Abélard, indifférent à sa détresse, le défie :
« Si Lausanne t’aime vraiment, elle te reviendra. Ça ne dépend pas de toi. Si tu la fais pleurer, si tu compliques une situation déjà éprouvante… Tu ne pourras lutter contre le destin. Parce qu’elle a un destin, Valère… toi, je n’en suis pas sûr. »
Là‑dessus, il se lève et s’en va vers l’étage. Valère se retient de lui hurler après. Il s’imagine déjà Lausanne, quelques années plus tard… Grandie, séduisante, prestigieuse. Des études brillantes, des actions en bourse, une médaille quelconque…. Valère, sur ce portrait, aurait l’allure d’un disgracieux autocollant. Immobile au milieu du salon, le mage se retrouve confronté à son étrangeté. Cette demeure proprette, parfumée de vanille, le toise. Surtout ce pan de mur, couvert d’un bataillon d’aquarelles encadrées : toutes représentent les cimes des Rigénées, au sud de la Pluvède. Chaque toile a été peinte par un proche membre de la parenté : oncle, tante ou cousin. Sous les traits colorés, l’individualité de chaque âme se dévoile… mais c’est le même massif. Voilà ce dont le clan des Sceau a privé Valère : la certitude d’une appartenance commune.
Céleste s’est plainte de devoir réparer les « pots cassés ». Dans un magasin de décoration, le client choisit‑il sur le rayonnage un vase intact, ou son voisin, rafistolé ? Le neuf, sans aucun doute. Prétendre le contraire reviendrait à excuser, à minimiser ce que la Sélénite lui a fait subir. Il y a certains crimes qui abîment et marquent la victime, et dont elle ne se relève pas totalement. Il leur manque l’innocence, volée à jamais. Les gens normaux auront toujours sur Valère une longueur d’avance. Il ne doit plus s’en formaliser. Fasciné par les tableaux exposés, Valère n’a pas remarqué le retour de Savinien par l’escalier adjacent. Il vient seul, mais il semble soucieux.
« J’espère qu’Estève ne t’a pas trop rudoyé, lance Valère. De quoi parliez‑vous ?
— De moi et Zaza, principalement. Estève avait des arguments percutants. Non pas qu’il m’ait cogné… Pardon. Ce n’était pas drôle, comme blague.
— Si ce n’est pas trop tard… je voudrais moi aussi retirer ce que j’ai dit, décide‑t‑il. Non pas que j’accepte que tu traites Lausanne ainsi… Mais je voulais avoir le dernier mot et j’ai dit des choses que je ne pensais pas vraiment.
— Peut‑être que tu devrais. J’écris des poèmes sur l’amour, parce que c’est ce que tout le monde a en commun. Sauf moi. J’ai beau me forcer, essayer de m’attacher… Je me lasse. Ces filles, je les voulais réellement. J’aurais sacrifié n’importe quoi pour conquérir leur cœur… mais dès le lendemain, elles m’irritaient. Comme si elles étaient devenues des personnes différentes. Au bout d’un moment, j’ai compris que c’était moi qui changeais. Mon père dit que quelque chose cloche chez moi.
— Arrête ton char, tu n’es pas sans‑cœur, s’énerve Valère. Juste… je ne sais pas, trop enthousiaste ? Tu veux être amoureux, comme tous ces protagonistes des romans que tu dévores. Alors peut‑être que tu te forces à croire que tu ressens des choses. Ça expliquerait beaucoup. Tu sors tout le temps avec des filles que tu mépriserais en temps normal. Évidemment qu’elles finissent par t’agacer.
— D’accord, donc je suis foutu, en gros ?
— Non ! Tu dois juste attendre de tomber sur quelqu’un qui te plaît vraiment. Tudieu, ce que tu peux être impatient !
— Eh bien désolé, mais c’est difficile de te voir réussir là où j’ai échoué. Lausanne t’est tombée toute crue dans le bec, et elle est restée à t’attendre toutes ces années alors qu’elle aurait pu aller voir ailleurs. Je n’ai jamais eu… quelqu’un comme ça, moi. »
Savinien pèche donc par envie, pas par jalousie. Cela, Valère peut le comprendre et le pardonner car il a toujours envié son ami. Maintenant les rôles s’inversent… transition douloureuse.
« Tu ne peux pas continuer à insulter Lausanne comme ça, insiste Valère. Surtout pas dans sa maison, ou devant moi. Elle tient aussi à toi, tu sais ? Vous étiez amis. Maintenant tu la détestes, elle n’y comprend rien, et elle souffre.
— Oh, malmort… Oublie ce que j’ai dit sur elle, l’implore Savinien. Tudieu, je ne sais pas ce que je pensais. Parfois je me force aussi à haïr les gens.
— Bien. Paix ?
— Paix. »
Le poète paraît soulagé de cet accord. Pour dissiper leur embarras mutuel, Valère choisit de changer du sujet. Ils discutent des derniers feuilletons parus dans Le Pluvagabond, et Valère retrouve le Savinien qu’il connaît. Son air fébrile indique même qu’une inspiration soudaine lui est venue.
« Promets‑moi en tous les cas de venir au gala du lycée. Je sais, tu n’y tiens pas, mais cette année… C’est moi qu’ils ont chargé du récital ! Quelques grands auteurs à déclamer, mais je pourrai intégrer certaines compositions de mon cru.
— Félicitations ! Mais tu ne vas pas chanter tes poèmes graveleux devant les parents, j’espère ?
— Je pourrais te le promettre, mais notre amitié mérite mieux qu’un vil mensonge. Et puis tous mes poèmes sont graveleux, si on creuse assez bien. Tiens, analyse celui‑là. »
Et Savinien, sans attendre, d’entonner :
« La flamme en son berceau
se récrie, se tord,
puis monte et brille,
dans l’éther
s’enfuit…
et
l’ennui
délétère
y rompt et vrille
le mépris retors,
l’affame en ses arceaux ! »
Valère reconnaît la forme du « sablain », un type de calligramme homophone que Savinien affirme avoir inventé. En réalité c’est l’adaptation d’une forme de chant diamisse traditionnel, exception faite que le diamarin utilise des pieds plutôt que des rimes.
« Joli… Pas sûr d’avoir compris la chute, cependant. C’est une allusion à l’incendie des manufactures ?
— Et à plein d’autres choses. Je te laisse méditer », suggère Savinien, un peu déçu.
Ils sortent. Au jardin, ils retrouvent Lausanne qui déballe les paquets ramenés par ses parents des magasins. Des cartons de pièces détachées. Savinien y déniche une paire d’électrodes :
« Un prototype de phlogistothérapie, les instruit‑elle. Ça permet d’injecter du courant électrique dans le corps, pour galvaniser les cœurs arrêtés…
— Tu me fais un prix ? J’aimerais bien me faire électrocuter, la consterne Savinien. Ben quoi ? C’est très à la mode… Certains artistes l’utilisent afin d’atteindre un état de transe visionnaire ! Lorsqu’ils se réveillent, ils racontent avoir ressenti quelque chose d’étrange… Comme si un éclair leur avait traversé le corps !
— Ce n’est pas une impression ! »
Lausanne, agacée, tente de lui arracher des mains le casque. Savinien lève ses longs bras ; trop petite, elle peste tout en tentant de le faire tomber. Ils ont repris leur dynamique habituelle. Valère pouffe et force Savinien à restituer l’engin.
« Mais qui a les moyens d’acheter ce truc ? Le phlogiston coûte des mille et des cents, remarque Valère.
— Plus pour longtemps, se réjouit‑elle. Tu n’as pas lu les journaux ? Élisée Mantodore a décidé de casser les prix des cartouches ! Il dit qu’il préfère vendre à perte, plutôt que de ralentir l’industrie du pays… »
Si Talma se tenait aux côtés de Valère, elle lui soufflerait que le magnat souhaite surtout mettre ses concurrents en faillite et racheter leurs usines. Sa mainmise sur le marché du phlogiston constitue un moyen de pression supplémentaire envers les juges et le gouvernement. Comme tous les jeunes de sa génération, Valère a grandi dans la vénération des nouvelles technologies phlogistiques : trains, chaînes de production, réverbères… Mais le coût humain de ces engins suscite désormais en lui le malaise. Abîmé dans ces hypothèses, Valère ne voit pas Lausanne abandonner ses colis et s’approcher de lui. Trop tard pour la repousser. Pris au piège, Valère lui rend son baiser quelques secondes. Savinien grimace comme s’ils venaient de lui marcher sur le pied.
« J’ai oublié mon carnet à l’étage », prétexte‑t‑il en s’éclipsant.
Sitôt que Valère et Lausanne sont seuls, celle‑ci lui demande une faveur :
« C’est à propos du gala des parents d’élèves… Le 8 floréal approche !
— Ah. Ils t’ont invitée une fois de plus ? C’est la rançon de la gloire, ma pauvre…
— Justement. Tout le monde va me regarder… Je ne peux pas m’y pointer sans cavalier. »
Un torrent d’images reflue dans le crâne de Valère. Ces potaches qui s’asseyaient à chaque cours près de lui, pour le plaisir de renverser « par accident » leur encrier sur son pupitre. Ce professeur de maths qui l’avait gratifié de 3/20 une année durant. Ce surveillant qui, un jour où Valère avait failli se faire arracher l’oreille par un troisième, lui avait recommandé de garder une « attitude positive » s’il souhaitait ne plus se faire traiter de bâtard. Tous s’esclaffent en le voyant, et lui dégobillent à tour de rôle sur les pieds un mélange de sangria et de petits fours. Revoir ces gens ? Plutôt crever.
« Oh, mais bien sûr, s’étrangle‑t‑il. Ce sera avec joie, Zaza !
— Tu as dit oui, s’extasie‑t‑elle d’une voix suraiguë. Oh, Valère, je suis si heureuse ! Tudieu… C’est malin, je recommence à pleurer. »
Valère serre les dents tandis que Lausanne se frotte les paupières. C’est ça, l’amour ? Ce n’est pas donné.
Le reste de la soirée se déroule sans incident. Le soleil ne s’est pas couché que Savinien le massacre déjà à la Déduite ; Lausanne, qui s’est elle aussi prise au jeu, ne traîne pas loin derrière. Aucun des deux ne remarque que Valère a la tête ailleurs. Une idée, en effet, vient de germer dans sa cervelle, et même d’y pousser.
La nuit venue, Savinien rentré chez lui, Valère attend que le reste de la maisonnée s’assoupisse. Il déboutonne la housse d’un coussin et récupère les grimoires qu’il avait dissimulés dans le rembourrage pour les placer dans un cartable. Puis il s’éclipse de sa chambre. Les Lagale ont poussé la confiance jusqu’à lui fournir un double des clefs, aussi découcher ne lui pose aucune difficulté. Mais les choses se gâtent dans Carat. Maudit couvre‑feu ! Pas moyen d’utiliser son vélo, trop visible. Les rondes des forces de l’ordre sur les grandes artères l’obligent à effectuer de nombreux détours par des ruelles, et avec lenteur. À chaque carrefour, il se retourne, pour vérifier si on le suit. Malgré ses effectifs renforcés, la maréchaussée ne peut pas tout quadriller. Les Dissidents ont repéré des angles morts, des zones mal éclairées et des quartiers trop calmes pour justifier une surveillance rapprochée. Après deux heures de marche, il arrive à sa destination : l’Oasiade. Retourner chez les Lagale nécessitera une nuit blanche, mais il doit parler à Talma. Seule une poule insomniaque caquète encore dans la basse‑cour. La respiration des bêtes couvre le bruit des pas de Valère sur la paille… Il toque à l’entrée, du nombre de fois convenu. Le code a‑t‑il changé, en son absence ? Non : la porte s’entrebâille déjà. Une voix plus grinçante encore que le battant rouillé monte dans la pénombre :
« Qui va là ? »
Talma n’apprécie pas qu’on la réveille si tôt. Ses nattes, coincées en un filet, lui font sur la tête un panier de crabes courroucés. Son corps musclé nage sous une robe de nuit élimée. Quant au bras incliné derrière son dos, il dissimule sans aucun doute un couteau. Elle l’abaisse lorsqu’elle découvre son visiteur, mais son professionnalisme laisse transparaître un peu de rancœur :
« Valère ! Je m’étonne de te revoir ici, surtout à une heure pareille. Tu as détalé la dernière fois, mes supérieurs ont cru que tu comptais les dénoncer aux flics… Les rassurer n’a pas été une partie de plaisir.
— Je suis désolé, admet Valère. C’est le plan qui me faisait peur, pas la Dissidence.
— C’est la même chose, ces temps‑ci. Tous nos effectifs sont là‑dessus… J’ai demandé à Olibée de traquer Mantodore. Nélée essaye de deviner son emploi du temps, histoire d’approcher de la cible. Alors si tu ne veux pas te joindre à nous, mieux vaudrait qu’on ne se fréquente plus du tout. Peut‑être qu’Ino pourrait revenir, puisque nous n’allons plus utiliser ta magie.
— J’ai changé d’avis. Laissez‑moi vous aider, halète‑t‑il. Sinon vous allez tomber comme des mouches. Est‑ce que je peux cacher mes grimoires chez toi en attendant ? »
Battant, chaîne, verrou : Talma envoie valser le loquet en un tournemain, et engouffre Valère à l’intérieur avant de refermer. L’adrénaline : un excellent réveille‑matin.
Attentive, elle n’allume pas pour autant la lumière :
« Sauf ton respect, je doute de ton engagement, ἀφραδής… [1] Tes yeux hésitent. As‑tu le cran nécessaire pour une opération pareille ?
— J’ai mieux que ça, Talma. J’ai un plan. »
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[1] ἀφραδής – « imprudent »
Les parents de Lausianne m’ont paru fort sympathiques jusqu’à la conversation de papa Abélard avec Valère. Je suis d’accord avec lui quand il conseille à Valère de ne pas essayer de retenir Lausanne. Quand on aime les gens, il vaut mieux les laisser poursuivre leurs rêves et les encourager que d’essayer de les retenir pour des raisons égoïstes, sinon, comme il dit, ça finira par pourrir la relation. Et je suis aussi d’accord quand le papa dit que Lausanne reviendra vers Valère si elle l’aime vraiment. Cela dit, je ne sais pas si je me trompe, mais je crois quand même détecter du mépris de classe dans le discours d’Abélard. :/ Le « ma fille a un destin, et toi, pas sur » c’est quand même salaud. J’ai quand même l’impression qu’il prend leur relation pour une petite amourette que sa fille oubliera vite une fois partie.
Et puis, est-ce que c’est vraiment ce que Lausanne veut, où est-ce que ce sont ses parents qui lui imposent ce beau futur glorieux ? Je serai curieuse de voir ce qu’elle en dit.
Savinien file un mauvais cotons. Pas cool, tout ce qu’il a sorti sur Lausanne. Heureusement qu’il s’est vite ressaisi. è.é Sa jalousie et compréhensible, mais ce serait dommage qu’il détruise les deux seules relations réelles qu’il a dans sa vie pour ça.
Le trio Lausanne/Valère/Savinien revient au cœur de l’histoire dans ces deux derniers chapitres et ça fait plaisir. Ça fait aussi plaisir de voir Valère retourner vers la Dissidence. Avec un plan en plus, j’ai hâte de voir ça !
Le gala du lycée et le gala des parents d’élèves, ce sont deux évènements différents ? Est-ce qu’il y a une chance que Mantodore se trouve au gala des parents d’élèves ? C’est pour ça que Valère revient vers la Dissidence avec un plan ? Ou ça n’a rien à voir ?
Pour revenir sur les révélations concernant Céleste, Estelle et Orion, j’en viens à me demander si Estelle était vraiment la mauvaise mère que dépeint Céleste. Maintenant qu’on sait qu’elle ne lui a pas refiler son fils parce qu’elle n’en voulait pas, mais parce que ça faisait parti d’un marché passé avec Céleste… On sait aussi que Céleste peut manipuler les souvenirs des gens, donc on ne peut pas non plus se fier aux souvenirs de Valère. :/ Du coup j’en viens à me demander… et si Estelle avait aimé son fils ? Et si elle avait refusé de le donner à Céleste et que Céleste l’avait assassinée en maquillant ça en suicide ? Apparemment, la strangulation, ça semble être sa spécialité. xD Bon, c’est peut-être l’espoir que Valère ait été aimé par quelqu’un dans cette famille qui me fait imaginer tout ça, mais ça semble quand même fort probable.
Je sens que les prochains chapitres vont être explosifs. Entre la Dissidence qui va faire son move contre Mantodore et Céleste qui va sûrement revenir à la charge d’une façon ou d’une autre… ça promet de belles péripéties !
Tu as très compris : le gala du lycée c'est celui des parents d'élèves, et Valère estime qu'il y a de grandes chances qu'Élisée Mantodore passe y faire un tour. Si tu relis le chapitre XI, Valère mentionne même à un moment que Mantadore est sur la liste des donateurs du lycée et que le proviseur l'invite régulièrement au gala... Donc c'est pour ça que Valère va voir Talma : il se dit que s'ils doivent cambrioler les affaires de Mantadore, c'est peut-être le lieu et le moment idéal.
Quant à Abélard... Oui, c'est du mépris de classe à peine masqué, enrobé de bonnes intentions. Il a de grandes ambitions pour sa famille Lausanne et dans les faits, oui, son idylle avec Valère pourrait lui fermer des portes. C'est un bâtard, son sang n'est qu'à 75% pluve, sa mère était une artiste populaire (ce qui n'est pas forcément bien vu dans certains milieux), on ne sait pas à quel point sa famille est riche/pauvre, il exerce un métier (barbier) pas forcément très bien payé, etc. Aucun de ces défauts n'est rédhibitoire isolément mais leur accumulation est problématique. Que Valère soit l'ami de Lausanne, ça passait, mais son potentiel futur mari...
Il y a d'autres facteurs qu'Abélard tait, bien sûr, à savoir qu'en Pluvède les filles héritent du nom de famille de la mère, et les garçons, du père. Il y a donc des familles exclusivement masculines et d'autres exclusivement féminines. C'est pour ça, notamment, que tout le monde sait que Valère est bâtard (faute de patronyle, il a hérité d'un nom de famille féminin : "Sceau"). Abélard est dans la situation inverse, à savoir qu'il vient d'une famille prestigieuse (les Lagale)... mais par sa mère. Donc il n'a pas hérité du matronyme et il est beaucoup moins intégré à la célèbre entreprise familiale que ses soeurs. Pour que sa fille puisse être enregistrée à l'état-civil sous le nom de "Lagale", il a dû faire des démarches devant les tribunaux. Par ailleurs il est en couple avec un homme (Estève), leur fille Lausanne est donc adoptée. Donc beaucoup de gens dans la famille d'Abélard pourraient juger que Lausanne n'est pas une "vraie" Lausanne et n'a pas droit à sa part d'héritage dans le consortium Lagale. En bref : Abélard a beaucoup de frustrations liées aux discriminations dont il juge avoir été victime, et Valère en fait les frais. C'est très hypocrite mais très humain.
Pour ce qui est de Lausanne... Elle a de l'ambition, mais en vérité toutes ces histoires de gros sous restent encore un peu abstraites pour elle. Sa vraie passion, en tant qu'ado de quinze ans, c'est le cheval. Elle serait sans doute horrifiée d'apprendre que son père met ainsi la pression sur Valère.
Le sujet d'Estelle reste sujet à interprétation mais Céleste n'a débarqué dans la vie de Valère qu'après son suicide. Donc on peut (relativement) faire confiance à ce dont se souvient Valère avant ses huit ans, à savoir d'une mère extrêmement absente. Pas méchante pour un sou, mais distante d'une manière qu'il ne comprenait pas. Rétrospectivement, c'est dû au fait qu'elle a été plus ou moins été contrainte, par pression familiale, à garder cet enfant. Je crois qu'elle a sincèrement essayé d'aimer son fils mais il y avait un vrai blocage dû à son trauma (et sa honte d'avoir trahi sa soeur Céleste). J'ai d'ailleurs écrit une nouvelle ("Ce qui nous revient") qui met en scène Estelle durant son adolescence et, heu... Disons qu'elle avait quelques félures psychologiques bien avant son triangle amoureux désastreux avec Orion/Céleste. Cela a joué aussi.
Céleste n'est donc pas aussi diabolique. C'est bon à savoir ! Mais dis, je vais peut-être aller jeter un œil à cette nouvelle. Ça m'aidera à patienter.
Encore merci pour cette lecture fort divertissante !
Passe de bonnes fêtes !