Chapitre 8 : Punition

Clave, allongée sur le lit de sa chambre de servante, se remémorait ce qu’il s’était passé le matin même : sa rencontre avec Noah, le fils du duc Arthur. Dès qu’elle avait su qu'il était de la même famille que l’homme qui avait fait d’elle sa servante, elle avait filé ni une ni deux. Cela faisait déjà plusieurs heures qu’elle l’avait croisé dans ce couloir, mais son visage était imprimé dans son esprit, et il l’avait été toute la journée pendant que la jeune fille faisait ses tâches ménagères.

Elle serra contre elle son oreiller miteux et poussiéreux et se recroquevilla sur son petit lit. Elle avait beau être épuisée, elle n’arrivait pas à trouver le sommeil. Ce ne fut que bien plus tard qu’elle finit par enfin fermer les yeux.

Dans son sommeil, elle ouvrit les yeux dans le vide blanc, ce vide si familier, si silencieux. Elle commença à paniquer, et elle crut qu’elle était de retour dans cet endroit, mais elle entendit une voix, qui lui était à la fois familière et inconnue.

– Souviens-toi… Tu dois… Te rappeler…, murmura une douce voix.

“Faites que je me réveille, pitié ! se dit Clave intérieurement. Allez !”

Elle se réveilla subitement et se cogna le dos sur le sol de pierre. Elle était tombée de son lit en rêvant. Son regard croisa les pendules de l’horloge, qui indiquait déjà six heures du matin. Cependant, elle devait faire la lessive et préparer le petit-déjeuner.

Elle se leva d’un bond, et comme elle avait déjà sa tenue de servante, une longue tunique noire et un tablier blanc sale, elle fila ni une ni deux dans le couloir, où elle croisa Catherine.

– Qu’est-ce que tu fais là, Cath ? Ce n’est pas le couloir des domestiques pourtant…, demanda Clave.

– À ton avis ? Je suis venue te chercher, tu es en retard, répondit calmement la domestique rousse.

– J’avais remarqué !

– Ne panique pas comme ça. J’ai fait la lessive à ta place. Et les autres servants n’ont même pas remarqué que tu étais absente…, expliqua Catherine.

– Oh… Merci beaucoup !

– De rien. Mais tu me devras quelque chose en échange.

– Comme quoi ? demanda Clave en abaissant les épaules

– Je ne sais pas… On verra le moment venu. Allez, viens, monsieur Arthur t’attend.

Clave étouffa un petit hoquet de surprise et plaqua sa main sur sa bouche. Elle espérait ne pas être punie parce qu’elle avait trop dormi… Une boule d’anxiété et d’appréhension commença à se former dans sa gorge.

– Tu sembles revêtir une importance particulière à ses yeux…, fit remarquer Catherine.

– Ah, tu crois vraiment ? demanda la blonde d’une voix hésitante.

La rousse fixa un moment la jeune fille en face d’elle puis haussa les épaules.

– J’ai l’impression, en tout cas…

Elle prit le bras de la servante et l'entraîna avec elle dans le couloir. Cela rappela à Clave le moment où le duc Arthur l'avait libérée de ce vide, dont elle venait de rêver.

Quelques minutes ensuite, les deux filles arrivèrent devant la porte du salon personnel du duc, deux semaines après que Catherine y eût conduit Clave pour la première fois. Elles toquèrent et une voix, que la jeune servante reconnaîtrait entre mille, leur ordonna d’entrer. Catherine poussa la lourde porte de bois. Le duc Arthur les attendait au centre de la pièce, qui était aussi sombre que la dernière fois.

– Viens, dit-il à Clave d’une voix qui n'annonçait rien de bon pour elle.

Après avoir jeté un dernier coup d’œil à Catherine, la jeune fille s’avança, peu sûre d’elle. Elle remarqua le fouet que le duc avait à sa ceinture et commença à paniquer. Elle n’avait vraiment pas envie d’une punition après si peu de temps passé ici.

“Pitié… Je n'ai rien fait de mal,” supplia-t-elle intérieurement.

– J’ai remarqué que tu n’étais pas là quand je t’ai appelée, tout à l’heure. Que faisais-tu ?

“Quoi ? Il m’a appelée ?”

– Euh, je… Je suis désolée, monsieur ! s’exclama-t-elle en s’inclinant le plus bas possible. Je dormais et j’ai… j’ai oublié de me réveiller… Veuillez m’excuser, je suis sincèrement…

– Je me fiche de tes excuses, coupa le duc Arthur.

Clave sursauta. Il avait pris son fouet. Elle recula lentement.

– Vous… Vous allez me punir, c’est ça ?

Le duc Arthur soupira.

– Tu connais les règles, servante. Ce genre de choses ne me plaît pas, mais je suis obligé. Approche.

Clave recula encore plus et serra ses bras contre elle. D’après ce que lui avait raconté Catherine, on punissait les servants avec des fouets électriques qui pouvaient aller jusqu’à paralyser le corps de la personne.

Le duc Arthur fit claquer son fouet dans le vide, se rapprochant de plus en plus d’elle. Lorsqu’il ne fut plus qu’à un mètre d’elle et que la jeune fille était bloquée par le mur, le duc lui prit le bras et, de l’autre main, il abattit son fouet sur elle.