Au petit matin, Petits Bois et ses amis se mirent en route pour regagner au plus vite le château, car il ne restait que quelques jours avant le vingtième anniversaire de la princesse. Le dragonnet voletait joyeusement autour de ses compagnons, et se posait régulièrement sur l’épaule du magicien pour se reposer. Au fil des jours, Makiavel reprenait confiance en lui et découvrait la joie d’avoir des amis qui appréciaient sincèrement sa compagnie et qui n’étaient pas avec lui par la force ou la peur.
Enfin, ils arrivèrent au château. Ce dernier était plongé dans le silence et semblait désert. Ils franchirent la porte de la grande salle, et découvrirent les gens de la cour prostrés dans le silence et la tristesse. Le Roi et la Reine étaient assis sur leurs trônes, le visage sombre et rongé par l’inquiétude. Dès que le Roi aperçut Petit Bois, il sauta sur ses pieds et s’écria :
— Te voilà de retour ! As-tu trouvé ce qui a brisé le cœur de ma fille et la rend si malheureuse ?
— Oui, j’ai trouvé le remède pour guérir votre fille !
Perplexe, le Roi observa sans comprendre ce que lui montrait Petit Bois : un lutin, tout de vert vêtu, une petite fille rousse au regard malicieux, un magicien au chapeau pointu cassé et un dragonnet violet.
— Hein ? fut la seule chose qu’il parvint à dire avant de se ressaisir. Hé bien, après tout, pourquoi pas, conclut-il en haussant les épaules. Suivez-moi avant qu’il ne soit trop tard !
Ils lui emboîtèrent le pas et débarquèrent en trombe dans une chambre plongée dans la pénombre. Dans un lit à baldaquin, reposait la princesse. Elle respirait à peine, son visage était blanc et elle luttait contre le sommeil éternel.
— Mais qu’est-ce que c’est que cette pièce à l’air vicié et aux rideaux tirés ! s’exclama aussitôt le lutin qui se précipita pour ouvrir rideaux et fenêtres afin de faire rentrer l’air frais. En plus de cela, il n’y a même pas de fleurs et de plantes pour l’égayer un peu !
À ces mots, il se mit à danser une gigue effrénée. Sous le regard ébahi de ses amis, des fleurs multicolores et odorantes sortirent par dizaine des clochettes de ses chaussures et s’assemblèrent en collier et couronne qui vinrent se poser délicatement sur le cou et la tête de la princesse. Celle-ci prit alors une grande inspiration, ses joues retrouvèrent des couleurs et ses paupières s’entrouvrirent très légèrement.
— Mais qu’est-ce que c’est que cette écuelle remplie d’un brouet insipide ! s’exclama Makiavel tout en se saisissant du bol qu’il jeta par la fenêtre. Comment voulez-vous que la princesse retrouve des forces en ingurgitant une telle bouillie !
Il releva ses manches, saisit une cuillère en bois qu’il agita frénétiquement pour faire apparaître de magnifiques fruits et légumes qu’il s’empressa de couper et d’accommoder pour ensuite les placer harmonieusement dans un plat en argent qu’il présenta à la princesse. Ses narines frémirent à l’odeur alléchante de ce met, et elle se redressa un peu dans son lit.
— Mais qu’est-ce que c’est que cette potion immonde ! s’exclama la Sorcière Noire en renversant le liquide verdâtre d’une fiole. Comment voulez-vous que la princesse retrouve sa joie de vivre avec un breuvage aussi infect ?
Aussitôt, elle sortit de son sac des herbes, des baies et des racines de toutes les couleurs et s’empressa de confectionner un remède mordoré et resplendissant. Elle s’approcha de la princesse et fit tomber une goutte de la potion entre ses lèvres qui esquissèrent aussitôt un sourire.
— Mais qu’est-ce que c’est que cette chambre sans distraction ! s’exclama Petit Bois en suivant des yeux Dragonnet qui virevoltait autour du lit enchaînant des pirouettes incroyables et en laissant derrière lui un nuage mauve pailleté qui se déposa délicatement sur la princesse qui ouvrit les yeux.
— Mais qu’est-ce que c’est que cette chambre sans amour ? s’exclamèrent en cœur le lutin, la petite fille et Makiavel.
Petit Bois se pencha et embrassa la princesse. Il se recula. La princesse éclata de rire et applaudit.