !
- Vous l’aimez ?
- Je l’adore ! Qu’est-ce que je donnerais pour en avoir une comme ça !
- Attendez, vous n’avez rien vu encore ! Il faut que je vous montre la salle de bain !
Le jeune homme la conduisit jusqu’à la fameuse pièce, et elle resta pétrifiée dès qu’elle passa sous la porte. C’était une très belle salle de bain, avec une grande baignoire blanche et une cabine de douche. Le sol était en marbre. Il y’avait aussi un petit placard pour ranger les produits de toilettes et les serviettes.
- Si vous vouliez vous débarrasser de moi, vous êtes mal barré, s’exclama Gabrielle, les mains sur les hanches. Je sens que je vais souvent venir squatter ! Ah…si j’avais une maison comme ça…j’adorerais !
- Bon, c’est vrai que le ménage doit être fatiguant à faire…remarqua Valentin.
- Oui, mais les femmes de ménage, ça existe !
- Je suis vachement content que ça vous plaise !
- C’est clair, c’est le bonheur absolu ! Vous allez vous sentir comme dans un petit cocon ici…
- Venez, je vais vous montrer les chambres…
Il la conduisit jusqu’à une pièce, non meublée.
- C’est une chambre ? s’étonna la jeune femme.
- Oui. La chambre des enfants.
- Vous n’avez pas d’enfants.
- Pas encore.
- Vous y pensez tôt quand même, fit-elle, amusée.
- Oui, je sais, mais comme je ne compte pas déménager une seconde fois, je préfère avoir tout l’espace nécessaire pour…
- Et ça, c’est quoi ?
Gabrielle venait d’ouvrir une seconde porte qui donnait sur une pièce identique à la précédente.
- Euh…temporairement, la pièce à bazar. Mais, ça pourra être aussi la chambre d’ami ou une seconde chambre pour les enfants…
- Encore ?!
- Bah…
- Vous en voulez combien ?
- Au moins un garçon.
- Et ben…je plains votre future femme !
Elle ressortit de la pièce, avec un petit air mélancolique.
- Ça va me faire bizarre quand même de vivre sans vous… Ça va me manquer.
- Moi aussi. Mais il ne faut pas y penser, hein ?
- Oui…
- Suivez-moi, vous n’avez pas vu ma chambre.
- Ah non, c’est vrai !
Valentin la conduisit jusqu’à une dernière porte, un peu plus éloignée du salon. La chambre était simple mais moderne, et les meubles étaient en bois clair. C’était une chambre très chaleureuse malgré les apparences. Cependant, Gabrielle n’osa pas entrer à l’intérieur d’une pièce si intime, et se contenta de l’observer depuis la porte. Même le jeune homme semblait gêné.
- Euh…bredouilla-t-il. Maintenant que vous paraissez calme et détendue, j’aimerai vous parler de quelque chose de très important pour moi et qui va peut-être vous énerver…mais ce n’est pas la peine de vous mettre en colère, hein ?
- Qu’est-ce que vous voulez me dire ?
- Et bien, c’est à propos du soir où on s’est rencontré et…
Gabrielle fronça les sourcils. Elle avait le mauvais pressentiment que la soirée allait mal se terminer. Elle n’aimait pas qu’il lui rappelle leur rencontre. Elle avait pratiquement oublié ce qu’ils avaient fait alors qu’ils étaient saouls, et voilà qu’il en reparlait.
- Vous devez sûrement penser que j’étais bourré la nuit où on…
- Mais vous l’étiez.
- Non. Je ne l’étais pas. Vous avez essayé de me faire boire, mais j’ai fait semblant, et je n’ai rien bu.
- C’est encore pire, fit Gabrielle d’une voix froide. Vous étiez conscient !
- Oui…admit Valentin.
- Vous auriez pu empêcher que ça arrive alors !
- Mais…
- Vous avez abusé de moi ! s’écria-t-elle, les yeux humides. Bravo, Valentin, vous pouvez être fier de tout ! Vous venez de tout gâcher ! Je vous déteste !
- Non !
- Si ! Vous aviez bien vu que je n’étais pas dans mon état normal ! Et vous n’avez rien fait pour tout arrêter !
- Parce que je n’avais pas envie de tout arrêter, voilà tout !
Sa dernière réplique avait suffit à faire taire Gabrielle. Il en profita pour continuer ses explications.
- Vous ne comprenez pas…fit-il en secouant la tête. J’avais déjà des sentiments pour vous.
Il eut un long silence gêné, dans lequel aucun des deux ne savait qui l’était le plus. Finalement, Valentin haussa les épaules et fut le premier à le rompre.
- Excusez-moi.
- Ça va aller…répondit Gabrielle d’une voix tremblante.
- Je vais vous ramener chez vous, et on n’en parlera plus, promis. Je récupérerai mes affaires une prochaine fois. On fera comme s’il ne s’était rien passé, okay ? C’était juste une soirée sympathique.
Le jeune homme saisit les clés de sa voiture et commença à s’éloigner vers la porte, pensant que Gabrielle le suivait. Pourtant, elle était restée devant la chambre, comme immobile. Elle n’avait plus très envie de partir maintenant.
- Val’, reviens…
Il s’exécuta, surpris par le tutoiement soudain.
- C’est moi qui suis désolée ! s’exclama la jeune femme en se jetant à son cou. Ça doit être énervant de me voir réagir au quart de tour sur des choses comme ça !
- C’est pas grave…
- Mais si ! Mais si ! Et puis…continua-t-elle d’une voix plus basse, vous avez eu le courage de tout m’avouer.
Gabrielle fit une petite pause et ses joues se mirent à rosir étrangement.
- Et puis…moi aussi, je ressens quelque chose…
- Petite cachottière, murmura Valentin, avec un sourire mauvais.
- Méchant garçon qui se moque tout le temps de moi…
Connaissant Valentin comme un homme pressé lorsque ses intérêts et son plaisir personnel étaient en jeu, Gabrielle trouva anormal qu’il ne l’embrasse pas tout de suite. Après l’avoir tendrement enlacée, il avait joué avec quelques mèches de ses cheveux tout en continuant à parler. Finalement, il s’était décidé à l’embrasser doucement, pour ne pas la brusquer.
- Méchant…répéta la jeune femme, lorsque leurs lèvres furent séparées. Qu’est-ce qu’on va faire demain ?
- J’en sais rien. Qu’est-ce qu’on va faire cette nuit ?
- Bah…fit Gabrielle, en jetant un petit coup d’œil vers la chambre. Je ne sais pas pour vous, mais moi…
Tout bien réfléchi, Gabrielle se disait qu’elle n’avait jamais vraiment analysé la nouvelle chambre de l’officier. Le seul élément qui lui fit regretter la sienne, c’était le lit neuf qui ne ressemblait en rien au nuage sur lequel elle avait l’habitude de dormir. Bercée par le souffle chaud de Valentin, elle aurait pût s’endormir sur-le-champ.
- Il était mieux mon lit, remarqua-t-elle, en continuant de caresser le dos nu du jeune homme.
- Je sais, répondit-il, agacé.
Il voulut recommencer ses baisers, mais Gabrielle l’arrêta à nouveau.
- Vous êtes certain que je ne suis pas bourrée ?
- J’espère bien ! Je n’ai pas envie de recevoir trois torgnoles à mon réveil !
- Vous avez raison de vous inquiéter.
- Bon…fit Valentin, pressé.
Il enfouit sa tête dans le creux du cou de la jeune femme, mais celle-ci lui tapota sur l’épaule, signe qu’elle voulait encore lui parler.
- Autre chose Valentin. J’espère bien que vous ne prendrez pas toute la place dans le lit !
- Moi ? Vous me connaissez mal !
- C’est ça.
- Vous avez terminé de parler ?
- Moui…
- Ah, enfin !
- Non.
Le jeune homme leva les yeux au ciel.
- Je vais faire un meurtre, grogna-t-il.
- Juste avant, je veux le mot magique.
- Le mot magique ? Pour ouvrir la caverne d’Ali Baba ? Sésame, ouvre-toi ! fit-il en imitant la voix de Fernandel.
Il éclata de rire, très fier de son jeu de mot. Gabrielle, vexée, lui tourna le dos et se mit dans la position du fœtus.
- Vous êtes cruel. Je crois que je vais revenir sur mes idées.
- Mais non…vous savez, je fais le con, parce que je suis très content. Franchement, je vous aime Gabrielle.
La jeune femme se retourna, avec le sourire et les larmes aux yeux. Elle s’agrippa au cou de Valentin et se pelota contre lui.
- C’était ça que je voulais entendre.
Bon, j'me doute bien que c'est pas tout rose, hein, mais bon c'est déjà ça de pris XD
La soeurette d'Anthony m'a bien fait sourire. Ella a pas la langue dans la poche et un sacré caractère. Ses dialogues avec son frère son tordants et c'était mimi comme tout qu'elle s'entiche du "beau blond" :D
La partie de shopping de Gabrielle et Valentin était bien menée aussi, sans parler de la soirée resto. Tout ça pour en venir à Valentin, et plus exactement son appartement. Il prévoit à long terme, c'est le moins qu'on puisse dire XD Célibataire et avec un appart avec deux chambres d'enfant:D Sacré Valentin :P
Sinon, je suis contente que Rachel t'ait plu... Je trouve qu'elle fait bien la paire avec Anthony. XD
Breffons : je me répète à chaque fois, je sais, mais merci Sejounette ! Biyouu