Chapitre XXVI, J’espère que le futur saura me tendre les bras.

Écrire - Nekfeu

Léna, Cinq ans plus tard

— Ça fait plusieurs années maintenant que tu es seule, cherches-tu à retrouver quelqu’un ?

 Cette phrase a raisonné fortement à mes oreilles pendant longtemps. C’était une amie, ou du moins une copine qui lui avait servit cette question sur un douloureux plateau d’argent.

— Non. Je ne vois pas pourquoi j’aurais besoin de quelqu’un dans ma vie.

 J’avais porté mon verre de vin blanc à mes lèvres et réprimé la grimace qui avait faillit naitre sur mon visage. Il n’était pas fameux. Oui j’avais appris à apprécier ce breuvage avec le temps sans m’enfoncer dans ses travers.
 Cette soi-disant amie avait roulé des yeux et son air hautain m’avait blessé. À présent, je me demande comment j’ai pu faire pour la supporter tout ce temps et je suis bien contente de ne plus l’avoir dans ma vie.
 Elle avait fait rouler le vin dans son verre à pied et m’avait dévisagé de haut en bas et haussé ses sourcils en apportant la boisson à ses lèvres, comme si je n’en valais pas la peine finalement. J’avais coupé les ponts peut après cette discussion, quand je l’ai retrouvé dans mon lit avec l’homme avec qui je commençais de partager ma vie. Ce connard ne connaissait pas mon passé avec celui que j’aimais encore alors quoi bon continuer pendant qu'il me salissait ? Oui je sais, blablabla faut être honnête et toutes ces bêtises mais je m’en fous. Je voulais une opportunité de ressentir de l’affection et de l’attention. Pathétique ? Qu’on ne vienne pas me dire que personne n’a jamais ressenti le manque de chaleur au point d’aller vers quelqu’un qui pourrait nous en donner, quitte à lui mentir à lui et à nous-mêmes. Ne me dites pas ça, parce que je ne vous croirais pas une seule seconde.

 J’écris sur ce carnet comme si tous mes problèmes allaient se résoudre au détour de ma plume, c’est probable oui. Du moins ç'a toujours eu cet effet-là. J’ai l’habitude d’écrire des histoires, pas de me faire une auto-thérapie comme ça. Je préfère voir mes personnages qui galérer avec leurs problèmes plutôt que moi, c’est plus simple à gérer même si j’essaie de me guérir à travers eux. Rina et ses problèmes sont bien plus attrayants pour moi que tout ce bourbier. Elle aussi elle a vécu comme moi ? Fadaise. Elle, elle est bien plus solide que moi.

— Putain.

 Je pose cette foutue plume et je me lève en prenant ce verre presque fini dans un même geste. Je bois trop ? Peut-être. Surement même. Fin non. Je ne bois que rarement mais parfois je bois seule et c’est sûrement ça le problème, même si je ne bois que quand j’écris, je crois. Mais vu que j’écris souvent…Vous voyez le truc ?
 C’est ma psy qui m’a conseillé d’écrire sur moi, comme si j’étais le personnage d’un de mes romans et que je valais la peine d’être couché sur papier. Je préfèrerais être couché sous un corps attentionné mais bon, on fait avec ce qu’on a. J’ai eu quelques aventures depuis le temps. Des hommes, des femmes, des coups d’un soir. Non je rigole. Du moins légèrement. Je n’ai eu qu’un homme, une femme et qu’une aventure extrêmement brève. Pourquoi ça n’a pas duré ? L’aventure nous n’allons pas bavasser longtemps dessus, je ne souhaitais pas aller plus loin. C’est le truc le plus récent mais je ne l’ai pas souhaité. L’homme était extrêmement touchant et adorable mais après deux ans de vie ensemble, je ne supportais plus tout ça. Je ne m’y retrouvais plus, moi et mes questions dans ma tête. J’étais instable mentalement, profondément triste et je me cherchais. Vous vous doutez que c’est après cela que j’ai rencontré une jeune femme. Je l’ai aimé presque aussi profondément que l’homme même si ça n’a duré que quelques mois. Pourquoi ça s’est terminé ? Parce que je suis une vielle égoïste qui ne supportait plus la distance, la pression que ça engendrait et je pense que je n’étais pas encore prête à aimer de nouveau. Je pensais encore à l’homme, nulle que je suis. Cet homme j’y ai pensé très longtemps, trop à mon goût d’ailleurs, même s’il ne remplaçait pas mon amour de jeunesse. Le vin roule dans mon verre comme une vague et je songe à un autre homme. Un que je connais depuis des années mais avec qui je n’ai eu qu’une amitié platonique, évidemment parce que j’étais avec le premier homme à cette époque. Mon regard se noie dans le mouvement de roulis effectué par mon poignet et je me mets à songer. Je ne pourrais peut-être pas me mettre avec lui. J’ai bientôt vingt-cinq ans et j’ai un projet, je ne permettrai à personne à se mettre en travers de ma route. Je me souviens d’une aventure fugace, autre que celle que j’ai décrite précédemment, avec une personne que j’apprenais à connaitre et elle m’a instantanément dégoutée.

 Nous étions installés sur la terrasse d’une petite brasserie de campagne, un week-end pour apprendre à se connaitre, c’est ce que j’avais promis. J’ai pris l’occasion pour m’enfuir un peu de mon quotidien carcéral et pour mieux disparaitre après, je l’avoue. Nous discutions de chose et d’autre quand tout à coup il y a eu une question fâcheuse.

— Et toi, tu souhaites avoir des enfants ?

 Mes sourcils s’étaient froncés devant cette question piège. J’avais essayé d'estimer ce que cette personne attendait. La vingtaine bien tassée, célibataire pour ce que je savais, propriétaire je crois et un boulot stable. Ok c’était clair.

— Oui, je souhaite plusieurs enfants biologiques.

 Cette précision avait fait naitre une interrogation sur son visage.

— Et ?

— Et un enfant adoptif.

— Quoi ? Pourquoi ?

 Ce sombre individu semblait choqué et je sentais que la discussion allait tourner au vinaigre. Peut-être que mon week-end aussi.

— Le souhait d’offrir une opportunité à un enfant qui souhaite une famille. Ce n’est pas parce que j’ai la possibilité d’avoir des enfants biologiques que je vais me priver d’aider un enfant qui a besoin de chaleur.

 Je pense que mon regard était noir ce jour-là car j’ai vu cette personne se renfrogner, comme si elle boudait.

— Je trouve ça ridicule. Tu prends certainement le bébé d’une famille qui elle en a vraiment besoin.

— Qui te dit que je souhaitais adopter un bébé ? Ceux plus âgés voient leurs chances diminuer au fil des années alors je penche plus pour cette vision des choses.

 J’avais essayé de tempérer mais la compagnie qu’on m’avait offert en cette fin d’après-midi s’était emportée en me disant des tas de vacheries au visage et nous humiliant moi et mon idée. J’avais fini mon week-end seule.
 Autant j’étais contente de me retrouver tranquille, sans personne pour m’embêter - d’autant que je n’avais rien payé - mais je me retrouvais avec des idées noires. Tout cela était venu avec lui, avec Julien. On avait évoqué le sujet il y a plusieurs années maintenant, bon sang que c’était loin. On avait parlé d’enfants, faites pas genre que vous n’avez jamais fais ça. Même quand une relation vient de débuter et même si on est très jeunes, on en discute. Là, nous étions vraiment très jeunes, je crois que nous étions en primaire ou au début du collège, et oui.

— Tu en veux toi ?

— Évidemment et toi ?

 Pour moi c’était une évidence, je ne saurais même pas dire pourquoi. Je pense qu’à cette époque, pour moi, c’était comme la concrétisation de la vie. Désormais je sais que c’était bien plus que ça. Que la vie est source d’infiniment plus de chose que la procréation et que ce n’est pas le sang qui nous unit mais bien les liens qui se tissent.
 On en avait discuté très sérieusement et nous avions parlé d’adoption pour justement aider quelqu’un qui pourrait en avoir besoin. Moquez-vous si vous voulez mais nous pouvons avoir cette vision des choses même très jeunes.
 Nous nous étions promis de concrétiser ça quand nous serions plus grands, des adultes. Ce rêve avait reprit vie quand nous nous étions retrouvés et j’y avais cru, malheureusement.
 Même si adopter un enfant seule est quelque chose d’immensément compliqué, je ne compte pas abandonner mon projet par cette simple épreuve. Pour lui, pour nous et pour la famille que nous aurions pu former, je ne peux pas laisser tomber.

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Iris d'Esten
Posté le 11/07/2023
Un saut dans le temps alors !
Ok pourquoi pas !
Du coup ca fait passer beaucoup de moment rapidement.
Ce chapitre est bien mais peut-être un peu trop au pas de course.
Mais c'est intriguant. Ah et juste petite remarque, cette phrase est mal tournée :
- J’avais coupé les ponts peut après cette discussion, quand je l’ai retrouvé dans mon lit avec l’homme avec qui je commençais de partager ma vie.
UneXtoile
Posté le 16/07/2023
Je te remercie pour ton commentaire, effectivement j'ai voulut faire un saut dans le temps pour montrer une évolution, trop rapide ?
En quoi trouves-tu qu'elle est mal tournée ?
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