Cinq valentins pour le prix d'un

Par MarieZM

Avertissement de contenu : s*xe cru, vulgarité... 

Samira s'installe derrière un bureau en verre, sur une chaise très moderne en métal, en face d'elle une chaise en bois avec un pied scié visiblement plus court que les trois autres. 

Une sorte de guirlande avec une ampoule unique pend lamentablement au-dessus de son bureau au mobilier dernier cri. 

Guillaume reste en retrait, adossé à la fenêtre derrière-elle. Ils sont dans le bâtiment dit des "Grands-moulins", au dernier étage, et ont une vue plongeante sur le bâtiment dit de la "Halle aux farines" où se trouve le bureau de Guillaume. Ils peuvent aussi voir le self du CROUS et les chantiers sur la Seine où passent les péniches. Guillaume regarde par la fenêtre, l'air pensif. 

Samira est sérieuse, comme en témoignent les rides de concentration sur son front.

– T'es sûre pour le coup de l'ampoule qui clignote ? hasarde Guillaume...

– Évidemment que je suis sûre ! C'est le B.A-ba de l'interrogatoire, rétorque Samira en levant un sourcil fâché.

– Alors, on pourrait éventuellement se passer de la chaise bancale ? 

– Bien sûr que non ! Bon, faisons entrer le premier, nous avons cinq valentins suspects, dit Samira

– On les suspecte de quoi ? réagit Guillaume, soudainement désemparé...

– Il sont suspectés d'être la perle rare pour ta sœur mystique !! Bon, essayez de suivre maintenant, Professeur ! répond Samira dans un sourire trahissant son amusement, tout en se levant pour fermer les volets.

La pièce est plongée dans le noir avec la seule lumière faiblarde de l'ampoule détraquée.

Un blond, d'un style négligé, aux cheveux gras avec une moustache en brosse, des lunettes carrées énormes, une chemise à carreaux et un bide à bière entre dans le bureau. 

– On veut écrire un article sur comment les étudiants répartissent leur temps entre leurs études et leur temps libre, commence Guillaume avec douceur, tu serais d'accord pour répondre à des questions personnelles ?

– Bin... oué, mais ça me fera pas de points supplémentaires pour le rattrapage si je vous aide ?

– Non, tranche Samira. Tu veux un verre d'eau ? 

– De...l'eau ? demande l'étudiant, incrédule...

– Tu t'attendais à ce qu'on t'offre du cognac grand-âge ? Tu n'es pas à l'hôtel, là, c'est une garde à vue... réplique Samira, en roulant de gros yeux à l'intention de l'étudiant. 

– Bon, d'accord, je vais prendre de l'eau... acquièce-t-il, en regardant Guillaume avec l'air perdu.

– Il faut bien qu'on ait un extrait de son ADN et ses empreintes digitales à son insu, se justifie Samira à l'intention de Guillaume, en sortant un gobelet en carton qu'elle pose brutalement sur le bureau en face du Valentin.

– Ce qu'elle veut dire, c'est qu'il faut que la démarche soit désintéressée, ta participation à cette... euh... cette étude... ne doit rien te rapporter, tu le fais parce que tu es volontaire, nuance Guillaume devant l'incrédulité de leur hôte.

– Ce que je veux dire, insiste Samira, c'est qu'on n'apprécie pas tellement les roublards dans ton genre. 

Elle le montre du doigt, et reprend :

– Donc tu t'assois, tu bois de l'eau, et tu réponds aux questions qu'on te pose,et n'essaye pas de faire le malin, OK ?

– Compris ! J'aurai essayé de négocier, mais je vois que y'a pas moyen, hé...hé...faut bien que je trouve des solutions pour mes examens parce que c'est carrément désespéré là, j'ai eu 5 de moyenne, je redouble, ma mère va me couper Internet si je valide pas mon semestre... s'enfonce le Valentin

– Alors, peux-tu nous dire comment tu occupes ton temps libre quand tu n'étudies pas ? demande Guillaume.

– Je me branle, dit le Valentin.

– Euh, tu t'en branles ? Ça signifie que la question ne t'intéresse pas ? s'inquiète Guillaume, sincère.

– Nan, c'est la réponse, hé... hé. Je m'astique la nouille sur des pornos, déclare le valentin satisfait.

– Eh bien, tu pourras expérimenter ta sexualité solitaire sur des podcasts de cours pour valider tes rattrapages, suggère Samira en ajustant ses lunettes, sérieuse. 

– J'y avais jamais pensé M'dame, mais c'est astucieux...

***

– Espérons qu'on aura plus de chance avec le second suspect, dit Samira, ta technique de gentil flic n'a pas porté ses fruits, je prends les choses en main cette fois...

Un grand blond aux cheveux jusqu'aux fesses et un imperméable noir entre dans le bureau. Lorsqu'il sourit, il a un dentier métallique qui recouvre toutes ses dents. Il porte une énorme croix satanique en collier qui se balance quand il avance de sa démarche chaloupée. 
.
– Vous m'avez convoqué, me voici dit-il en s'auto-montrant théâtralement.

– Nous voulions nous entretenir avec vous, Valentin, asseyez-vous ici dit Samira en désignant un siège éloigné en retrait du bureau puis elle se lève et fait face au Valentin qui s'assoit, dubitatif. 

– Qu'est-ce que tu fais de ton temps libre ? Enchaîne-t-elle.

– J'exerce mon Art ! annonce le valentin, grandiloquent.

Samira lève les yeux au ciel pendant que Guillaume réprime un bâillement.

– Je suis bassiste dans un groupe de métal symphonique, réplique le Valentin avec mépris, mais j'imagine que vous n'y connaissez rien...

– Euh... non, effectivement, admet à contrecœur Samira.

– Mais c'est très intéressant, tente Guillaume...

– Non, c'est sans intérêt, intervient Samira. Parle-nous plutôt de ta petite amie... 

– Je vois que les nouvelles vont vite, ce n'est pas ma petite amie... dit le Valentin avec un air dégoûté, la jeune fille avec qui je traîne en cours, je ne couche pas avec elle...

– Ah ? s'étonne Guillaume.

– Le sexe, c'est vulgaire, je préfère ne pas écorner mon fantasme de harem de groupies folles amoureuses de mes talents de musicien en assouvissant de bas instincts avec une inculte qui me trouve stylé parce que je ressemble à Marylin Manson... c'est tellement mainstream.

***

Un Valentin en treillis militaire avec les cheveux rasés, l'air hagard. 

– Ils sont partout, vous savez... 

Devant la mine dubitative de Samira et Guillaume, il poursuit...

– Pendant mon temps libre, je me prépare au pire, affirme le valentin.

– Euh, vous vous préparez comment au juste ? demande Samira, désemparée.

– Par exemple, pour me préparer, je fais des simulations de guerre ou post-apo sur écran, le week-end, après les cours, je vais au stand de tir, je fais des stages de survivalisme pendant les vacances... 

– D'accord... et vous avez une amoureuse avec qui partager votre temps libre ? coupe Samira.

– Je pense que personne ne nous aime et qu'on n'aime personne, on n'a que des ennemis, plus ou moins hostiles, l'amour est une invention pour vendre des parfums, fait soudainement l'étudiant d'un air inspiré.

– Votre attitude blasée, je n'y crois pas. Une fille vous a brisé le cœur... AVOUEZ ! hurle Samira en tapant du poing sur la table. 

Guillaume sursaute. Il s'adresse à Samira : 

– On n'est pas là pour leur extirper des aveux sous la contrainte... Tu leur as dit que tu voulais juste écrire un article sur la façon dont ils s'occupent pendant leurs loisirs...

– Bon, je me suis emportée, dit Samira en se ravisant, vous avez le droit de garder le silence, tout ce que vous direz pourra et sera retenu contre vous...

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