Le vaisseau mère l’Eclatax se détachait des dernières nappes de particules célestes pour revenir dans sa dimension originelle. Il venait d’accomplir un voyage complexe, sur trois espaces-temps. Composé de multiples sauts de puce à l’échelle astrale, dont seuls les Sauriens en avaient la maîtrise et surtout le goût.
L’entrée et la sortie dans ses multivers pouvaient engendrer différents problèmes sur la structure de l’engin, comme des atteintes non négligeables sur le métabolisme du vivant. Si ces incidents étaient craints de la part des autres espèces, les Sauriens, eux, s’en moquaient, voir s’en amusaient.
Le cosmologue responsable de la manœuvre venait de valider l’immersion finale. Dernière étape qui confirmait aussi la reprise de poste du reste de l’équipage. D’après ses calculs ils allaient apparaître juste devant la couveuse, qui portait le nom de Terre, pour le rendez-vous le plus important depuis des millénaires.
Il affichait un sourire détendu pour les critères sauriens, ce qui lui donnait un air malsain sur son visage allongé et plat couvert d’écailles. Ce moment attendu par tous les siens allait ponctuer la fin d’un cycle, et aussi le début d’une nouvelle ère. Il en était de même pour les trois autres espèces qui allaient et venaient dans ce coin-ci de l’univers. Six mille ans s’étaient écoulés. Il avait hâte de retrouver les Lyriens, les gris, les vautours et surtout les humains, dont les modifications apportées semblaient très prometteuses pour la croissance de l’essence originelle ou du fluiiide comme le nommait ses potes Lyriens.
Ces retrouvailles sur terre représentaient aussi pour tous les membres de la pléiade, le moment de renouveler le traité qui les unissait. Ils en profitaient pour échanger toutes sortes d’informations sur le cosmos, sa cartographie, ses pièges, ses singularités qui le composaient comme autant de papillons sur un champ de coquelicot au printemps. Si le cosmologue se souvenait de cette image, c’est en raison de la couleur rouge qui dopait l’appétit sexuel des sauriens. Comme quoi cette saison terrestre pouvait activer de nombreuses sollicitations à travers l’univers. Bien que pour les sauriens ce n’était pas très difficile, vu qu’ils arrivaient à en interpréter dans toutes choses. De nature ovipare leurs femelles avaient préféré s’éloigner de leurs congénères mâles pour respirer un peu. Décision qui exacerbait encore davantage leur désir de procréer.
Les paupières semi-fermées, les mains derrière la tête, Exo observait avachis sur son fauteuil la console couverte d’une multitude de voyants qui s’allumaient ou s’éteignaient dans une symphonie visuelle adaptée à ses rétines verticales. Animées par autant de sondes à l’extérieur du vaisseau mère, qui lui indiquaient en temps réel comment ce dernier réagissait à l’extraction et la pénétration d’une nouvelle dimension ou plutôt de leur dimension mère, la zone Alpha.
Tout se déroulait pour le mieux, l’Eclatax devait apparaître juste après le passage de leur satellite, dont l’installation leur avait donnait des écailles blanches.
Une ultime nappe de particules au couleur d’améthyste se détacha de l’appareil, signale qu’il venait d’intégrer à part entière la dimension Alpha et là tout s’accéléra.
Une flopée de voyants se mirent à clignoter, une sirène leur porta main forte, pour lui faire remarquer qu’il avait percuté un corps solide de moindre taille qui avait rebondi sur la coque.
Sur terre, tous les habitants qui regardaient leur émission préférée de Pinouf froncèrent les sourcils en même temps à l’interruption de leur programme. Dans le vide sidéral, le moment n’était pas au loisir récréatif, le vaisseau arrivait bien trop vite sur l’objectif. Exo sursauta, il tentait de comprendre. Il avait repris les calculs utilisé il y a six mille ans, ce qui ne représentait pas une durée pertinente pour une évolution aussi conséquente dans l’espace-temps.
Sauf à l’approche de la planète couveuse, et il réalisa aussitôt que la densité de celle-ci avait fortement augmenté depuis leur dernière visite. Ce qui signifiait deux choses, la promesse d’une récolte exceptionnelle et le risque de ne pas en profiter s’il s’écrasait dessus, comme une mouche sur un hublot trop bien nettoyé.
Il inversa toute la propulsion, balança l’énergie sur le bouclier avant, en prévision du choc. L’Eclatax était un vaisseau immense le plus grand de leur flotte. L’engin entra dans l’atmosphère comme un forcené et apparut dans le ciel terrestre enveloppé d’un nuage de fumée dense et noir qui ne semblait pas vouloir le quitter.
Exo déglutit, tous ses muscles tendus, il se rendit compte qu’il était excité comme un bagnard sur xeros qui vient de retrouver sa liberté, juste avant qu’il ne percute la surface de l’eau. Le choc ébranla l’Eclatax des soutes aux passerelles. Le bouclier de la proue explosa, mais parvint à absorber l’onde destructrice. Il s’immergea in extrémiste dans les profondeurs de l’océan, qui réussit à le ralentir jusqu’à se poser sur un fond, couvert de sédiment dans lequel il s’enfouit.
Il se détendit pour s’enfoncer dans son siège, la console se remettait à clignotait de manière familière, il respira enfin.
Un appel de la passerelle arrière attira son attention, il prit la communication.
— Si ça, ce n’était pas un atterrissage à s’faire tomber les écailles ça, je m’y connais pas, c’est quoi que t’as pas pigé, dans, on arrive sans se faire remarquer ? J’espère pour toi que le vaisseau n’a rien sinon tu vas passer ton séjour à remplir de la paperasse tout seul je te préviens !
— Un atterrissage c’est posé un vaisseau sur un corps stable, dans le même ordre qu’il était dans l’espace, d’un point de vue technique, c’est ce que je viens de réaliser. Non rassure toi personne ne nous a vus arriver, et là, nous sommes au fond d’un océan à l’abri des regards, le tout, dans la plus grande discrétion.
Exo n’avait pas faux sur ce point-là, le vaisseau se trouvait bien à l’abri des regards, en revanche niveau furtivité, on ne pouvait pas dire que c’était réussi. À la surface, quand l’engin aux dimensions gigantesque avait pénétré dans l’eau, cela avait créé un immense remous, puis une vague géante s’était formée.
Un tsunami de taille honorable fonçait à présent droit sur la cote.