Une fois chacun rentré chez soi, les Delta sont submergés par la panique. C'est plus gérable quand on est à plusieurs, on parle fort, on se soutient, on extériorise son angoisse. En se retrouvant seuls dans leurs chambres, la pression du lendemain remonte, la solitude fait surgir des idées noires et la mélancolie s’installe insidieusement. Toutes les idées tournent en rond et de plus en plus vite dans leurs têtes, et le résultat devient vertigineux et obsessionnel.
- Comment être certains que tout va bien se passer ?
- Est-ce que quelque chose d’inattendu va se produire et tout déstabiliser ?
- Est-ce qu’on va être capables de tenir le coup face aux profs et de répondre à leurs questions ?
- Qu’est-ce qu’on fera si un imprévu arrive, si le site se plante, ou si on le perd ? Est-ce qu’on saura bien réagir ?
- On a essayé d’anticiper, mais est-ce qu’on a rien oublié ?
- Dans la précipitation des derniers moments, on a dû mélanger des choses, on ne va pas s’y retrouver.
- Est-ce que les autres sauront prendre le relais si je suis incapable de faire ma partie ?
Avec l’accélération des pensées négatives, tous les efforts de préparation et la maîtrise du sujet ont disparu, laissant la place au doute et à la perte de confiance. Ils ont le trac.
Pour se calmer Violette prend une petite pilule aux plantes pour dormir et s’enroule dans son lit, à côté de John qui respire doucement dans son sommeil. Elle vérifie que les différents réveils sont tous en marche et programmés. Le calme de l’enfant près d’elle et le somnifère ont rapidement raison de son anxiété et elle s’endort d’un sommeil lourd sans rêves.
Alphonse s’installe dans son lit devant son poste de télévision et regarde des séries en boucle, sans même comprendre les scénarios ni reconnaître les personnages. Au bout d’un moment, abruti par le scintillement lumineux et les yeux rouges et exorbités, il finit par poser la tête sur son oreiller, l’écran continue de diffuser des images mais il n’a plus la conscience éveillée pour s’en apercevoir.
Pour une fois, Cezary est dans le noir absolu. Il a tiré les rideaux épais, éteint son écran de pc et la petite lampe jaune. Les yeux grand ouverts dans l’ombre de la pièce, il essaie de penser à autre chose, mais sans arrêt ses idées reviennent sur le seul sujet qui le préoccupe, il passe en revue le site, les tests, et cherche ce qui aurait pu échapper à leur vigilance. Toutes les images bouclent dans sa tête, en accéléré, ce qui pourrait le rendre fou se dit-il, alarmé. Peu à peu, lui aussi épuisé de fatigue, sombre dans un sommeil léthargique, et ne se rend plus compte de rien.
Lucia n’est pas là ce soir. Zoé tourne en rond dans l’appartement, Manon roulée en boule sur le sofa rouge ne daigne pas ouvrir les yeux. Zoé décide de se faire une tisane de camomille pour se calmer et essayer de trouver le sommeil. Et voilà que la bouilloire ne fonctionne plus quand elle la branche après l’avoir remplie d’eau, le voyant rouge reste désespérément éteint.
- Que se passe-t-il encore ? ce n’est vraiment pas le moment de me laisser marcher sur les pieds par une machine, s’écrie-t-elle furieusement en reposant la bouilloire sur son socle.
Sans même réfléchir, alors qu’elle pourrait se faire chauffer de l’eau dans une casserole, ni regarder l’heure très tardive, elle attrape ses clés et monte à l’étage du dessus sonner chez Zebediah.
Au bout de quelques instants et devant l’insistance de Zoé, un Zebediah ensommeillé et surpris de la visite, cheveux hirsutes, en caleçon et tee shirt froissés, ouvre la porte. Il semble hébété de voir Zoé devant chez lui à cette heure de la nuit. Brusquement Zoé revient sur terre, réalise l’absurdité de la situation et regarde sa montre :
- Je suis vraiment désolée Zebediah, je n’avais pas vu l’heure, il est tard et tu dormais. On passe la soutenance de notre projet demain et je suis une boule de nerfs. Je voulais me faire une camomille mais la bouilloire ne fonctionne plus. Est-ce que tu peux me prêter la tienne ?
Sans dire un mot, Zebediah hoche la tête et va chercher sa bouilloire à la cuisine.
- C’est vrai qu’il est tard, je m’étais endormi. Demain j’ai une réunion importante et je veux être en forme face à mes clients, alors je me suis couché tôt, arrive-t-il à formuler avec difficulté en baillant de fatigue.
- Merci Zebediah, demain est aussi une journée difficile pour toi ! Désolée de t’avoir réveillé, j’étais si perturbée que j’étais incapable de me concentrer sur quoi que ce soit. Du coup je ne te propose pas de boire cette tisane avec moi. Ce sera pour une prochaine fois.
- D’accord, rien ne presse. Tu es prête pour ta soutenance ? J’espère que ça va bien se passer.
Zebediah fait des efforts mais ce n’est pas le bon moment pour faire la conversation, il est encore à moitié comateux.
- On verra, pour l’instant je suis complètement stressée. Je ne veux pas te déranger plus longtemps. J’y vais, je te ramène la bouilloire demain, sauf si tu en as besoin pour ton petit déjeuner ?
- Non ça ira, je prendrai du café. Et détend toi ! vous vous êtes bien préparés, vous êtes prêts, vous allez assurer ! Aie confiance en toi, c’est le secret de la réussite !
- Oui, plus facile à dire qu’à faire. Salut Zebediah, bon courage pour ta réunion demain.
- Merci, bonne nuit tout de même Zoé. Ca ira pour dormir ?
- Oui, ne t’inquiète pas, merci pour la bouilloire.
Légère comme une plume Zoé descend l’escalier et s’engouffre chez elle avant que Zebediah ait seulement eu le temps de réaliser ce qui vient de se passer. Il hausse les épaules, referme sa porte et retourne se coucher.
La courte entrevue a permis à Zoé de se changer les idées. Après avoir branché la bouilloire, elle fait chauffer l’eau et jette une poignée de fleurs de camomille séchées dans une grande tasse. Elle boit lentement la tisane bien chaude dans son lit, Manon à ses pieds, puis doucement se laisse glisser vers le sommeil.
*
Le dernier jour tant attendu du stage est enfin arrivé. Il fait beau et chaud. Dans le petit appartement de la rue N. où toutes les fenêtres sont ouvertes pour laisser entrer l’air frais du matin, Zoé enfile sa petite robe à fleurs et ses sandales fines. Elle relève ses cheveux blond clair dans un joli chignon un peu lâche, attache une paire de boucles d’oreilles dorées et là voilà prête. Toutes les angoisses de la nuit se sont envolées et elle a retrouvé confiance en elle, la luminosité du soleil qui inonde la pièce lui donne le moral. Elle réussit même à sourire devant son miroir.
Grâce à la bouilloire de Zebediah, elle se prépare une tasse de thé parfumé à la cannelle. Une tartine au miel à la main, accoudée à sa fenêtre, elle se surprend à rêver à son avenir. Maintenant il est possible de l’envisager, c’est la prochaine étape après la soutenance. Rechercher du travail, mais cette fois avec de l’expérience et des arguments pour les entretiens. Elle se sent plus forte. Comment tout cela va-t-il se passer ? C’est assez excitant d’imaginer la journée d’aujourd’hui, c’est enfin atteindre l’apothéose après tous les efforts consentis.
De l’autre côté du périphérique, dans sa banlieue égayée par le soleil généreux, et après une nuit finalement apaisée, Violette regarde aussi par la fenêtre. Elle a déjà emmené John chez une voisine pour la journée. Après la soutenance, elle ira le chercher et ils partiront tous les deux en train pour la province, chez ses parents qui garderont John pendant les vacances scolaires. Violette reviendra ensuite seule sur Paris pour continuer à chercher un emploi.
Avec une certification et une expérience valorisables sur son CV, elle pense pouvoir décrocher rapidement le job qu’elle attend depuis longtemps. L’organisation pour les vacances est en place, les valises sont déjà prêtes, Violette est rassurée, elle peut se concentrer sur la dernière épreuve du stage et imaginer son avenir.
- J’espère trouver un job bien rémunéré, ainsi nous pourrons chercher un appartement plus grand, avec une chambre pour John et une chambre pour moi, ce sera plus confortable. Ce sera un vrai luxe ! quel bonheur ! John aura son petit lit et moi le mien, et au revoir l’affreux clic clac avec son matelas de cinq centimètres d’épaisseur et ses ressorts métalliques durs qui grincent. Et puis il est si moche, je m’en débarrasserai tout de suite !
De joie elle en exécute quelques pas de danse, en slalomant entre les meubles de son studio.
- Je dois me préparer pour cet après midi, que vais-je mettre ? pantalon ou robe ? une robe c’est bien sûr plus féminin, mais est-ce que c’est ce qu’on attend de moi ? quel look convient le mieux pour ce type de présentation ?
Puis elle songe que Atsuko fait partie du jury et, comme elle éprouve peu de sympathie pour ses élèves, Violette préfère rester discrète et opte pour une tenue sobre. Elle choisit une robe noire stricte qui fait ressortir son teint de brune, qu’elle agrémente avec sa chaîne en or et ses boucles d’oreilles en perles.
- Maquillage léger, un peu sur les paupières, un lipstick rose clair et un peu de blush sur les joues pour donner bonne mine. Les cheveux courts au naturel, un petit brushing avec la brosse ronde pour donner du volume. Ca fait très sérieux.
Elle se regarde dans la glace de l’armoire, satisfaite de l’image qu’elle renvoie : une jeune femme dynamique, bien dans sa peau et dans sa vie, épanouie, prête à affronter les difficultés du monde du travail.
- Une battante ! Executive woman, c’est moi, dit-elle en virevoltant, au risque de se tordre une cheville ou de tomber.
Peu importe ! Heureusement, sa mémoire a effacé les mauvais moments du stage, les humiliations, les retours arrière, les désillusions. Place à la réussite et au futur. Oubliées les vexations de Patricia LaBelle, l’indifférence d’Atsuko, les solutions complexes de Cezary, la sensation de maîtriser enfin son sujet la dynamise totalement. Et c’est tant mieux ! Elle se sent étrangement audacieuse avant l’examen, prête à tout donner pour obtenir le diplôme.
Dans la chambre du foyer, Cezary lui aussi se prépare. Il a enfilé un costume sombre pas très récent, un peu trop grand car il a beaucoup maigri pendant le stage, avec une chemise blanche à peine repassée et une fine cravate grise. Il peigne ses boucles noires mais elles sont rebelles. Tant pis, il ne peut pas vaincre sa nature de cheveux. Il rajuste ses lunettes rondes qui avaient glissé le long de son nez. Ce projet a été pour lui un énorme investissement, il y a mis toutes ses forces et toute son énergie. Si près du but il se sent vidé de sa substance, tant il a déjà donné de lui-même. Heureusement il fait confiance à l’équipe et sait qu’il peut compter sur les autres. Le complexe de son accent étranger resurgit dans les moments d’émotion, bien qu’il ait beaucoup progressé au contact des autres stagiaires. Soudain il est terriblement intimidé, il a l’impression qu’il sera incapable d’ouvrir la bouche pendant la soutenance, il se sent bloqué.
Il faut qu’il se calme, qu’il se détende, qu’il respire. L’avenir se présente positivement. Il va pouvoir relancer sa recherche d’emploi, et enfin avoir des moyens pour quitter ce foyer étriqué. Il a tout à coup des rêves de grandeur, il voit loin, il voit haut ! Mais l’obstacle de la soutenance se dresse devant lui, et tant qu’il ne sera pas franchi, son avenir reste incertain.
Contrairement aux autres, il a du mal à retrouver sa confiance en lui ce matin. Mais cette dernière épreuve devrait aller vite, tout sera déjà fini dans quelques heures. C’est comme ça qu’il faut voir les choses, se projeter dans l’avenir ça aide à surmonter le stress. Des hauts et des bas, tout le monde en a, il faut vaincre sa peur et aller de l’avant, se persuade-t-il à coup de pensées positives.
Les traces de la nuit sont visibles sur le visage d’Alphonse, ses yeux clairs sont fatigués et étrécis. Il les baigne avec de l’eau fraîche pour atténuer les rougeurs dues à trop de temps passé devant les écrans.
- Il est temps de se préparer, c’est aujourd’hui qu’il faut tout donner. Les doutes se sont envolés, on va faire un carton !
Devant la glace dans sa salle de bain, Alphonse continue de s’observer et commence à grimacer par auto dérision.
- Tout seul, tu n’es bon à rien mon vieux, heureusement que les autres sont là pour soutenir le projet. Quand je fais le bilan, je n’ai pas l’impression d’avoir été super efficace. Et maintenant il faut assurer, et après direction un nouveau boulot.
Contrairement à Cezary, il ne met pas de costume, il n’est pas à l’aise dans ce type de vêtements. Il choisit une chemise blanche en coton sur un pantalon de toile beige, et une paire de chaussures de cuir montantes couleur caramel. Avec des cheveux frisés blonds, il a un look faussement décontracté et chic.
Avant de partir, Zoé monte chez Zebediah pour rapporter la bouilloire, mais celui-ci est déjà parti travailler.
- Je reviendrai plus tard, dit-elle en redescendant chez elle. Elle n’a pas envie de partir tout de suite et d’arriver trop tôt. Je vais y aller doucement. Elle ramasse son sac, et caresse machinalement Manon qui vient se frotter sur ses jambes. Tu n’aurais pas fait une petite bêtise par hasard, Manon ? demande-t-elle au chat qui semble avoir l’air coupable. Je n’ai pas le temps de chercher mais je parie que tu as encore mis le chouchou dans ton bol d’eau. Et où est passée ta balle ?
Pour une fois, Zoé se trompe. Avec son instinct, Manon a senti que Zoé est angoissée et vient simplement lui apporter du réconfort par sa présence, et lui rappeler aussi qui est la maîtresse à la maison. Manon ne se sent pas coupable, elle est juste inquiète pour Zoé, mais Zoé est trop préoccupée pour être réceptive à une manifestation si discrète. Soudain son téléphone portable vibre, c’est Mamina. Zoé est ravie par cette diversion et répond aussitôt.
- Zoé ma chérie, je voulais te souhaiter une bonne soutenance avant que tu ne partes. La voix chaleureuse de Mamina est comme un baume sur son cœur.
- Mamina, c’est super, justement j’étais en train de me préparer pour y aller. Tu tombes à pic !
- Alors comment ça va, vous êtes prêts ? pas trop tendus ?
- Oui on est prêts, mais pas du tout décontractés.
- C’est un moment important, qui va couronner une année de travail ! alors tu penses, vous ne pouvez pas être totalement zens !
- J’espère que ça va bien se passer, c’était dur de s’endormir hier soir, toutes les pensées tournaient dans ma tête, impossible de trouver le sommeil.
- Tu n’as pas pensé à te faire une petite tisane de camomille ?
- Si bien sûr, j’ai forcément pensé à toi et à ta tisane !
- C’est à cela que ça sert d’avoir une grand-mère !
- Heureusement que tu es là Mamina, je sais que tu m’accompagnes en pensée partout où je vais.
- Cà tu peux le dire !
- Je t’appellerai ce soir pour te raconter. Tu sais, à la dernière minute j’ai ajouté sur le site ta recette toute simple pour les pâtes, la sauce aux tomates fraîches !
- Celle où tu coupes les tomates bien mûres en tout petits morceaux, que tu mélanges avec du basilic et de l’huile d’olive, un peu de sel et de poivre ? c’est fait en un instant et c’est tellement savoureux !
- Je suis convaincue que cette petite recette va nous porter chance !
- Ah oui tout à fait ! c’est excellent ! Ma chérie je t’embrasse, et fais le maximum pour réussir !
- Tu penses ! et toi tu fais quoi aujourd’hui ?
- Je vais jouer aux cartes chez mon amie Victorine.
- Ca va être une bonne journée ! ne vous disputez pas trop car vous êtes toutes un peu mauvaises perdantes !
- Oui c’est vrai, mais c’est notre façon à nous de nous entendre et de nous amuser en nous asticotant !
- C’est sûrement ça ! Je t’embrasse Mamina.
- Moi aussi ma chérie.
Zoé attrape son sac à main, y glisse son téléphone portable et quitte l’appartement, c’est enfin l’heure. Au bas des escaliers, dans la cour, Louis est assis sur son banc. Lorsque Zoé s’approche, il se lève. Lui aussi sait que Zoé passe la soutenance et il veut l’encourager avant son départ.
- Salut Zoé, ça y est c’est le grand jour, prête pour l’épreuve ?
- Presque prête ! j’ai un peu mal au ventre, je suis très crispée.
- Çà va aller, détend toi sur le chemin !
- Merci Louis, je sais que vous allez penser à moi aujourd’hui. Je viendrai vous voir ce soir pour vous faire un petit compte rendu.
- C’est d’accord, je t’attendrai toute la journée, ne peut s’empêcher de dire Louis, ce qu’il regrette aussitôt. Ce n’est pas le moment de faire un focus sur lui-même, aujourd’hui c’est Zoé qui a besoin de soutien.
Pour lui prouver son amitié, il la serre dans ses bras et lui fait deux grosses bises sur les joues. Troublée par ce geste amical inattendu, Zoé s’enfuit presque vers la grille et se met à courir pour aller prendre son métro. Elle agite la main avant de disparaître au coin de la rue.
*
Les Delta se rejoignent à la brasserie Jeanne où ils se sont donné rendez-vous pour un dernier point de situation avant d’entrer en lice.
La tension est extrême, mais ils ont regagné en confiance après les doutes de la nuit. Ils passent en revue leur liste : chacun sait ce qu’il a à faire, connaît l’ordre de passage, a bien en tête le rythme à respecter pour tenir le délai d’une heure.
Il est bien loin le temps où ils ont remis leur projet en question et tout recommencé. Oubliés les doutes, le sentiment d’échec et les kyrielles d’anomalies, ils se sentent gonflés à bloc, comme des sportifs avant le match, ils comptent sur l’équipe pour réussir.
Enfin ils se lèvent et se dirigent vers les locaux de WorkInsert comme on se rend dans l’arène pour combattre. Cezary pousse la porte et laisse Violette et Zoé entrer en premier, Alphonse ferme la marche. Dans le hall d’entrée, des chaises ont été alignées le long du mur pour les candidats. Les Alpha sont invisibles, ils ont déjà démarré leur soutenance dans la salle Azote. Les Gamma attendent leur tour, tous prennent place sur les chaises.
Laetitia leur propose des cafés, thés ou boissons fraîches, mais les gorges sont nouées, un simple verre d’eau suffira. L’attente semble interminable, il fait très chaud. Enfin les Alpha sortent de la salle d’examen.
- Est-ce un handicap ou au contraire un avantage de ne pas connaître les lieux ? se demande Zoé en imaginant l’intérieur de la salle Azote où elle n’est jamais entrée. Elle se doute qu’il est aussi impersonnel que celui de la salle Hydrogène.
Les Alpha parlent entre eux un peu fort, ils font un petit bonjour de la main aux Delta et aux Gamma, Laetitia les accompagne vers la salle Hydrogène pour qu’ils se préparent à l’épreuve orale individuelle. Au bout d’un quart d’heure, un professeur ouvre la porte de la salle Azote et fait signe aux Delta, ils entrent.
L’instant est solennel, six jurés sont assis derrière une longue table et leur font face. Avec surprise ils constatent qu’Atsuko n’en fait pas partie. Mme LaBelle, assise sur une chaise au fond de la salle se lève, s’approche et présente le groupe Delta au jury. Elle explique aux stagiaires qu’Atsuko n’a pas pu venir aujourd’hui et est remplacée par un autre professeur. Mme LaBelle se retire ensuite avec discrétion.
Toute l’équipe a la rage au cœur à la nouvelle de la désertion d’Atsuko, mais ils affichent un sourire hypocrite et réussissent même à masquer leur colère. Ils saluent le jury, et se présentent individuellement. Puis ils s’installent, distribuent les slides au format papier, et lancent la présentation sur l’écran de projection. Le moment de panique est passé, tout rentre dans l’ordre et se met à fonctionner normalement.
Ils démarrent leur exposé, chacun parle à son tour, avec l’appréhension de dépasser le temps de parole imparti. De temps en temps, ils switchent sur la démonstration pour illustrer leur propos. Ils sont si tendus qu’ils ne voient pas le temps passer. Heureusement les nombreuses répétitions qu’ils ont faites leur permettent d’être quasiment en pilotage automatique, de dérouler leurs parties sans avoir à réfléchir.
Lorsqu’ils arrivent au bout des cinquante minutes, il leur semble qu’ils sont libérés d’un énorme poids. Il reste encore quelques minutes pour répondre à des demandes de précisions, mais déjà ils ont respecté le timing, à une minute près. Les questions ne sont pas complexes, et ils savent y répondre sans hésiter. Cependant il est impossible de savoir ce que pensent les professeurs qui restent impassibles.
Les Delta remercient le jury, ramassent leurs affaires et sortent de la salle, vidés. Après la soutenance du groupe, ils doivent se préparer pour l’oral individuel, dont le résultat viendra compléter la note globale.
Laetitia les prend en charge et les emmène vers la salle Hydrogène où ils se retrouvent une dernière fois, mais sans avoir besoin d’y travailler. Ils se rassemblent autour de la machine à café pour une boisson, ils ont la gorge desséchée d’avoir tant parlé sous la pression. Les Alpha les accueillent et les conversations fusent.
- Ouf, ça y est c’est fini !
- C’était atroce, j’avais l’impression d’être tendue comme la corde d’un arc.
- J’avais la gorge serrée, parfois les mots n’arrivaient pas à sortir de ma bouche.
- Moi j’avais la sensation que j’allais exploser complètement, je ne me rendais même pas compte de ce que je disais, un véritable automate.
- C’était dur je trouve, plus dur que je ne pensais finalement. Le jury était glacial.
- Ils n’étaient pas accueillants, ils ne nous mettaient pas en confiance avec quelques signes d’approbation par exemple.
- Ils ont tout fait pour qu’on ne se sente pas à l’aise. C’est la technique habituelle chez WorkInsert.
- Impossible de savoir ce qu’ils ont pensé.
- Du coup on ne sait pas si c’était bien ou pas.
- Et Atsuko, c’est vraiment une honte, elle n’était même pas là ! Elle aura été nulle jusqu’au bout.
- Il faut qu’on se reconcentre pour la deuxième partie, l’épreuve solo.
- Allez, ce sera bientôt complètement terminé.
- Pour l’instant ce sont les Gamma qui sont sur la sellette, j’espère qu’ils assurent !
- Cà s’est passé comment pour vous ?
- Difficile à dire, c’était plutôt fluide et pas mal, mais comment le jury va-t-il nous noter ? Aucune idée.
Au bout d’une attente qui leur semble interminable, ils voient enfin la porte s’ouvrir et la dernière équipe entre dans la salle Hydrogène avec Laetitia. Les Gamma font une drôle de tête, on dirait que leur oral ne s’est pas déroulé comme ils le souhaitaient.
- Alors ?
- On s’est emmêlés les uns les autres, on a largement dépassé le temps de parole, la démo n’était pas efficace. Très très bof.
- On est super déçus, le résultat de tout ce travail était minable.
- Vous ne vous jugez pas trop sévèrement ?
- Tout de même vous vous étiez bien préparés ?
- Le trac, ça nous a fait perdre nos moyens.
- Il ne faut pas désespérer, on ne sait jamais, ce n’est peut être qu’une mauvaise impression.
- Non, c’est sans appel, c’est raté. On va avoir le rattrapage, c’est sûr. Et il faudra revoir des parties complètes du site.
- Il y a des trucs qui n’ont pas plu au jury, on ne sait pas pourquoi.
- On aurait pu anticiper si Atsuko nous avait aidés.
- Oui, absolument. Enfin, on avait compris qu’elle n’était notre coach que de nom.
- Ca fait mal au cœur, se donner tant de mal pour si peu de résultat … quelle déception.
Mme LaBelle passe la tête par la porte et frappe des mains pour obtenir le silence.
- Mesdames, Messieurs les étudiants, veuillez vous préparer pour l’épreuve orale. Vous pouvez retourner dans le hall et chacun d’entre vous sera appelé par le jury.
- On y va, Mme LaBelle !
Tous se bousculent pour sortir de la salle Hydrogène et viennent s’asseoir dans le hall d’entrée. Ils attendent leur tour pour passer, le long défilé commence. Chaque élève dispose de vingt minutes pour répondre à un feu nourri de questions. Le jury s’est réparti dans trois salles pour optimiser le déroulement de l’examen. Le temps s’écoule doucement, il y a comme un ronronnement dans la salle, avec le va et vient des élèves, les portes qui s’ouvrent et se ferment. Zoé, prise soudain d’une sorte de vertige après toutes les émotions des jours derniers, ressent le besoin de respirer l’air du dehors. Au moment où elle se lève pour aller faire un petit tour dans la rue, elle entend le fatidique :
- Mademoiselle Zoé Muid, c’est à vous.
Zoé respire profondément pour évacuer la sensation de malaise qui l’oppresse, puis elle se dirige vers la salle d’oral, un sourire forcé sur les lèvres. Elle entre et va s’asseoir en face des deux professeurs qui l’attendent. Les premières questions pleuvent, Zoé a l’impression d’être un robot qui répond mécaniquement. Les réponses viennent toutes seules, comme si elle les avait apprises par cœur alors que ce n’est absolument pas le cas. Elle se rend compte qu’elle est dans un tel état de fatigue qu’elle est proche de craquer. Alors elle rassemble toutes ses forces et sa volonté pour tenir le temps de l’examen, elle veut absolument réussir l’épreuve et obtenir le diplôme. Elle s’accroche à son objectif, ça l’aide à rester debout jusqu’à la fin des vingt minutes.
- C’est bien Mademoiselle, vous pouvez disposer.
Lorsqu’elle entend ces mots, elle comprend que c’est terminé. Lentement elle se lève, elle remercie le jury et le salue, puis se retourne et sort lentement de la salle. Elle referme la porte derrière elle et s’appuie le long du mur, Alphonse se précipite et lui prend les mains.
- Zoé, Zoé, murmure-t-il plein d’inquiétude, est-ce que ça va ? Alphonse est bouleversé, il caresse le visage de Zoé doucement.
Zoé cherche de l’air pour sa respiration, elle finit par se calmer après le gros coup de stress et Alphonse la guide lentement vers une chaise. Violette lui apporte un verre d’eau et lorsqu’elle boit, Zoé commence à se sentir mieux, comme libérée du poids qui enserrait sa poitrine depuis des jours.
- Tu nous as fait peur Zoé !
- C’est l’épuisement et la tension, je suis désolée ….
- C’est fini, ça y est !
- Je ne sais pas ce que ça a donné, j’étais totalement en autoguidage, je ne sais même plus ce que j’ai dit.
- N’y pense plus, repose-toi quelques instants, après on pourra partir.
- Et pour les autres, ça a marché ?
- Oui, sans problème, on avait bien travaillé.
Tous les candidats ont passé l’épreuve, le jury à nouveau réuni délibère, mais les notes ne seront pas données immédiatement, il faudra attendre plusieurs jours pour savoir qui aura réussi à décrocher le diplôme. Patricia LaBelle leur donne rendez-vous la semaine suivante pour venir chercher les résultats. Les trois équipes ramassent leurs sacs et se dirigent vers la sortie.
Ils sont étonnés de sortir dans la rue, c’est fini, le stage est fini, les épreuves sont terminées, ils peuvent rentrer chez eux, faire la fête, enfin s’amuser ! Ce seront bientôt les grandes vacances, l’année scolaire s’achève, tout le monde se prépare à partir en congés, eux aussi. Il fait un temps radieux dehors, le ciel est totalement bleu, pas un nuage ne vient obscurcir la clarté du soir. La température est douce, il y a un petit vent frais qui fait frissonner les feuilles des grands arbres.
- Un dernier pot ensemble ? demande Alphonse à toute l’assemblée avec enthousiasme
- Allons-y ! Yeepeeeeeee !
Ils se retrouvent dans la brasserie Jeanne au coin de la rue où ils arrosent généreusement la fin des cours et des examens. La soirée est très gaie. Remise de ses émotions, Zoé participe avec enthousiasme au défoulement des équipes, bien qu’elle ressente en même temps une grande envie de se retrouver seule et de dormir. Enfin vers vingt et une heures, tous éprouvent le besoin de rentrer à la maison et de se reposer.
- Je te raccompagne chez toi dit Alphonse à Zoé, je ne voudrais pas qu’il t’arrive quelque chose sur le trajet du retour, tu es encore sous le choc. Il est heureux de ce prétexte pour poursuivre la soirée avec Zoé.
- Merci Alphonse, je crois que je peux m’en sortir toute seule, mais c’est mieux si tu viens avec moi, c’est certain. Zoé est heureuse de rentrer avec Alphonse.
- On va y aller nous, dit Alphonse à la cantonade. On se retrouve la semaine prochaine, même lieu même heure mêmes équipes pour les résultats. Ils seront peut être disponibles sur Internet avant, Mme LaBelle nous avertira. Bonne nuit à tous !
- Salut à vous, bon retour.
Violette est déjà partie depuis longtemps, Cezary s’est offert un petit extra en restant jusqu’au bout, délaissant son ordinateur pour une fois. Tous les stagiaires sont heureux de passer ce moment ensemble, enfin détendus. Ils savent que c’est l’une des dernières fois où ils se verront, à partir de maintenant chacun va suivre sa propre voie, avec plus ou moins de chance et de réussite.
Après avoir quitté la brasserie Jeanne encore joyeusement animée, Zoé et Alphonse s’éloignent vers la station de métro pour un trajet rapide.
Lorsqu’ils arrivent devant la grille de l’immeuble de la rue N., ils croisent Zebediah qui sort de la cour, un sac de sport à la main. Pour une fois, Zebediah ne porte pas son habituel costume mais un jean et une chemise légère en coton bleu ciel.
- Salut Zoé ! dit Zebediah
- Salut Zebediah, je te présente Alphonse, un collègue de la formation, Alphonse, voici Zebediah, mon voisin du dessus.
- Bonjour Alphonse,
- Bonjour Zebediah
- Alors Zoé, cette soutenance ? tout s’est bien passé ?
- Ca été difficile, j’ai eu un passage à vide pendant l’oral individuel, maintenant je suis si soulagée que ce soit terminé !
- Tu penses que vous avez réussi ?
- Impossible de conclure quoi que ce soit, intervient Alphonse, le jury était de marbre et ne laissait rien transparaître. On a fait du mieux possible, maintenant comment savoir s’ils sont satisfaits ? …
- On le saura dans une semaine, ajoute Zoé.
- Vous avez tant travaillé, ça ne peut qu’avoir marché !
- On l’espère ! c’est la clé pour notre futur job !
- Zoé, on y va, demande Alphonse, tu as besoin de te reposer.
- Salut, passez une bonne soirée, répond Zebediah en s’éloignant. Zoé n’a même pas pensé à lui demander comment s’est déroulée sa réunion importante, elle a probablement oublié, songe-t-il avec amertume. Cette relation est vraiment trop à sens unique à son goût, Zoé pourrait manifester davantage de sympathie !
- Bonne soirée Zebediah, dit Zoé, tu vas où ?
- Au sport, je vais me défouler ! Tout de même, se dit Zebediah, elle a une pensée amicale pour moi ….
- Amuse-toi bien alors, à bientôt salut !
Zebediah disparaît rapidement au coin de la rue, tandis que Zoé et Alphonse pénètrent dans la cour de l’immeuble. Louis est sur son banc, amorphe et prostré. Zoé s’approche et s’assoit près de lui.
- Louis, est-ce que ça va ?
- Ah Zoé ! je me suis fait tant de souci pour toi ! est-ce que ça s’est bien passé ?
- Oui, à peu près, répond Zoé qui n’a pas envie de s’étendre sur les difficultés du jour.
Elle a surtout envie de s’allonger sur son lit sans bouger ni penser à rien, juste faire un câlin à Manon. Et il faut appeler Mamina aussi.
- Louis, je viendrai vous faire une démonstration de notre site demain, ce soir je suis complètement épuisée. Alphonse m’a juste raccompagnée pour s’assurer que je suis arrivée à bon port.
- Bonjour Louis, dit Alphonse en avançant la main.
- Bonjour, répond Louis d’une voix molle en hochant la tête, sans serrer la main tendue.
Seule Zoé parvient à éveiller son intérêt, Alphonse lui est tout à fait indifférent.
- Bien sûr Zoé, va vite te reposer, c’était une journée éprouvante pour toi, dit Louis en regardant Zoé sans sourire.
- A demain Louis
- A demain Zoé.
Alphonse et Zoé se dirigent vers l’immeuble du fond et grimpent les cinq étages d’un pas qui manque d’énergie.
- Il est mal aimable ton ami Louis, il ne m’a pas décroché un mot, dit Alphonse.
- Si, il t’a dit bonjour, et crois-moi, pour lui c’est beaucoup. Il est très très déprimé en ce moment.
- Eh ben c’est pas un mec drôle en effet.
- Non, pas drôle du tout. On ne sait plus quoi faire pour le faire sortir de sa léthargie. Parfois j’ai même l’impression que ça s’aggrave.
- Et vous ne pouvez rien faire ?
- On vient le voir souvent, on lui apporte des douceurs, moi il m’aime bien, alors ça va, on arrive à se parler.
- Mouais, dit Alphonse décidément pas sous le charme.
- Nous voici arrivés au cinquième, annonce Zoé.
Sur le palier, devant la porte de l’appartement, Alphonse enlace Zoé et la serre fort dans ses bras, puis il l’embrasse doucement dans le cou. Zoé se laisse faire d’abord, puis s’écarte ostensiblement.
- Dis-moi, tu en connais du monde dans ta résidence. Ils sont tous bien sympas avec toi ! la taquine Alphonse, Louis ! Zebediah ! Qui d’autre ?
- Ce sont mes voisins, je les vois tous les jours. Et oui ils sont sympas, ils me témoignent toujours de l’amitié. Ca compte pour moi qui suis loin de ma famille.
- Ne te fâche pas ! Je te laisse, tu as besoin de dormir, on se revoit bientôt. Bisous !
- Salut Alphonse, merci de m’avoir raccompagnée.
- Avec plaisir ! salut à toi !
Zoé entre chez elle et Alphonse redescend l’escalier en courant, traverse la cour d’un pas assuré et franchit la grille avant de se retrouver dans la rue. Là, il s’arrête brusquement, sort son téléphone portable de la poche arrière de son pantalon et appelle l’un de ses amis pour savoir où ils vont passer la soirée. Avant de s’éloigner, Alphonse lève la tête vers la fenêtre du cinquième étage où habite Zoé. La fenêtre est noire, Zoé doit déjà être profondément endormie.
Alphonse se trompe, Zoé est étendue sur son lit mais elle ne dort pas, elle caresse Manon d’une main distraite et savoure cet instant de solitude avec son chat. Quoi, quel était ce geste tendre de la part d’Alphonse ? Ce garçon est-il fréquentable ? Serait-ce une bonne idée de sortir avec lui ? Zoé n’en est pas convaincue, sans trop savoir pourquoi. Un bon copain oui, un petit ami ? Non, probablement pas, il semble beaucoup trop superficiel. Et quel bonheur de penser que la formation est finie, toutes ces questions se résoudront d’elles mêmes et ne se poseront plus quand chacun aura trouvé sa voie ! Il ne reste plus qu’à attendre le résultat de la soutenance, en espérant qu’il sera positif, et une partie du plan sera réalisée. L’étape suivante sera de chercher du travail. Moins drôle et plus oppressant peut être. Enfin pour l’instant, toute à sa joie d’en avoir terminé avec les examens et les conceptions de sites internet, Zoé prend son téléphone et trouve le courage d’appeler Mamina.
- Allô Mamina, c’est moi !
- Ma chérie, tu es adorable, j’attendais ton coup de fil depuis des heures, je me suis fait un sang d’encre pour toi. Comment ça s’est passé ?
- Bien Mamina, on a fait ce qu’il fallait, maintenant impossible de dire comment les profs vont juger notre travail et nous noter.
- De ton point de vue c’était bien ?
- Oui je pense que c’était du bon travail, c’était une bonne équipe.
- Un de ces jours, il faudra que tu me montres ce site, que je puisse voir un peu ce que vous avez fait.
- Tu sais Mamina, ce site va être rapidement rendu inaccessible, car rien n’y est vrai, hormis les recettes, alors il ne peut pas rester en ligne. On ne vend pas de cours de cuisine !
- Je ne pourrai pas le voir alors ?
- Si, avec tes amies vous pourrez vous connecter demain, je vais t’envoyer l’adresse par sms. Vous pourrez naviguer et tout regarder. Tu retrouveras tes recettes, mais sois indulgente !
- Pas de souci ma chérie, je ferai plein de compliments sur toi à mes amies, elles n’oseront même pas émettre une seule critique !
- Oh, mais elles peuvent, ce n’est qu’un travail, il peut être largement amélioré !
- Tu n’y penses pas ! tout cela est terminé maintenant, tu peux enfin envisager autre chose ! Oublie un peu toutes ces histoires de site internet et pense à des idées agréables, les vacances, un petit ami !
- Mamina, tu es incorrigible ! Sur le fond tu as raison, mais en fait ce n’est que le début d’une nouvelle histoire ! il me faut chercher du travail à partir de maintenant ! Alors je ne peux pas tout oublier tout de suite !
- Fais comme tu l’entends, mais n’oublie pas que le temps passe vite ! Je vais te laisser te reposer, je te souhaite une bonne nuit, j’ai idée que tu dormiras mieux que la nuit dernière ! Moi aussi j’ai besoin de me reposer maintenant.
- Mamina, je suis déjà dans mon lit, avec Manon, prête à m’endormir !
- Super ! Je t‘embrasse !
- Moi aussi, tu es merveilleuse de penser à moi comme ça, ça me touche tellement !
- Oui ma chérie, toute la journée j’ai pensé à toi.
- Merci merci merci mille fois Mamina, dors bien toi aussi, je t’envoie l’adresse du site internet et plein de baisers.
- Bisous ma chérie.
Zoé envoie l’adresse de ‘Troc et Toques’ à Mamina et éteint son téléphone portable, le dépose par terre, elle sent Manon qui vient se lover contre elle et faire la danse du lait, et toutes les deux sans tarder sombrent dans un profond sommeil. Comme il n’est pas tard, les bruits du dehors arrivent par la fenêtre entr’ouverte, mais ni Zoé ni Manon ne les entendent plus. Doucement la nuit finit par descendre sur la ville, les lumières s’allument un peu partout, toute la pression de la journée qui se termine retombe et la paix d’une soirée d’été s’installe dans le quartier de la rue N., comme au cœur de Paris.
J’aime bien cette phrase « avec l’accélération des pensées négatives » on a l’impression d’un engrenage qu’on ne peut plus arrêter
, s’écrie-t-elle furieusement en reposant la bouilloire sur son socle bruyamment.
Furieusement / bruyamment = ça fait un peu lourd comme phrase non ?
« en balançant sa bouilloire sur son socle » ?
J'ai un peu du mal à suivre l'histoire. sans doute que ce n'est pas le type de livres que j'ai l'habitude de lire.
Je trouve par contre que ton dialogue à la fin fait très naturel malgré quelques redites de "tu sais mamina".
A +
Tu as raison, je vais supprimer le 'bruyamment'. c'était lourd !