Chapitre XXI : Lever le camp

L’après-midi passa rapidement, il y avait beaucoup d’agitation dans le camp avec l’arrivée des renforts. Il fallait monter des tentes, nourrir les chevaux et gérer le stock de nourriture. Minos décida de lever le camp le lendemain afin de l’établir dans une clairière à quelques kilomètres de là. De toute façon, ils n’y resteraient pas longtemps, dès que Lux serait informée de leur arrivée, ils établiront un plan pour récupérer le talisman et se débarrasser d’Ignis. En attendant, il était hors de question d’accorder un instant de répit à Tanwen. Tandis qu’un autre Brûlé s’occupait de former Luke, Minos l’emmena dans la forêt afin de lui rappeler les leçons d’herboristerie qu’elle avait reçues. Il lui apprit également à confectionner des pièges à collet et à quel endroit les poser pour avoir plus de chance de capturer du gibier. Elle passa une bonne partie de l’après-midi à s’exercer, mais les travaux manuels n’étaient pas son fort et Minos dut repasser sur la plupart de ses pièges pour les refaire. Après y avoir mis des appâts dans chacun d’eux, ils s’arrêtèrent près d’un cours d’eau et firent une pause un bref instant.

— Ce fut une bonne journée, dit Minos. Rentrons au camp, l’on verra demain ce que l’on aura réussi à attraper.

— Je parie que j’en aurais plus que toi, lança Tanwen espiègle.

À sa grande surprise, Minos la suivit dans son jeu :

— Vu l’allure de tes pièges, même le plus stupide des sangliers ne tomberait pas dedans, répondit-il.

— La faute à celui qui m'a appris à les faire.

— On ne peut rien faire avec les cas désespérés.

— De toute façon, les pièges, c’est bien trop lent. Tu aurais dû m’apprendre le pistage, l’on serait parti avec des arcs et l’on…

Elle n’eut pas le temps de finir sa phrase que Minos se jeta sur elle, la plaquant au sol. Une flèche fendit l’air et alla se figer dans l’épaule de Minos qui laissa échapper un grognement de douleur. Tanwen vit un filet de sang s’échapper de la blessure, mais il se releva aussitôt et dégaina son glaive en regardant les alentours. Une autre flèche fendit l’air et il l’esquiva aisément en faisant un pas de côté. Trois hommes en armes sortirent alors des bois et se ruèrent sur eux. Ils portaient des capes rouges et des armures de bronze de bonne facture. Ce n’était pas de simples bandits, peut-être des hommes de Spyr ou bien de Dérios ? Elle dégaina son arme prête à se battre, lorsqu’elle croisa le regard inquiet de Minos.

— Cours ! Cria-t-il en parant le coup du premier assaillant.

Il n’en était pas question. Elle préférait encore mourir au combat que l’abandonner lâchement, quand bien même il s’inquiétait pour elle. Tanwen leva son glaive et prit une posture défensive en attendant que l’un des hommes ne se jette sur elle. Ils échangèrent quelques passes d’armes, mais son assaillant portait un bouclier et elle se retrouva rapidement désavantagée, ne parvenant pas à percer la défense de son adversaire. Un rapide coup d’œil vers Minos lui fit comprendre qu’elle ne recevrait pas d’aide de sa part. Il était seul et blessé contre deux autres hommes qui savaient également manier une lame. De plus, il ne revêtait pas son armure qu’il avait laissée au campement et ses adversaires étaient lourdement équipés. Tanwen n’avait pas le choix et elle devait se concentrer sur son sort. Elle évita de justesse un coup de bouclier qui l’aurait envoyé dans les pommes pendant un bon moment et contre-attaqua sans succès. L’homme qui lui faisait face était robuste, quoiqu’un peu lent. Si elle ne pouvait pas le vaincre sur terrain découvert, elle devait l’emmener dans la forêt où elle aurait l’avantage.

Elle prit la fuite en courant, l’homme sur ses talons. Ce n’est que quand elle se retrouva entourée de végétations qu’elle se retourna pour lui faire face. Son attaquant continuait de l’asséner de coups, mais sans parvenir à la toucher. Elle sentit qu’il s’impatientait et l’une de ses attaques la rata et la lame alla se figer dans l’écorce d’un arbre à proximité. Tanwen en profita pour contre-attaquer et elle réussit à lui transpercer l’avant-bras, le faisant lâcher son épée toujours plantée dans l’arbre. Elle libéra alors toute la furie qu’elle avait en elle et l’enchaîna de coups dans toutes les directions. L’homme paraît ses attaques avec de plus en plus de difficulté et son bouclier finit par lui voler entre les mains. Tanwen se jeta en avant et lui transperça le ventre. L’homme hoqueta et saisit la lame avec ses mains comme pour essayer de la retirer dans un dernier espoir. Il s’effondra avant d’y parvenir. Tanwen resta un moment sous le choc. Durant ses entraînements, elle avait pris conscience que ce jour finirait par arriver, mais n’y avait jamais véritablement pensé. Bien sûr, cela n’avait rien à voir avec un meurtre de sang-froid comme le lui avait ordonné Lucio, pourtant, la vue de cet homme mort la perturba et elle resta quelques secondes à le contempler.

Puis Minos lui revint en tête, elle se mit à courir en direction du cours d’eau, l’air paniquée. Elle savait qu’il était fort, mais dans son état et sans armure, il était grandement désavantagé. Elle courut jusqu’à en perdre haleine et lorsqu’elle déboucha sur le lieu de leur affrontement, elle ne vit que deux corps allongés dans une mare de sang. Tanwen allait s’en approcher lorsqu’elle sentit une main se poser sur son épaule. Elle se retourna brusquement en levant son glaive.

— Du calme, ce n’est que moi, lui répondit Minos.

Tanwen abaissa son arme et laissa échapper un soupir de soulagement à la vue de son maître.

— Où est passé le troisième homme ?

— Je m’en suis occupé, répondit-elle. Son corps est dans les bois à quelques mètres de là.

— Bien, il nous faut rentrer au camp en vitesse. Ce n’était que des éclaireurs, mais leur archer a pris la fuite, ils ne vont pas tarder à appeler des renforts.

— Comment va ton épaule ?

Minos avait brisé la flèche et la pointe en fer était toujours figée dans sa peau.

— On verra ça au camp, dit-il.

Ils se dirigèrent en courant vers leur campement en traversant rapidement la forêt. À leur arrivée, ils virent que la plupart des Brûlés s’étaient rassemblés autour du feu du camp. Tanwen remarqua plusieurs chevaux qui n’avaient pas été dessellés et simplement attachés avec une corde à des arbres. En s’approchant davantage, elle reconnut la prêtresse de l’autre fois ainsi que Lux qui s’adressait à la foule avec inquiétude.

—… Trois mille spyriens au minimum. Il nous faut partir maintenant ou il sera trop tard.

— Ils sont déjà là ! Cria Minos en entrant dans le cercle avec Tanwen sur ses talons. Nous sommes tombés sur des éclaireurs dans la forêt.

Lux soupira.

— Nous n’avons plus le choix, il va falloir se préparer à se battre dans ce cas.

— Attaquons-les en premier ! S’exclama Hilda. Qu’attendons-nous ? Ils ne s’y attendront sûrement pas.

— On ignore où se trouve leur campement et ils ont la supériorité du nombre.

— Préparons nos défenses dans ce cas, répondit Minos. Il n’est pas encore trop tard, l’on peut ériger d’autres barricades et piéger les environs.

— Je maintiens que l’on devrait attaquer dès ce soir, persista Hilda. Envoyons des éclaireurs pour trouver leur campement.

Lux s’assit sur une souche d’arbre et prit quelques secondes pour réfléchir. Tanwen sentait bien que l’atmosphère était tendue. Elle n’avait pas peur de combattre, mais elle s’était engagée pour se débarrasser de Lucio et ne s’attendait pas à se retrouver mêlée à une guerre entre Spyr et Dérios. Elle croisa le regard de Luke et sentit bien que lui aussi était inquiet, après tout, il risquait fort de devoir croiser le fer contre ses anciens camarades. Soudain, Lux releva la tête, l’air sûre d’elle.

— À combien de temps sommes-nous d’Ortie ? Demanda-t-elle.

— Environ trois heures de marche à pied, une à cheval, lui répondit une Brûlée.

— Il y a un vieux fortin en ruine sur une colline à proximité de la ville.

— Le Tertre blanc, acquiesça Minos. Dérios n’avait plus les moyens de l’entretenir et les habitants ont fait de l’endroit un sanctuaire pour leurs morts.

— Parfait, les troupes de Dérios passerons forcément par Ortie. Si l’on se dépêche, l’on devrait pouvoir atteindre le fort avant la tombée de la nuit. Il nous faudra ensuite résister face aux spyriens jusqu’à l’arrivée des troupes de Dérios à l’aube.

— Et si les Déris refusent de nous laisser partir ? Demanda Hilda.

— Un de leurs généraux est avec nous, j’espère pouvoir lui faire confiance.

— Quel autre choix avons de toute façon, dit Minos.

Lux parcourra l’assemblée du regard en attendant d’autres propositions, mais elle ne vit que des mines graves et des regards déterminés.

— Bien, déclara-t-elle, nous partons en direction du Tertre blanc. Préparez vos affaires en ne prenant que l’essentiel. Je veux une vingtaine de volontaires avec moi, nous partirons devant avec les chevaux pour préparer les défenses. Hilda, tu guideras la marche et Minos, je te laisse t’occuper de l’arrière-garde.

Ils acquiescèrent et Lux éleva alors la voix pour lancer son cri de guerre.

— Dans le feu, nous mourrons !

— Dans le feu, nous renaîtrons ! Crièrent les Brûlés tous en cœur. Ils se séparèrent aussitôt et chacun fila se préparer à la hâte. Dans la pagaille et la précipitation, Tanwen regagna sa tente et remplit son sac avec tout ce qu’elle jugea utile d’emporter. Par chance, on lui avait trouvé une armure à sa taille et elle s’en équipa. Elle n’aimait pas la porter et le poids la gênait dans ses mouvements, mais il valait toujours mieux ça que mourir transpercée par une flèche perdue ou un coup de lance bien placé. Alors qu’elle sortait pour gagner les écuries, elle tomba sur Minos qui l’attendait devant sa tente avec son armure en bronze sur les épaules. Elle remarqua qu’il avait passé un bandage autour de sa blessure.

— Comment va ton épaule ? Demanda-t-elle.

— Ça ira pour le moment, espérons juste que cela ne s’infecte pas. Je suis venu t’avertir que tu seras à l’arrière avec moi. Quoi qu’il arrive ne me quitte pas d’une semelle, il est fort probable qu’ils tentent de nous tendre une embuscade sur le trajet.

— Compris ! Répondit-elle.

— Je voulais également te dire que tu t’es bien battue tout à l’heure. Tu es revenue voir comment j’allais après avoir terminé ton combat, et c’est ce qu’aurait fait une vraie Brûlée.

— Je ne pouvais tout de même pas les laisser te vaincre avant moi.

— Parce que tu penses en être capable ?

— J’ai remarqué que tu te faisais souvent toucher à l’épaule, je pense avoir trouvé ton point faible.

Minos sourit, d’un sourire authentique et chaleureux, en la regardant. Tanwen fut si surprise qu’elle ne profita même pas de l’occasion pour continuer de le charrier.

— Essaie de rester en vie ce soir, et peut-être que tu auras encore ta chance dans le futur, qui sait ? Dit-il avant de sortir de la tente.

Tanwen sourit à son tour. Il n’est peut-être pas si froid que ça finalement, pensa-t-elle. Elle termina de préparer ses affaires à la hâte, puis gagna les écuries où se rassemblaient déjà les autres Brûlés.

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Talharr
Posté le 29/07/2025
Re,
ça y est tout le monde est réuni. Tout le monde va se diriger au même endroit. Une grande bataille se prépare.
Hâte de voir ça :)
Tanwen toujours aussi agréable à suivre :)
Les petites taquineries avec Minos aha
Le combat et le 1er mort.
Bien orchestré aha

Les retours :) :

"Minos décida de lever le camp demain afin de l’établir" -- peut-être plus "le lendemain"

"qu’elle ne recevrait pas d’elle de sa part" -- "pas d'aide"

"continuait de l’assener de coups" -- "asséner"

"le fer contre ces anciens camarades" -- "ses"

"Comment va ton épaule, demanda-t-elle ?" -- encore le soucis de ponctuation aha

"Tu es revenu voir comment" -- je crois "revenue"

"Tanwen sourit à son tour Il" -- manque juste le point avant la pensée interne :)

A plus pour la fin de ce 1er volume :)
Scribilix
Posté le 30/07/2025
Salut, merci encore pour les fautes.
Oui, ce premier tome se terminera sur la bataille du Tertre blanc qui réunira tout ce beau monde.
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