CHAPITRE 9
- la poudre magique du lac -
— Je crois rien, je te connais pas, dit Marco.
Le sourire de Lili s’élargit.
— Non, tu as raison, on ne se connait pas. Mais je peux dire que tu es un jeune garçon du nom de Marco.
Marco voulut répliquer mais sentit le piège venir.
— Donc toi t’es pas une petite fille du nom de Lili ?
— Si, mais pas tout à fait comme tu le pensais, dit Lili.
— Comment ça ? demanda Marco.
— Je te le dis que si tu me promets de m’aider à comprendre ce qui ne va pas avec la Grande Tortue.
Marco haussa les épaules.
— D’accord, dit-il.
Il avait de toute façon l’intention d’enquêter sur le sujet. Et tout ce mystère l’intriguait.
— Alors ferme les yeux.
— Pourquoi ?
— Ce n’est pas juste quelque chose qui s’explique, il faut le voir. Mais d’abord tu dois fermer les yeux.
Marco souffla, un peu agacé ; il était vexé d’avoir à se plier à tout ce protocole, mais il ferma tout de même les yeux. La curiosité l’avait emporté. Qu’est ce que Lili lui réservait cette fois ? Jusque maintenant, il devait avouer qu’il n'avait jamais été déçu.
— Attention, dit Lili, ne bouge pas. Je vais devoir te mettre une poudre sur les yeux pour que tu puisses me voir telle que je suis vraiment.
Le corps de Marco se tendit lorsqu’il entendit le clac d’une boîte que l’on ouvre et lorsqu’il sentit les doigts de Lili tracer un large trait sur son visage, le parcourant de droite à gauche en passant sur ses yeux.
Puis Marco entendit Lili refermer la boîte et s’éloigner de quelques pas.
— C’est bon ? Je peux ouvrir ? demanda-t-il.
— Oui.
Lentement, Marco ouvrit les yeux.
Et le monde entier avait changé. Plus rien n’était comme avant et Marco ne savait plus où regarder. Le ciel et ses nuages qui avaient pris une teinte orangée en pleine matinée ? Les fleurs, algues et fougères multicolores qui poussaient sur les cailloux et que Marco n’avaient encore jamais vues ? Les papillons de taille gigantesque qui tournoyaient autour pour venir y butiner ? Ou Lili ?
Lili dont la peau n’était plus brune de soleil mais devenue bleu ciel. Lili dont les longs cheveux noirs ondulant dans le vent étaient désormais teintés de bleu marine.
— Bonjour, dit Lili.
— T’es qui ? demanda Marco.
— Je suis toujours Lili, mais un peu différente.
— T’es bleue.
— Oui, dit Lili en riant. Car je suis une habitante du lac.
— Une habitante du lac ?
— Oui, avant que le lac ne devienne un lieu pour touristes, nous étions déjà là, avant même que les humains n’existent d’ailleurs, je crois.
Marco fronça le nez. Tout cela le dépassait un peu. Il posa le doigt au coin de l’un de ses yeux et frotta un peu. Il sentit sous ses doigts la poudre fine que Lili y avait déposée. Regardant le bout de son index, il y découvrit une trace noire irisée.
— C’est quoi ce que tu m’as mis sur les yeux ?
— De la poudre magique du lac. Mise sur les yeux, elle révèle à ton peuple notre existence et notre monde.
Cela faisait beaucoup à encaisser d’un coup et Marco avait mille questions. Mais il garda le silence. Il avait besoin de peser, soupeser et re-peser tout ce qu’il venait de découvrir.
Il s’approcha de l’eau et se pencha pour voir son visage. Une bande noire le traversait en passant sur ses yeux comme un étroit masque de zorro. Il se releva.
— C’est pas mal ! dit-il à Lili.
Lili rigola.
— Oui, ça te va bien !
— Une habitante du lac, dit Marco. Mais pourquoi j’ai jamais entendu parlé de vous avant, pourquoi vous vous cachez ?
Lili lança un regard appuyé et entendu à Marco.
— Oué, dit celui-ci. Je vois. Les humains, c’est pas la meilleure espèce de l’univers.
Il se tourna vers la plage pour vérifier si d’autres touristes ne seraient pas eux aussi désormais doté d’une peau et de cheveux bleus, mais ce n’était pas le cas. La plage se remplissait petit à petit, mais les chairs de chacune et chacun restaient toutes en camaïeu de terres plus ou moins cuite.
— Ils sont où les autres, il y en a beaucoup des comme vous ?
Lili se rembrunit.
— Ici, plus tellement. En fait… presque plus, quelques familles seulement, et encore, la plupart quittent le lac pour l’été.
— À cause de nous ? demanda Marco.
Lili hésita à répondre, puis finalement :
— Oui, un peu sans doute.
Marco acquiesça gravement.
— En fait, reprit Lili, en ce moment il n’y a plus que ma grand-mère et moi.
— Ah, tu vis vraiment dans la cabane avec ta grand-mère ?
— Mais oui, ça c’était vrai ! s’en amusa Lili.
— Mais alors pourquoi je ne t’avais jamais vue avant ?
— Nous pouvons nous rendre visible dans des traits humains, mais nous pouvons aussi nous rendre invisibles, à notre manière… j’étais là, mais tu ne m’as tout simplement pas vue.
— Et la Tortue, elle existe vraiment ? demanda Marco méfiant.
Au fond de lui, il espérait beaucoup que cette histoire soit vraie, mais il avait maintenant peur d’être déçu.
— Bien sûr que c’est vrai ! s’étonna Lili. C’est même pour elle que je te raconte tout ça, pour te parler de la Grande Tortue. J’ai besoin de ton aide, tu m’as promis, tu te souviens ? Les autres sont partis, ma grand-mère est vieille et moi, toute seule, je n’arrive pas à comprendre ou résoudre le problème. Tu vas m’aider ?
— Pourquoi moi ? Il y a plein d’adultes qui sauraient sans doute mieux.
Lili lança de nouveau son regard appuyé et entendu à Marco.
— Oué, dit celui-ci. Je vois. Les adultes, c’est pas les meilleures personnes de l’univers non plus.
Le cœur de Marco se mit à battre plus fort. Petit à petit, la fable devenait réalité et il commençait tout juste à en prendre vraiment conscience. Il regarda de nouveau Lili, les nuages, le lac, les fleurs et les papillons, les petits crabes vert et bleus qui étaient venus jouer avec leurs orteils et tout cela devenait vrai de vrai. Vrai de vrai cette fois, il n’en revenait pas !
— Oui, je vais t’aider ! dit-il finalement.
— Bien. Alors il faut que tu trouves le moyen de convaincre tes parents d’aller sur l’île Tortue.
Marco sourit.
— Ça, c’est déjà prévu, dit-il.
La fin du chapitre précédent est vraiment top :D
Excellent, Lily est vraiment intéressante. Je comprends enfin le sens de la couverture. J'y vois un chapitre charnière et je suis super contente d'entrer dans le fantastique :p.
Lily aurait-elle sentie comme nous, les lecteurs, que Marco avait quelque chose de profond et de spécial ? ^^
Au fait, Marco... évoluant près de l'eau... Je fais maintenant un lien avec Marco Polo :p
J'aime toujours autant. Je suis sûre que les jeunes lecteurs seraient bien emballés par cette bascule fantastique, et qu'ils auraient un grand plaisir à comprendre que c'est bien sûr un enfant, plus spécial et compréhensif qu'un adulte, qui est choisi pour vivre une telle aventure. :)
À bientôt ^^ (et c'est juste le manque de temps IRL qui m'amène à couper court à ce moment lecture).
Merci pour ton message. Ouf, le basculement dans le fantastique fonctionne donc ! Il a surpris pas mal de monde, heureusement il semble être bien passé pour toi : )
Haha, Marco Polo, je n'ai pas choisi ce nom pour cela mais j'y ai pensé aussi en cours d'écriture ; )
Merci pour ton message toujours encourageant !
Franchement, très bien envoyé.
En voilà une nouvelle qui surprend même ceux ce qui s'attendaient déjà à être surpris.
Oh, je suis contente si ce chapitre fonctionne, j'avais peur de perdre mes lecteurs avec une plongée si franche dans le merveilleux.
Oui c'est vrai, il y a un petit côté Marvel (ou Avatar ?) maintenant que tu le dis ^^"
J'espère que la suite te plaira autant : )
Merci pour tes messages !
Je dec ! Voilà donc le secret de Lili ! Ce n'est pas du tout ce à quoi je m'attendais, et c'est très intéressant, ce peuple qui fuit en été à cause des touristes... j'ai trouvé très touchant et mignon la répétition des répliques de Marco sur les humains puis les adultes ! aussi le "T'es bleue", c'était parfait <3
Oui, le récit bascule pas mal ici, j'espère que cela fonctionne tout de même, malgré la surprise ^^
Mais non, vous avez l'esprit mal tourné, ce n'est pas une drogue enfin x'DDD
C'est un roman jeunesse on a dit : P
Merci pour ton commentaire, j'espère que la suite te plaira maintenant que le secret de Lili est révélé ^^
Je ne m'attendais pas à ça ! On a fait un bond dans l'étrange. Soit on est totalement dans le surnaturel, soit le garçon rêve (ou la poudre est une drogue, mais il faudra changer le registre d'âge du livre lol).
J'aime que Marco le prenne calmement, comme un enfant qui découvre que son imagination est réelle. Un adulte ne pourrait pas prendre les choses de cette manière. Et c'est étrange aussi qu'ils fassent tout cela devant tout le monde. Pour l'instant, on ne sait presque rien de ce peuple du lac.
Remarque de forme :
- Jusque maintenant = jusque là
- autours = autour
- Oué = ouais ?
A bientôt
Haha, non il ne s'agit pas de drogue ^^
L'histoire restera jeunesse de bout en bout xD
Pour ta remarque, j'imagine dans ma tête que le bout de la plage, avec les rochers qui commencent à apparaître et la colline derrière, il y a peu de monde, donc ils ne jouent pas vraiment "devant tout le monde" mais ce n'est pas clair tu as raison. Je devrais le repréciser. Il y a des endroits de plages fort fréquentés et d'autres beaucoup moins, il faudra que je mette cela au clair dans ma réécriture, ici on ne comprend pas bien...
Merci pour ta remarque, je note tout cela pour la phase de corrections ! : )
Merci aussi pour le relevé des fautes, je vais corriger cela ! ^^