*Emilie
Il est 20h, j’ai déjà mangé et je flâne sur mon PC portable, assise sur mon lit, lorsque je reçois un message de Martin.
« Tu es chez toi ? »
« Oui. Pourquoi ?
« Simple curiosité. Je suis dans ma chambre, je m’ennuie donc je me suis dit que j’allais t’embêter. »
« On dirait que c’est une passion chez toi. »
« T’as pas idée ☺ »
« Si j’étais pas disponible, tu ferais quoi de ta soirée ? »
« J’écouterais de la musique. Et je ne pourrais sûrement pas m’empêcher de penser à toi. »
« Stop teasing me … »
« Tu ne me crois pas ? »
« Étrange non ? »
« Tu ne me croiras donc pas, si je te dis que j’ai dû mal à ne pas fantasmer sur toi ? »
Mon cœur s’arrête dans son élan. Cet homme va me tuer. Mes doigts sont suspendus au-dessus du clavier tactile.
« Je t’ai coupé ta langue ? »
Je ne sais pas trop comment je dois me comporter avec lui, depuis la nouvelle direction qu’a prise notre relation. Le problème c’est qu’avec lui, je suis toujours tentée par la curiosité. Et que cela prend le pas sur la raison. Il me tient, est-ce qu’il en a conscience ?
« Ils ressemblent à quoi tes fantasmes ? »
« J’imagine être le premier homme nu que tu vois. J’imagine être le premier homme à découvrir ton corps. Le premier homme à te toucher, à t’apprendre le mot « plaisir », le premier homme à t’entendre gémir, et jouir. »
« Ça ne m’étonne pas, tes fantasmes sont à égalité avec ton égo ☺. Malheureusement tu ne serais pas le premier homme pour la plupart de tes scénarios. Je suis inexpérimentée mais je n’ai pas vécu dans un couvent. »
Les trois points de suspension apparaissent, signe qu’il est en train d’écrire. Puis ils disparaissent, réapparaissent, et jouent un peu comme ça pendant cinq minutes.
« On a perdu sa langue ? » je le taquine, fière de moi.
« Tu viens de briser mes rêves, laisse-moi le temps de digérer. On t’a déjà touché ? »
« Je passe. » je réponds en utilisant les règles du jeu auquel on avait joué une fois.
Le ballet des points de suspension reprend.
« Emilie .. »
J’aimerais tellement entendre sa voix dire mon prénom. J’aimerais tellement entendre sa voix tout court. Sans laisser le temps à mes pensées de s’agiter, j’appuie sur l’icône du téléphone à côté de son prénom puis sur le haut-parleur.
- Fausse manip’ ? demande-t-il en décrochant, la voix un peu enrouée.
- Non, je réponds le cœur battant sourdement. Je sais pas, j’avais envie de t’appeler c’est tout.
- Tu vas pouvoir me répondre du coup …
Sa voix est faite de notes qui comblent mes oreilles de plaisir.
Un léger rire s’échappe de ma gorge.
- Non je passe toujours, je réponds amusée.
- Emilie …, il gronde, le timbre bas.
Ah, donc c’est comme ça que sonne mon prénom dans sa bouche … ça fait vibrer mon cœur et déjà j’aimerais qu’il le redise.
- Tu ne m’enlèveras pas mon dernier fantasme.
- Lequel ? je demande en m’en rappelant pourtant très bien.
- Être le premier homme à te faire gémir de plaisir, il répond, plein d’assurance.
Une partie de moi est gênée d’avouer que je n’ai jamais connu le plaisir sexuel. Une autre part veut en savoir davantage sur Martin.
- Et pourquoi ce serait toi cet homme ? je questionne d’un air que j’espère nonchalant.
- Parce que tu m’apprécies, malgré qu’une partie de toi déteste ça. Parce que toi aussi tu penses à moi. Parce que je suis expérimenté et pourrais t’apprendre beaucoup de choses.
- Tu as une belle opinion de toi-même !
- Dis-moi que j’ai tort.
Je souffle, dépitée.
- C’est pas possible d’être aussi arrogant et sûr de soi. Ta confiance en toi n’a donc aucune limite ?
- Désolé de te décevoir sur ce point. En attendant tu n’as pas démenti mes propos.
- Tu me croirais si je démentais ?
- Il faudrait que tu sois vraiment convaincante …
- Je m’en doutais.
Le silence se pose délicatement entre nous.
- Martin, j’aimerais savoir …, j’hésite et cherche les bons mots.
- Dis-moi, il m’encourage.
- Avec combien de filles comme moi tu joues de la sorte en ce moment ? je ferme les yeux et me maudis de ne pas avoir son assurance.
- Déjà, des filles comme toi il n’y en a pas deux. Ensuite …pour être honnête il n’y a qu’avec toi que j’entretiens ce genre de relation. Après je ne te cache pas, qu’à côté de ça, j’ai des aventures avec d’autres femmes, comme Sylvia la dernière fois.
Le pincement au cœur réapparaît à ce souvenir.
- Qu’est ce que ces aventures t’apportent ? Tu n’as pas envie de plus ?
- Le plaisir. La liberté. La confiance en moi. Le lâcher-prise. Et non les relations amoureuses ne m’attirent pas. Enfin, les relations tout court en fait, je n’ai pas d’amie du sexe féminin non plus.
Je crois que je ne connais aucun des termes qu’il a évoqué.
- Mais attends, je ne comprends pas, que tu ne veuilles pas de relation amoureuse ok c’est une chose mais … pourquoi ne pas vouloir nouer de relation amicale ?
- Je ne sais pas. L’occasion ne s’est jamais présentée. Elles craquent toutes pour moi c’est compliqué !
J’explose d’un rire franc.
- Je peux être ta première amie fille, je dis.
Cette fois c’est lui qui rigole.
- C’est ça, oui, Emilie.
- Bah quoi ? je réponds, légèrement offusquée.
- On ne pourra jamais être que des amis, toi et moi.
- Et pourquoi ça ? Je te rappelle que je ne coucherai pas avec toi. Toi, tu ne veux pas d’histoire sérieuse. Alors si on continue à entretenir une relation …bah à part amicale je ne vois pas de quelle nature elle pourrait être !
- A la limite sexfriend …, il suggère.
Je ris.
- La partie ‘je ne coucherai pas avec toi’ tu as décidé de ne pas l’entendre ?
- Tu finiras par craquer, je suis irrésistible.
- Une partie de ta phrase est vraie, je m’amuse.
Je l’imagine sans mal froncer les sourcils.
- Une partie seulement ? Mais c’est pas possible, l’un ne va pas sans l’autre.
- Martin, je reprends plus sérieusement, peut-être qu’un jour je verrais le sexe comme toi, mais même dans ce cas de figure, je ne veux pas juste ça de toi. Je préfère être ton amie et renoncer à te toucher plutôt que l’inverse.
Le silence s’étire doucement entre nous mais je suis sereine. Être honnête avec moi-même m’a apaisé.
- Je ne veux pas que tu attendes ou espères des sentiments amoureux de ma part. Je ne pourrais pas t’offrir ça, il répond enfin.
- J’ai compris.
- Je suis toujours très sceptique sur l’amitié que tu veux instaurer entre nous, il rit tout bas.
- Bah alors on est quoi l’un pour l’autre, si ce n’est des amis ? On n’est pas amoureux, on ne couche pas ensemble. Par contre on passe du temps ensemble, on s’écrit, on s’appelle, on échange, on s’amuse, on rit …
- Ouai, ok, mais j’aurais toujours envie de toi Emilie, de ta bouche, de ton corps … Plus tu me les refuseras, plus j’en aurais envie.
Ma poitrine est sévèrement montée en température. J’ai l’impression d’étouffer sous mon tee-shirt.
- Tu sais … te moque pas de moi hein, j’aimerais bien connaître ce que c’est la confiance en soi, le lâcher-prise, le plaisir …tout ce que tu disais que t’apportait le sexe. Je ne sais pas si je serais capable d’expérimenter tout ça un jour.
- Même si j’adore me moquer de toi, je sais où sont les limites. Enfin la plupart du temps. Bien-sûr que tu connaîtras ça, il n’y a pas de raison. Laisse-moi t’apprendre un peu.
- Comment tu veux m’apprendre si je refuse de coucher avec toi?
- Arrête de remuer le couteau dans la plaie … Mais j’ai peut-être une solution. Pour ça, tu dois répondre à une question.
- Je t’écoute.
- Tu t’es déjà touchée ?
- Tu me demandes si je me suis déjà masturbée ?
- Oui.
- Oui.
- Est-ce que ça te fait du bien ?
- Je crois. Je ne sais pas trop. C’est assez instinctif, mais un peu …mécanique ? »
- Tu t’es déjà fait jouir ?
- Je ne suis pas sûre.
- Alors la réponse est non. Comment tu t’y prends quand tu te touches?
- T’as cru que j’allais répondre à ça ?!, je m’offusque en m’empourprant.
- Ok. Changement de stratégie.
Je reçois une photo. Mon cœur a un loupé. Martin m’a envoyé une photo de lui, torse nu. La photo s’arrête à la limite de son sexe. Le V est dessiné en bas de son ventre. Il est musclé, mais rien de trop prononcé. Ses pectoraux et ses abdominaux sont légèrement dessinés. Comme ce que j’avais aperçu à la rivière... Ce n’est qu’un torse nu, pourquoi ça me fait autant d’effet ?
Mon bas ventre se manifeste. Ma respiration s’accélère.
- Alors ?
- Alors quoi ?
- Qu’est ce que ça te fait ?
J’hésite, je ne peux pas être 100% honnête sur l’effet qu’il me fait, il partirait en courant de savoir à quel point je le trouve beau, à quel point je le désire.
Je respire un bon coup et me lance :
- Tu sais très bien ce que ça me fait.
- Emilie, dis-le.
- Tu …tu es très beau.
- Bien-sûr que je suis beau ! Mais qu’est ce que tu ressens dans ton corps ?
Je ris nerveusement.
- Faut vraiment que tu m’apprennes à avoir confiance comme ça.
- Je vais t’apprendre. A ton tour.
- De quoi à mon tour ?
- Photo, il répond, laconiquement.
- Hors de question !
- Tu ne me simplifies pas la tâche Emilie Aubry … alors dis-moi ce que tu portes.
- …je porte un grand t-shirt.
- Et en bas ?
Je décide que je ne prends pas beaucoup de risques en lui envoyant une photo d’une partie de ma culotte, qui est joliment dentelée. Je cadre pour qu’il voit l’os de ma hanche et le haut de ma cuisse.
- Putain, je tuerais pour en voir plus. Et pour te retirer ce bout de tissu.
Damn it. Il a un tel pouvoir sur les battements de mon cœur. Et sur …mon désir, que je sens pulser entre mes jambes. Avant son apparition dans ma vie, je ne connaissais pas ces sensations physiques-là.
- Martin, arrête de jouer avec moi deux secondes. J’ai besoin que tu répondes sincèrement à une question.
- Je ne joue pas. Quelle question ?
- Est-ce que je peux te faire confiance ?
- Je sais que je suis con parfois mais … oui.
- Ok... Martin, je crois que j’ai envie de toi, là.
Un ange passe et suspend les battements de mon cœur.
- Enlève ton t-shirt, il finit par lâcher d’une voix rauque.
Respire Emilie. Je me lève et ferme le loquet de ma porte. Grâce au ciel, ma sœur n’est pas là cette nuit. Je retourne sur le lit, retire mon t-shirt. Mes tétons pointent sans la chaleur du tissu.
- And now ?
- Concentre-toi sur ma voix et laisse-toi guider. Déjà faut que tu sois détendue, donc allonge-toi et prends plusieurs grandes respirations.
Un peu fébrile, j’obéis. Comme si Martin était là à respirer avec moi et voyait mon corps se relâcher, il reprend :
- Je veux que tu te caresses délicatement, en partant de ta bouche. Imagine que ce sont mes doigts. Puis tu descends sur l’os de ta mâchoire, ton cou, ta gorge, le haut de tes seins, entre tes seins, je veux que tu joues avec eux, que tu t’approches du téton et que tu recules, que tu l’effleures, que tu le contournes. Mouille un peu tes doigts quand tu t’attarderas vraiment dessus. Et surtout, surtout pense à moi et tout ce que j’aimerais te faire.
Je regarde de nouveau la photo qu’il m’a envoyée. Je pense à ses mots, je ferme les yeux et imagine ses doigts sur moi, puis je l’imagine en train de me regarder faire et ça décuple mon excitation. Lorsque mon doigt humidifié commence à taquiner mon téton, je sens comme un petit courant électrique rejoindre directement mon entre-jambe. Sans m’en rendre compte, mon bassin se tortille un peu.
Un imperceptible gémissement s’échappe de mes lèvres.
- Téton ? il me demande.
- Hum …, je réponds.
- Je suis content que ça te plaise parce que je rêverais de m’en occuper. Les sucer, les lécher, les mordiller …
- Martin …, je gronde, embarrassée et excitée à la fois.
Je sens mon sexe se liquéfier.
- Désolé mais ce que j’ai aperçu à la rivière m’a beaucoup plu.
- Ensuite ? je lui demande.
- Si tu savais comme j’aimerais être là avec toi Emilie… Maintenant je veux que tes caresses descendent plus bas, lentement. Joue sur ton ventre, sur tes hanches, sur tes cuisses puis remonte tout doucement.
Je m’exécute sans rechigner et je sens la chair de poule me gagner.
- Plus doucement encore. Ramène ta main droite à ta bouche et mouille la. Je veux que tu penses à ce que tu aimerais que je te fasse et que tu laisses ton instinct guider ta main entre tes jambes, sous le tissu.
C’est la première fois que je me touche comme ça. Je me sens en sécurité, guidée par Martin. Mes jambes s’ouvrent, ma culotte cache à peine mon sexe mouillé de désir. Pour la première fois, je ressens réellement du plaisir lorsque mes doigts rencontrent l’intérieur de mon intimité. Je finis par trouver ce qui me fait vibrer. Mon majeur et mon annulaire me pénètrent pendant que mon pouce mouillé caresse doucement le contour de mon clitoris.
Dans ma tête, il n’y a que Martin. Martin. Martin. Mon plaisir gonfle en moi et des vagues extatiques s’échouent doucement sur mon sexe. Celles-ci se rapprochent et s’intensifient. Jusqu’à ce que tout mon corps se tende et s’enveloppe soudain d’une déferlante de chaleur. Cette dernière vague, c’est comme si mon sexe entier était un cœur qui pulse. Ça dure quelques délicieuses secondes puis les pulsations finissent par s’atténuer. Je me retrouve épuisée, allongée en étoile de mer sur mon lit.
La réalité revient doucement à moi. Et d’un seul coup je me sens honteuse de ce qui vient de se passer. Je me sens nue (au sens figuré) et vulnérable, à la merci de Martin.
- Ça va Emilie ?
- Pourquoi tu fais ça ?
- Ça quoi ?
- Ça.
- J’ai juste eu envie de t’apprendre ces mots que tu ne connaissais pas. Parce que je trouvais ça triste. Tu m’en veux ?
- Je me sens honteuse.
Je l’entends rouspéter.
- Ne sois jamais honteuse d’avoir du désir, de lâcher prise et de prendre du plaisir. Le sexe n’est pas une honte. J’espère qu’un jour, tu arriveras à voir ça différemment. Bon, sinon …c’était bon ?
- Oui.
- Pour moi aussi.
- Co-comment ça toi aussi ?
- Moi aussi.
- Mais …mais je ne t’ai pas entendu …, je balbutie.
- Ça c’est parce que ton attention était focalisée sur autre chose, il rit. Mais tant mieux. Bon maintenant faut que je t’apprenne à avoir confiance en toi ? Y a du boulot mais je suis …confiant !
- Crétin, je ris.
Il est si sûr de lui, ça m’exaspère.
- On raccroche ? Je suis un peu gênée là.
- Si tu veux. Bonne nuit beauté, repose-toi bien.
- Bonne nuit Martin et merci.
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*Martin
Je souris en regardant le temps qu’a duré notre appel. Cette année de fac prend une tournure inattendue. Et c’est loin d’être déplaisant. La dernière fois que je m’étais masturbée en pensant à une femme réelle, sans avoir besoin de stimulation visuelle comme le porno, c’était en année de 3e avec ma prof de français. Je ne sais pas si c’est son inexpérience ou le fait qu’elle refuse de coucher avec moi qui m’excite autant, ou si c’est elle tout simplement. Faut dire qu’elle n’arrête pas de me surprendre.
Je ne m’attendais pas du tout à ça quand elle m’a demandé si elle pouvait me faire confiance. J’ai cru que mon cœur allait sortir de ma poitrine. J’étais sincère. J’aurais tué pour pouvoir la regarder, ou pour voir davantage de son sous-vêtement sur elle. Et l’entendre gémir … Jamais un simple son n’a eu autant de pouvoir sur mon excitation.
Emilie. Emilie. Emilie. C’est pas ce à quoi je m’attendais quand elle a décrété qu’on ne serait rien de plus que des amis. Qu’est ce que tu me réserves à l’avenir ?
Le lendemain en cour, je n’en mène pas large. Lui arrive en retard comme à son habitude.
« Sorry I’m late » dit-il de façon décontractée à notre professeure d’anglais. Elle aquiesçe légèrement sans rien dire et le laisse s’asseoir. En défaisant son sac, il croise mon regard et me lance un clin d’œil. Je lève les yeux aux ciels et retourne à mes notes. Il m’insupporte. Je m’en veux de m’être laissée allée à une telle bassesse avec lui hier.
« You will prepare an oral on feminism in USA for next month. You will be in pairs. Bastien you will be with Boubakar. » Bastien parait un peu déçu. Je me perds dans mes pensées quand j’entends « Martin you will be with Emilie ».
« Shit ». Quand tout le monde se retourne vers moi, je comprends que j’ai dit ça tout haut.
« Something’s wrong Emilie ? » demande notre professeure
« No-nothing ! My apologies … »
Martin se retourne avec un petit sourire en coin. Awesome …
Je reçois un message de sa part.
« RDV chez moi samedi 14h. »
« J’ai mon mot à dire ? »
« Of course. Chez moi samedi à 14h ça te va ? ☺ »
« Very well. »
Je le vois sourire. Je souffle. Quel con.